La tendance coloriste d'après laquelle des couleurs lumineuses et saturées
- le rouge, le bleu, le jaune et le blanc, rarement le vert -s'assemblent en alternances variées joue un grand rôle dans l'ensemble ornemental.
Cette tendance nous la rencontrons également en Égypte, en Orient, et aux premiers temps de la civilisation grecque, mais nulle part comme dans le cycle minoen elle ne donne un tel sentiment de bien-être, de joie puérile.
Associée à la mobilité caractéristique des motifs, elle a fait de l'intérieur des palais et des autres grands bâtiments un monde irréel, de contes et de rêves, auquel ajoutait encore la polychromie des éléments architectoniques.
Dans aucune autre branche de l'art minoen on ne voit plus clairement la pureté enfantine de ces hommes qui, avec beaucoup de charme et sans aucune emphase, célèbrent la nature divinisée ou représentent les cérémonies sacrées.
Partout on devine la sensibilité et la tendresse envers la nature et ses créations. On sent une vibration mystique dans le mouvement caractéristique des motifs, qu'ils soient ornementaux ou figuratifs.
Ce mouvement est rendu avec la même force "d'expression qui - nous l'avons vu - a constitué l'élément originel dans chaque manifestation de l'art minoen depuis les époques les plus anciennes. C'est là-dessus que repose l'attrait exercé par la peinture minoenne dans laquelle on sent souvent un souffle poétique comparable à celui de la peinture japonaise.
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Les hommes qui ont vécu si joyeux, si libres, dans la nature divinisée, qui ont tant profité de la mer et de son monde mystérieux ont maintenant la possibilité de traduire la nature, malgré un conventionnalisme traditionnel, sur les surfaces des murs, tantôt sur une vaste étendue et sans contrainte, tantôt sur des surfaces réduites, sur des frises limitées ou dans des panneaux où ils se laissent davantage aller à la miniature.
Nous sommes sûrs que ce type de décoration trouve sa source dans l'âme des hommes de l'époque qui pouvaient par là exprimer leurs croyances intimes et leur propre conception du monde.
Aussi n'est-il peut-être pas juste de considérer ces thèmes comme scènes de genre, comme rendant de simples scènes de la vie quotidienne ou de simples impressions. Il est évidemment difficile de distinguer les scènes à caractère purement religieux, d'autres qui semblent simplement réalistes.
La différence essentielle avec l'art de la fresque en Égypte et en Orient, réside dans le fait que le monde représenté s'est fort peu relié au passé et fort peu occupé de perpétuer l'activité humaine sous toutes ses formes ; il manque le sens historique et la tendance à glorifier les actions humaines.
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