Maude Okyo

Assise dans un fast-food autoroutier, je me retrouvai face à un double cheese et un verre de Coca Zéro de la taille de l’Empire State Building. Je picorais dans mon cornet de frites sous le regard appuyé de Théo. Le temps passé dans la voiture m’avait permis de le découvrir un peu mieux et je pensais la réciproque vraie ; il osait enfin me lancer quelques piques ironiques, et se montrer plus familier. Au bout d’un moment, je finis par l’apostropher, un peu gênée d’être observée en plein baffrage.
– Quoi ?
– J’ai rarement vu une fille commander un menu XL et hésiter à y rajouter un dessert, avoua-t-il.
– Tu amènes tes conquêtes au fast-food ? J’espère que ce n’est pas sérieux. Mais, vu que je m’occupe déjà de Soren, je peux te faire un prix spécial pour des cours en accéléré, parce que c’est clair, faut consulter, là… Ou essayer un second rendez-vous, y a qu’au premier qu’on est polie et qu’on fait semblant de kiffer la salade, tu sais ?

La porte s’ouvrit brusquement. Soren semblait soucieux, pourtant, il me sourit. C’était con à dire, mais ce mec devait être conçu ainsi : il montrait ses sentiments. Et visiblement, même inquiet, il était content de me voir…

– J’ai cru que tu t’étais endormie.

– J’étais en mode Ninja : planquée.

Ses traits tirés me donnèrent envie de le câliner. Je me relevai et l’enlaçai. pour le réconforter, pas du tout un truc de pelotage… à l’origine.

Il posa son front contre le mien, yeux fermés, et soupira.

– Ils me font chier… et tu me fais peur. On ne va pas réussir à gérer ça, avoua-t-il à mi-voix.

Dans la rue face à une énorme pancarte publicitaire, plus grande qu’une affiche de cinéma, chaussée de lunettes noires qui font très star, même si je ne le suis pas, je regarde mon corps étalé lascivement sur un tissu en satin totalement cheap. La pub est cheap, d’ailleurs. Finalement, elle vante les mérites d’une crème amincissante, première nouvelle. L’image de ce corps artistiquement abandonné donnerait des complexes à n’importe quelle nana normale. Grâce à Photoshop, je semble plus belle que jamais, ma propre mère ne me reconnaîtrait sûrement pas.

"Les ex auraient du être comme les boy's band des années 1990 : coincés dans le passé dont ils ne devaient en aucun cas s'échapper, pour le bien de l'humanité."

"Sans un mot, Soren se leva pour se trémousser sur du Katy Perry. Si, si. Véridique. Ce mec de près de deux mètres imita une choré de pouf sans protester une seule fois et pire, cela me plut vu le sérieux décomplexé avec lequel il le fit."

La boîte qui le lançait avait joué la carte du mystère : on ne pouvait se procurer le « ClimaX » comme n’importe quel produit, non, on devait être invité après sélection. Il fallait prouver sa motivation avec, a minima, un texte court – ou n’importe quelle autre méthode plus originale. Elle avait donc décidé de décrire sur le ton humoristique sa culotte et son vagin comme le Sahara : sec, vaste et dépeuplé. À la limite du terrain hostile.

J’étais encore rêveuse de la veille, notre étreinte avait été…orgasme-sismique de haute intensité sur l’échelle de « Oh my Soren ». Merveilleuse, bouleversante, ardente !

Le retour m’avait semblé à la fois irréel et douloureux : m’arracher à la chaleur de sa peau m’avait fait mal.

Tu m'étonnes que ce genre de personne me prenne forcément en grippe, comment pourrait-il en être autrement? Je déteste Scarlett Johannson et Jessica Alba qui n'ont pas que le corps, mais aussi la tronche qui va avec. Bande de salopes

J'ai pensé défiler en lingerie, histoire de mettre du beurre dans les épinards - les pâtes, je suis plutôt pâtes, et oui, c'est dégueulasse de rester si mince en mangeant des pâtes, tout ça sans les vomir illico, mais c'est ainsi.

Quand on voit un strip-tease de n'importe quelle star de ciné pour l'un de ses films, une bonne partie des déhanchements est cadrée en dessous de la tête. Ne cherchez pas, c'est qu'il y a ma tronche en haut.