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3.4/5 (sur 5 notes)

Nationalité : Canada
Biographie :

Né en Australie, Michael Rubbo a passé 20 ans au Canada avant de retourner dans son pays d’origine. Il a réalisé plusieurs films qui lui ont valu des prix prestigieux. En avril 1985, il réalise son premier long métrage de fiction : Opération Beurre de Pinottes, tiré du roman qu’il a écrit pour son fils Nicolas. Après, il réalise trois autres Contes pour tous : Les Aventuriers du timbre perdu, Vincent et moi et Le Retour des Aventuriers du timbre perdu.



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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Vincent (onze ans). — Tu sais, maman, pour que le monde soit parfait..
Moi. — Oui ?
Vincent. — Il faudrait d'abord supprimer les moustiques.
Moi. — Tiens !
Vincent. — Et les vipères, aussi.
Moi. — Pourquoi ?
Vincent. — Parce qu'elles font tort aux couleuvres. On les confond, alors quand on voit une couleuvre on dit : Oh ! la sale bête ! C'est vexant. Tandis que s'il n'y avait que des couleuvres, quand on en rencontrerait une on saurait qu'elle ne mord pas, alors on dirait : Oh ! le joli serpent, et elle serait contente. Si je pouvais refaire le monde...
Moi. — Tu le trouves mal fait ?
Vincent. — Non. Mais je ne suis pas difficile.
Moi. — Qu'est-ce que tu supprimerais encore ?
Vincent. — Dans les animaux, pas grand-chose. Par exemple je garderais les lions, les crocodiles...
Moi. — Ah, oui ?
Vincent. — Oui. A cause des explorateurs. Ils n'aimeraient pas que ce soit trop facile, leurs explorations. Ce ne serait plus l'Aventure.
Moi. — Evidemment.
Vincent. — Non, c'est dans les types, tu vois, qu'il faudrait... (geste de faucheur). Ça, oui.
Moi. — Quel genre de types ?
Vincent. — Il faudrait les classifier d'abord. Ceux qui font les guerres, les révolutions, et puis les méchants...
Moi. — Ce ne sont pas les mêmes ?
Vincent. — Pas forcément. Et puis les voraces...
Moi. — Qu'est-ce que c'est, les voraces ?
Vincent. — Ceux qui veulent tout avaler même s'ils n'ont pas vraiment faim. Mais surtout ceux qui font la guerre, tu vois. Dehors et dedans. Je veux dire dans les familles.
Moi. — Tu crois qu'on peut les empêcher tout à fait.
Vincent. — On peut essayer. Il faudrait un œil.
Moi. — Un œil ?
Vincent. — Oui. Dans chaque maison, un œil. Quand il verrait qu'on commence à se disputer, l'œil ferait un peu de musique, pour leur dire de s'arrêter.
Moi. — Et s'ils ne s'arrêtaient pas ?
Vincent. — Il faudrait un Maître des Yeux, qui serait averti par l'électronique, et il leur enverrait des gendarmes très doux qui les raisonneraient.
Moi. — Tu crois qu'il y en a ?
Vincent. — Quoi ?
Moi. — Des gendarmes très doux ?
Vincent. — Ils seraient entraînés. Scientifiquement
Moi. — Tu ne crois pas que c'est contraire à la liberté de conscience ?
Vincent. — La liberté de se disputer ?
Moi. — Oui.
Vincent. — Peut-être. Mais il pourrait quand même y avoir un œil. Bleu.
» Si j'avais assez d'argent pour tout acheter... »
Moi.— Qu'est-ce que tu achèterais ?
Vincent. — Tout. Mais je peux faire comme si...
Moi. — Ah ! oui ?
Vincent. — Oui. Je me dis : je peux tout acheter. Mais je ne suis pas pressé. Alors je n'achète rien. C'est pareil.
Moi. — Presque.
Vincent. — J'aimerais bien aussi assister à la Résurrection.
Moi. — Oui ?
Vincent. — J'aimerais poser quelques questions à un certain nombre de types.
Moi. — Qui ?
Vincent. — Gérard de Nerval. Je pourrais lui demander ce qu'il a voulu dire au juste dans son poème que tu n'as pas pu m'expliquer : suis-je Amour ou Phébus... Maintenant peut-être qu'il n'aurait pas envie de ressusciter pour qu'on lui pose ce genre de question.
Moi. — Peut-être pas.
Vincent. — Peut-être qu'il aurait envie de ressusciter pour être épicier, pour changer.
» A un homme préhistorique, aussi ? Je voudrais lui demander si c'était vraiment magique, les dessins de bisons, tu sais, dans les grottes... Je le ferais apparaître ici et je lui demanderais. Non, peut-être pas ici, parce qu'il aurait peur des autos. Dans une prairie, pour ne pas le dépayser. Et je le ferais interviewer par des hommes habillés avec des peaux de bête, pareils que lui. Par exemple il ne faudrait pas les prendre trop gringaletsl
» Je me demande si un homme préhistorique, qui aurait vu le monde de maintenant, tu sais, les autos, la télé, tout ça, il aimerait mieux vivre à notre époque, ou retourner aux cavernes. Les diplodocus et les plésiosaures, c'est pas drôle. Mais les autos, la nuit, le cancer, c'est pas drôle non plus. »
Moi. — Qu'est-ce que tu lui conseillerais ?
Vincent. — Finalement, tu vois, je crois que je lui conseillerais les diplodocus. Seulement je lui filerais un paquet d'allumettes, s'il n'avait pas encore découvert le feu, et puis peut-être une flûte.
Moi. — Ça dérangerait l'histoire du monde.
Vincent. — Tu crois ?
Moi. — S'il n'a pas encore découvert le feu, et que tu lui donnes des allumettes tu lui fais sauter des années de réflexion, tu comprends. Il vaudrait peut-être mieux le lui laisser découvrir tout seul.
Vincent. — Oui, mais en attendant de l'avoir découvert il aurait froid.
Moi. — Ah ! évidemment.
Vincent. — Peut-être qu'il s'en ficherait, de le découvrir lui-même, s'il avait vraiment froid.
Moi. — Peut-être.
Vincent. — Peut-être, je ne veux pas critiquer, remarque, mais peut-être le bon Dieu il aurait pu le lui donner au départ, le feu. La flûte, je ne dis pas, quoique le soir, comme ça, sans électricité, ce serait agréable d'avoir un peu de musique. Mais le feu ! Quand tu penses qu'il y a eu des hommes qui ne l'ont jamais connu. Tu te rends compte ? Ça me fait froid rien que d'y penser.
Moi. — Il y a encore beaucoup d'hommes qui manquent de tout, tu sais.
Vincent. — Oui, mais ils savent que ça existe.
Moi. — Tu crois que c'est une consolation ?
Vincent. — Je ne sais pas. Quand même ils auraient pu se dire, les hommes préhistoriques : un jour il y aura le feu...
Moi. — Mais alors ils n'auraient pas eu à l'inventer.
Vincent. —Est-ce qu'on est sur la terre pour inventer ?
Moi. — D'une certaine façon.
Vincent. — On en reparlera
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Juanito, fils de Dolores, trois ans.
Moi (faible et conciliante). — Il n'aime peut-être pas la musique ?
Dolores (indignée). — Lui ? Il n'aime pas la musique ? Vous allez voir !
D'un revers de main elle arrache le chat à son rejeton (qui l'enfournait patiemment dans un sac en plastique), plante Juanito sur ses pieds, lui crie : « Olé ! » et entonne un chant sauvage. Docile, l'enfant claque des doigts et saute sur place, sans perdre sa gravité héréditaire. Dolores le contemple un instant avec ravissement, puis l'empoigne, le couvre de baisers, lui suce la joue, et s'apercevant qu'il est tout mouillé, le rejette du même mouvement sur le sol.
Dolores. — Oh ! mon amour ! oh ! l'horreur !
Juanito retombe sur le sol comme un petit coussin, rattrape le chat du même mouvement et recommence à le fourrer dans le sac, que je reconnais au même instant pour être celui de mon éponge.
Moi. — Dolores ! C'est mon sac à éponge 1
Dolores (très ferme). — De toute façon, votre éponge est perdue. Qu'est-ce que nous disions ? Ah oui, Cristina. C'est la honte de l'Espagne.
Moi. — A cause des Portugais ?
Dolores. — Oh ! non. Ça encore... Elle est un peu simple, vous savez. Alors elle ne s'aperçoit même pas qu'elle change. Elle ne sait ni lire ni écrire.
Moi. — Evidemment, c'est une explication.
Dolores. — Mais ce n'est pas une excuse à tout. L'honnêteté, ça ne s'apprend pas, c'est dans le sang, comme la danse. Et Cristina n'est pas honnête.
Moi. — Ah ! non ?
Dolores. — Non. Elle vole même ses amis. Et elle ne sait pas recevoir. Faites-lui un cadeau, ça la chiffonne. Mais voler, oui. Ça laisse libre. J'ai bien ri quand elle s'est trouvée enceinte. Je lui ai dit : « Cette fois tu ne peux pas le refuser, le cadeau ! »
Rire argentin d'Alberte derrière la porte. Dolores bondit.
Dolores. — Petite misérable ! Tu nous épies ! Tu écoutes aux portes ! Je vais te couper les oreilles Je ne te donnerai pas à déjeuner ! Je...
Alberte (froide, dédaigneuse, un peu pâle, tient tête à l'orage). — Tu es bien obligée, rétorque-t-elle, sachant ce qu'elle déchaîne.
Dolores (dans un paroxysme). — Comment, je suis bien obligée ! Est-ce que tu sais ce qu'elles gagnent à Marseille, les Espagnoles ? Des 100 000 francs, et plus, et elles ont leur week-end, et elles ont la télé ! Si je reste ici, c'est à cause de ta pauvre maman 1
Alberte (ne cédant pas d'un pouce). — Tu es quand même obligée de me donner à manger.
Dolores (folle). — Je ne suis obligée à rien ! Je fais ce que je veux ! Et pourquoi, d'abord, que je suis obligée ?
Alberte (digne). — Parce que je suis un enfant.
Un moment stupéfaite devant cet argument, dont le bien-fondé la frappe, Dolores tout à coup laisse tomber son ire comme un masque, et éclate de rire.
Dolores (me prenant à témoin). — Quel amour cette petite !
Elle l'enlace, la couvre de baisers. Alberte se laisse faire, calme, comme le boxeur qui après un K.O. reçoit l'ovation importune, mais inévitable, de la foule. Le chat étouffe dans son sac de plastique. Juan entreprend de s'asseoir dessus.
Dolores (tout attendrie). — Voyez-les, s'ils sont gentils tous les deux.
Moi. — Je crois que le chat va étouffer.
Dolores. — Mais non, mais non... Tenez, je les sépare. Toujours à vous en faire pour tout le monde ! (Dans un élan.) Le mois prochain quand vous me paierez, je vous en achèterai une sur mon argent, d'éponge !
Moi. — Merci, Dolores.
Je sors de mon bain devant la foule qui a reparu, renonçant à trouver au fond de la baignoire un abri contre les vicissitudes de la vie.
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Qui est Vincent ? Il a quatorze ans maintenant, mais pour moi c'est encore un petit garçon. Mon petit garçon. Mon second fils. L'aîné c'est Daniel, vingt ans cette année. Il y a aussi Alberte, onze ans, et Pauline, neuf ans. Mes enfants,
Le petite phrase que l'on me dit le plus souvent, je crois, c'est celle-ci : « Comment arrivez-vous à écrire ? » ou « Je vous admire d'arriver à écrire avec ces quatre enfants. » Ceux qui me posent cette question sont en général les mêmes qui, un instant après, me demandent de faire une conférence à Angoulême, de lire le manuscrit de leur cousin, de rédiger un article « qui ne me prendra qu'un instant » sur Mme de La Fayette ou la vie de Flaubert.
Je ne sais que répondre. Je dis platement : « C'est une question d'organisation. » Que voudriez-vous que je dise ?
La seconde petite phrase, teintée parfois d'une certaine admiration sportive, parfois d'une indulgence ironique, c'est : « Ce doit être commode d'avoir la foi » ou « Je vous admire d'avoir... » ou « Vous avez de la chance d'avoir... »
Je ne sais que répondre. Je dis platement : « Pas si commode. » Puis un remords me prend : « Oui, commode, dans un sens. »
Je ne sais pas répondre aux questions. Ou plutôt, je ne sais répondre aux questions que par des images. Je regarde mes enfants, mon travail, ma foi. Je me dis : « Les voilà », comme on se dit devant le miroir : « Voilà mon visage. » Aux autres de le définir. Moi, les définitions...
Le jour où j'ai eu avec Vincent une conversation que j'ai notée, parce qu'elle m'amusait, nous étions allés prendre le thé près de Saint-Séverin, dans le pub anglais où il y a de si bonnes tartes au citron. Ce n'était pas pour le récompenser : il ne l'avait nullement mérité. C'était parce que nous avions envie de parler, tout simplement. Vincent à onze ans : mauvais élève, turbulent, indiscipliné, casse-cou escaladant des échafaudages, âme tendre fondant en pleurs pour un mot de reproche, bricoleur impénitent toujours couvert de colle et de peinture, dévorant des livres de sciences naturelles et Arsène Lupin ; parfois un peu pédant, sale comme un peigne, les plus beaux yeux du monde et des connaissances en théologie. Lui non plus, je ne le définis pas.
Qu'il eût envie de parler avec moi « si on allait prendre quelque chose, pour parler un peu tranquillement ? » c'était un moment coloré de ma vie, un de ces moments qui en contrepoint à beaucoup de manuscrits lus et de vaisselles faites, forment le fil conducteur de notre vraie vie, de ce qui a compté vraiment, et n'est pas toujours le plus important, en apparence. Le jour où Alberte a joué pour la première fois en public (du piano) et le jour où en sortant de la maternelle, elle a enlevé un petit garçon ; le jour où Pauline a dit pour la première fois : « Je dîne en ville » (elle avait cinq ans !) et le jour où elle a eu un prix d'orthographe : elle avait, ce jour-là, un tablier neuf et un tel air d'enfant bien élevé ! Le premier poème de Daniel et sa première beuverie, et le jour où il a acheté son saxophone et où nous sommes restés tous figés d'admiration devant l'instrument étincelant dans son écrin de velours frappé, et le jour où, immergé dans la baignoire, entre une cigarette posée sur le rebord et un petit four entamé dans le porte-savon, il m'a dit : « Cette nuit j'ai fait un rêve formidable. J'avais fait un très grand et très dangereux voyage, et je revenais au milieu des bravos épouser une fille merveilleuse. » Toute la simple jeunesse du monde, celle des chansons et des poèmes qui depuis les Croisades s'élance toujours avec la même joie, brillait dans ses yeux, qui sont grands et verts. Voilà des moments qui sont bien liés à la joie d'écrire. A la joie de croire. D'autres sont liés à la peine de croire et d'écrire. Tout cela ne fait qu'un. Mais est-ce que cet « un » répond aux deux petites phrases ?
Ce soir-là j'ai dit à Jacques :
— Tu devrais nous peindre. Faire un grand tableau avec toute la famille. Nous deux, et puis les enfants, les animaux, Dolores. Tous les peintres font ça. Selbs-bildnis. L'artiste et sa famille.
— L'ennui, c'est que je ne suis pas figuratif en ce moment, a-t-il remarqué en mâchonnant sa pipe.
— Bon, bon. C'est toujours pour moi toutes les corvées...
— Quelle hypocrisie !...
Je vais faire un tableau. Est-ce que les images répondent aux questions ?
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Moi. — Dolores, je prends un bain.
Dolores. — Oh ! ça ne me gêne pas.
Elle s'installe sur un tabouret, me tournant le dos, concession à ma pudeur et à la civilisation.
Dolores. — Une cigarette ?
Moi. — Je veux bien.
Elle allume deux cigarettes, m'en donne une. Le désordre de la salle de bains est épique. Par les vitraux décolorés toute la maison d'en face m'observe à l'aise. Ces vitraux ont été peints il y a douze ans, avant notre mariage, à l'époque où Jacques berçait nos amours naissantes de belles promesses. Je nourrissais alors l'illusion que, remarquable bricoleur, il allait me faire vivre dans un univers digne des Arts ménagers.
Dolores. — Je profite de ce que vous vous baignez pour me reposer cinq minutes.
Je n'ose lui dire que c'était aussi mon ambition.
Dolores. — Hier j'ai lavé un tas de linge haut comme un homme. C'est qu'ils savent salir, les enfants ! Et hier soir j'ai fait une java ! Aujourd'hui je n'ai rien à faire, alors je suis triste. Dans ma famille on n'aime pas s'arrêter.
Moi. — C'est pourtant agréable de s'arrêter, parfois.
Dolores. — Est-ce que vous vous arrêtez, vous ?
Moi. — Mais... j'essaie.
Dolores. — Vous lisez, même dans votre bain.
Moi. — Ce n'est pas pareil.
Dolores. — Si, c'est pareil ! Moi, quand je bouge c'est comme si je pensais.
Je n'ai pas dormi de la nuit, ça m'a fait du bien. On a été d'un café à l'autre, en parlant, avec des Espagnols.
Moi. — Tu ne vois que des Espagnols ?
Dolores. — Des Espagnols ou des Marocains. On se comprend, pourquoi changer. Cristina, elle, ne fréquente que des Portugais. Comme ça, elle sait au moins quelle est la nationalité de son fils, si elle ne sait pas qui est son père.
La salle de bains s'est peu à peu remplie d'une foule discrète. Juanito1 joue par terre avec la laisse du chien, qu'on cherchera en vain tout à l'heure. Pauline explore ma trousse de toilette et se couvre de talc. Alberte écoute la conversation. Le chien et le chat Taxi se bagarrent gentiment.
Alberte (intéressée). — Elle ne sait pas qui est le père de qui ?
Dolores passe tout à coup d'un ton grave et contenu à un fausset suraigu, typiquement espagnol. Elle hurle, sans toutefois que son beau grand visage roman s'anime :
Dolores. — Voulez-vous laisser votre maman tranquille, petites andouilles ?
Un brutal reflux se produit sur le forum. Le chien sort en trombe, renversant Pauline qui s'effondre au milieu d'un nuage de talc. Pleurs. Alberte bat en retraite derrière la porte, l'oreille au guet. Juanito s'empare du chat.
Dolores (allumant une autre cigarette). — Ces enfants ! Il faut tout de même qu'ils soient bien élevés, non ? Juan a été sage cette nuit ?
Quand Dolores veut faire « la java », elle me confie Juan, beau bébé grave, un peu morose, d'une dignité tout espagnole, qui se love entre Pauline et Alberte dans un creux du lit, et y subit, résigné, les baisers passionnés de mes deux filles.
Moi. — Très sage.
Pauline (réapparue par miracle, toute blanche des pieds à la tête, voix aiguë). — Il n'a pas été sage du tout, je lui ai dit : « Dors mon petit chéri », et je lui ai chanté une berceuse, et alors il a crié fort, fort, et Alberte elle m'a pincée.
Alberte (de derrière la porte). — Elle lui chantait dans les oreilles !
Pauline (sanglotant avec rage). — Non ! Non ! C'est pas vrai 1
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Même s’il était tôt, ce matin-là, la cour
de l’école était déjà pleine de monde. Peutêtre
parce qu’il faisait beau. Les jeunes
s’adonnaient à leurs activités favorites en
attendant que la cloche les appelle en
classe. Il y avait Rufus, par exemple, qui se
donnait des airs de vedette avec ses lunettes
de soleil. Assis à l’ombre d’un arbre, sur
un banc de bois vert, il grattait sa guitare…
Il était en train de composer un autre de ses
grands succès qu’il destinait au marché
américain. Douze ans à peine, et bientôt
célèbre ? Il chantonnait…
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Les élèves s’installèrent bruyamment à
leurs pupitres respectifs. Pour sa part,
Tommy était déjà prêt à l’attaque. Assis
sur son pupitre, bien en vue de tous
— c’était la place qu’il préférait — Tommy
sortit ses paquets de timbres et les brandit
dans les airs.
— Eh, les amis, regardez ça !
Avec son petit sourire goguenard, sa
voix ferme, ses allures de chef, Tommy
n’eut aucune difficulté à attirer l’attention.
Les garçons et les filles de sa classe le
craignaient et l’admiraient à la fois. Plusieurs
l’entouraient déjà.
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Pauline. — Est-ce que tu aimes papa ?
Moi. — Oui.
Pauline. — Pour toujours ?
Moi. — Mais oui.
Pauline. — Comment est-ce que tu peux être sûre ?
Moi. — ...
Pauline. — Peut-être tu te diras tout d'un coup : il a un trop grand nez.
Moi. — Mais je n'aime pas papa à cause de son nez 1
Pauline. — Moi, oui. J'aime beaucoup son nez. Mais peut-être je changerai d'idées.
Moi. — Et qu'est-ce que tu feras alors ?
Pauline. — Oh ! Pauvre papa ! Je ferai semblant.
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Dolores, passant à Francfort au cours de ses tribulations, y a acheté deux gaines-culottes, pour l'amour de la beauté, car elle déteste porter une gaine. Ces gaines sont noires, incrustées de papillons roses qui volettent Dans un grand élan : « Tenez, prenez-les ! Je ne les ai jamais portées. Ce sera encore plus joli sur une blonde. » Je les porte.
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Mal en train
Michel est mal en train. En fait, il se sent si mal en train qu'il traîne de la patte. Non pas qu'il a mal à la patte, mais il a mis son train-train quotidien en petite vitesse. Le plus drôle, c'est qu'il n'a vraiment aucune raison de se sentir aussi déprimé. La saison de soccer bat son plein et il est l'étoile incontestée de son équipe. Son meilleur ami, Conrad, un jeune Chinois au visage tout rond et aux yeux vifs, est toujours avec lui. Alors, dites-moi, qu'est-ce qu'un garçon peut demander de plus à la vie que d'avoir un bon et fidèle ami ? Vraiment, Michel n'a aucune raison de se sentir triste, surtout que le printemps montre le nez et que c'est précisément la saison pour se sentir heureux, particulièrement après le dur et long hiver de Montréal.
Mais pourquoi Michel est-il si mal en train ? D'abord, sa mère est à l'autre bout du monde, quelque part en Australie et il s'ennuie. Deuxièmement, il y a sa soeur Suzie.
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Le responsable de la confusion sourit
timidement. C’était Connie, en effet. Son
casque protecteur bien calé jusqu’aux
oreilles, il venait de faire son apparition
dans la cour de l’école sur son inévitable
planche à roulettes géante. Mais personne
n’eut le temps de lui tomber sur le dos,
parce qu’un autre bolide, encore plus impressionnant,
arriva à son tour.
Monté sur sa bicyclette, Tommy se rua
vers un groupe d’enfants. Yeux noirs, cheveux
noirs, sourire effronté de celui à qui
le monde appartient… en tout cas, au
moins la cour de l’école… Tommy sauta
prestement de sa bicyclette et la laissa
tomber sur le sol avec fracas. Aussitôt,
un groupe de garçons l’entourèrent en
essayant à qui mieux mieux d’attirer son
attention.
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