Régine
Anne SINCLAIR annonce l'invitée du jour, RÉGINE, puis présente les invités qui vont débattre de sa personnalité :
Christiane COLLANGE,
journaliste et éditorialiste à France Soir,
Françoise SAGAN, écrivain,
Louis NUCERA, écrivain,
Edgar SCHNEIDER, chroniqueur à Jours de France, et
Michèle PERREIN,
journaliste et écrivain. L'émission débute par un autoportait conçu par RÉGINE....
J’ai été bouleversée par les larmes de ma mère. C’était la première fois que je me sentais en insécurité. Si une grande personne, ma mère à moi, pleurait, jamais on ne serait à l’abri de rien. Et je pleurais les larmes de maman qui me serrait contre elle sans comprendre que c’était sa peine qui m’étouffait.
Je pense à Katherine Mansfield. Oui, plantée sur ma terrasse comme la sentinelle de je ne sais quel conflit, face à ce travail qui m'absorbe mais ne m'abstrait pas du monde, je ne fais que penser à elle. Elle est née en Nouvelle-Zélande, ce n'est pas si loin après tout, et puis elle a couru comme je le fais aujourd'hui, Véritable rat empoisonné, dans tous les coins, pour voir comment étaient les gens. Elle y a trouvé des petites joies sur le fond de tristesse. (Julliard, 1971, p. 224)
A mes propres yeux, j'avais besoin de me reconstituer, de savoir une fois pour toutes si j'étais accessoire ou être humain. Une femme, un homme, pour moi, il fallait que ce soit la même chose. Je pouvais vivre en mauvais état. Je ne pouvais pas vivre niée. (Julliard, 1971, p. 170)
Déjà à Paris, autrefois, je grimpais sur ce qui se présentait: Tour Eiffel, Génie de la Bastille, Arc de Triomphe, Notre-Dame. C'était une manière de remettre les choses dans leurs proportions. Il n'y a pas foule sur les sommets . (Julliard, 1971, p. 160)
A droite, à gauche, une femme reste une femme : sa place est mesurée. Il n'y a pas de différence pour moi entre une femme d'Hanoï qui meurt sous une bombe américaine, une femme de Saigon qui meurt sous une bombe vietcong et la jeune fille qui vient de laver ses longs cheveux noirs au bord de l'eau. Rêveuse, lente, douce, elle les a rincés trois fois. Sa bombe à elle, qui la lui lancera ? J'en ai assez des histoires d'hommes. Pour eux il y a de bonnes bombes et de mauvaises bombes. (p. 87)
J'ai décrit ce livre , avec minutie,la violence qui est faite aux femmes dans la rue, violence simple et impunie si elle ne va pas jusqu'au viol (et encore le viol doit-il se prouver). J'ai dit les attaques larvées, sournoises, les mains au panier- à la vulgarité du geste correspond la vulgarité du terme- j'ai dit la complicité des hommes appelés normaux lorsqu'on raconte devant eux ces histoires de mains baladeuses.
Il y a des moments obscurs dans la vie, complètement opaques même, où l'on est sûr d'accomplir ce qu'on va accomplir, tout en sachant qu'une prudence devrait faire tourner bride , s'échapper à temps. S'échapper avant que l'inconnu à connaître, à comprendre ne vous rattrape, parce que cet inconnu ne se pliera pas à vous, mais vous à lui.
C'est ridicule cet entêtement que tu as à vouloir me faire dire que l'égalité des hommes et des femmes implique leur similitude. Je ne me suis jamais prise pour ta semblable. Je ne me suis pas prise pour ton inférieure non plus. (Julliard, 1971, p. 95)
Les femmes sont belles. Elles ont des visages épanouis sous les cheveux noirs, de grands yeux, des lèvres ouvertes. Quelques unes sont de vrais Gauguin, les petites filles, des chefs d'oeuvre aigus : on dirait qu'un crayon d'une finesse extrême s'est penché sur elles pour dessiner leur contour, sans reprise, sans l'ombre d'une hésitation. Leur beauté touche au génie. (p. 22)
-Si vous étiez un homme...
- Depuis longtemps, je sais que je ne suis pas un homme. Sous une bombe, je ne vois pas à quoi peut bien servir le sexe d'un cadavre. (Julliard, 1971, p. 66)