Citations de Pasquale Ruju (27)
« Mon père est mort. J’ai pris en main l’entreprise familiale. » (...) « Vous avez commencé tôt », fit remarquer Mme Ferraro. Il n’y avait plus aucune hostilité ni méfiance dans sa voix. Peut-être que Marcello ne l’avait pas encore conquise, mais à l’évidence ils allaient s’entendre.
« Je suis le fils aîné. C’est mon devoir.
Si un bon livre, un bon polar plutôt , c’est un livre qu’on lit d’une traite sans,aucun temps mort alors celui-ci en est un. Écriture fluide, rapide, claire mais malheureusement on n’apprend rien.
La mafia italienne vue par le prisme d’une femme amoureuse et candide.
Les personnages sont creux, le contexte quasi inexistant et j’ai lu de bien meilleurs livres sur le sujet.
C’est un livre facile, trop,facile. Sitôt refermé sitôt oublié. La fin surprenante est bâclée.
Une pièce.
Nue, murs de ciment brut, climatisation impuissante à atténuer la chaleur torride de juillet. Pourtant cela ne semble pas gêner la veuve. Pâle, presque immobile, elle reste là, assise derrière une large table de métal vissée au sol. Sans dire un mot, sans faire un geste. Une caméra de télévision, fixée en hauteur sur le mur devant elle, doit renvoyer à un écran de surveillance chacun de ses moindres mouvements, chacun de ses changements d’expression, chacun de ses soupirs. Là, derrière le mur, ils essaient de savoir ce qui se passe dans sa tête. Ils essaient de savoir pourquoi elle a fait ce qu’elle a fait. Ils veulent comprendre.
Comprendre, rien que ça, pense-t-elle. Comme si c’était facile.
vous me racontez une histoire, Annamaria. Une belle histoire d'amour. Peut-être est-ce comme cela que vous l'avez vécue, au moins pendant un certain temps. Ce n'est pas que je ne vous croie pas, vraiment... mais voyez-vous..." L'index de Silvia Germano se pose sur la première ligne de la feuille la plus à gauche sans qu'elle baisse le regard. "C'est seulement une partie de la vérité"
C’est comme cela que les choses se passaient, dans ces régions-là.
Elle avait quinze ans le jour où ils s’étaient rencontrés pour la première fois. Elle vivait encore là-bas, en Calabre, au fin fond de la Locride, dans un village perché à mi-chemin entre le haut plateau et la mer. Avec Caterina, sa sœur cadette, elle prenait tous les jours un vieil autobus qui les amenait dans une bourgade à peine plus grande, sur la côte, où elles suivaient des cours à l’école normale.
Silvia Germano se place en face de la veuve, pendant que Morelli referme la porte de l’extérieur, les laissant seules. Annamaria ne bouge pas pendant un long moment. Elle a bien entendu la voix de la nouvelle arrivée, mais elle prend quand même son temps avant de lever la tête et de la regarder à son tour. Silvia Germano soupire, puis elle s’assoit en face de la femme. Elle pose sur la table la sacoche qu’elle a apportée et en sort un dossier plutôt volumineux. Elle se met à le feuilleter. Sur la première page, il y a une photo de la veuve, en format A4. Elle a été prise dans la rue, de loin, au téléobjectif. Sur la photo, elle descend d’une grosse berline, elle porte un pardessus clair et des lunettes de soleil. Belle comme toujours, mais sérieuse, presque renfrognée.
Exactement le contraire de la femme dans la salle d’interrogatoire, Silvia Germano. Maigre, grande, athlétique, un tailleur gris acier austère, des cheveux d’un blond cendré attachés avec soin. Unique note de couleur : ses lunettes de marque violettes, qui mettent en valeur ses yeux verts de chatte. Des yeux intelligents, parfois d’une froideur glaciale ; ceux d’une femme qui sait se faire respecter. Morelli la respecte, ça oui. Et c’est peu de le dire. Il n’a jamais prêté attention aux phrases de certains de ses collègues, quand ils disaient que le nouveau substitut du procureur — belle femme, par ailleurs — avait en permanence un balai dans le cul. Propos de potaches, auxquels il évitait de participer. Il n’aurait pas aimé, ensuite, croiser ces yeux de chatte.
« Encore un peu de patience. Le substitut du procureur ne va pas tarder. »
L’inspecteur Morelli, donc, prend la parole. Une voix enrouée de fumeur mais pas hostile, et même chaleureuse, rassurante en quelque sorte. Il n’a pas l’air méchant, Morelli, mais il le fait probablement exprès.
C’est peut-être lui qui doit jouer le rôle du gentil flic.
Non, ça suffit. Trop de films, trop de romans. Calme-toi, Annamaria, reste calme.
La porte métallique sur le mur du fond s’ouvre tout à coup. L’homme qui entre est un inspecteur en civil, athlétique, la quarantaine. C’est lui qui a accompagné Annamaria dans cette pièce, quelques — ou de nombreuses ? — heures plus tôt.
Mais comment s’appelait-il ? Zut, elle ne retrouve plus son prénom. Son nom de famille, plutôt ; son prénom, évidemment, il ne le lui a pas donné. Quelle idiote. Moretti ? Non, Morelli.
Morelli, c’est ça, elle en est sûre.
Du temps.
Combien de temps a pu passer ? Deux heures ? Trois ?
Elle ne saurait dire. On lui a pris sa montre, tout comme les quelques bijoux qu’elle portait, après lui avoir fait signer un reçu.
Elle est en train de perdre la notion du temps, et c’est peut-être justement ce qu’ils veulent. C’est une stratégie pour affaiblir ses défenses. Ce sera plus facile, après, de l’amener à avouer. Peut-être aussi qu’il n’y a rien là de prémédité, la personne qui s’occupe de son affaire est peut-être simplement en retard. Mais elle a vu trop de films, et lu trop de livres. Et elle a imaginé beaucoup trop de mauvais scénarios pour pouvoir y croire.
Devant elle se trouve un micro relié à un magnétophone. Un système obsolète mais efficace, qui a servi des milliers et des milliers de fois.
Eh oui, pense encore Annamaria, Dieu seul sait combien d’histoires ont enregistrées ces bobines. Combien de cauchemars, combien de souffrances. Combien de remords.
Bientôt elle y ajoutera son lot. Ou peut-être que non. Pas de remords, en tout cas.
Elle n’en exprimera pas, des remords.
Elle ne pleure pas. Elle sait qu’elle ne pleurera pas. Elle ne leur donnera pas cette satisfaction.
Elle garde les yeux rivés sur le plateau de la table ; de temps en temps seulement, peut-être sans s’en rendre compte, elle se tord les mains.
Elle s’appelle Annamaria et elle a trente-sept ans. Elle est encore belle, même quand on la regarde sur un écran de surveillance. Belles, ses mains longues et minces ; beau, son visage régulier ; splendide, son épaisse chevelure d’un noir de jais. Même quand la mauvaise définition transforme tout en vagues taches.
Elle s’appelle Annamaria et elle a trente-sept ans. Elle est encore belle, même quand on la regarde sur un écran de surveillance. Belles, ses mains longues et minces ; beau, son visage régulier ; splendide, son épaisse chevelure d’un noir de jais. Même quand la mauvaise définition transforme tout en vagues taches.
Pour une fois — cela arrivait rarement — ce fut elle qui monta sur lui, qui le fit entrer en elle de cette façon, presque comme si elle voulait dominer cet homme tellement plus grand et plus fort qu’elle. Et pendant qu’ils bougeaient ensemble, en suivant ce rythme maintenant familier, elle avait pensé encore une fois que tout allait se passer pour le mieux. C’était sûr.
Il ne pouvait pas en être autrement.
Ils faisaient l’amour presque tous les jours, et au moins une fois par semaine Annamaria réussissait à atteindre l’orgasme. Ce n’était pas parfait, bien sûr, mais il paraît que la perfection n’est pas de ce monde.