Citations de Marion Lecoq (17)
Comment accepter de la quitter ? Le médecin m'a parlé entre quatre yeux, ce matin. C'est maintenant. On y est.
Un brouillard de larmes aveugle mes yeux.
L'eau est partout, dedans, dehors, le monde n'est qu'une eau courante qui glisse et qui s'échappe, mes larmes comme la mer, la mer comme nos corps, rien que de l'eau qui coule sans fin.
Angèle.
...Angèle a émis des râles en dormant, de faibles râles, toutefois cela a suffi pour me réveiller. Les bruits d'Angèle sont les seuls qui peuvent me tirer du sommeil. J'ai si peur qu'elle ne meure sans bruit à côté de moi, sans prévenir, sans mon regard pour lui dire au revoir, que le moindre gémissement me fait sursauter.
Elle appuie sur sa gorge pour parler. C'est un peu comme un talkie-walkie, on appuie pour parler, on relâche pour écouter.
... deux vieux sur un banc, et le temps file sans s'occuper de nous, il n'a pas besoin de nous pousser trop fort, il sait qu'il nous aura, nous ne sommes qu'en sursis.
Beaucoup de galériens, dans un étrange paysage où la beauté altière des montagnes se marie aux installations rouillées des usines abandonnées.
J'imagine qu'à mesure que la vie passe, on est hantés par de plus en plus de fantômes.
Je le sais depuis longtemps, c'est la nuit qu'on devient fou.
Je marche vite, pour semer derrière moi le bruit des hélicoptères et le sourire de mon frère. Pour semer mes larmes et ma colère. Me purifier dans l’effort, dans le silence habité de la nature, dans la beauté minérale des aiguilles rocheuses.
Jean Servein ne se départ jamais de son infinie courtoisie, mais on devine en lui une dévotion possessive envers sa femme qui nous tient fermement à distance.
Il veille sur elle comme sur un trésor convoité par des mercenaires, qu'il aurait pour mission d'amener à bon port.
Notre curiosité bute en vain, refoulée sans trêve, sur son souriant mystère.
Qu'on est bien, là, tous ensembles, réunis autour de nos rires.
Annette y est allée, elle a farfouillé dans le bac des livres pour les petits, et elle a trouvé un livre où le héros était un robot. Elle a dit à la petite fille : « Tu vas voir, personne ne fait la voix de robot aussi bien que moi! » (p. 146)
La soirée touche à sa fin.
On regagne la voiture.
Pendant le retour, personne ne parle, on savoure juste, les yeux perdis dans l'étroit faisceau des phares, tandis que la tête de Justine dodeline, appuyée contre le bras de sa mère.
Quand j'ai déposé tout le monde, je rentre, et je m'aperçois que j'ai encore ce sourire béat collé à la bouche. C'est la meilleure soirée que j'ai passée depuis longtemps. Promis, la prochaine fois, je me lance, je danse.
Les hommes sont comme les ruines d'usine, ils rouillent.
J'adore descendre à fond de train la route en lacets qui rejoint la ville.
Je suis de bonne humeur quand je suis allé marcher en montagne. Le silence, les paysages, la beauté presque douloureuse de la nature semblent déplier en moi tout ce qui était crispé, comme les doigts d'un poing fermé qu'on desserre un à un.
En général, je ne m'en aperçois pas tout de suite.
Je suis pris dans ce que je fais, et puis il y a ce bourdonnement agaçant qui me parasite et qui me gêne pour penser, qui grandit, grandit, et quand il devient trop fort et que je suis obligé de m'arrêter pour y prêter attention, je me rends compte que ce sont les hélicoptères qui tournent dans ma tête.
Quand ils ont décidé de s'inviter, ce n'est pas facile de les déloger.
Il faut courir vite.
Pour ne pas devenir fou.
Ce samedi avec Nadège et Justine qui a is son plus beau jogging rose, on sonne chez Annette. On s'est mis d'accord, Nadège et moi, pour ne rien laisser paraître devant Justine pour l'instant. Enfin si c'est possible, parce que j'ai l'impression que ça se voit comme le nez au milieu de la figure. Justine est en boucle sur le poney qui aura une belle crinière et qui s'appellera peut-être Pruneau, comme celui de sa copine Ilona.
Elle est tournée vers elle-même, vers sa fatigue, vers sa souffrance, et je reste à l'écart, sur le rivage, tandis qu'elle se noie.