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Citation de Cannetille


Les avions lui tendaient le miroir de tout ce qu’il n’était pas. Ils incarnaient pour lui des oiseaux, mais au sens propre du mot : il les observait de loin, ces projectiles hautains, tandis qu’ils fusaient vers le restant du monde. L’idée de s’asseoir à l’intérieur des hublots n’avait pas plus de sens que la perspective de s’endormir dans les entrailles d’un corbeau. Un avion, c’était une chose qui élevait le bec en diagonale et prenait de l’altitude avec perfidie, pour mieux rabaisser ceux qui restaient en bas. Ils décollaient les uns après les autres, ces vautours, pleins de bruit et de morgue, et toute cette poussée écrabouillait Julien, lui donnait l’impression de s’enfoncer toujours un peu plus dans son matelas dur jusqu’à se sentir totalement comprimé. Comme ces sorciers guinéens dont parlait Gainsbourg dans « Cargo Culte », il invoquait les jets, soufflait vers l’azur et les aéroplanes, rêvait de hijacks et d’atomisations. Sur son lit, raide devant tous ces envols, il repensait à son écouvert à combler, à ce concert qu’il devait jouer au Piano Vache pour revenir à zéro. Revenir à zéro… N’avait-il pas d’autre objectif, dans la vie, que de revenir à zéro ? Julien exerçait depuis sept ans, sa situation sociale n’était pas vouée à évoluer et il courait en permanence derrière son compte en banque. C’était ça, son quotidien : compenser ses agios par des chèques qui fondaient sitôt encaissés – et, pour couronner le tout, contempler l’ascension des avions, ces condors métalliques qui le toisaient en montant vers le ciel.
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