Quelle est la rentabilité d'investir plusieurs années dans la formation des professionnels de la santé pour les perdre au moment de l'expression de leur plein potentiel ?
Aujourd'hui, nous sommes appelés à ne plus devenir les meilleurs du monde mais bien à devenir meilleurs pour le monde. Sans cette conversion, je rejoins Hubert Reeves qui pense que nous ne pouvons survivre en tant qu'espèce sans établir un rapport harmonieux avec notre environnement.
Mon propos d'aujourd'hui est une étoffe tissée de tous ces liens, éphémères ou éternels . Toute existence constitue un parcours initiatique; c'est à dire, une succession d'expériences transformatrices.
Il est temps de conscientiser que la force des institutions de soins réside en son personnel soignant. Celui-ci constitue un patrimoine non matériel. Il n'est pas une ressource humaine que l'on gère et qu'on épuise. Si les praticiens sont la partie congrue, on perd le sens de la mission. N'oublions jamais que la vie donne en abondance alors que l'obsession de la rentabilité pille et laisse derrière elle des steppes arides et stériles.
De l'infiniment petit à l'infiniment grand, "je" n'est pas ce que l'on croit. Sentir cela dans son corps expose au vertige, rend humble, invite à rendre grâce. Réaliser que notre identité repose sur une illusion nous dispense surtout de nous prendre tellement au sérieux, nous délivre de la poussée d'avoir raison et ouvre à l'humour. Pas celui de la raillerie mais celui de l'infinie tendresse pour nous et donc pour les autres.
Osons envisager une transformation dans le cursus de la formation médicale pour lui rendre ses lettres de noblesse : diplômer des jeunes équilibrés et épanouis, aptes à pratiquer l'art de guérir. Oui, la médecine reste un art. Elle n'est et ne sera jamais une science exacte, n'en déplaise à la marchandisation et la robotisation ambiante.
Faire plus chaque année, voilà l'objectif. Pourquoi les chefs de service acceptent-ils, pour plaire aux gestionnaires, de monter des plans financiers, ce qui n'est pas leur métier. Requiert-on du gestionnaire qu'il sache prescrire un médicament adéquat ?
Réunir sciences, technologies et présence aimante. Ce n'est pas savoir ou aimer mais c'est bien les deux. Ce n'est pas l'un ou l'autre; c'est l'un et l'autre.
Il va être urgent de se rencontrer au coeur du soin. Le retour du sacré coeur des soignants.
La vie donne, elle n'est pas marchande et on ne marchande pas avec elle. Nous ne ferons pas fi d'un retour au spirituel. J'entends ici la connaissance de l'esprit de la vie. A ne surtout pas confondre avec le religieux.
Seule la mort, les accidents ou les maladies peuvent ainsi attiser l'incroyable puissance de la vie : une pulsation d'Amour qui fait battre le coeur du monde, qui relie tout.