Payot - Marque Page - Mariko Koike - Je suis déjà venue ici
Le chemin couvert de fleurs écloses ressemblait à une large ceinture de kimono verte, et de toutes parts on pouvait voir le spectacle resplendissant des fleurs de tournesol et de sauge aux couleurs éclatantes.
J'aimais tout ce qui était coloré. Je ne sais pas combien de fois j'ai couché sur le papier la couleur étrange et complexe du soleil couchant qui teinte le ciel de Hakodate, la neige glacée presque bleue, les kakis rouge écarlate.
Debout dans la cuisine, elle coupe les légumes sur la planche pour les faire sauter ou cuire à la vapeur, grille la viande, plonge le poisson dans un court-bouillon, prépare un assaisonnement avec de fines lamelles de bonite fumée et des petites sardines séchées au soleil et cuites à l’eau, confectionne un potage de miso au tôfu et aux minces tranches de pate de soja fermenté frit, puis des haricots adoucis par du sésame, se lance dans un zôsui, en faisant cuire du riz dans un bouillon à base d’œufs et de légumes ou de poissons de saison…
L’adolescent était assis sur le matelas, bas du corps dénudé, les fesses à même la partie supérieure du pantalon de pyjama.
Dans ses mains il tenait quelque chose de dur, dressé, qu’il frottait frénétiquement de bas en haut, avec une expression de plaisir paroxystique, bouche bée, les yeux révulsés sous l’extase. […]
La chose dans sa main ressemblait à une belle plante, resplendissante, de la teinte pâle d’une fleur de cerisier. Turgescente, sur le point de gicler.
Quelle fertilité… Quelle éros… Quelle vitalité…
Cette voix sensuelle l’enivra. Il ressentit un chatouillement au niveau du pénis, et cela se transforma d’un coup en un violent flux sanguin qui parcourut tout son corps.
Elle ne savait pas très bien quels sentiments il lui portait. En la caressant, il murmurait parfois : « Je t’aime. » Elle aussi, dans ses bras, lâchait un « Je t’aime. »
Mais elle ne croyait pas à ces mots-là. Ni lui non plus, sûrement.
Le cas contraire ne l’aurait pas attristée pour autant. Dès lors qu’il répondait à son besoin de caresses, ici et maintenant, les mots « Je t’aime », « Moi aussi » ne pouvaient pas être totalement feints.
Dans ce domaine que l'on appelle l'art, il est très difficile d'exprimer son admiration en termes recherchés. Plus la frontière est ténue entre une bonne et une mauvaise œuvre, et subjectif le jugement que l'on porte sur elle, plus l'acte de dire son admiration s'avère périlleux. C'est pourquoi les gens qui veulent transmettre leurs émotions n'emploient généralement que des exclamations puériles. C'est joli ! Magnifique ! Admirable !
Les miaulements d'un chat se firent soudain entendre quelque part.
Yukiko interrompit sa vaisselle et jeta u oeil dans l'arrière-cour par la fenêtre de la cuisine .Sous le cerisier de forme peu harmonieuse,elle aperçut un chat tout sale.(Page 5).
Malgré tous ses efforts, elle ne ressentait qu'un grand vide, avec l'impression d’être aspirée vers les entrailles de la terre. Comment faire pour échapper à cette sensation? Ses questions restaient sans réponse, puisqu'elle était incapable de se représenter l'avenir. Et cela l'effrayait d'autant plus.
Continuer à écouter dans ce wagon une histoire d'insectes racontée par un vieil homme lui parut soudain insupportable.
"Kantan et Haïkus"
En réalité, je ne l'ai jamais vu essayer de pénétrer le mystère de l'âme humaine, dans un échange sérieux et approfondi. Demander à l'autre ce qu'il ressentait, quelle était la raison de son trouble, ce qui l'angoissait. De toute ma vie, je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui affectait autant d'indifférence que lui vis-à-vis des sentiments d'autrui. Par l'attitude qu'il adoptait en toute occasion, il semblait penser qu'il n'y avait aucun mécanisme psychologique chez les êtres humains, y compris lui-même. Quand il posait une question, c'était toujours sur le mode de la plaisanterie, dite parfois sur un ton maniéré, d'autres fois sur un ton comique, et il se limitait au moment même, à ce qui venait de se produire, sans chercher à voir plus loin.