Citations de Maurice Merleau-Ponty (250)
La vraie philosophie est de rapprendre à voir le monde....
Philosopher, c’est chercher, c’est impliquer qu’il y a des choses à voir et à dire. Or aujourd’hui, on ne cherche guère. On ‘revient’ à l’une ou l’autre des traditions, on la ‘défend’. Nos convictions se fondent moins sur des valeurs ou des vérités aperçues que sur les vices ou les erreurs de celles dont nous ne voulons pas. Nous aimons peu de choses, si nous en détestons beaucoup. Notre pensée est une pensée en retraite ou en repli […] Dans ce monde où la dénégation et les passions moroses tiennent lieu de certitudes, on ne cherche surtout pas à voir, et c’est la philosophie, parce qu’elle demande à voir, qui passe pour impiété
Ne jamais consentir à être tout à fait à l’aise avec ses propres évidences.
(Leçon inaugurale au Collège de France, 1953).
La vraie philosophie est de rapprendre à voir le monde, et en ce sens une histoire racontée peut signifier le monde avec autant de profondeur qu’un traité de philosophie. Nous prenons en main notre sort, nous devenons responsables de notre histoire par la réflexion, mais aussi bien par une décision où nous engageons notre vie, et dans les deux cas il s’agit d’un acte violent qui se vérifie en s’exerçant.
Comme le tisserand donc, l'écrivain travaille à l'envers il n'a affaire qu'au langage et c'est ainsi que soudain il se trouve environné de sens.
Signes, Le langage indirect et les voix du silence
Le philosophe se reconnaît à ce qu’il a inséparablement le goût de l’évidence et le sens de l’ambiguïté.
Le philosophe est l’homme qui s’éveille et qui parle, et l’homme contient silencieusement les paradoxes de la philosophie, parce que, pour être tout à fait homme, il faut être un peu plus et un peu moins homme.
C’est pourquoi tant de peintres ont dit que les choses les regardent et André Marchand après Klee : « Dans une forêt, j’ai senti à plusieurs reprises que ce n’était pas moi qui regardais la forêt. J’ai senti, certains jours, que c’étaient les arbres qui me regardaient, qui me parlaient… Je crois que le peintre doit être transpercé par l’univers et non vouloir le transpercer…J’attends d’être intérieurement submergé, enseveli. Je peins peut-être pour surgir. »
Philosopher, c'est chercher, c'est impliquer qu'il y a des choses à voir et à dire. Or, aujourd'hui, on ne cherche guère. On «revient» à l'une ou l'autre des traditions, on la «défend».
Qualité, lumière, couleur, profondeur, qui sont là-bas devant nous, n'y sont que parce qu'elles éveillent un écho dans notre corps, qu'il leur fait accueil.
Il n’y a pas de vision sans pensée. Mais il ne suffit pas de penser pour voir : la vision est une pensée conditionnée, elle naît « à l’occasion » de ce qui arrive dans le corps, elle est « excitée » à penser par lui. Elle ne choisit ni d’être ou de n’être pas, ni de penser ceci ou cela.
Le peintre « apporte son corps », dit Valéry. Et, en effet, on ne voit pas comment un Esprit pourrait peindre. C’est en prêtant son corps au monde que le peintre change le monde en peinture.
Son concept de Nature n'est souvent qu'une idole à laquelle le savant sacrifie plus en raison de motifs affectifs que de données scientifiques.
Le cogito nous enseigne que l'existence de la conscience se confond avec la conscience d'exister.
La parole est un geste et sa signification un monde.
Phénoménologie de la Perception
Visible et mobile, mon corps est au nombre des choses, il est l'une d'elles, il est pris dans le tissu du monde et sa cohésion est celle d'une chose. Mais puisqu'il se meut, il tient les choses en cercle autour de soi, elles sont une annexe ou un prolongement de lui-même, elles sont incrustées dans sa chair, elles font partie de sa définition pleine et le monde est fait de l’étoffe même du corps. Ces renversements, ces antinomies sont diverses manières de dire que la vision est prise ou se fait du milieu des choses, là où un visible se met à voir, devient visible pour soi et par la vision de toutes choses, là où persiste, comme l'eau mère dans le cristal, l'indivision du sentant et du senti.
Apollinaire disait qu’il y a dans un poème des phrases qui ne semblent pas avoir été créées, qui semblent s’être formées.
Les rencontres mettent au jour dans la vie des possibilités, qui sans elles, se seraient assoupies.
Il y a des fragments de Rodin qui sont des statuts de Germaine Richier, parce qu’ils étaient sculpteurs, c’est-à-dire reliés à un seul et même réseau de l’Être.
La peinture ne célèbre jamais une autre énigme que celle de la visibilité.
La philosophie n'est pas une illusion: elle est l'algèbre de l'histoire.