De temps en temps, certains d'entre nous, les jeunes, provoquent un raz-de-marée dans l'océan de notre histoire, une poussée d'anxiété qu'enregistre l'électrocardiogramme de notre race. Nous nous mettons en colère et nous hurlons. Nous faisons la une des journaux. Nous nous déshabillons sur le campus des universités qui nous recrutent pour respecter leur quota d'étudiants appartenant à des minorités ethniques, nous courons nus en pleine tempête de neige et on parle de nous pendant des années comme ces dingues d'Indiens qui ont fait ceci ou cela: celui qui est parti faire le plein d'essence à la station service et qui a continué jusqu'au Canada, celle qui a sorti la poubelle et qu'on n'a jamais plus revue... Nous faisons comme nous pouvons, avec les moyens du bord. Nous nous débrouillons avec ce que nous sommes.
Faire Avec, Linda Hogan
Tant qu'un peuple ne peut exercer aucun contrôle sur la façon dont il est décrit, que son sentiment d'identité est bafoué à chaque instant dans les livres, les films, les programmes de radio et de télévision, il ne peut que se décourager. Mais quand il se met à définir lui-même les images données de lui, alors le simple espoir de survivre peut faire place à une espérance plus ample: celle de s'affirmer, de vivre, de désirer vivre.
Mon père, assis à l'intérieur du tipi, polissait des cornes de bison tout en fumant,; ma mère, enveloppée dans sa couverture et accroupie à côté de mon père sur la peau de bison, était occupée à ses broderies en piquants de porc-épic; j'étais paresseusement adossée près de l'entrée et j'observais, comme j'ai l'habitude de le faire, la ligne fine et lointaine où le ciel rejoint la prairie, et je me demandais, comme toujours, ce qui pouvait bien s'étendre au-delà. Et c'est alors qu'il est arrivé, cet aimable vieil homme aux cheveux blancs et au visage pâle et maigre.