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Critiques de Marion Ruggieri (300)
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Retour à Birkenau

"Papa, Gilbert, prenez le camion !"

C'est toujours ça qu'ils n'auront pas à faire à pied.

Je ne les embrasse pas. Ils disparaissent.

Ils disparaissent.



C'est le dernier souvenir que Ginette Kolinka garde de son père et de son frère. Lorsqu'elle leur conseillait, à la descente du train, de prendre ce camion pour moins se fatiguer, alors que celui-ci menait aux chambres à gaz.



Arrêtée en 1944 et déportée à Birkenau, Ginette raconte l'essentiel de la vie dans ce camp d'extermination, le quotidien des coups, de la peur, de la honte et surtout de la faim.



Et puis son transfert à Bergen-Belsen, Raguhn et Theresienstadt, avant son retour à Avignon, parmi sa famille, parmi ceux qui restent...



A mon avis :

Évidemment, c'est un témoignage bouleversant que celui des déportés juifs qui ont connu les camps d'extermination ou de concentration.



Celui de Ginette Kolinka raconte la même chose que Primo Levi dans son fameux "Si c'est un homme" : la faim, la maladie, les coups, les humiliations, les vols, la crasse...



Mais le témoignage de Ginette Kolinka est plus court, plus concis, comme une conversation.



De fait, il survole une large période sans détails trop longs ni superflus, comme si elle avait voulu nous dire son histoire mais avec l'humilité de celle qui y a survécu, sans s'apitoyer et sans fioriture.



Et cette simplicité, cette franchise font de ce livre un véritable coup de poing qu'on lit d'une traite mais qui laisse une trace profonde en nous.



C'est sans doute le but de son auteur, qui s'attache depuis des années maintenant à informer les enfants de ce qui s'est passé là-bas, y compris en leur faisant visiter les lieux, même s'ils ont été aseptisés depuis.



Un livre touchant donc, au sens propre du terme.



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Retour à Birkenau

Les témoins sont de plus en plus rares. Alors quand Ginette Kolinka raconte sa naïveté alors qu’avec son père, son petit frère et son neveu, elle arrive dans un camp où elle pense qu’ils vont simplement travailler, on anticipe l’horreur avant elle et on frissonne. Elle a appris par une femme, pas vraiment bienveillante, que son père et son frère sont partis en fumée. Elle a vécu à côté d’une chambre à gaz sans savoir ce que c’était.

Elle a sans doute survécu grâce à sa jeunesse, mais aussi grâce à une robe que Simone lui a donnée, robe qui lui a de nouveau permis d’exister. Lorsqu’elle est revenue, elle n’a pas pu en parler, comment aurait-elle pu évoquer ce qui pour elle-même était impensable.

Un témoignage indispensable.

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Une vie heureuse

On pourrait penser que voilà un témoignage de plus sur les camps, est-il nécessaire? La réponse est indicutablement oui, assurément, car les paroles et les mots de tous les déportés doivent résonner au-delà de l'histoire, de leur histoire personnelle, afin que ceux qui pourraient se laisser aller vers la méconnaissance ou l'oubli soient une nouvelle fois éclairés par un sourire, celui de Ginette.



Elle a choisi d'intituler son livre "Une vie heureuse" et ce choix est magnifique de la sonorité qu'il porte dans nos présents à travers cette vie qui connut l'un des pires malheurs de l'existence et qui sut en reconnaître les bonheurs dont on a l'impression qu'ils ont, non pas éclipsé le passé, mais permis à Ginette de savourer le présent et d'avancer vers l'avenir.



L'étoile jaune, l'arrestation, le voyage vers les camps, les privations, les coups, toutes les souffrances n'ont pu lui arracher son désir de vivre et d'être heureuse. Elle dit ne pas savoir comment elle a réchappé de toute cette horreur qui a emporté son père et son frère dès leur arrivée à Auschwitz.



Elle est demeurée une cinquantaine d'années silencieuse, puis a franchi le pas, en s'exprimant enfin. Dans les écoles, elle a révélé à des adolecents l'indicible avec humour et gravité. Sur les marchés, elle a témoigné de sa frénésie de vivre. Dans son appartement, qu'elle n'a quitté que de 1942 à 1945, elle livre des souvenirs, émouvants en la suivant dans les différentes pièces, en regardant les photographies qu'elle a insérées.



Elle dit avoir tout pour être heureuse, elle n'élève pas son niveau d'exigences pour cela, elle vit l'instant, le présent, tout ce qui lui aurait pu lui échapper dès ses dix-sept ans et son témoignage s'ajoute intensément à d'autres, mémoire indispensable pour toute vie.
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Retour à Birkenau

«  Jusqu'ici nous étions encore des êtres humains .

Nous ne sommes plus rien. »



Voici un témoignage nu, émouvant, pétri d'humilité , terrible, d'une femme simple de 94 ans rescapée du camp de Birkenau, dénoncée , arrêtée par la Gestapo, à l'âge de 19 ans en mars 1944, à Avignon , avec son père, son petit frère, et son neveu , la dernière de six soeurs...



Elle se souvient : le bloc de la quarantaine , n° 9 , le bloc où elle travaillait , n ° 27, l'effroi et la surprise , la peur lors du tatouage n° 78 599, les odeurs , la faim , les coups , la crosse qui brise les os , les poux, les appels sans fin, l'alignement comme des revenants , les guenilles, les pieds sales, les paillasses pouilleuses, les plaies cachées et pour cause, les mortes de la nuit—— la peur perpétuelle des sélections,—- la honte cuisante de la nudité ——et celle intolérable de la puanteur des toilettes , planches de bois alignées ———, l'obsession de la nourriture à son retour , le silence à ses proches .....



Comment donner des détails sur ce qu'elle a vécu , une barbarie innommable, à sa mère et à ses soeurs lorsque les vôtres : père, petit frère, neveu sont morts , gazés dès leur arrivée ? Elle sera la seule à revenir ...

Elle conte non seulement la cruauté , la nudité ,la haine, le froid , la terre battue, les gravats , le ciment , les baraques mais aussi parfois la solidarité et l’humanité chez les compagnes ....



Là - bas perdre le moral, c’est précipiter la mort .....



Elle nous narre sa rencontre avec Simone Jacob, partie avec sa mère et sa soeur , qui lui a donné une robe, ce qui la sauva ...Elle viendra la voir sur le marché d'Aubervilliers plus tard., devenue Simone Veil , son amitié indéfectible avec Marceline - Loridan- Ivens dont j'avais lu le livre « : Et tu n'es pas revenu . »disparue il y a peu...



Se demande comment elle a pu survivre à « ça ? ».

Aujourd'hui, elle raconte dans toutes les classes de France et à Birkenau , où elle retourne plusieurs fois par an avec des élèves ..





A lire pour que nous n'oublions jamais !





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Retour à Birkenau

Un témoignage toute en pudeur d'une petite femme timide et discrète. Mais comme tous les témoignages sur la shoah, il est indispensable.

Certains pourraient dire, encore un.

Je dirai un de plus qui témoigne de l'horreur, de l'impensable.

Toujours les mêmes questions, pourquoi ? Comment ?

Et toujours la même pensée : pour que jamais cela ne se reproduise.

...

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Une vie heureuse

Elle sourit, la dame, sur la couverture.

Comme elle le dit elle-meme avec beaucoup d'humour :

« - J'ai payé mes dents assez cher comme ça, si en plus je ne les montre pas ! »



Ginette Kolinka nous emmène dans une promenade à travers les pièces de son appartement, celui qu'elle a occupé sans interruption ou presque :

« Toute ma vie, j'ai habité ici.

À l'exception de trois années, de 1942 à 1945. »



De ces trois années, 14 mois se sont écoulés en camp de concentration. Elle en est revenue, contrairement à son père et son frère, gazés dès leur arrivée.



Cette promenade à travers les différentes pièces est l'occasion d'égrener ses souvenirs, surtout la vie avant et celle après. Elle ne s'appesantit pas sur les mois passés en camp.



Une vie simple d'une femme simple, qui a décidé d'être heureuse, ... et de témoigner. Elle a parcouru la France pour raconter, en mémoire de ceux qui n'ont pu le faire :

« Mais, au fond, je me dis toujours la même chose : pourquoi moi ? Et je pense à ceux qui n'ont pas eu ma chance, ceux qui ne sont pas revenus. Ceux qui n'ont pas pu témoigner. »



Je n'ai jamais eu l'occasion de la croiser. J'ai aimé la lire. Cette conversation où elle se livre, sans fioritures, m'a profondément touchée par son ton très familier, au plus près de la vie de tous les jours, sans pathos, juste une phrase par moments qui vous cueille et vient vous rappeler qu'elle est une survivante. Elle ne se plaint pas, jamais, elle dit qu'elle n'en a pas le droit. Alors j'ai eu un peu honte de mes plaintes à moi.



Merci à NetGalley et aux éditions Grasset pour ce partage #Unevieheureuse #NetGalleyFrance
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Une vie heureuse

Paf ! Ginette, tout sourire, m’a collé une bonne petite baffe, mais en douceur, presque pas mal !

Après, toujours avec le sourire, elle m’a fait signe de la main pour m’inviter à rentrer chez elle.

Alors, un peu gênée, je suis entrée dans son appartement, une petite caverne d’Ali-Baba, débordante de photos, de souvenirs. Ginette a sorti une boite en fer avec dedans des petits gâteaux à grignoter et m’a proposé de boire quelque chose. On s’est installées dans le salon, elle dans son fauteuil en velours et moi sur son canapé. Je me suis détendue, et je me suis laissée porter par la voix de Ginette qui a commencé à me raconter sa vie. Elle m’a fait visiter son appartement, pièce par pièce, et en regardant les lieux, un objet, une photo, elle m’a raconté sa vie, ses souvenirs, comme si j’étais une vieille connaissance.

J’ai écarquillé les yeux, ouvert grand mes oreilles, je ne voulais pas en perdre une miette.

Quand elle a eu fini, elle m’a refait un grand sourire. J’ai compris que c’était l’heure de se quitter, même si je l’aurais bien écoutée encore pendant des heures. Mais Ginette a 98 ans, après avoir remué tous ces souvenirs, il était l’heure pour elle de se reposer.

Alors je l’ai remerciée pour m’avoir accordé si gentiment de son temps, je me suis permis de lui faire une bise sur la joue en en profitant pour la serrer fort dans mes bras. Je lui ai promis que je reviendrai la voir de temps en temps, et je sais que bien sûr je tiendrai ma parole. Alors à très bientôt Ginette, j’ai été sous le charme de cette rencontre inattendue.

Je ressors complètement secouée par cette lecture, pas seulement à cause de la douce baffe, mais par la lumière qui émane de ce livre. J’ai peine à croire que j’écris cette phrase alors que ce récit est celui d’une des rares survivantes encore parmi nous de la Shoah.

Et pourtant, quelle leçon de vie nous donne ce petit bout de femme !

Avec modestie et humilité, elle nous raconte son parcours incroyable. Alors qu’elle n’est qu’une toute jeune fille, sa vie bascule. Elle est déportée avec son père et son frère qui seront gazés dès leur arrivée à Auschwitz. Sans qu’elle ne puisse l’expliquer, elle reste en vie, peut-être grâce aux marchés qu’elle faisait avec ses parents, elle avait l’habitude d’être dehors par tous les temps.

Ginette parvient à survivre, puis à rentrer chez elle à la libération du camp. Alors, elle se réinsère dans la société. Se force à tout oublier, tout effacer… Elle ne parle de rien à sa mère ni ses sœurs, ni plus tard à son mari. Met tout cela derrière elle. À tel point que le jour où elle est contactée par une personne qui travaille pour Spielberg afin de recueillir des témoignages pour la liste de Schindler elle refuse d’abord de parler, prétend ne plus se souvenir de rien. Mais une brèche vient d’être ouverte dans son être, et sans qu’elle le veuille, les souvenirs affleurent, affluent, et elle commence à se livrer au jeune homme qui vient l’interviewer.

Une nouvelle page de sa vie va alors s’écrire, ses témoignages auprès des jeunes deviennent son cheval de bataille pour que personne n’oublie jamais la Shoah.

Petit livre, petit bijou, empreint de sincérité et de dignité. Bravo à Marion Ruggieri qui s’efface et restitue avec justesse les mots de Ginette, tant j’ai eu l’impression que c’était à moi que Ginette s’adressait. Que d’émotions également, lorsque soudain, au détour d’une phrase, les souvenirs du camp reviennent à la charge, bien tapis dans un coin de la mémoire, et que les fêlures, les doutes, les angoisses refont abruptement surface :

« Elle [la concierge] savait, forcément. Peut-être pas qui nous avait dénoncés. Mais qui avait habité chez nous durant ces trois années ? qui avait vidé l'appartement ? Parfois, je me demande pourquoi je n'ai pas posé de questions. J'étais jeune, indifférente à tout ce qui s'était passé avant. Je me contentais du présent. Et c'est toujours le cas. (p.15) »

« La déportation, tout le temps, tu y retournes.

Une pièce invisible. (p .26) »

« Quand tu es allée dans les camps, c'est difficile de croire. (p.31) »



Je vous conseille également le roman graphique sur la vie de Ginette réalisé par Aurore d’Hondt qui restitue en noir et blanc son histoire : Ginette Kolinka : Récit d'une rescapée d'Auschwitz-Birkenau.

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Retour à Birkenau

A 94 ans, Ginette Kolinka est une des dernières rescapées d'Auschwitz-Birkenau. Déportée à 19 ans, en mars 1944, avec son père, son petit frère et son neveu, dans le même convoi que Simone Veil, elle fut une des rares survivantes de ce convoi qui transportait 1500 juifs. Un drame qu'elle a longtemps eu du mal à évoquer avant de se décider à lutter contre la banalisation de cette horreur. Témoigner, transmettre inlassablement, est devenu le combat de Ginette Kolinka.



Ginette Kolinka rappelle régulièrement l'instinct de survie qui subsiste malgré tout : « ce n'est pas possible d'avoir survécu » écrit-elle. A son arrivée au camp, elle n'a pas peur, elle croit se trouver dans un camp de travail : « J'aperçois de la fumée, sans doute la cheminée de l'usine » … Elle ne peut soupçonner que des hommes puissent être capables d'infliger une telle barbarie. Toutefois, dans un monde où rester en vie compte plus que tout, les gestes de solidarité sont toujours présents, et finalement les rescapés ne savent pas comment ils ont pu survivre aussi longtemps.



Le témoignage de Ginette Kolinka est poignant et d'une grande pudeur, elle raconte l'indicible, ce qu'elle a vécu, sans se plaindre, sans jamais tomber dans le sensationnel. Son histoire est celle de nombreuses victimes, elle la raconte dans ce livre, mais témoigne également dans les établissements scolaires et lors de voyages scolaires à Birkenau afin qu'on n'oublie pas ce dont les hommes sont capables. Un témoignage émouvant, une formidable leçon de vie.



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Une vie heureuse

Jeudi dernier, j'ai eu la chance de rencontrer Ginette Kolinka. La conférence était organisée par les chères libraires de ma commune, les Julie, et ma médiathèque préférée où a eu lieu l'événement. Était également présente à ses côtés Aurore d' Hondt, qui venait de publier quelques mois plus tôt une magnifique BD sur le récit de Ginette Kolinka.

Elle en était déjà à sa troisième conférence de la journée.

Ce qui m'a fasciné, c'est le sourire de Ginette Kolinka, la joie de vivre qui rayonne sur son visage. Une joie qu'elle a envie de partager. Puis elle ferme les yeux, se souvient comme si elle était là-bas et elle raconte son récit.

Une vie heureuse est un court texte autobiographique qu'elle a écrit avec la complicité de Marion Ruggieri. Je relis une fois encore la belle dédicace qu'elle m'a écrite après la conférence. Je me souviens de lui avoir dit à ce moment-là que ma mère avait un an de moins qu'elle, que son premier amour, c'est-à-dire aussi le père de ma soeur ainée Madeleine, avait été fusillé par la Gestapo parce qu'il était résistant. J'ai vu son regard empli de compréhension étreindre le mien, longuement, elle n'a rien dit. Sa dédicace était peut-être les seuls mots qu'elle savait poser à cette douleur.

Une vie heureuse est une déambulation dans l'appartement familial parisien qu'elle a quitté durant les mois de sa fuite vers le sud de la France puis lors de sa détention dans le camp d'Auschwitz-Birkenau, après son arrestation avec son père et son frère. Cette déambulation de pièce en pièce est prétexte à transmettre ce devoir de mémoire qui tient à coeur Ginette Kolinka.

Je crois bien qu'elle évoque toujours dans ses rencontres avec son public, la chance qu'elle a eu de s'en sortir vivante.

En cette fin d'après-midi-là, elle a regardé l'assistance et a demandé aux personnes qui avaient moins de quinze ans de lever la main. Elle leur a alors dit qu'à Auschwitz ils auraient été directement dirigé vers les chambres à gaz...

J'ai aimé ce livre qui fait sens à cette rencontre qui demeurera pour moi inoubliable. Elle fait du lecteur que nous sommes un porteur de mémoire, avec le souci de la continuité. Dire, continuer de dire, inlassablement, ce qui fut l'intolérance, la méchanceté humaine, dire pour que cela ne recommence plus.

Aujourd'hui plus que jamais il nous faut entendre et transmettre cette parole. La montée de l'extrême-droite aux portes du pouvoir me fait peur, le contexte de l'antisémitisme aussi.

Il y a sans doute sans doute un impératif social et politique plus que moral à entendre ce que nous transmet Ginette Kolinka.

C'est l'impossibilité d'oublier plutôt que le devoir de mémoire qui prévaut d'abord.

Pourquoi moi ? dit-elle. Pourquoi pas les autres qui n'ont pas eu la même chance que moi ?

C'est la mémoire du passé qui ne passe pas, mémoire irrévocable qui ne s'effacera jamais. C'est un passé incrusté dans le présent.

Elle déambule dans ce parcours de vie, d'une pièce à l'autre.

Comment révoquer le passé ?

La mise en récit des horreurs qu'elle a vécues lui permet de tenir debout.

Lorsque Ginette Kolinka évoqua ce soir-là devant nous le souvenir de cette jeune femme qui venait d'accoucher dans le camp et lorsqu'un des nazis saisit ce nouveau-né pour le jeter et le briser contre le mur d'en face, je n'oublierai jamais le silence de l'assistance et je ne peux pas retenir mes larmes en écrivant ces mots, parce que j'ai vu la scène sous mes yeux. Elle disait cela sans émotion comme décrivant le quotidien de ces quelques mois passés au camp d'Auschwitz-Birkenau.

C'est la mémoire d'une perte de soi, perte de sa propre identité. C'est une mémoire mise en récit et non un récit. C'est la mémoire de quelque chose d'incroyable qui dit ce que fut la misère absolue et indicible, qui dit la phrase qu'elle dit pour envoyer malgré elle son père et son frère vers la mort. " Vite ! Sauvez-vous par là-bas ! " Mais par là-bas c'étaient les chambres à gaz. Elle dit cela et sans doute elle le porte encore aujourd'hui comme un sentiment de culpabilité.

Longtemps elle dit qu'il y eut la peur de ne pas être crue, tant le narratif pouvait paraître incroyable.

Qu'est-ce qu'un témoin qui revient de là-bas ?

Les témoins vivent dans une tragique solitude, une expérience hors-norme, incompréhensible.

Le témoignage reste toujours une preuve faible.

Le devoir de mémoire peut-il être transmissible, lorsque Ginette Kolinka ne sera plus là ?

Face au devoir de mémoire, il y a deux obstacles, l'oubli et la résistance au souvenir.

Je veux transmettre ce désir de poursuivre le chemin à travers mes mots, prenez-les, emparez-vous d'eux, diffusez-les comme des vols de colombes à travers le ciel sublime qui nous surplombe. Je vous en supplie. Il ne faut pas oublier. Jamais.

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Une vie heureuse

Elle est arrivée dans cet appartement elle avait 10 ou 11 ans, elle a 97 ans, cela fait quatre-vingt-sept ans qu'elle monte ces escaliers. Toute sa vie, elle a habité ici. À l'exception de trois années, de 1942 à 1945. Quand elle revient en 1945, rescapée des camps, elle a 20 ans, pèse 20 kilos, le crâne rasé à cause du Typhus.

Ce court témoignage a une construction très originale, Ginette Kolinka nous fait visiter chaque pièce de cet appartement : l'entrée, la chambre principale, le salon, la petite chambre, la salle à manger, la cuisine. À chaque fois les souvenirs remontent, son enfance avec ses cinq soeurs, l'atelier de confection de son père, les marchés avec sa mère à Aubervilliers ou la Villette, Albert, son mari et son fils Richard, sa fierté ; elle rêvait qu'il soit fonctionnaire, heureusement qu'il ne l'a pas écoutée, il ne pensait qu'à la musique, il sera le batteur du groupe Téléphone. Ginette nous raconte ses rencontres avec les collégiens pour témoigner ; Birkenau, la faim, le manque d'hygiène, les travaux de terrassement très durs, ses amies de captivité, Marcelline Loridan et Simone Veil.

Ginette respire la joie de vivre, Marion Ruggieri recueille son témoignage et nous le livre tel quel, c'est un peu fouillis, une sorte de bric-à-brac, mais c'est une formidable leçon de vie et de courage.



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Retour à Birkenau

« Retour à Birkenau » nous apporte un nouveau témoignage d'une rescapée de la Shoah, Ginette Kolinka.

Dans ce récit bref, fort et touchant, la vieille dame (94 ans), raconte son arrestation à 19 ans, en 1944, avec son père, son petit-frère et son neveu. le convoi dans les wagons à bestiaux, son arrivée au Birkenau, sa survie au camp, de la sidération à l'habitude des souffrances physiques et morales. Ne plus rien voir, ne plus rien sentir. La solidarité entre les femmes, la débrouille pour manger, la chance qui vous sauve. Ses retrouvailles avec sa famille et sa vie, qui continue, malgré tout. Parler de tout ça ? De la culpabilité, de la douleur, de l'inhumain ? Non, ne pas embêter les gens. Ginette attendra un déclic qui se produira au début des années 2000.

Ses souvenirs sont entrecoupés de remarques sur ses voyages scolaires avec des lycéens. Lorsqu'elle revient pour la première fois à Birkenau, Ginette découvre en même temps que les jeunes la grandeur du camp, bien plus vaste que ce qu'elle croyait. Elle découvre ce que fut l'agonie de son père et de son petit-frère. Elle réalise également que les lieux actuels ne peuvent retranscrire la réalité de l'époque.



Le devoir de mémoire est nécessaire, essentiel, éternel. Mais au fil des années, les lieux changent, les tas de boucles soyeuses aux diverses couleurs deviennent un amas uniforme de cheveux ternes et gris qui tombent en poussière. Des pavillons coquets ont été construits le long de l'ancienne Judenrampe. Quand il n'y aura plus les rescapés pour faire entendre leur voix et parler de cette époque où le monde a sombré dans un enfer bien réel, que restera-t-il pour toucher les générations qui arrivent ? Je dis bien toucher et non pas juste enseigner. C'est la question que pose Ginette Kolinka à travers son récit. "Aux élèves, je le répète : c'est la haine qui a fait ça, la haine à l'état pur. Les nazis ont exterminé six millions de Juifs. Souvenez-vous de ce que vous avez trouvé impensable."



Elle espère même que ces jeunes à qui elle parle, n'ont pas pensé qu'elle exagérait... Pourtant, tout cela s'est passé il y a tout juste 75 ans. A l'échelle de l'Histoire, c'était hier. Il faut se souvenir, encore et toujours.

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Retour à Birkenau

J’ai lu beaucoup de témoignages sur cette période de l’histoire et chaque fois que je tourne la dernière page de l’un d’entre eux je suis intimement convaincue qu’ils sont tous essentiels. Celui de Ginette KOLINKA ne fait pas exception. Ici ce qui m’a frappé c’est le côté « madame tout le monde » de Ginette KOLINKA. Ce n’était pas une résistante, pas une fervente pratiquante, elle ne faisait pas de politique, c’était une jeune fille dans laquelle beaucoup pourraient se reconnaître. Elle dit d’elle même qu’à l’époque, elle n’était pas particulièrement rusée ou débrouillarde. Contrairement à la plupart de ceux qui sont revenus elle n’est ni rebelle ni effrontée mais plutôt de nature à respecter les règles pour éviter les ennuis. Pas de prise de risque, pas de désobéissance, dans le camps c’est quasiment une condamnation à mort. Pourtant elle va survivre, parce qu’elle est jeune et en bonne santé, parce qu’elle aura un peu de chance et aussi grâce à des gestes d’humanité de la part des autres.



Sa personnalité fait que son regard sur ce qu’elle a vécu est atypique. La naïveté et l’incrédulité face à l’enfer et la cruauté. Il y a d’abord cette nudité qu’on lui impose brusquement et qui la choque , abasourdie, anesthésiée, cela la marquera définitivement. Le déni de tout dignité la dépasse complètement, elle y est confrontée sans y croire. Comment ça peut être vrai ! Ensuite et surtout il y a la faim. Indescriptible, inimaginable, omniprésente qui lui laissera des stigmates même après. Et par dessus tout il y a son impuissance à expliquer, à comprendre parce que c’est au-delà de ce que quelqu’un sain d’esprit peu intégrer. C’est inimaginable si on ne l’a pas vécu parce que c’est inhumain.



Et puis il y a son impuissance face à la réalité d’aujourd’hui, face à ce camps où on emmène les enfants pour qu’il sachent. Mais qu’ils sachent quoi ? Ça n’a plus rien à voir. Il manque l’horreur, les vivants qui déambulent, les morts entassés, les SS qui éructent les ordres, la fumée et son odeur qui s’infiltre partout à la fois menace et crève cœur, les gens qu’on maltraite, la boue, le froid, la désolation. La vérité. Elle a disparue. Cachée sous l’herbe qui a repoussé, dissimulée par la vie qui a repris ses droits. Et c’est un peu comme si on avait effacé les preuves. Alors Ginette raconte, inlassablement, répond aux questions, fait revivre l’enfer. Et quand demain tous ceux qui savent dans leurs os, dans leur âme, jusqu’au fond de leurs tripes, quand ces survivants, ces miraculés auront disparus que restera-t-il ? Des témoignages et des lecteurs. Alors Ginette témoigne malgré le doute qui lui tord l’estomac : au moins me croiront-ils ?
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Retour à Birkenau

Avec « Retour à Birkenau », je suis partie à la rencontre de Ginette Kolinka et de son histoire. Ginette Kolinka fait partie des survivants des camps de la mort, contrairement à son père, son frère et son neveu, déportés avec elle et qui feront partie des millions de victimes de la Shoah.

A ses côtés, j'ai pénétré dans le camp de Birkenau. Je l'ai écouté avec attention me raconter l'histoire de sa déportation, de ces longs mois passés dans le camp de concentration d'Auschwitz-Birkenau.



A l'heure de mettre des mots sur mon ressenti, mes émotions m'empêchent de trouver la justesse et la pertinence qui conviennent. Ils manquent, à mon sens, de légitimité et de ce fait, ils me viennent de manière confuse, décousue. Car qui mieux que ceux de Ginette Kolinka peuvent parler de ce qu'elle a vu et vécu ?



Alors, je vais, comme elle le conseille aux visiteurs, fermer mes yeux et laisser ses mots parler pour moi.



« Sous chacun de vos pas, il y a un mort. »



*

Et en ouvrant de nouveau les yeux, le camp m'est apparu sans le filtre du passage du temps, du vide, de la vie qui a repris. Les baraquements du camp ont revêtu immédiatement leurs vrais costumes, et c'est le choc de découvrir les conditions de vie inhumaines, cruelles, dégradantes et humiliantes dans lesquels des êtres humains ont maintenu d'autres êtres humains.



Les mots de Ginette Kolinka relatent cette enfance bouleversée par la guerre, l'occupation, l'arrestation, puis la déportation avec une partie de sa famille.

Ils racontent son incompréhension et sa peur à voyager dans des wagons à bestiaux sans nourriture ni eau, les corps entassés, les relents des corps, le sol jonché d'excréments, les cadavres qui s'entassent, la sensation de suffoquer.



« 16 avril 1944. le train s'arrête enfin. J'ai l'impression d'avoir somnolé tout ce temps. Derrière la porte, on entend des voix qui crient, des chiens qui aboient, le bruit des gonds que l'on déverrouille : un air vif pénètre le wagon, comme c'est bon ! Après ces heures passées recroquevillés dans la pénombre et la puanteur. Combien de jours, de nuits ? »



Puis, les mots décrivent la vie dans le camp : le travail forcé, les coups et les insultes, les odeurs pestilentielles d'excréments et de cadavres, la faim et la soif, l'appel interminable sans bouger, le manque d'hygiène et d'intimité, la maladie et la mort qui entourent son quotidien.



« Perdre le moral, c'est précipiter la mort. »



Qui mieux que Ginette Kolinka peut vous parler de toute cette souffrance, de cette frayeur ?

Qui mieux que Ginette Kolinka peut vous parler des sentiments que l'on ressent lorsque l'on voit la fumée qui s'élève au-dessus du camp ?

Qui mieux que Ginette Kolinka peut vous parler de la douleur que l'on ressent lorsque l'on apprend que son père et son petit frère de douze ans ont été gazés et sont partis en fumée ?

Savez-vous combien de temps il faut pour mourir dans les chambres à gaz ?

C'est terriblement long.



« « Vous voyez la fumée, dehors ? Ils sont là ! Ce sont leurs corps, vos familles, qu'on brûle ! » Elles balancent ça, mais personne ne les croit. Comment voulez-vous les croire ? Moi, en tout cas, je ne les crois pas. Je me dis que ce n'est pas possible, que ces filles, à force, sont devenues inhumaines. »



Comment peut-on se reconstruire physiquement et psychologiquement après les atrocités commises et la terreur de l'enfermement ?



*

A son retour à Paris en 1945, Ginette Kolinka a vingt ans et elle ne pèse plus que vingt-six kilos.

De cette épreuve, de l'horreur inimaginable des camps, elle n'en dira rien jusqu'à ce qu'elle brise le silence au moment où Steven Spielberg cherche des témoins de l'époque pour son film "La liste de Schindler".

Depuis, Ginette Kolinka partage son expérience et accompagne les groupes scolaires qui visitent les camps.

Cette partie est très intéressante, car l'autrice nous parle de son retour dans ce lieu cinquante-cinq ans plus tard. Elle nous transmet ses impressions, ses émotions face à ce lieu aseptisé devenu musée.



*

Le récit de Ginette Kolinka met en lumière sa résilience, sa force à survivre malgré les circonstances, son combat à transmettre pour ne jamais oublier les atrocités nazies ainsi que leurs victimes.

J'ai trouvé son récit très mesuré, sobre, juste, poignant. J'ai été également touchée par l'humanité de son discours, par l'absence de rancoeur ni de haine.



J'ai trouvé intéressant sa façon de s'adresser aux lecteurs comme si le livre était une passerelle, un pont entre elle et nous. On se sent proche d'elle.



« Moi-même, je le raconte, je le vois, et je me dis ce n'est pas possible d'avoir survécu à ça. Je vois et je sens.

Mais vous, qu'est-ce que vous voyez ? »



L'autrice nous parle également de son rôle de passeur de mémoire aux côtés des plus jeunes qui n'ont pas connu la guerre.



« Aux élèves, je le répète : c'est la haine qui a fait ça, la haine à l'état pur. Les nazis ont exterminé six millions de Juifs. Souvenez-vous de ce que vous avez trouvé impensable. Si vous entendez vos parents, des proches, des amis, tenir des propos racistes, antisémites, demandez-leur pourquoi. Vous avez le droit de discuter, de les faire changer d'avis, de leur dire qu'ils ont tort.

Le font-ils ? »



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Il est difficile de juger ce genre de livre. Faut-il noter la qualité du récit, le style de l'auteur ? Ou la force du récit, le courage de l'autrice pour dire l'indicible prévalent-ils ?



« Cette phrase, soixante-dix ans après, résonne encore en moi. « Il y a des camions pour les plus fatigués. » Dans ma naïveté, cette naïveté qui m'a peut-être sauvée et qui les a condamnés, je pense à mon père, amaigri par ces dernières semaines, exténué par le voyage, je pense à Gilbert, mon petit frère, qui n'a que 12 ans, à sa petite tête ébouriffée. Et je m'entends leur crier : « Papa, Gilbert, prenez le camion ! »

C'est toujours ça qu'ils n'auront pas à faire à pied.

Je ne les embrasse pas. Ils disparaissent. »



Cette autobiographie est très courte et écrit avec simplicité et franchise. Aucun mot n'est de trop, il va à l'essentiel et cette concision est incroyablement touchante. L'autrice a cette capacité à raconter sans pathos, l'enfer des camps de concentration, à nous faire sentir ce qu'elle a vécu et à nous livrer avec sincérité ses émotions, ses souffrance, sa peur.



*

« Retour à Birkenau » est un récit de vie court mais dense, intime et bouleversant d'émotions.

Une force de vie et un courage qui forcent le respect.

A lire absolument !
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Retour à Birkenau

Un court récit, sans fioriture, qui ne se targue pas d’être de la grande littérature. Mais faut-il être un auteur de roman ou d’essai pour toucher ceux pour qui on écrit ?



Ginette Kolinka raconte sa déportation et les mois passés dans les camps de Birkenau et de Bergen-Belsen avec ses mots, ses sensations, ses souvenirs, tout ce qu’elle ne savait pas, n’imaginait même pas être possible ! Elle donne parfois l’impression de ne pas bien avoir réalisé ce qui se passait et qu’elle s’était refermée sur une seule chose : trouver à manger ! Et cela a peut-être suffit à lui sauver la vie avec un peu de chance en plus !



Je ne m’autorise pas à juger ses écrits car ils sont propres à sa personne et à son vécu, ils me parlent et me blessent tels qu’ils sont, pour ce qu’ils sont : un témoignage et une condamnation de la barbarie au nom d’une idéologie dépravée !



Challenge PLUMES FEMININES 2021

Challenge RIQUIQUI 2021

Lecture THEMATIQUE août 2021 : En ville !
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Une vie heureuse

* Le sourire de Ginette *



Il y a quelques années, je visitais le Mémorial de Caen. Superbe musée doté d'une non moins superbe librairie consacrée à la seconde guerre mondiale. Et qui dit librairie, dit furetage, dit achat. Dans ces rayons, j'ai été attirée par le sourire de Ginette. Un bon grand sourire franc d'où émane bonté et bonheur... puis je lis le tire, c'est "Retour à Birkenau".



Et je retrouve ma Ginette il y a quelques semaines, avec son grand sourire, l'oeil qui frise quand elle fait une blague, et toujours cette bonté qui rayonne dans le 28 minutes de ARTE. Ginette, elle a 98 ans, bon pied bon oeil, et elle nous raconte sa déportation mais aussi sa résilience.



Je ne pouvais pas rater ce nouveau témoignage d'une grande petite dame si solaire.



Dans ce témoignage, elle fait le tour de son appartement, et le tour de sa vie en même temps. Une vie remplie, avec ses désastres mais aussi avec ses joies et elle en tire le bilan : une vie heureuse.
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Retour à Birkenau

Dévoré sur la journée, tout est dit ! Un témoignage court, marquant, qui ne laisse pas indifférent .
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Une vie heureuse

J'ai lu le commentaire de PetiteBichette (merci !) sur ce livre et je n'ai pas hésité, je l'ai fait acheter par mon mari qui a eu la mauvaise idée de passer à proximité d'une des librairies de ma ville. A peine acheté, déjà lu.

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Je vous conseille vivement la lecture de la critique de PetiteBichette qui donne une image réelle du livre : touchant, émouvant mais pas du tout larmoyant, une ode à la vie. Ginette Kolinka a été enfermée dans les camps de la mort. Pourtant elle sourit à la vie. Son livre est un immense sourire avec quelques touches noires (quand un souvenir remonte, une interrogation qui restera à jamais sans réponse). Un livre remarquable sur un personnage exceptionnel, par son histoire, son vécu, mais aussi par sa façon d'être, son recul, son sourire en un mot. La photo sur le bandeau est superbe !

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Un texte court, qui mérite qu'on s'y arrête. Très peu de pages sur les camps, beaucoup sur l'après. Emouvantes ou enjouées.

Un témoignage important et poignant.

Son sourire, sa "vie heureuse", un sacré pied de nez à ceux qui ont voulu la détruire parce que Juive.
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Une vie heureuse

Ginette Kolinka nous invite dans cet appartement dans lequel elle habite depuis qu'elle a une dizaine d'années, comme elle le dit « Toute ma vie, j'ai habité ici. À l'exception de trois années, de 1942 à 1945. ». Après avoir monté les escaliers, dans ses pas, le couloir, on entre dans le vestibule et on la suit dans les différentes pièces. Chacune va faire remonter des souvenirs, au gré des photos, elle évoque pour nous ses parents ses frère et soeurs au temps de la vie en famille avec les marchés et leur dureté, l'atelier de confection de son père.



Elle évoque surtout le passé, l'arrestation dans le Sud, sur délation, le retour, la culpabilité de revenir seule se sentant coupable d'avoir envoyé son père et son frère dans la chambre à gaz à leur arrivée. Elle parle peu des camps, si ce n'est pour le devoir de mémoire : après une longue période de silence (elle n'en parlait ni à ses soeurs, ni même à son mari, elle avait peur de ne pas être crue) et explique l'importance d'aller témoigner, parler devant les collégiens, lycéens. Elle a décidé, une fois pour toute, de vivre l'instant présent et de profiter de la vie, « une vie heureuse » dit-elle.



De Auschwitz Birkenau, elle parle des lourds travaux de terrassement, de la faim, des amies Simone Veil et Marceline Loridan, deux femmes admirables elles-aussi.



Elle évoque pour nous son mari, Albert, son côté facétieux, volontiers blagueur avec lequel elle a repris les marchés ainsi que le goût de la vie.



J'ai beaucoup aimé la manière dont elle évoque son fils Richard, le génial batteur du groupe Téléphone que j'aime tant, et sa fierté devant les disques d'or. Ginette Kolinka est une femme lumineuse, son sourire nous emporte et ce court récit autobiographique, écrit à quatre mains avec Marion Ruggieri est magistral, nous faisant entrer dans son intimité, sans que l'on se sente voyeur en la suivant dans son appartement.



Un grand merci à NetGalley et aux éditions Grasset qui m'ont permis de découvrir ce livre et la personnalité extraordinaire de Ginette Kolinka.



#Unevieheureuse #NetGalleyFrance !
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Retour à Birkenau

Ginette Kolinka, rescapée de Birkenau, nous livre le témoignage d’une femme simple, loin de toute littérature, et, peut-être, justement beaucoup plus proche de la vie.



Arrivée à 19 ans à Birkenau, elle croit y découvrir un camp de travail traditionnel : d’ailleurs à son arrivée ne voit-elle pas de la fumée qui s’échappe de la cheminée de l’usine où les nazis l’ont emmenée. Et au loin des femmes travaillent … Sauf que plus Ginette avance, plus les femmes semblent étranges. Elles sont chauves, anormalement maigres, on dirait des folles. La jeune femme aura la naïveté de croire que ces femmes faisaient partie d’un camp d’aliénés des environs.



Autre image marquante : après la guerre, une fois qu’elle a retrouvé sa famille au retour des camps, Ginette ne peut s’empêcher de se lever la nuit pour fouiller la poubelle et y dénicher les restes.



Ou encore ces mots abjects de la guide polonaise, qui ose dire que les assassinés mouraient gazés rapidement, c’est-à-dire en vingt ou vingt-cinq minutes !



Et puis le choc du retour à Birkenau, cinquante-cinq ans après … C’est le printemps, il fait beau, des maisons avec jardinet et toboggan ont été construites tout près du camp. Une jeune femme fait d’ailleurs son jogging dans la rue. Pour la rescapée, c’est intolérable. Et je peux tout à fait le comprendre, mais là où elle voit un sacrilège j’aimerais y voir plutôt le triomphe de la vie, à travers les jeux des enfants et la liberté des jeunes femmes à circuler comme elles l’entendent.



C’est un témoignage, un de plus, mais c’est toujours aussi choquant, toujours aussi poignant, et surtout toujours aussi indispensable. Car jamais nous ne serons blasés de ces voix, jamais nous n’oublierons leur histoire.



Essentiel pour continuer le travail de mémoire, qui incombe à chacun d’entre nous.

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Retour à Birkenau

Difficile d'être objective devant un tel récit. Devant quelque chose d'aussi personnel, et en même temps d'aussi collectif. Je dis collectif, puisqu'il s'agit du récit d'un passage à Birkenau, pendant la deuxième guerre mondiale. L'histoire personnelle de Madame Kolinka, qui s'inscrit dans l'horreur qu'ont vécu tellement d'autres. L'arrivée en train, la marche pour les derniers kilomètres, la quarantaine obligatoire, non pas pour les maladies, mais pour se réformer à l'esprit du camp. Les couchettes partagées, la saleté, la crainte, la peur, la maladie... Les coups, les cris, les morts... Et la libération, enfin, celle qu'on espérait même plus, parce que pas assez de force pour espérer... Les retrouvailles avec la famille. L'horreur qu'on tait, le replis sur soi, l'oubli, même si c'est impossible d'oublier. Et maintenant, le travail de mémoire, l'enseignement aux plus jeunes... Un texte difficile à oublier, mais... après... il ne faut pas oublier. Mes respects Mme Kolinka.
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