Moi /qui n’ai pas su trouver
Moi
qui n’ai pas su trouver
dans le buisson des voix anciennes
le poème et la main ouverte
et du faux infini qu’offre ce bleu
arrogant d’un ciel illimité aveugle
ai cru cependant en l’amour infini
et porté mon songe
jusqu’en terre
l’immobile
et sous la pierre, la muette,
n’ai su comprendre
le murmure du temps
le grondement des mondes,
l’évidence la lumière que retient
le plumage de l’oiseau
moi qui ai rassemblé les fragments
d’une folie passagère
pour y coudre le visage de celle qui
muette chante encore
dans la pénombre
de l’universel émoi
J'habitais le silence…
Extrait 2
J'ai lu entre les doigts du vent
l'empreinte des terres que pétrissent nos mains,
la caresse dans le gel des feuilles, des longues nuits
d'hiver
où neiges couvrent le silence
cristallisent le souffle.
dans la brume glissante la nuit
où dansent les mains muettes
et j'ai cru lire dans ma propre mort
le silence de la terre que murmurent
les branches des forêts lointaines.
Tu cherches la source et le bleu…
Extrait 2
C’est ton regard pourtant
qui croît
derrière ces montagnes enneigées
et ce blanc silencieux ton silence
qui rayonne
dans l’arc d’un feu intense
et brûle
au versant de tous monts
de toute mort
nulle source,
nul brasier ne couvrira ton enfance
de cendres
en tous points elle croît
C’est là…
C’est là
dans le rougeoiement du soir
où l’esprit s’étend comme la lumière rase
sur la terre imbibée du sang
de l’été
comme un feu de lumières tardives
espoir et mort viennent réinventer
le silence
En ce pays où le ciel très proche nous invite
aux premières envolées de l’âme
et nous plonge dans l’argile
dans l’obscure demeure
l’humble costume séculaire nous abritant
qu’à peine ta voix chante par-dessus l’opéra
des silencieuses retombées de l’Être.
Au creusé des plus profondes rides
de la terre il nous faut réapprendre
à croître dans le point d’aube et vieillir
lentement
dans le feuillet
des couleurs
que la nuit viendra verser
sur nos corps
plus proches.
Secrètement …
Extrait 2
Effacé du décor, tu danses près de lui,
tes mains lourdes de la mémoire
tiennent le chevalet de cette peinture ancienne
et tu danses tout près de ce pays
Mais tu sculptes déjà la matière du passé
l’archet de tes musiques futures
le ballet au cœur duquel tu viendras mourir
Feuillages de mémoire, l’arbre viendra fixer
la mouvance et fleurir l’immobile
en une longue danse
finale
Moi, l’aliéné le fou…
Moi, l’aliéné le fou
qui n’ai pas su aimer l’amour
comme j’aime la pierre muette
sous l’eau vive
La terre sous le gel
des saisons
Moi l’illusoire infini
L’ombre sans le soleil
la clarté vaine, aveuglante
sans même le vestige d’un bleu
que ton ciel printanier
a fait naître
Ce ciel en moi tout ce ciel vide
aujourd’hui cette démesure
privée de l’éclair de ton rire
du froissement de nos corps d’hier
et moi le froid le très froid
en moi sans toi,
mes mains gelées qui cherchent le fruit
et l’or sous la pierre
sous l’eau vive, ton visage tes lèvres
moi la terre qui pénètre la terre, qui entre
dans l’antre de mes jours
moi
sans
toi
Je me souviens de l’enfance…
Extrait 2
Nous étreignons nos chairs pour atteindre
l’envers de la matière
Éteindre le silence de nos mécaniques sans parole
et parfois s’ensoleille le monde
et nait un arc-en ciel
Mais pourquoi soudain, ce silence premier
Ce vide que nos bouches recrachent avides ?
La poésie est-elle muette, qui chancèle
aux lèvres des marionnettes humaines
et toujours cette pierre muette,
ce poème esseulé qui recouvre le bleu,
d’un blanc manteau d’oiseaux pâles
La clairière se fait rêveuse…
La clairière se fait rêveuse
de touches d’or en blé d’argent
nos yeux furent las d’attendre
que le feu brûle en son corps
de lumière pâle
la rêveuse se fait murmure
femme dans le ruisseau du temps
qui la couche et l’emporte
Nue elle dort lumière fauve
sang furieux rubis de feu sur la terre
notre mémoire
elle dort iris blême
incendiaire lueur qui,
d’ici jusqu’aux nuits
que nos paumes couvent ensemble
Oisillon
fébrile de douleur vive
s’élève éclair
et qui, là où soudain océan et soleil s’enfantent
rondeur rousse qui clôt le vide universel,
s’entrouvre un chant fragile
La clairière s’est faite chant du soir
rougeur sombre et cendres
de nos paroles vives
Friables…
Extrait 2
Qui es-tu
dans l’infini de nos visages
qui es-tu
lorsque nos chants s’éloignent ?
voleur de soleils que j’ai portés en toi,
je m’immobilise
au versant de mon ombre,
l’impossible lueur
Tu as cru en la rugosité…
Extrait 3
et tu as su mourir en chaque nuit
en chaque souffle pour qu’expirent les mots
et qu’inspirent les morts
et ce désert illimité
que tu franchis à chaque pas
en toi, hors de toi,
funambule sur l’équilibre fragile
Il t’a fallu mourir pour naître
à l’étonnement d’un jour d’automne,
noyé dans l’illusion du temps
il te faut écouter à présent
le souffle paisible
des braises et le crépitement
d’un feu qui brûle ailleurs
dans l’âtre d’une maisonnée enfouie
dans le temps
une vieille femme y contemple la flamme
où tendrement bleuit la nuit