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Critiques de Odile Goerg (1)
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Fantômas sous les tropiques : aller au cinéma en..

Aux frontières de l’histoire politique, de l’étude culturelle et de la sociologie, Odile Goerg s’intéresse au cinéma africain au temps des colonies. Son livre n’est pas une histoire des films africains – bien rares d’ailleurs avant les indépendances – mais une analyse d’une pratique sociale : ce qu’aller au cinéma voulait dire dans un contexte colonial. Cette enquête se heurte à la rareté des sources : les archives officielles ne conservant guère de trace de ce loisir frivole, Odile Goerg a utilisé des sources plus rarement sollicitées par l’historien (romans ou autobiographies tel le livre Cinéma de Tierno Monémembo) et mené des entretiens auprès des lointains survivants de l’époque.

Où se déroulent les premières séances de cinéma ? Au départ sur la place du village ou dans une arrière-cour avant que, dans les années 20 se construisent des salles dédiées dont les appellations reprennent celles de la métropole : Palace, Rex, Vox, Rialto, Paris … Le cinéma est dès l’origine un événement urbain qui crée, au cœur de la cité, un rassemblement festif et un nouvel espace de sociabilité.

Qui va au cinéma ? Les Européens au premier chef, qui ont connu leurs premières expériences cinématographiques en métropole et qui cherchent à rompre la monotonie de leur séjour. Mais aussi les Africains sans lesquels les exploitants n’atteindraient pas l’équilibre commercial. Les premiers spectateurs sont des « évolués » : des Africains instruits qui vivent au contact des Blancs et copient leurs pratiques sociales. A la différence de l’Afrique du sud ou du Congo belge, les salles ne sont pas ségrégées ; les Africains et les colons s’y mélangent. Ce mélange a ses limites, les prix variant entre l’orchestre et le balcon entraînant une ségrégation spatiale de fait ; mais la salle commune n’en demeure pas moins un espace partagé où les relations de race se reconfigurent. Même reconfiguration entre les sexes, à la faveur de l’obscurité : les salles de cinéma deviennent le lieu de rencontres plus ou moins clandestines, car les adultes ne sont jamais loin.

Que voit-on au cinéma ? Aller au cinéma ce n’est pas seulement voir un film ; mais c’est quand même voir un film – ou plusieurs car les séances, précédées des actualités, voyaient s’en succéder plusieurs. Les autorités coloniales vont bientôt s’inquiéter du contenu des programmes dont certains mettent à mal le prestige du Blanc. Une censure est mise en place en 1934, qui double la censure métropolitaine. Mais les spectateurs africains se réapproprient des contenus qui peuvent sembler anodins : les frasques de Charlot font rire au détriment des gardiens de l’ordre, le racisme d’un Tarzan provoque des manifestations de désapprobation, « La bataille du Rail » encourage le nationalisme et la résistance …

« Fenêtre ouverte sur l’ailleurs » qui donne aux public africains l’occasion de se frotter au monde, lieu de rassemblement, où l’obscurité et l’anonymat encouragent des manifestations impossibles ailleurs, la salle de cinéma a constitué un lieu potentiel de contestation du pouvoir colonial. Mais Odile Goerg a raison de ne pas dramatiser le tableau. L’ambiance bruyante des salles est plus festive que révolutionnaire. En métropole comme aux colonies, le cinéma est moins un lieu d’expression politique qu’un divertissement paisible.
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