Martin GRAY au Camp de Rivesaltes
C'est vrai, je suis devenu égoïste, c'est vrai je peux voir un mourant et passer près de lui sans m'arrêter. Parce que j'ai compris que pour le venger il me faut vivre, à tout prix. Et pour vivre, il faut que j'apprenne à ne pas m'arrêter, que je sache le regarder mourir.
Mon égoïsme c'est ce qu'ils m'ont laissé comme arme, je m'en suis saisi, contre eux. Au nom de tous les miens.
Savoir accepter l'autre tel qu'il est.
Être joyeux du bonheur qu'il trouve.
L'aimer dans sa totalité : pour ce qu'il est, laideur et beauté, défauts et qualités.
Voilà les conditions de l'amour, de l'entente.
Car l'amour est vertu d'indulgence, de pardon et de respect de l'autre. (171)
...
Aimer c'est en même temps partager des mots, des regards, des espoirs et des craintes. (176)
...
Aimer, c'est réussir à donner à l'autre confiance en lui. (183)
Ce que l'on donne à un enfant, il le rend un jour.
Et ce qu'on lui refuse, il le refuse.
Et le mal qu'on lui fait, il peut le faire.
Mais si l'on gonfle ses jeunes voiles au souffle de la force, du courage et de la droiture, alors il vogue et sait affronter la tempête. (83)
Éduquer un enfant, c'est s'offrir à lui en exemple. (84)
Protéger un être, un enfant ou un homme, ce n'est jamais lui masquer les risques de l'existence...
Protéger quelqu'un, c'est d'abord lui apprendre à voir, lui montrer le danger en lui, autour de lui. C'est le rendre capable de l'affronter et de le vaincre. (85)
L'homme peut être seul au milieu des autres.
Mais celui qui est ouvert au monde, celui qui sait demeurer fraternel, celui qui est solidaire des autres, celui-là, même solitaire, n'est jamais seul. (117)
...
Il suffit du regard d'un homme pour briser la solitude. Et ce regard viendra. Mais il faut d'abord croire qu'il existe. (119)
Toute la journée, j’ai marché dans le ghetto. Des enfants fouillent dans les poubelles, une femme son bébé mort dans les bras mendie ; un couple élégant, l’homme superbe, bras croisés, la femme maquillée, chantent au milieu de la chaussée. Là on vend des livres par paniers entiers, ici un homme est allongé sans connaissance : sans doute le froid et la faim. Tout va mal : la mort est partout.

Je n’ai qu’une certitude :
Ceux que j’ai aimés, ma famille, mes camarades, mes enfants,
Demeurent vivants en moi.
Ils guident encore mes pas.
Leur être fidèle, ce n’est pas s’enfermer dans la douleur.
Il faut continuer de creuser le sillon : droit et profond.
Comme ils l’auraient fait eux-mêmes.
Comme on l’aurait fait avec eux, pour eux.
Être fidèle à ceux qui sont morts,
C’est vivre comme ils auraient vécu, c’est les faire vivre en nous,
C’est transmettre leur visage, leur voix, leur message aux autres.
Ainsi la vie des disparus germe sans fin.
Je ne sais pas si je dois me dire croyant.
Je ne puis dire : je crois en Dieu.
Je ne puis dire non plus : je crois…
Ce que je sais seulement,
C’est que la mort ne détruit pas l’amour que l'on portait
A ceux qui ne sont plus…
Je le sais parce que tous les jours je vis avec les miens…
Ce que je sais aussi, c’est que la vie doit avoir un sens.
Ce que je sais encore, c’est que l’amour est la clé de l’existence.
Ce que je sais enfin, c’est que l’amour, le bien, la fidélité et l’espoir
Triomphent finalement toujours du mal, de la mort et de la barbarie.
Tout cela, je la sais, je le crois…
Dieu est-il au creux de ces certitudes ?
Je ne sais pas… Je cherche…
L'enfant n'a pas d'abord besoin d'objets. Il a faim des autres. Besoin de sentir à tout moment l'ombre protectrice, bienveillante, attentive, de ceux qui l'ont porté et voulu.
Donner à un enfant , c'est se donner soi. A tout moment. Alors il peut pousser droit, et ses racines seront profondes, fortes.
Les parents sont la semence de l'enfant et la terre dans laquelle il pousse. (79)
Les mots et la parole ont une force insoupçonnée. Ils sont la tourmente ou la brise. La pluie qui dévaste ou l'eau qui irrigue. (25)
Les mots et la parole ont une force insoupçonnée.
Ils sont la tourmente ou la brise.
La pluie qui dévaste ou l'eau qui irrigue.