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4.18/5 (sur 22 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Nice , 1988
Biographie :

Née à Nice en 1988, Milène Tournier est docteure en études théâtrales. Sa thèse, dirigée par Hélène Kuntz, s'intitule "Figures de l’impudeur : dire, écrire, jouer l'intime".
Elle pratique l’écriture vidéo et partage régulièrement son travail sur Facebook et sur Youtube. Une de ses vidéo-écritures a été diffusée au Centre Pompidou dans le cadre du Festival Littéra-tube.
Quelques-uns de ses poèmes ont été publiés dans la revue de poésie contemporaine "Place de la Sorbonne".

Source : https://www.artcena.fr/auteurs-soutenus/milene-tournier
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Avec Rim Battal, Vanille Bouyagui, Jacques Darras, Guillaume Decourt, Chloé Delaume, Arthur H, Paloma Hermina Hidalgo, Abellatif Laâbi, Christophe Manon, Virginie Poitrasson, Jean Portante, Omar Youssef Souleimane, Milène Tournier… Accompagnés par Lola Malique (violoncelle) et Pierre Demange (percussions) Cette anthologie du Printemps des Poètes 2024 rassemble 116 poètes contemporains et des textes pour la plupart inédits. Tous partagent notre quotidien autour de la thématique de la grâce. Leurs écrits sont d'une diversité et d'une richesse stimulantes. Ils offrent un large panorama de la poésie francophone de notre époque. Pour en donner un aperçu ce soir, douze poètes en lecture, accompagnés de musique. À lire – Ces instants de grâce dans l'éternité, Anthologie de poésie réunie et présentée par Jean-Yves Reuzeau, Castor Astral, 2024.

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Citations et extraits (26) Voir plus Ajouter une citation
JE T’AIME COMME
UNE AGENCE D’INTÉRIM



extrait 3

Je t’aime comme aujourd’hui le garçon obtient un entretien,
il s’assoit avec son CV dans une pochette plastique A4 entre
les jambes. On lui demande c’est quoi son regard sur le monde.
Il pense qu’il en a pas. Que monde, il a, mais pas un regard.
Il dit je sais pas, je sais pas, je sais pas qui je suis. Et on lui dit
que c’est pas gênant. On lui pose des questions larges et des
questions précises. Et aucune il sait répondre. Son cerveau,
ça fait un ouragan dedans, et puis rien. Il dit qu’il sait se laver
les mains, même dans les zones fréquemment oubliées par
les autres, ça lui paraît important à dire, alors il le dit. Il pense
qu’il aimerait être un panda. On lui donne un formulaire à
remplir, il faut répondre par des adjectifs à ses qualités ses
défauts ses goûts, et il met néant partout. On lui donne la
liste des papiers à fournir et il est pris d’un vertige.
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91. L’homme s’était endormi dans le bus
  
  
  
  
91. L’homme s’était endormi dans le bus. C’était la première fois que cela lui arrivait, et avant que cela lui arrive une deuxième – et qu’alors il comprenne simplement être devenu vieux –, il crut, sans en parler à sa femme, avoir fait un petit AVC. De ceux qu’on pourrait retrouver, peut-être, à l’imagerie, plus tard, à l’occasion d’un avertissement plus retentissant, qui l’aurait mené à un scanner, en montrant, le médecin, avec le laser pointeur, là, vous voyez, une petite fêlure, comme on sent sous le doigt l’aspérité d’une roche, et seulement lui saurait que c’est, oui, la fêlure, l’après-midi du bus. Et personne n’a vu ni entendu, dans le bus, un vieil homme se réciter, comme un enfant, l’alphabet, pour vérifier sa mémoire.
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Je ne suis jamais allée…


Je ne suis jamais allée, j’irai

T’écrire l’après-midi à Tanger

Simple ou presque simple dans une pièce qui garde l’ombre

J’irai t’écrire là, à frissonner un peu, d’inexacte sueur

D’avoir frais dans la ville brûlante

Je t’écrirai, l’après-midi long comme un drap qu’on met à pendre,
plus grand que le lit, un drap pour presque une pièce, et qu’on
replie lourd sur le piano, pour garder son bois d’épicéa de l’épais
août

J’irai, abandonner à Tanger ce qu’à Tanger l’après-midi j’aurai écrit.
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15. C’était un drôle d’été
  
  
  
  
15. C’était un drôle d’été. Dans la salle multimédia de la bibliothèque municipale, un jeu d’échecs en libre-service («Merci de replacer les pièces après utilisation») suait, muet, entre deux poufs. Le mobilier, choisi parmi des catalogues de collectivités, ressemblait et ne ressemblait pas aux meubles des vitrines des magasins de décoration. Il venait tous les après-midi. Ses soirées s’étiraient calmes et sous influences, somnifères, cannabis vague. Mais l’après-midi, il venait ici jouer aux échecs. Juillet avait passé, puis août, et aucun fou n’avait ouvert de diagonales, ni le cavalier enjambé d’obstacle, seulement dérangés, régulièrement, par la caresse du ventilateur sur pied et son léger grésillement lorsque c’était vers la droite qu’il se tournait. Il n’était pas seul. Là, un clochard dormait sur la table, la tête dans ses bras. Ici, un autre clochard regardait une série avec un casque. Plus loin, une dame âgée grossissait sur l’écran la police de Google. Septembre était un autre monde, comme pouf du catalogue d’après. C’était un drôle d’été.
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66. Et juste avant de mourir
  
  
  
  
66. Et juste avant de mourir, la vieille dame refit, dans le noir de sa chambre, dix photographies importantes de sa vie. Pour emporter leur trace. Les traces ne sont pas ce qu’on laisse mais ce qu’on emporte. Dans le noir, mais avec chaque image très précise dans la tête, elle replaça son corps, le plus fidèlement possible, tel qu’elle se le rappelait – elle avait décidé qu’il fallait des photographies où elle soit présente. Son corps refaisait dans la chambre le geste et, grâce au noir, le corps dans la chambre et l’image dans la tête se mêlaient. Elle debout au milieu de l’arc de Rauba-Capeù, la mer déployée, la promenade des Anglais et quelques voltiges de mouettes. Elle accroupie sous des pis, impressionnée. Et ainsi les dix. C’était la chambre noire avant la mort, l’envol au très clair.
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JE T’AIME COMME
UNE AGENCE DE TRANSFERT
D’ARGENT



Je t’aime cash.

Je t’aime comme le monde est le même partout dans le monde. Je t’aime à l’international.

Je t’aime comme transférer de l’argent, c’est voyage invisible et rapide et pas le voyage lent et pesant des marchandises.

Je t’aime comme un transfert, comme une manche, une prière, un miracle, de ne pas exactement savoir par où une chose est arrivée et par qui.

Je t’aime comme transférer de l’argent, c’est joue à joue de loin.

Je t’aime comme au pays. Je t’aime comme chaque mois envoyer des sous au pays. Je t’aime comme dire : « J’aide mes parents. »

Je t’aime en plusieurs langues et devises.

Je t’aime comme un détecteur de faux billets. Je t’aime, c’est tellement après la vérité.

Je t’aime comme deux plantes en pots dans l’agence de transfert d’argent, pour faire chaleureux et pour faire loin.

Je t’aime, c’est la fin des transactions.
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JE T’AIME COMME
UN ASCENSEUR



Je t’aime comme le père réalise, dans l’ascenseur, qu’il
n’est jamais seul, que c’est la première fois, là, dans l’as-
censeur, qu’il est seul, sans les enfants, sa femme, ses col-
lègues.

Je t’aime comme les petits gestes et mystères des humains,
une fois coulissées et closes les portes de l’ascenseur...

Je t’aime comme une voix atone d’ascenseur qui annonce
son premier étage.

Je t’aime comme refaire un tour d’ascenseur, c’est gratuit
et plein de bruits et lumières, comme à la foire.

Je t’aime comme l’enfant assez grand pour appuyer lui sur
le bouton de l’ascenseur.

Je t’aime comme les adultes sont des enfants non accom-
pagnés.

Je t’aime comme s’envoler.

Je t’aime comme le léger suspens dans l’ascenseur, avant
d’atterrir tout à fait.

Je t’aime comme une grille d’ascenseur, comme une cage
noire à oiseaux
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JE T’AIME COMME
UNE BIBLIOTHÈQUE
MUNICIPALE



Je t’aime comme le clochard a enlevé ses chaussures dans la bibliothèque municipale et branché son téléphone portable. Maintenant il dort, et la bibliothèque municipale un peu ronfle, au deuxième étage.

Je t’aime comme le rayon enfant de la médiathèque. Je t’aime comme du mobilier à taille d’enfant et s’encabaner.

Je t’aime comme la forêt des rayonnages où se perdre longtemps et sans crainte.

Je t’aime comme une enfant aux rêves curieux.

Je t’aime, Père Castor, pour faire barrage à mon ennui.

Je t’aime comme l’enfant se fiche de dedans ou dehors, qui sait bien rêver seul.

Je t’aime comme un cercle autour du conteur.

Je t’aime comme la dame emprunte à la bibliothèque six livres sur le cancer.

Je t’aime comme Le Chien bleu n’a jamais mordu Nadja.
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JE T’AIME COMME
UNE AGENCE D’INTÉRIM



extrait 5

Je t’aime, c’est mon business, t’aimer.
Je t’aime, c’est zéro valeur.
Je t’aime comme cette vie courte et les rôles qu’on joue.
Je t’aime comme un intérimaire sans attaches, au vent,
qui pourrait voyager partout, demain.
Je t’aime comme certains ont leur plaque en dur, de
médecin ou avocat, et pas les feuilles volantes des
éphémérides d’intérim.
Je t’aime pour toujours, mon bel intérimaire.
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JE T’AIME COMME
UN ABATTOIR



Je t’aime comme un saigneur, une boyaudière…

Je t’aime comme un saigneur, une boyaudière,
un dépouilleur, une éviscératrice, un dégraisseur,
un désosseur, une coupeuse de quartiers.
Je t’aime comme séparer sang et carcasse.
Je t’aime, vide-moi de mes regrets, je t’aime, je
veux être ton exsangue.
Je t’aime comme un monte-charge, et le poids
d’échine et de poitrine qui pèsent encore plus
débitées.
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