Citations de Pascal Bruckner (575)
C’est le choix et la liberté qui distinguent l’être humain de l’animal. Tous les bons auteurs, Rousseau, Kant, Hegel, l’ont affirmé. La première liberté d’un individu, c’est de dire non !
Pour l'enfant, le père est un géant qui rapetisse à mesure que lui grandit. (p.114)
Depuis la mort de mes parents, je les croise, dans les rues, même à l'étranger, voûtés, marchant à pas menus. Ils reviennent me hanter sous la forme d'inconnus, tous les seniors de France me parlent d'eux, me donnent de leurs nouvelles. (p.246)
La télévision n'exige du spectateur qu'un acte de courage, mais il est surhumain, c'est de l'éteindre.
À partir d’un certain âge, nos parents sont des cadrants vivants qui nous indiquent l’heure de notre décrépitude. Les regarder c’est nous voir trente ans plus tard, anticiper des lendemains chagrins.
Le pire dans la vieillesse, ce n'est pas la diminution physique, c'est le dégoût de l'humanité. Combien commencent en subversifs pour finir en grincheux ? Rebelles à vingt-ans, poupons geignards à soixante-ans. Mon père m'a élevé dans l'exécration d'autrui, j'ai choisi de me vouer à la célébration. La célébration du monde et des êtres ne cessera jamais de me suffoquer. (p.219)
Les pères brutaux ont un avantage: ils ne vous engourdissent pas avec leur douceur, leur mièvrerie, ne cherchent pas à jouer les grands frères ou les copains. Ils vous réveillent comme une décharge électrique, font de vous un éternel combattant ou un éternel opprimé. Le mien m'a communiqué sa rage: de cela je lui suis reconnaissant. La haine qu'il m'a inculquée m'a aussi sauvé. (p.17)
On appartient au monde qu'on a fait, pas à celui d'où l'on vient. (p.186)
La conduite défaitiste devient la vraie cause de la défaite.
-J'espère que tu ne fais pas de bêtises ?
- Si, maman, il n'y a que les bêtises qui valent le coup dans la vie.
Tous les jours, vers le début de l'après-midi, je me surprends à attendre son appel, une coutume que nous avions instituée et qui me pesait alors. Ce silence est comme une écharde fichée dans mon coeur. (p.77)
Elle tombait malade pour que mon père s'occupe d'elle, collectionnait les maux comme d'autres les pays exotiques pour devenir enfin visible. (p.63)
À tout âge, la faculté de rebondir peut l’emporter sur le souci de se conserver et la paresse des acquis.
À vingt ans la beauté est une évidence, à trente-cinq une récompense, à cinquante un miracle.
[ Les Voleurs de beauté ]
Ce qui unit les humains et les chats, au-delà des caresses, c’est le sommeil. Où qu’ils soient, les petits félins vous invitent à l’assoupissement, dans la chaleur de leur fourrure soyeuse. Pouvoir dormir côte à côte, des heures durant, sans bouger est une forme d’intimité plus profonde que le langage ou les jeux.
L'écriture ne console pas du tourment, elle le déplace, l'approfondit ; l'écriture est vanité qui ne dit pas l'expérience de la perte et du désaisissement.
À peine assise, je fus assaillie par une nuée de dragueurs qui se relayèrent à mon chevet. Le dragueur est le cousin du mendiant, il répond comme lui au principe de l'espérance statistique : il s'attache aux nombres, jamais aux personnes. Sur dix femmes qu'il aborde, une au moins, il le sait, consentira à prendre un café avec lui. Et sur dix qui boiront un café en sa compagnie, ce serait bien le diable si une ou deux, de guerre lasse, n'acceptait d'aller plus loin. Il ne séduit pas, il harcèle, emporte la place à la fatigue.
La richesse d’un destin est toujours liée aux rencontres qui l’ont émaillé et sans lesquelles chacun de nous n’aurait aucune épaisseur.
Il n’est jamais bon de commencer son existence amoureuse par le paroxysme : toute autre joie vous est ensuite insipide.
Le miracle de l'amour, c'est de resserrer le monde autour d'un être qui vous enchante, l'horreur de l'amour, c'est de resserrer le monde autour d'un être qui vous enchaîne.
Les livres m'ont sauvé. Du désespoir, de la bêtise, de la lâcheté, de l'ennui. Les grand textes nous hissent au-dessus de nous-mêmes, nous élargissent aux dimensions d'une république de l'esprit. Entrer en eux, c'est comme aborder la haute mer ou décortiquer un mécanisme d'horlogerie extrêmement sophistiqué.