Si je ne suis plus là pour répondre à tes questions et dissiper tes doutes, toutes les histoires que mon père m'a racontées et toutes celles que son père lui avait rapportées tomberont dans l'oubli. Et nous disparaîtrons avec elles. Ça ne changera rien parce qu'au fond, rien n'est vraiment important. Ce ne sont que des tranches de vies vécues dans un monde où disparaissent chaque jour des millions d'histoires, dans un monde qui lui-même n'existe plus. Des millions d'histoires pleines d'espaces vides et de silences qui en disent plus que des paroles.
Le monde entier est un théâtre, et les hommes et les femmes ne sont que des acteurs ; ils ont leurs entrées et leurs sorties. Un homme, dans le cours de sa vie, joue différents rôles ; et les actes de la pièce sont les sept âges.
William Shakespeare
La vie est bien courte. Il ne faut pas la compliquer à dessein. À quoi cela m'a-t-il servi de bosser comme un con toute ma putain de vie ? À rien. Je n'ai rien de plus que les autres qui n'ont jamais couru de risques. Pourquoi me suis-je préoccupé de tout ? Pour rien. Si je pouvais tout recommencer, j'agirais différemment. D'une autre façon. Je me consacrerais à vivre. Et tu devrais bien en faire autant, avant qu'il ne soit trop tard. La vie n'est qu'un souffle de moineau... un souffle.
Dans la peur d’en dire trop. Dans la peur de n’en dire pas assez. Des regards complices, de l’oubli. De la crainte qu’on ne t’oublie pas. Toute cette peur qui se transforme en une tristesse transmise de génération en génération, comme une blessure éternellement infectée, éternellement purulente
C'est curieux, mais tous mes souvenirs d'enfance sont des gros plans, de grandes mains, des pieds énormes. Les enfants vivent une autre réalité, une réalité au ras du sol, ou tout est grand, ou tout est nouveau.
Après ? Nous avons eu quelques années de démocratie.
Mais le peuple continuait à avoir faim.
Pourquoi ?
Parce que les riches ne partagent jamais ce qu'ils possèdent, qu'on soit sous une dictature ou en démocratie. (p.42)
Toi, je suis sûr que tu connais plein d'histoires sur la guerre civile. mais tu ne l'as pas faite. C'est plus facile d'y penser que de la faire pour de bon. La possibilité d'un échec est moindre. (p.37)
Un jour, peut-être, tu te poseras des questions sur ton père, ce type qui parlait une langue bizarre, ou sur ton grand-père et ton arrière-grand-père qui naquirent et vécurent dans un pays qui n'est pas le tien. (p.6)
La faim, la colère, les poux, la peur... Je ne veux plus que tu me questionnes, je ne veux plus revivre ça comme chaque fois que tu t'assieds et que tu veux connaître le passé de ton grand-père ou le mien
Pauvres espingos ! Toujours plongés dans le passé ! Toutes ces blessures ouvertes et jamais refermées.... (p.35)