Musée Maillol. La revanche des Etrusques.
Maillol est l'ancêtre de la tapisserie moderne. Comme le prouve "Le jardin enchanté", Maillol a complètement régénéré l'art de la tapisserie en lui rendant la noblesse et l'efficacité qu'elle eut au Moyen Age. Volontairement ornementale, la tapisserie ne rivalise pas avec la peinture. Elle en est une autre forme où le dessin, directement lié à la couleur, se développe dans le plan du mur, en des successions de rythmes qu'enrichissent les subtiles vibrations chromatiques soutenues par un dessin épuré dont la finalité n'est pas la vérité de l'observation mais le plaisir de l'oeil et de l'esprit.
"Coloriste unique, l'un des plus merveilleux de tous les temps, il sait de ses étonnants bleus, verts, jaunes et violets, emplir une toile, la saturer, en faire une explosion d'intensité. "
Avec les années, Morandi réduit le nombre des objets qui finissent par instaurer un rapport inédit avec l'espace : la couleur du fond envahit une partie de la bouteille, après en avoir dissout partiellement le contour, se répand sur la toile à la place du couvercle, glisse comme une ombre dans l'embouchure du vase.
Au bout de ce parcours, il y a une réalité qui ne se révèle pas à travers la mise au point, la concentration absolue du regard et de la volonté, mais plutôt dans la capacité d'allusion formelle, dans le rappel précis d'une dimension intuitive. Même si cette réalité reste hors de portée, malgré la réflexion et l'engagement assidu de toute une vie, les aquarelles ont réussi à conférer à la réalité la définition intense d'un mirage mouvant, mais décrit avec clarté. Dont la trame fragile à l'eau des aquarelles livre l'image la plus durable et la plus émouvante.
"Tout dessin de Raoul Dufy est en quelque sorte sa signature et ce qu'on est convenu d'appeler signature inimitable. (...) Car rien ne tombe de plus haut ni ne forme des entrelacs plus rapides qu'un fil de miel si ce n'est l'arabesque dont notre peintre couvre sa feuille. D'un bout à l'autre elle tombe de lui vertigineusement. Et n'allez pas croire qu'il n'a qu'à se pencher et à tendre la main pour que l'arabesque s'écoule. Il la médite et la projette avec la science infaillible de la dentellière et de l'araignée. "
JEAN COCTEAU
"Ce fut un enchanteur, et il y a beaucoup d'agrément à posséder dans sa société la présence d'un enchanteur. Mais si l'on approfondit les traits qui composent la figure de cet enchanteur, on voit se former celle d'un créateur. Un créateur égal en puissance, en invention, en audace, en réflexion, en nette et résolue maîtrise, aux quatre ou cinq très grands qui ont produit l'art moderne et fait de l'art moderne un des grands styles de tous les temps."
JEAN CASSOU,
Conservateur en chef du Musée National d'Art Moderne en 1953
Rien de ce qui sort de ses mains ne peut laisser le spectateur indifférent. (…) toute cette œuvre se propose et s'anime à la manière d'un théâtre qui serait celui du monde et de la vie.
Elle exprime tout ce que peut avoir d'agréable, de noble, d'émouvant, d'harmonieux et de rare une réalité dont elle fait oublier toutes les laideurs.
Et l'on est là, comme dans la boutique de l'enchanteur, définitivement conquis et charmé.
Il parait de plus en plus évident que l'histoire de l'art s'est égarée en classant des peintres comme Henri Rousseau et André Bauchant parmi les naïfs, c'est-à-dire en les mettant à part dans l'histoire de l'art moderne. Qu'il y ait un air naïf dans leurs représentations, nul doute, mais en tel cas pourquoi ne pas appeler naïves les fables du ghetto de Chagall, les Bretonnes et les Tahitiennes de Gauguin ?
L'oeuvre d'art n'est pas toujours le résultat d'une émotion qui s'extériorise. Ou du moins, cette émotion peut naître, non plus de l'artiste lui-même, spontanément ou causée par le choc de la vie ; la matière même de l'oeuvre d'art, cette matière à l'état brut - couleurs, sonorités, mots et rythmes, pierre ou argile à modeler -, peut suffire à plonger l'artiste dans le délire créateur.
(André Gide)
On peut parler d'essence, en utilisant le vocabulaire idéaliste que, tout compte fait, Morandi utilisait , même si c'était avec une modestie revêche. Ou bien d'antique vérité, d'identité originaire des choses, qui se maintiennent malgré l'écoulement du temps, fortes d'une raison qui trouve, chez l'artiste, une résonance aussi singulière que précise, une compréhension intime et spontanée.