Glory est de retour dans la vieille maison familiale de Gilead, dans l'Iowa, cette fois pour une durée plus imprécise que les autres. Elle a trente-huit ans, son père le respecté pasteur Boughton s'éteint tout doucement, et à vrai dire plus rien ne la retient ailleurs, sa vie sentimentale s'est soldée par un échec aussi retentissant socialement que blessant, mais de ce qu'il en a été véritablement et de ce "mari" peu scrupuleux, jamais elle n'en parle, jamais elle n'en a parlé.
Et voilà que Jack, l'un de ses grands frères, refait surface, telle une apparition, après une absence de plus de 20 années. De tout ce temps écoulé, personne ne sait rien, mais tout le monde suppose. Jack était l'enfant "impossible" de la famille, l'éternel absent, même présent, l'éternel fugueur, l'adolescent mystérieux et toujours sur la brèche, le jeune homme brillant, séducteur mais dévoré par un mal obscur tout autant que par l'alcool. Il est parti sur un drame, un de plus, et rien de bien, semblait-il ne pouvait plus lui arriver désormais.
Et pourtant, pourtant, Jack, l'enfant prodigue, reste dans le coeur du père, le révérend, l'enfant qu'entre tous, il aimait et chérissait le plus au monde. Celui qui le fit le plus souffrir aussi, bien sûr. Quand le révérend apprend son retour, lui l'homme âgé pour qui les jours sont désormais comptés, c'est le bonheur et l'inquiétude, à nouveau.
Se nouent alors entre les trois, durant ces quelques semaines, une tension affective et émotionnelle sans pareille, extrêmement troublante, doucement bouleversante.
Le temps du livre s'écoule lentement, au rythme des âmes qui se retrouvent peu à peu, se donnent lentement et plus sûrement leur confiance. Peu à peu, très progressivement, le frère et la soeur se confient, se confessent, toujours dans la mesure, chaque mot comptent, chaque geste a de l'importance. Et Glory de découvrir plutôt que de redécouvrir ce frère, blessé depuis l'enfance, l'exclu qui s'excluait lui-même, jamais aussi loin ni distant qu'on le supposait alors, en marge toujours, parce qu'il ne se sentait pas le droit, tout simplement et très étrangement d'appartenir à cette famille nombreuse, brillante et si vivante.
Le portrait en creux, tout doucement brossé de Jack, le "vaurien" de la famille, et tel qu'il est perçu par sa petite soeur au travers des paroles feutrées, des gestes esquissés, des manques et des ratures, est tout simplement inoubliable, comme l'est aussi la figure du père, fort et fragile tout à la fois, vacillant et protecteur, parfois en vain.
Histoire de vie et de mort mêlées, de rédemption envers et contre tout et malgré les tourmentes, de pardon.... Dieu est au centre de cette histoire, bien sûr, mais jamais comme une évidence, il est le noeud, l'arrête tranchante, où se heurte et se blesse Jack plus souvent qu'à son tour. Les relations avec son père sont tendues parfois jusqu'à se rompre, non par une attitude purement sévère ou intolérante du vieil homme, mais par l'inquiétude de le voir refuser, peut-être, l'espérance qui fut la pierre d'angle de toute son existence. L'angoisse d'un homme pour son fils, une angoisse sans fin, une éternité en somme...
Rien de bigot, non, loin s'en faut, juste un amour pur, lumineux et transpercé.
J'ai beaucoup aimé.
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