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Citations de Michel Moutot (82)


Quand j'avance sur ma poutre, au-dessus de Manhattan, quand j'assemble à la main les pièces de leur cathédrale d'acier, je ne suis pas dans leur univers, mais dans le mien. Je marche là où personne n'a marché avant moi. Dans le ciel. Avec les aigles.
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Les gens sur le chantier ne comprenaient pas que je puisse marcher aussi facilement sur les poutres, certains ont commencé à dire que je n'avais pas le vertige parce que j'étais indien. Cette ânerie que disent certains à Québec est arrivée jusqu'ici, je ne les ai pas contredits.
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En algonquin, kébec signifie "là où le fleuve se rétrécit ".
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Il paraît que nous sommes des dizaines de Mowaks des Six Nations à Ground Zéro. Et des centaines se préparent à descendre. Ces tours, nos pères les ont bâties; elles sont à nous. Nous devons être là, aux premiers rangs, pour leurs funérailles.
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Pour les Mohawks, dont le sort est lié à la grande voie d'eau, descendre le fleuve et passer sous les arches de métal symbolisait le passage à une ère nouvelle. Ils l'observaient avec un mélange d'admiration et d'appréhension : le pont était la porte d'un monde inconnu, sa présence signifiait que le leur allait être bouleversé et qu'ils allaient à nouveau devoir s'adapter. Le pont Victoria annonçait la fin prochaine des bateaux de transport, la disparition des radeaux de rondins, la victoire de la roue sur la pagaie, l'unification du pays, le chemin de fer, le raccourcissement des distances, l'industrialisation, le triomphe à venir d'une société blanche, étrange et, vue de la berge à Kahnawake, toujours menaçante.
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Le plus haut bâtiment de l'hémisphère Nord. Un nouveau phare pour la démocratie. Hommage aux héros, au courage de l'Amérique. Quand l'antenne sera posée, il atteindra 1 776 pieds, pour rappeler l'année de la Déclaration d'indépendance.

(la Liberty Tower)
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"Pour nous les monteurs d'acier indiens, ces gratte-ciel seront nos pyramides d'Égypte, notre Empire State Building, nos chefs d'œuvre. Nos pères, nos grands-pères, et leurs ancêtres avant eux ont bâti les ponts, les villes, les monuments de l'Homme blanc. Les passerelles, les montagnes de fer, les cités de l'Amérique. Avant l'invasion de nos terres, nous étions des charpentiers, des bâtisseurs de longues maisons. Quand les anciens ont compris qu'ils ne pourraient pas vaincre les envahisseurs venus de l'Est, ils ont gagné par leur travail, leur sueur, leur courage et leur sang leur place dans ce nouveau monde. Nous en sommes fiers. Nous n'avons que faire de leur sentiment de culpabilité qu'ils rachètent par des allocations, des détaxes sur les cigarettes ou des licences pour l'ouverture de casinos. Un ironworker ne vit pas de charité. Quand j'avance sur la poutre, au dessus de Manhattan, quand j'assemble a la main les pièces de leurs cathédrales d'acier, je ne suis pas dans leur univers mais dans le mien. Je marche où personne n'a marché avant moi. Dans le ciel. Avec les aigles" (P. 516)
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Je n'ai jamais été très assidu aux cérémonies dans la longue maison et je ne crois pas plus que ça aux enseignements de Handsome Lake, mais, face à une calamité pareille, tout ce qui peut réconforter est bon à prendre. Je sais que les miens ont fait brûler pour moi des feuilles de tabac que nos cultivons dans le jardin. La fumée qui monte dans le ciel, c'est une façon d'entrer en contact avec le Créateur, de le remercier et de lui demander son aide.
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Dans la région, il ne reste plus un indien ou presque. Ils ont été chassés vers le Nord par des traités cent fois rompus, des guerres, des tueries, et la peur des maladies apportées par les blancs. Mais pour toujours, les Adirondacks, ce sont nos montagnes.
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- Tu vois, fils, j’ai toujours regretté d’être né cent ans trop tard. Ces voitures qui pétaradent, ces usines et ces conserveries de sardines qui empestent l’atmosphère, ce n’est pas pour moi. Tu vois ce paysage ? Tu imagines la tête des premiers gars qui ont découvert ce coin ? Et là ils massacrent la montagne pour tracer à coups de dynamite une route le long de la côte, pour attirer les touristes et les promoteurs. Je ne l’ai jamais vu, ce Mormon, mais à sa place je ne serai pas ravi non plus de voir arriver les bulldozers.
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Les travaux avancent inexorablement, à coups de dynamite et d’engins mécaniques à vapeur. Une centaine de barbares violent chaque jour sa propriété, défigurent ce paysage unique, comblent des canyons, jettent des ponts, font s’effondrer dans l’océan des pans de montagne. Ils menacent d’envahissements cette côte sauvage et l’existence même du ranch Rock.
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Les suspensions du Golden Gate Bridge seront posées, la Porte d’Or sera franchie. Le planning de l’ingénieur en chef Joseph Strauss, qui a jusqu’ici été tenu, voire devancé, prévoit une inauguration de l’ouvrage avant l’été 1937.

Vues de la berge, leurs silhouettes graciles se détachent sur le bleu dur du ciel de mai. Bridgemen et ironworkers, les meilleurs spécialistes de la construction d’ouvrages métalliques sont venus de tout le pays pour participer à ce chantier dont tout le monde savait, avant le premier coup de pioche, qu’il entrerait dans la légende.

p. 85-86
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Dans un coin de la salle, sur une estrade de bois brut, les Rock Islanders, l'orchestre d'Alcatraz (folklore de l'Ouest, chansons populaires) ont entamé une répétition. C'est un privilège, réservé aux détenus exemplaires, de pouvoir rompre la monotonie des journées d'enfermement sur "le Rocher" en jouant de la musique. (..)
Les sept premiers mois de son séjour, à cause de sa réputation, de sa légende imprimée aux quatre coins du pays, six ans après le massacre de la Saint-Valentin, Al "Scarface" Capone avait été placé à l'isolement, surveillé vingt-quatre heures sur vingt-quatre par des gardiens triés sur le volet, patronyme aux consonances italiennes interdit. Mais comme le disait à qui voulait l'entendre le directeur, le bon air de la baie et un règlement strict semblaient avoir transformé le loup en agneau, et, après Noël, il avait reçu l'autorisation de faire venir une mandola, grande mandoline sicilienne, et de participer une fois par semaine aux répétitions.
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... j'ai hâte de retourner à Ground Zero, Andy aussi. L'espoir, même ténu, subsiste. Pompiers, flics et sauveteurs ont besoin qu'on découpe pour avancer vers le cœur des décombres. Comme des combattants quittant le front après des semaines acharnées, je me rends compte que le retour à la vie ordinaire est déroutant, frustrant, décevant. Difficile de l'avouer, d'expliquer l'intensité des émotions, l'importance des enjeux, la force des sentiments. Je ne le sais pas encore, mais Ground Zero a commencé à agir sur certains d'entre nous comme une drogue.
«Dedans» c'est dur, épuisant, effrayant, dangereux, mais nous nous sentons plus qu'utiles : indispensables, admirés, investis d'une mission patriotique, sacrée, presque divine ! Difficile, presque douloureux de s'en éloigner. «Dehors», une fois passée la joie de retrouver les siens, la vie ordinaire semble fade, mièvre, médiocre, sans importance. «Ils ne savent pas, ne peuvent pas comprendre. Il faut avoir vu.»
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De sa sacoche en cuir, Joe Rochelle sort une feuille de papier cartonné qu'il déplie et dont il lit les premières lignes. «Aux voyageurs canadiens : les voyageurs sont informés que les dispositions suivantes ont été prises pour leur permettre de voir Le Caire et les pyramides aux frais du gouvernement de Sa Majesté.»
Suit le programme d'une journée de tourisme de luxe, avec train spécial à destination du centre-ville, voitures à chevaux pour la visite du pont de Ksar et Nil, la place Abdin, le palais, la mosquée du sultan Hassan, avant le bazar et les jardins d'Esbekiya.
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Trente hommes viennent d’être embauchés, dont cinq Noirs venus de la Nouvelle-Orléans, des as du marteau-piqueur à ce qu’on dit. Pas de place pour eux aux river camp, l’administrateur a été formel.
S’ils veulent bosser, ils feront des allers-retours entre Vegas et le chantier tous les jours. Même paie que les autres, on n’est pas dans le Mississippi, mais ils se démerdent pour manger. Seaux d’eau séparés. On ne va quand même pas boire dans la même louche que des negroes, pas vrai les gars ?

p. 207
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Une grande main se pose sur mon épaule. Je me retourne. Wild Bill Cooper, le meilleur ami de mon père. Je ne l'ai pas vu depuis des années. Ses cheveux ont blanchi, ses épaules de colosse se sont voûtées, les rides de son visage, qui entourent un grand nez d'aigle, se sont creusées. Il s'appuie sur une canne, plie à peine le genou droit. Son regard brille toujours de cette flamme qui m'impressionnait et m'effrayait lorsque j'étais enfant.
« John, petit, c'est bien que tu sois là. Je savais que, ce jour maudit, si tu étais à Manhattan, tu descendrais au Trade Center avec un chalumeau. Et que tu ne serais pas seul. Ce sont les tours de ton père. Ici, quand nous les avons vues s'écrouler, d'abord nous sommes restés pétrifiés devant la télé. Puis nous avons appelé les fils, les neveux, les jeunes. Au Canada et ailleurs. Nous leur avons dit : prenez vos outils, les chalumeaux et partez pour New York. Les twin towers sont à nous. C'est nous qui les avons construites. À vous de les mettre en terre. Et de marcher dans le ciel, de boulonner les poutres, d'honorer les ancêtres quand il sera temps de les reconstruire. »
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A partir d'ici, la chaussée, les trottoirs, les voitures, les arbustes, les lampadaires, les panneaux, les poubelles, tout disparaît sous dix centimètres de cendres grises, fines comme du talc. Un paysage d'hiver nucléaire, un fim de science-fiction. Un Pompéi moderne. Comme les jours de neige sur New York, la rumeur de la ville a disparu. Le silence est si profond qu'il bourdonne dans mes oreilles. Je n'entends pas le bruit de mes pas ; le mélange de poussière, de cendres, de feuilles de papier et de béton pulvérisé étouffe tout.
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Il a fallu bâtir trente-deux ponts, faire sauter des pans de montagne et s'abîmer dans l'océan des dizaines de machines, aplanir des collines, creuser défilés et tunnels pour mettre ce point final à la conquête de l'Ouest. Les Dodge et les Caterpillar ont remplacé les lions des montagnes et les mustangs, les derniers grizzlys se terrent au fond des canyons, survolés par les condors de Californie que des chasseurs venus des grandes villes vont bientôt exterminer. Des motels, des stations-service et des parcours de golf vont pousser le long de la route, les touristes vont accourir de tout le pays pour découvrir ces grandioses paysages, les bus des Greyhound Lines vont relier en quelques heures Los Angeles à San Francisco.
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– Vous tous, asseyez-vous. Toi, approche.
Raclements de chaises. Paolo fait un geste vers la panière. Aldo, de la tête, lui fait signe de ne pas bouger. Enzo joint ses mains pour contenir des tremblements de rage. Ana s’avance vers son père, esquisse un sourire. Elle s’apprête à l’embrasser quand don Salva lui donne un coup de poing sur la joue droite. Ana s’écroule, hurle de surprise et de douleur.
Carla se précipite pour s’interposer.
– Toi, dehors!
Ana pleure, hoquette, saigne au coin de la bouche. Elle tente de se redresser mais une gifle la cloue au sol. Elle est incapable de parler ou respirer. Son père se penche vers elle, l’attrape par les cheveux, la relève, l’assied de force sur une chaise. Elle s’effondre sur la table, sanglote, les mains sur les oreilles pour parer de nouveaux coups. Il tonne, de sa voix grave à l’accent rocailleux des montagnes.
– Puttana! Salope! Traînée! Ton cousin avait raison! Pas encore dix-neuf ans et déjà le vice au corps ! Je sais ce que tu as fait hier soir, où tu étais. Tu devrais savoir que rien ne m’échappe à Trapani. Je suis sûr que c’était ce pêcheur de merde, ce pouilleux de Marettimo. Lui, il est mort. Tu m’entends? Mort! Tu as déshonoré ta famille. Ma seule fille! Tu m’as déshonoré. Avant ce soir, toute la ville saura qu’Ana Fontarossa, la fille de don Salvatore Fontarossa, le fontaniero, est une garce qui se fait prendre dans la cale d’un bateau comme une putain du port. Pire qu’une puttana, parce qu’elle, au moins, elle fait ça pour manger!
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