Exerçant leur profession de façon autoritaire, notamment lorsqu'ils bénéficient d'une position de pouvoir, nombre d'hommes ont également des comportements autoritaires dans le cadre familial. Les militaires et professionnels apparentés, les grands patrons, les médecins ou autres notables sont surreprésentés parmi les criminels conjugaux.
Parmi les actes de barbarie qui caractérisent les situations de guerre ou de terrorisme, le viol revêt une importance particulière. Le viol est une arme de guerre, méthodiquement pratiqué lors de la guerre de Bosnie (1992 - 1995). Après examen de la terreur sexuelle exercée sur toutes les femmes de Foca, ville bosniaque, le Tribunal pénal international de La Haye qualifia, le 27 juin 1996, le viol contre les femmes en temps de guerre de "crime contre l'humanité". Le viol à large échelle est un crime facile à planifier et ne nécessitant qu'une panoplie guerrière des plus réduite. Qu'il s'exerce au Rwanda ou en Tchétchénie, il doit détruire l'ennemi. La pratique systématique du viol, par les grossesses qui s'ensuivent, entend effacer la communauté ennemie en brouillant sa libre reproduction et la transmission du lien de filiation.
Avoir vécu une partie de son enfance ou de son adolescence en l'absence quotidienne d'un de ses parents - décédé ou plus souvent séparé ou divorcé - est un facteur de risque moindre que d'avoir été témoin de conduites addictives de membres de la famille ou de relations parentales très conflictuelles [...] Les mauvais traitements physiques répétés, infligés au cours de l'enfance, grèvent durablement l'existence d'une personne en multipliant par cinq le risque d'être en situation "très grave" de violences conjugales ; l'impact des violences sexuelles est du même ordre de grandeur, les deux étant souvent associés.
Prendre le nombre de décès de femmes consécutifs à des violences conjugales comme indicateur du niveau de violence apparaît peu pertinent, sauf comme outil morbide de sensibilisation du grand public, pour un système d'information se nourrissant de la détresse et du malheur.
Le fait que dans une relation quotidienne, l'interaction entre les partenaires puisse prendre des formes agressives, en cas de profond désaccord par exemple, est somme toute assez banal [...] Mode relationnel par définition, le conflit implique la réciprocité entre les protagonistes et il est susceptible d'entraîner le changement. La violence, si elle peut prendre des formes identiques, est univoque : la même personne subit les coups et cède lors des altercations [...] Alors que le conflit peut être envisagé comme une des modalités fonctionnelles des relations interpersonnelles durables, la violence est un dysfonctionnement conjugal. Elle résulte d'une volonté, plus ou moins consciente, de façonner l'autre pour mieux assurer son pouvoir.
A l'exception de CVS, les enquêtes françaises n'utilisent pas le mot "viol" - dont le signifiant se révèle trop émotionnel - mais l'expression "rapport forcé".
La gravité des traumatismes provoqués par les viols a été longtemps sous-estimée ; cela tenait en partie aux réactions des victimes, que l'on interprète maintenant différemment. La terreur provoque des réactions inattendues et, dans le passé, la paralysie ou la sidération ont pu être interprétées comme des formes de consentement, de même que la passivité apparente de la victime, seule possibilité d'échapper à la mort, à la torture.
[définition des violences à l'égard des femmes, selon l'ONU]
Tous actes de violences dirigés contre le sexe féminin, et causant ou pouvant causer aux femmes un préjudice ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychologiques, y compris la menace de tels actes, la contrainte ou la privation arbitraire de liberté, que ce soit dans la vie publique ou dans la vie privée.
Selon le modèle que construisit Walker en 1984, le cycle de la violence conjugale se répète infiniment et comprend toujours les mêmes étapes : montée en puissance progressive de la violence qui s'exacerbe jusqu'à une crise aiguë, à laquelle succède une phase de regrets/pardon, appelée "lune de miel" et souvent idyllique, puis une période variable de rémission, jusqu'à le reprise du mouvement. La pertinence du modèle ne fait aucun doute et permet d'appréhender l'incompréhensible, à savoir pourquoi les femmes restent prisonnières de ces situations. De fait, ce processus peut, à la fois pour les victimes et les auteurs, donner l'illusion de la possibilité de la réparation, l'illusion d'un nouveau départ.
Concept polysémique et polémique, la violence est une réalité multiforme, non réductible à un seul modèle interprétatif. Mais, plus un concept est large, plus il se prête aux manipulations discursives : l'utilisation abusive du mot "violence" en est l'illustration. Désigner sous un même vocable des situations aussi diverses que les incivilités, massacres, viols, agressions verbales ou inégalités criantes est une forme d'amalgame courante. Appauvrissement du langage ou instrumentalisation d'un concept qui, en développant un sentiment général d'insécurité, masque les réalités socioéconomiques et politiques ?