Après avoir délibéré il y a quelques semaines, le jury du ✨"Prix du roman de la Gendarmerie Nationale"✨ composé de gendarmes, de personnalités du monde culturel et des Editions PLON, a récompensé Patrice Quélard pour son uvre romanesque "Place aux immortels".
Vidéo mise en ligne sur la chaîne YouTube de la Gendarmerie nationale.
Je n’ai plus d’ennemis dans cette guerre, elle est finie pour moi. Ou alors, si j’ai encore des ennemis, ils ne sont pas allemands, ni français, ni anglais. Ils sont juste colonels ou généraux.
En d’autres circonstances, Émile aurait trouvé ça amusant, de voir un juif alsacien assurer les arrières d’un antidreyfusard primaire. Curieusement la guerre permet parfois de laisser de côté certains conflits omniprésents en temps de paix.
Un homme de troupe qui sous-estime son adversaire est un suicidaire, mais un officier qui sous-estime son adversaire est un criminel.
A tous les gosses et à tous les hommes d’Europe et d’ailleurs envoyés au massacre, à leurs parents endeuillés, à leurs veuves, à leurs orphelins.
Des galons sur un tocard, cela ne ferait jamais plus qu’un tocard avec des galons, et ce ne serait guère mieux que de ne pas avoir de chef du tout. Alors qu’un crack avec des galons, c’est là que les galons faisaient toute la différence.
Émile considérait avec un certain amusement ces gradés qui racontaient ces faits d’armes du passé avec une précision si scientifique et une fierté si exaltée qu’on aurait pu croire qu’ils y étaient, alors que tous les protagonistes de ces épopées fertilisaient les chrysanthèmes depuis bien longtemps.
Les premiers sifflements, lugubres, passèrent au-dessus de la tête des hommes qui n’avaient pour dérisoire ressource que de la baisser.
C’est le nouvel uniforme, répondirent-ils aux autres qui s’en étonnaient, « bleu horizon » qu’ils appellent ça. C’est pour être moins voyants, pour se confondre avec l’horizon, quoi !
Et le froc toujours aussi rouge, observa l’un des « anciens », avec amusement, c’est pour se confondre avec quoi ? Les coquelicots ?
(…)
Et voilà ! Et nous, il nous manque plus que les oreilles, et on est des lapins de garenne !
La guerre… c’est tellement exceptionnel. Peut être que cela justifie des mesures d’exception. Après tout, dans le civil, on vous interdit de tuer, et là d’un seul coup, on vous paie et on vous décore pour le faire. J’avoue qu’il y a de quoi être désorienté.
On dit que ce sont toujours les meilleurs qui s’en vont. C’est vrai, mais incomplet. Pour ça au moins la guerre est juste, elle tue et mutile aveuglément les bons comme les ordures, les types sympas comme les sales cons.