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Citation de Charybde2


L’aveugle pesta sa poésie incommodante jusqu’au bas de la ziggourat évidée. Il pesta contre tout aux environs, les fourrés, les rochers, les flaques et les dénivelés, les embûches, les obstacles, les bourbiers et les remous invisibles, ceux que l’on percevait du coin de l’œil. Il pesta de plus en plus fort, chantant presque contre les portes immenses de la Cité d’Ailleurs, lardées de ronces, qui restèrent closes. Il envoya semonce sur semonce de sa voix rauque et forcée, adressant aux cieux et aux tours, jurons, poings et exclamations, alors que la broussaille, mue d’une étrange volonté, semblait recouvrir ses cris jusqu’à les étouffer – et le voyant s’agiter de la sorte, je comprenais peu à peu pourquoi – jusqu’à ce qu’une loupiote, une âme faible, mais téméraire, remonte la muraille.
– Regarde, luis dis-je.
Je montrai la lueur qui roulait derrière les créneaux écroulés. Lui rit, se moquant de mon doigt, puisqu’il n’y voyait rien. Je le rangeai, honteux, et les portes s’ouvrirent.
À l’intérieur, l’avenue était nue et pleine de méfiance. Elle perçait à travers les tours et les nuraghi, les miradors et les beffrois, colorée par le mauvais temps et la pluie récurrente. Des angles improbables couraient le long des murs boiteux de ce labyrinthe interminable. Les fenêtres clochaient, mal placées. Elles s’accordaient en malheureux vis-à-vis. Des traverses filaient derrière des colonnades, entre les amoncellements de baraques empilées. Les arêtes tombaient, les perspectives fuyaient, avachies les unes sur les autres, déséquilibrées, tordues dans une architecture démente, mais solide, impénétrable et réelle. Si l’on cherchait le ciel, c’était pour s’effrayer d’autant plus des trouées improbables que formaient les cimes des tours.
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