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Citations de Mathias Enard (928)


Mathias Enard
"Le savoir, en général, et la littérature, en particulier, ont un vrai pouvoir. Lire des livres est une façon d'être libre"
Lire Septembre 2015
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Mathias Enard
Les livres restent, en définitive, avec le feu, la seule façon de combattre les ténèbres.
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La musique est un beau refuge contre l'imperfection du monde et la déchéance du corps.
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Je sais que les hommes sont des enfants qui chassent leur désespoir par la colère, leur peur dans l'amour; au vide, ils répondent en construisant des châteaux et de temples. Ils s'accrochent à des récits, ils les poussent devant eux comme des étendards; chacun fait sienne une histoire pour se rattacher à la foule qui la partage. On les conquiert en leur parlant de batailles, de rois, d'éléphants et d'êtres merveilleux; en leur racontant le bonheur qu'il y aura au-delà de la mort, la lumière vive qui a présidé à leur naissance, les anges qui leur tournent autour, les démons qui les menacent, et l'amour, l'amour, cette promesse d'oubli et de satiété.
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Nos rêves sont peut-être plus savants que nous.
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Poiraudeau avait une petite soif et vida une timbale de rouge, car il méprisait le blanc, dans lequel il manquait, trouvait-il, la part virile. Le vin dépourvu, soutenait-il de ses aspects les plus charnus, les plus musqués, les plus couillus, était un genre d'eunuque, lunaire, lisse, transparent. Si on pouvait voir à travers, c'est qu'il ne cachait aucun mystère.
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Quelle heure est-il ?
Le réveil est la canne de l'insomniaque, je devrais m'acheter un réveil-mosquée comme ceux de Bilger à Damas, mosquée de Médine ou de Jérusalem, en plastique doré, avec une petite boussole incorporée pour la direction de la prière - voilà la supériorité du musulman sur le chrétien : en Allemagne on vous impose les Evangiles au creux du tiroir de la table de nuit, dans les hôtels musulmans on vous colle une petite boussole contre le bois du lit, boussole et rose des vents qui peuvent servir certes à localiser la péninsule arabique, mais aussi, si le coeur vous en dit, Rome, Vienne ou Moscou : on n'est jamais perdu dans ces contrées.
J'ai même vu des tapis de prière avec une petite boussole intégrée au tissage, tapis qu'on avait immédiatement envie de faire voler, puisqu'ils étaient ainsi préparés pour la navigation aérienne : un jardin dans les nuages, avec, comme le tapis de Salomon da la légende juive, un dais de colombes pour se protéger du soleil - il y aurait beaucoup à écrire sur le tapis volant [...]
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Berlioz n'a jamais voyagé en Orient, mais était, depuis ses vingt-cinq ans, fasciné par Les Orientales d'Hugo. Il y aurait donc un Orient second, celui de Goethe ou d'Hugo, qui ne connaissent ni les langues orientales, ni les pays où on les parle, mais s'appuient sur les travaux des orientalistes et voyageurs comme Hammer-Purgstall, et même un Orient troisième, un Tiers-Orient, celui de Berlioz ou de Wagner, qui se nourrit de ces œuvres elles-mêmes indirectes. Le Tiers-Orient, voilà une notion à développer.
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L'être est toujours dans cette distance, quelque part entre un soi insondable et l'autre en soi. Dans la sensation du temps. Dans l'amour, qui est l'impossibilité de la fusion entre soi et l'autre.
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Effectivement, les roumis* se sont approprié le territoire du rêve, ce sont eux qui, après les conteurs arabes classiques, l'exploitent et le parcourent, et tous les voyages sont une confrontation avec ce songe. Il y a même un courant fertile qui se construit SUR ce rêve, sans avoir besoin de voyager, dont le représentant le plus illustre est sans doute Marcel Proust et sa "Recherche du temps perdu", coeur symbolique du roman européen : Proust fait des "Mille et Une Nuits" un de ses modèles - le livre de la nuit, le livre de la lutte contre la mort. Comme Schéhérazade se bat chaque soir, après l'amour, contre la sentence qui pèse sur elle en racontant une histoire au sultan Shahryâr, Marcel Proust prend tous les nuits la plume, beaucoup de nuits, dit-il, "peut-être cent, peut-être mille, pour lutter contre le temps. Plus de deux cents fois au cours de sa "Recherche", Proust fait allusion à l'Orient et aux "Nuits", qu'il connaît dans la traduction de Galland (celle de la chasteté de l'enfance, celle de Combray) et de Mardrus (celle, plus trouble, plus érotique, de l'âge adulte) - il tisse le fil d'or du merveilleux arabe tout au long de son immense roman; Swann entend un violon comme un génie hors d'une lampe, une symphonie révèle "toutes les pierreries des Mille et Une Nuits". Sans l'Orient (ce songe en arabe, en persan et en turc, apatride, qu'on appelle l'Orient) pas de Proust, pas de "Recherche du temps perdu".

*(terme désignant un Européen et signifiant littéralement « Romain »)
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Incipit
Nous sommes deux fumeurs d’opium chacun dans son nuage, sans rien voir au-dehors, seuls, sans nous comprendre jamais nous fumons, visages agonisants dans un miroir, nous sommes une image glacée à laquelle le temps donne l’illusion du mouvement, un cristal de neige glissant sur une pelote de givre dont personne ne perçoit la complexité des enchevêtrements, je suis cette goutte d’eau condensée sur la vitre de mon salon, une perle liquide qui roule et ne sait rien de la vapeur qui l’a engendrée, ni des atomes qui la composent encore mais qui, bientôt, serviront à d’autres molécules, à d’autres corps, aux nuages pesant lourd sur Vienne ce soir : qui sait dans quelle nuque ruissellera cette eau, contre quelle peau, sur quel trottoir, vers quelle rivière, et cette face indistincte sur le verre n’est mienne qu’un instant, une des millions de configurations possibles de l’illusion... p 7
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Je me revois frapper à sa porte, deux battants de bois à la peinture jaunie, les phalanges tout près des trois chiffres de métal, avec l'angoisse, la détermination, l'espoir, l'aveuglement, le serrement de poitrine de celui qui se lance, qui veut retrouver dans un lit l'être deviné sous une couverture à Palmyre et poursuivre, s'accrocher, s'enfuir dans l'oubli, dans la saturation des sens, afin que la tendresse chasse la mélancolie, que l'exploration avide d'autrui ouvre les remparts du soi.
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tous ces moments où l’on se déshabille, où l’on se montre, nu sans rien d’autre que le frémissement de la peau – ces hommes nus par centaines descendus de trains aveugles les vêtements amassés dans un coin de cour l’air glacé soudain les bras qui se croisent les mains qui se portent aux coudes pour vêtir de chair la chair nue marquée en son centre par la tache de naissance des pubis : l’ennemi se précipite toujours sur les vaincus pour les dépouiller, et nous-mêmes nous dépouillions nos ennemis pour de l’argent pour un souvenir pour une arme rare et nos prisonniers avant de les achever, par principe, dans le froid, nous leur ordonnions de se déshabiller parfois pour ne pas tacher ou trouer l’uniforme, la veste qui pouvait toujours servir certes, mais aussi pour jouir du pouvoir de l’homme sur la bête nue, l’homme debout contre la bête glabre et frémissante, et ainsi dérisoires il était plus facile de leur enlever la vie méprisable p 114
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Souvent on souhaite la répétition des choses; on désire revivre un moment échappé, revenir sur un geste manqué ou une parole non prononcée; on s'efforce de retrouver les sons restés dans la gorge, la caresse que l'on n'a pas osé donner, le serrement de poitrine disparu à jamais.
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... et je sus immédiatement que je voulais poursuivre ces travaux-là, c'est à dire des travaux littéraires, des travaux dans cette branche particulière des mathématiques qu'est la littérature, et plus précisément la poésie, qui est l'algèbre de la littérature.
(page 189)
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Quelle alchimie de désir, sorcellerie de luxe ! Pardon, mais je suis certain qu'à la campagne on baise mieux qu'en ville. On est plus libres; on est inspiré par l'orgie continuelle de la nature, la débauche de reproductions, les insectes, les poules, les lapins, les chevreuils, les taillis ou les plantes grimpantes. Ces milliards de copulations constantes vous envahissent. En ville, au contraire, on souffre d'une sexualité de plantes grasses ou de voitures de pompiers. A Paris soit on a le coït haussmannien, soit on copule en klaxonnant comme un chauffeur de Uber.
(page382)
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Le parfum du chant nous emportait [..]
Je sentais la chaleur du corps de Sarah contre moi, et mon ivresse était double - nous écoutions à l'unisson, aussi synchrones dans les battements de nos cœurs et nos respirations que si nous avions chanté nous-mêmes, touchés, emportés par le miracle de la voix humaine, la communication profonde, l'humanité partagée, dans ces rares instants où, comme dit Khayyam, on boit l'éternité.
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Combien faudra-t-il d'œuvres d'art pour mettre la beauté dans le monde?
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La nuit ne communique pas avec le jour. Elle y brûle. On la porte au bûcher à l'aube. Et avec elle ses gens, les buveurs, les poètes, les amants. Nous sommes un peuple de relégués, de condamnés à morts.

p.9
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Un port est un bien bel endroit pour attendre, pour laisser son corps glisser petit à petit dans le voyage, un lieu à la fois terrien, maritime et fluvial, un rocher, une forteresse d'Amérique fondée par Colomb lui-même, un lieu de l'existence duquel on pourrait presque douter s'il n'y avait les mouvements des cargos, des barges, des porte-conteneurs et des grues qui les chargent, de l'aube au couchant dans un ballet besogneux.
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