Critiques de Mollâ Sadr ad-Dîn Muhammad Ibn Ibrahim al-Shirazi (1)
On a souvent, trop facilement, dit de Mulla Sadrâ qu'il était un "existentialiste", mais il faut préciser que ce n'est pas dans le sens que nous l'entendons en Occident, mais plutôt en ce que, dans la critique sadrienne, l'existence a été "camouflée" par une philosophie essentialiste (notamment par Avicenne, imbu de péripatétisme aux accents néo-platoniciens) ; on négligeait le monde phénoménal en surlignant son caractère "holographique", alors que l'existence n'est rien d'autre que l'Être en acte : il existe une intimité ontologique qui donne toute la noblesse au monde des existants, et l'existence n'est plus un "surajouté", comme l'accident par rapport à la substance ou le prédicat par rapport au sujet, mais bien une "extrapolation créatrice" de l'Être, et donc bénéficie de sa "légitimité".
Cette critique fait penser à celle, en Inde, d'un Ramanuja contre Adi Shankara (voir "L'Absolu selon le Vedanta" d'Olivier Lacombe), et c'est réellement une tentation continue des écoles idéalistes que de se défaire totalement du créé, alors que, selon les injonctions coraniques, la création est un Livre fait de signes-miracles-signaux (définition premiére de "ayat", qu'on traduit généralement par "verset" - du Qur'an -, faute de répliquer l’extravagant polysémie intrinsèque à la langue arabe.)
Ouvrage assez court - si on oublie la lumineuse introduction d'Henry Corbin - mais qui traite d'une problématique toujours actuelle.
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