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4.09/5 (sur 34 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Norbert Alter est sociologue, professeur des universités. Après avoir passé treize ans à France Telecom, il a rejoint le Conservatoire National des Arts et métiers, puis Paris Dauphine et Sciences Po Paris.

Articulant les perspectives sociologiques, économiques et gestionnaires, ses premiers travaux portent sur l’innovation. Ils la définissent comme la capacité collective à donner sens et efficacité à une nouveauté, en l’opposant à l’invention, qui ne représente que la capacité à créer une nouveauté. Cette distinction, mobilisée pour observer les innovations technologiques et organisationnelles des entreprises, met en évidence le caractère crucial des processus collectifs d’appropriation, de transgression des normes et d’institutionnalisation .

Dans une deuxième période, l’analyse de la coopération conduit l’auteur à mobiliser le paradigme anthropologique du don et du contre don pour analyser les logiques d’entreprise. Il définit la compétence comme collective. Elle résulte d’un système d’échange reposant sur le principe de « réciprocité élargie » (A donne à B qui donne à M, qui donne à A). Il y circule toutes les dimensions de la vie organisationnelle : cognitive, politique, symbolique et affective. Les individus échangent en effet pour être compétents mais, simultanément, pour créer des liens sociaux et faire société.

Dans un troisième temps l’auteur s’attache à comprendre ce qui permet d’échapper à son destin social, aux déterminismes sociologiques. Après une longue enquête menée auprès de patrons atypiques (par leur origine ethnique, leur genre, leur orientation sexuelle, leur autodidaxie ou leur handicap physique), l’auteur identifie plusieurs ressources communes à ces parcours : l’indiscipline sociale; le soutien de « fées » qui, pour des raisons affectives ou morales, les ont soutenus ; la proximité et la distance, caractéristiques de la « figure de l’étranger » (Simmel).

Dans son autobiographie, celle d’une origine sociale marquée par la misère et la violence, l’auteur retrouve ces analyses. Souvent étiqueté comme « transfuge de classe », il indique pourtant que le désir de socialisation permet d’échapper aux lois de la reproduction sociale, autant que la subversion de l’ordre social.

Son dernier ouvrage, « Pour en finir avec le machin », mobilise un style pamphlétaire et humoristique pour se libérer de l’étouffant langage de la communication d’entreprise. Il décrit l’origine et les dégâts du paradoxe central du management : rem
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Citations et extraits (29) Voir plus Ajouter une citation
Je n’avais pas de vraie maison, un endroit pour être tranquille, protégé du reste du monde, une maisonnée. Dans le livre de lecture du cours préparatoire, une image me faisait rêver : les parents qui nettoient la vaisselle, les enfants qui l’essuient et la rangent. Ça représentait mon idéal : faire la vaisselle en famille, en paix, dans une cuisine proprette. Cette image toute simple m’empêchait de dormir. Elle me disait : « Tu ne connais pas ça. Pourras-tu le connaître ?

Alors que ses copains apprennent à lire à partir cette image banale, Pierre apprend à lire en rêvant à la banalité de cette situation.
(Incipit)
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Les études m'ont donné un langage, pas une langue. En société, dès que la contrainte se desserre, je reprends mes travers : les idées ordinaires, des raisonnements relâchés et des jugements de valeur. Je suis heureux comme ça. Et dès que la contrainte se resserre, dans mon milieu professionnel, ou pour impressionner le bourgeois, je donne le change: vocabulaire choisi, jugements cohérents, peu d'affectivité, et un peu d'humour. Mais je n'exprime pas ce que je suis avec ce type de langage. je suis un homme de mots et d'idées simples, qui peut se corriger, pas se transformer.
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On n'échappe jamais à l'histoire, qui produit, sous des formes diverses, des dominants, des censeurs et des colonels, qui tous souhaitent dicter les destins individuels au nom du bien. Mais on peut échapper, au moins partiellement, à son histoire pour la réinventer et se réconcilier avec elle, puisqu'on n'est jamais seul.
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Il arrive ainsi à l’école et, dès le hall d’entrée, il perçoit l’odeur infiniment rassurante du bâtiment : un mélange de bois, de crayon, d’encre, de cuir et de sueur. Comme on respire l’odeur de la mer ou de la terre humide, il aime sentir cette effluve bienveillante, forte et fidèle à elle-même. Elle signifie que là, dans cet espace, se trouveront toujours, toute l’année et les années suivantes, des crayons pour dessiner, des encriers pour y tremper les plumes Sergent Major, des cartables et des trousses, des enfants en un tas uniforme, qui participe à l’effluve. Il aime cette odeur parce qu’elle le rassure. On ne peut pas changer l’odeur d’une école, pas plus que celle de la mer ou de la terre humide. Il aime aussi l’architecture fonctionnelle et sans fioriture de l’établissement, les couleurs banales, les salles de cours sous-dimensionnées, la table étroite qu’il partage avec un voisin, la cour avec ses arbres bêtes, les toilettes défoncées, les rares géraniums aux fenêtres et le réfectoire sonore. L’école est faite pour les enfants, rien que pour eux. Pierre s’y niche.
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Il aime autant ressentir son appartenance aux lois de la société que son indépendance. L'association des deux sentiments lui procure le plaisir tiré de la certitude de se trouver à sa place, serein, entre la loi des autres, qu'il respecte le mieux possible, et que parfois il aime, et les lois sociologiques qui façonnent son identité, dont il ne peut se défaire.

Certains acceptent cette ambivalence : ils l'aident à tenir une trajectoire de vie acceptable pour lui et pour eux-mêmes. Dans bon nombre de situations qu'il croit maîtriser grâce à sa seule rouerie, il découvre ainsi qu'il ne peut s'en tirer sans la coopération des défenseurs de la loi ou de ses victimes.
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Les filles le réchauffent. Il dispose, avec elles et en elles, d'un petit foyer. Elles lui font raconter qu'au-delà d'être un garçon, il n'est pas un garçon comme les autres. Et lorsqu'elles lui confessent leur propre fêlure, il a le sentiment de pouvoir les aimer.
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L'innovation est toujours une histoire, celle d'un processus. Il permet de transformer une découverte, qu'elle concerne une technique, un produit ou une conception des rapports sociaux, en de nouvelles pratiques.
Mais ce processus n'est pas mécanique, toute découverte ne se transformant pas toujours en innovation. Une découverte peut fort bien demeurer à l'état d'invention. L'analyse de l'innovation consiste alors à comprendre ce qui permet de passer d'un état à un autre. Elle s'attache à identifier les étapes de ce passage, étapes caractérisant l'histoire de l'action des innovateurs et de leurs opposants. Ces innovateurs ne sont pas toujours des entrepreneurs ou des chercheurs, mais disposent toujours d'une capacité à transformer l'ordre des choses. Ils sont souvent atypiques, dissidents ou critiques, avant d'être rattrapés, et parfois absorbés, par les normes qu'ils contestent. Ils s'y heurtent donc toujours, mais de manière - finalement - légitime. L'innovation n'a ainsi rien d'une action rationnelle, économiquement fondée et pacifique, elle correspond au contraire à une trajectoire brisée, mouvementée, dans laquelle se rencontrent intérêts, croyances et comportements passionnels.
L'analyse de l'innovation fait ainsi constamment apparaître des phénomènes caractérisés par des incertitudes, des réussites non programmées et des programmes qui échouent, des déviants qui ouvrent de nouvelles voies économiques, des stratèges dont les décisions sont parfois dérisoires. Elle met surtout en évidence que tout ce monde parvient, finalement, à vivre ensemble, mais jamais initialement.
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Il s’est en effet progressivement construit une éthique qui l’autorise à voler son patron. Il garde, bien au chaud dans son cœur, la rancune qu’il porte à sa brutalité. Et puis, même s’il fait de son mieux pour ne pas y penser, il trouve cruel de perdre ces beaux mois d’été, enfermé dans son café, agité comme une souris en cage, alors que ses copains se reposent à la plage et courtisent les filles. Et même si son patron n’a aucunement la responsabilité de cette situation, il en profite : la jeunesse, la nécessité d’apprendre le métier, l’absence de relations font de Pierre un salarié plus faible, plus aisément exploitable que les autres. Même après son apprentissage, le patron lui confie, plus qu’aux garçons à demeure, les sales boulots, les sales horaires. Pour « lui apprendre ». Pierre lui porte une haine froide et réfléchie. Le voler représente une jouissance : celle d’assouvir sa rancune, et de s’enrichir aux dépens d’un salaud.

Il rencontre aussi des patrons humains, un peu émus par son statut de lycéen, qui lui parlent comme à un neveu, protecteurs. L’un d’entre eux l’embauche pendant un mois au noir. À la fin de cette période, il lui tend une enveloppe et lui dit simplement : « Tiens, tête de linotte ». Pierre y découvre plusieurs billets de cent francs. Le patron lui explique : « C’est la moitié des charges sociales que j’aurais dû payer pour ton emploi. Tu prendras des vacances. »

Pierre découvre la douceur d’une relation de travail ; cela le surprend et l’émeut. Il ne peut pas voler ce type de patron. Mais financièrement, cela ne l’arrange pas. Alors il change de café pour trouver un patron qui l’exploite bien brutalement, qu’il peut détester et voler éthiquement.
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On donne "aux autres" autant qu'"à l'autre". Autant qu'à l'autre opérateur, on donne au projet, à la compétence collective, au métier, à l'entreprise, à tous ceux qui permettent de donner sens et efficacité au travail. Managers et opérateurs savent très bien tout cela parce qu'ils le ressentent ! Ils ne savent pas toujours l'expliquer, mais ils l'éprouvent – comme on éprouve une grande satisfaction à voir celui auquel on a tenu la porte la tenir à son tour. Ainsi l'entreprise ne peut-elle pas se passer des échanges sociaux : ils représentent un don que les opérateurs lui font ; ce don est précieux et il fédère les individus. Mais elle ne peut pas pour autant accepter que cette logique régisse les relations parce que ce type de fonctionnement va à l'encontre de l'idée même de management et de rationalisation du travail. La solution retenue par l'entreprise, c'est alors d'accepter ces "cadeaux" mais sans célébrer leur réception, de les prendre sans reconnaître explicitement leur valeur et, surtout, de transformer ces manifestations de liberté en obligations. C'est à l'analyse de ce paradoxe que se livre le présent ouvrage : les entreprises refusent de célébrer le don de leurs salariés ; au lieu de recevoir ce cadeau, elles préfèrent le prendre ou acheter la valeur qu'il représente ; au lieu de considérer ce geste comme une ressource, elles en font un problème. Elles interdisent finalement de donner, au profit d'échanges équilibrés et prévisibles. Ce paradoxe me paraît s'expliquer fondamentalement par le fait que les théories qui fondent le management se veulent "modernes", alors que l'efficacité du management repose sur des dimensions archaïques, universelles et pragmatiques.
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Son visage devient grave puis il m’indique que la certitude d’être différent, incapable de tenir les rôles sociaux conventionnels représente, pour un enfant, une misère plus grande que l’indigence: on n’est jamais tranquille, toujours fautif.
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