Si l'on commence par le Nord, l'Estaque est le premier nom qui vient à l'esprit. L'Estaque : les baraques à chichis, les barques des jouteurs, les villas mauresques des capitaines à la retraite, la rocaille irrémédiablement souillée par les usines au-dessus du paradis prolétarien de Robert Guédiguian. Ou ce qu'il en reste. L'Estaque de Cézanne, de Braque, de Dufy. De Zola.
Mais, comme on est un simple touriste, comme on aime à rester dans l'imprécision de la littérature, on se contentera, à partir du quai de Rive-Neuve, le quai de l'ancien bagne, de monter jusqu'à l'entrée du jardin Pierre Puget, en haut du cours du même nom, où l'on s'arrêtera devant la statue du sculpteur à son œuvre et la plaque où est gravée cette strophe des Phares de Baudelaire :
« Colères de boxeur, impudences de faune,
Toi qui sus ramasser la beauté des goujats,
Grand cœur gonflé d'orgueil, homme débile et jaune,
Puget, mélancolique empereur des forçats. »
Entre Orrorin tugenensis, le premier bipède avéré et Constantin Edouardovitch Tsiolkovski, il y a environ 6 millions d'années. Entre le projet de fusée de ce génial physicien (il était à la fois sourd et autodidacte) et l'arrivée d'un équipage américain sur la Lune, il y a 171 ans à peine. L'histoire s'accélère et le mouvement semble tendre vers toujours plus d'élévation.
Cependant, la langue provençale a bien été à Marseille, des siècles durant, la langue parlée, souvent exclusivement, par toutes les classes sociales.
Tout homme qui marche est porteur de regrets et de tourments qui lui sont propres . Il ne manquerait plus que quelques pas ,ou quelques mots jetés sur le papier, l'en débarrassent.
Le monde est un mirage et ceux qui paraissent s'y attacher ne sont que des ombres.