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Citation de Carosand


La biscotte crisse, laisse croire qu'elle résiste, puis, comme si elle renonçait à elle-même, fond d'un coup sous la molle étreinte des lèvres mouillées. Cette embrassade intime correspond à l'exact effort que Solange consent mettre dans son existence. Elle aime le crissement et l'abandon pacifique de la biscotte. Avec le pain, il fallait mordre, vaincre une résistance. Elle ne veut plus mordre dans du pain. Elle ne veut plus mordre tout court. Grignoter, c'est sa nouvelle façon de consommer les choses, la vie, sans exploit, sans performance.
Et puis les biscottes beurrées du matin ont un autre avantage. Elles ont cette vertu d'aider au vagabondage, aux rêveries. Car, le matin, Solange ne se tyrannise plus, elle ne se livre plus à ses ablutions mentales armée des chiffons de la conscience. Elle se promène mentalement, elle maraude avec un goût particulier pour l'enfance qui affleure de plus en plus sous la forme d'évocations si délicieuses qu'elle les savoure inlassablement, émue, éblouie.
Au lit, le plateau du petit déjeuner sur ses genoux, enfouie dans une profusion de châles, de lainages, d'édredons, car elle est devenue, frileuse, elle parcourt les sentiers de la mémoire. Dans l'humus du passé, la chaleur fait pousser les souvenirs comme des champignons qui se laissent cueillir sans effort.
La biscotte crisse. Elle devient le sable qui égrène le temps parfumé à la confiture ou au miel parmi les vapeurs de thé.
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