Rentrée d'hiver 2023 - Mélanie Birgelen présente son premier roman "Nuit nigériane"
Ils voyaient le soleil se coucher sur la ville, sur les toits d’Abuja, ces cubes blancs et gris qui fondaient dans un ciel cramoisi comme de gros glaçons dans un verre de chapman.
Une journée s’achève, une journée ordinaire, dans un pays extraordinaire, difficile à cerner. Une terre ésotérique où pousse une vérité polymorphe et ondoyante. Une liberté de choisir la sienne.
Le mauvais rêve s’effiloche déjà, le pourpre de la mort ne résiste pas longtemps à la pénombre bleutée de sa chambre.
Ils ont un tas de plantes à l'intérieur, ce qui laisse un brin dubitatif – à quoi bon se construire des murs, si c'est pour y convier l’hostile nature et ses nuisibles ?
À travers ses rideaux, elle aperçoit un bout de firmament nocturne, indigo, quelques étoiles en astérisques.
Il se met à transpirer anormalement. Whatsap, instagram, twitter, facebook - ça pullule. Des encouragements mais surtout des insultes, des menaces de mort.
Il s’était inspiré du Nigeria, celui où il avait vécu, de sa beauté, de sa grandeur, de sa frénésie, de ses paradoxes, de sa brutalité.
Le crépuscule s’écroule sur Murtala Mohammed Road, une voie rapide en périphérie d’Abuja, plantée de pylônes électriques. Le châssis d’un tuk-tuk fend l’air serré, ses trois roues raclent le bitume. Les particules de sable et de poussières flottantes, portées par l’ondoiement des combustions, semblent charrier des morceaux de soleil couchant.
C’était l’année du « Yes We Can », Kingsley avait le monde à son pouce, et Olujimi le regardait par-dessus son épaule. Il sentait le déodorant Axe Pulse et c’était l’odeur de l’infinité qui se jouait sous ses yeux.
Les notes d'afrobeats tombent sur leurs vies condamnées comme des météorites filant à toute allure dans la clarté de l'aube. On croirait à la fin du monde ou au début d'un éternel été.