Le chemin du deuil est long parce qu'il progresse sur une ligne de crête : il s'agit à la fois de conserver un lien très fort avec le mort et d'aimer des vivants, un autre compagnon, une autre compagne, un autre bébé, un autre enfant, sans que naissent des conflits intérieurs. Sur cette ligne de crête on finira par se rendre compte que le coeur est suffisamment grand pour accueillir tout ce qui semble contradictoire.
La mort a un sens, elle est indispensable pour laisser la place aux suivants. Philosophiquement, la mort donne son sens à la vie. Elle souligne l'urgence de vivre car notre temps est limité . Théologiquement, la mort est le moyen d'être réuni avec son Créateur et de recevoir l'accueil promis au Paradis, où l'on retrouvera ses proches défunts. Ce peut être une étape sur le long chemin de l'éveil qui permet d'accéder à d'autres vies pour vivre d'autres expériences .

Étude de Christophe Fauré : Féminité à l’épreuve, féminité dans l’épreuve.
Le plus aigu est sans doute la redéfinition parallèle de son rapport à soi-même : « après tout ce temps, qui suis-je devenu ? Qu est ce que Je me raconte sur moi ? En quoi puis-je me dire que ma vie a du sens ? Quelle est la vie que je vis ? Quel est ce ‘‘je’’ qui parle . Qui vit ce que je vis en ce moment ? » Tous ces aspects interagissent. A se percevoir beaucoup plus terne, fait de tristesse, de vécu un peu dépressif, de colère, on a ressenti et peut-être intériorisé ce reproche muet, « elle n'a pas fait son deuil ! » Qu'on le juge plus violent ou atténué pour une femme, il prend corps de réalité et influe à son tour sur le devenir. Évidemment, tous les cas de figure différent et il peut exister des va-et-vient entre les différentes étapes.
Mais tel est le sens : parvenir à cette redéfinition en se sachant différent et porteur de cette énorme cicatrice, à tout jamais. C'est cela la redéfinition par rapport à la personne que l'on a perdue, et non telle ou telle figure imposée. Il ne faut pas accepter un sens qui vienne de l’extérieur. Mais quel serait le sens, fût-il grand, si l'on se perd soi-même dans le processus ? C'est à celui qui vient de l'intérieur, qu'il faut être attentif et réceptif: c'est parfois un tout petit sens et l’expression de « devenir un plus bel être », ce possible « gain » différé bien après la perte terrible, doit être relativisée même si elle correspond à des réalités vécues, des expériences, des témoignages
Conte de Halida Hamdane : La fiancée de l’autre monde.
- Driss, tu ne peux continuer à pleurer ainsi. Tant que tu pleures, l'âme de ta bien-aimée reste là, elle rôde autour. Libère-la, laisse-la partir, laisse-la aller rejoindre les âmes bienveillantes, laisse-la ! Tant que tu pleures, elle ne partira pas, elle souffre. Tu ne veux pas la laisser souffrir ? Libère-la, laisse-la partir...