Jolie, sans répondre aux canons de la beauté classique, elle n'était pas assez fortunée pour représenter un beau parti, mais elle avait l'esprit vif et elle brûlait de vivre pleinement sa vie.
C'était cette ardeur, ce désir indéfinissable d'aventures qui l'avait poussée à s'embarquer pour l'Afrique du Sud afin de réclamer son héritage. Elle sortit de la poche de sa jupe grise un présent de son oncle Benjamin. Ce petit lion en bois exotique était devenu le symbole de ses rêves. Elle serra le minuscule animal dans sa main et fixa l'horizon, le cœur gonflé d'espoir.
Peut-être ne rencontrerait-elle pas l'homme de sa vie en Afrique du Sud, mais du moins y découvrirait-elle l'aventure dont elle rêvait. D'une manière ou d'une autre, elle mettrait à profit sa liberté toute neuve.
L'extraction des diamants avait causé la mort de quantité d'hommes, dont certains s'étaient noyés, emportés par les pluies d'orage torrentielles qui balayaient parfois la péninsule sans crier gare. Kimberley Hole était un lieu de défi et de malédiction ; on y trouvait la mort ou la gloire. Il était inutile de tenter de le décrire. Il fallait le voir pour comprendre.
L'Afrique n'était pas faite pour les donzelles. Là-bas dans le grand Karoo, nom donné par les indigènes à cette étendue inhabitée qu'il fallait traverser pour atteindre Kimberley, se passaient des choses susceptibles de faire regretter à un homme courageux de ne pas être resté tranquillement chez lui.
En Afrique, les choses sont rarement telles qu'on les imagine. C'est un pays magnifique mais extrêmement rude.
Bien sûr elle voulait ce que veulent toutes les femmes : un mari et une famille, mais elle n'avait rien contre prolonger un peu son statut de célibataire.