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Citations de Pedro Lima (13)


Pour réaliser leur chef-d'oeuvre, les artistes aurignaciens de Chauvet-Pont d'Arc on employé neuf techniques graphiques élaborées, souvent associées entre elles, qui en font des maîtres accomplis de la préhistoire et de l'histoire de l'art.
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Pour préparer leur pigment, en particulier le fusain de charbon de bois, ces quelques artistes, peut-être encadrés par un seul maître, ont réalisé la combustion de branches de pin sylvestre, en particulier dans des zones profondes de la cavité. Mais en évitant de le faire dans la salle du Fond, l'une des plus richement décorées, peut-être pour ne pas l'enfumer. Une fois leur crayon fabriqué, c'est avec des traits rapides et assurés qu'ils ont fait naître sur les parois les lions, aurochs et chevaux qui accueillent le visiteur, comme tapis dans l'ombre des salles avant que la lampe torche du guide ne les illumine...
L'émergence de l'art à Chauvet-Pont d'Arc signifie-t-elle qu'il est apparu subitement, inventé par des génies doués d'une intelligence et d'une maîtrise technique en rupture avec les Homo sapiens qui les précédaient ? Certainement pas. Chauvet-Pont d'Arc n'a pas surgi du néant et d'autres formes artistiques antérieures ont dû exister, peut-être dans d'autres cavités encore inconnues, ou sur des supports périssables, peaux, écorces ou parois en plein air. De plus, Chauvet-Pont d'Arc n'est pas complètement isolée aux sources de l'art pariétal paléolithique. D'autres sites ornés ont été datés à des âges aussi reculés : Deux-Ouvertures, Tête du Lion et la grotte aux points en Ardèche, l'abri Castanet en Dordogne, Baume Latrone dans le Gard et Coliboaia en Roumanie. De plus, on retrouve dans ces deux dernières grottes des bestiaires proches de celui de Chauvet-Pont d'Arc, composés de félins, de mammouths et de rhinocéros. Proximité culturelle renforcée par des convergences de style, par exemple, cette même façon de figurer, à Coliboaia comme en Ardèche, les oreilles des rhinocéros au moyen d'une virgule de part et d'autre de la ligne du dos. Ainsi, c'est une véritable Europe de la culture qui se dessine à l'aube de l'occupation de ce continent par Homo sapiens, inventée et importée par des tribus de chasseurs-cueilleurs nomades venus de l'est, d'Eurasie et du Proche-Orient. Des nomades qui ont peu à peu colonisé l'ensemble de l'Europe, emportant leurs croyances, leurs techniques et leurs organisations sociales. Ils ont réalisé à Chauvet-Pont d'Arc, après avoir élu ce site façonné par les éléments naturels assimilés à des divinités, leur plus fabuleux chef-d’œuvre.
p. 78
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Niché au cœur de l'alcôve centrale du grand panneau de la salle du Fond, ce petit cheval de 60 centimètres à peine occupe une place symboliquement prédominante, sans que l'on connaisse les raisons de ce choix. Cette espèce jouait-elle un rôle majeur dans les mythes ou les récits véhiculés par l'iconographie de la salle du Fond ? Peut-être... En tout cas, il a été représenté plein de vie, quatre courts traits gravés à l'avant de ses naseaux figurant, selon toute vrai-semblance, son souffle vital. Jean Clottes, premier directeur de l'étude scientifique de Chauvet-Pont d'Arc, note de plus que les artistes ont préparé ici le support rocheux avant d'y déposer, l'image de l'animal, comme en d'autres endroits de la cavité. La forme du raclage évoque même celle du cheval, y compris une esquisse de la tête et d'un œil. « L'impression est celle d'un animal sortant des profondeurs de la roche », dé-taille le spécialiste. Sur le rebord supérieur droit de la niche, un bison produit un effet de surgissement similaire. Sous le bison, deux mammouths ont été figurés comme imbriqués l'un dans l'autre, d'après la description de Marc Azéma et Bernard Gély. Le savant dosage de charbon et d'argile restituant à merveille la couleur grise de la robe de l'animal principal.
p. 151

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« Chauvet-Pont d'Arc », “Le Premier Chef-d'œuvre de l'humanité”, Pedro Lima, éditions - SYNOPS © mai 2014
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Artistes confirmés, ceux qui ont peint et dessiné à Chauvet-Pont d'Arc devaient bénéficier d'une position à part dans le groupe, peut-être privilégiée.
Complètement immergés dans leur milieu naturel, ils se consacraient à plein temps à l'art et à leurs autres fonctions rituelles. Observant les animaux de longues journées durant, avant de les représenter sur les parois. Ils devaient aussi transmettre leurs savoirs rituels et picturaux à leurs successeurs, qui les accompagnaient peut-être au fond de la cavité. Cela explique-t-il la présence d'adolescents à Chauvet-Pont d'Arc, comme cela sera encore le cas dans d'autres sanctuaires plus tardifs ? L'hypothèse est plausible. Les artistes, peut-être aussi chamans, étaient certainement en charge de la vie spirituelle des tribus aurignaciennes, leur conférant la cohérence et la stabilité, seule à même d'expliquer l'extraordinaire longévité de l'art pariétal paléolithique, durant 25 millénaires.
À Chauvet-Pont d'Arc, les Aurignaciens n'ont pas seulement écrit le premier chapitre de l'histoire de l'art. Ils ont aussi retranscrit parmi les premiers mythes fondateurs de notre humanité, dont certains se sont perpétués jusqu'à nos jours. Ceux mettant en scène un ours servant d'intermédiaire entre humains et animaux, encore vivaces dans les cultures arctiques. Et d'autres, tel celui figuré dans la salle du Fond, où un sexe de femme s'enlace avec un bison. Rappelant, comme le souligne Jean Clottes, le mythe du Minotaure et au-delà, « tous ceux tirés de multiples complexes ethnographiques où des mortelles ont des relations avec des dieux ou des esprits transformés, aux formes partiellement animales ». Déesse souterraine de la fertilité enfantant le fantastique bestiaire qui l'entoure, selon Joëlle Robert-Lamblin, ou lointaine ancêtre des divinités de Crète et de Méditerranée, la Vénus de Chauvet-Pont d'Arc parle au plus profond de nous-même et nous interroge sur nos origines. Premier chef-d’œuvre de l'humanité, Chauvet-Pont d'Arc constitue le berceau mondial de l'art, l'écrin minéral des premières images connues à ce jour. Sur ses parois tourmentées, à la lueur vacillante des torches de pin sylvestre, se jouent les premiers épisodes de la vie symbolique des hommes, de leurs peurs, de leurs voyances et de leurs espoirs. Autant d'images bouleversantes, que la 3D nous révèle aujourd'hui dans toutes leurs dimensions.
p. 83
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Une cavité sous le signe de l'eau et de l'ours
Ce sentiment d'un investissement total de la caverne, d'une structuration organisée de son espace est renforcé par d'autres indices archéologiques. Les spécialistes ont ainsi noté que des crânes d'ours fossilisés ont été intentionnellement déplacés de leur position d'origine. Ce fut le cas dans la salle du Crâne, où l'un d'eux a été déposé volontairement sur un bloc rocheux détaché de la voûte, en compagnie d'autres crânes disposés aux alentours. Autre découverte, confirmée par l'analyse tridimensionnelle de blocs rocheux situés sur le sol : certains amas de pierre ont été formés volontairement par les hommes, peut-être dans un but cultuel, comme dans la salle des Panneaux rouges. Dans la salle Hillaire, un bloc de calcite détaché d'une paroi a été déplacé sur plusieurs dizaines de mètres, puis aménagé pour former une marche, permettant de franchir le dénivelé d'une banquette d'argile. Dans la galerie du Cierge, d'autres blocs ont été déplacés, puis assemblés pour former un bassin de rétention d'eau, rendu étanche par de l'argile prélevée à quelques mètres de là, dans laquelle l'auteur de cet aménagement mystérieux a laissé l'empreinte de ses doigts.
A-t-on voulu retenir l'eau pour l'empêcher de s'écouler plus loin dans la cavité? Avait-elle une fonction rituelle, codée ? Le mystère reste bien sûr entier, même si d'autres faits militent en faveur d'une importance symbolique de l'eau pour les artistes de Chauvet-Pont d'Arc. Ainsi, le panneau des Chevaux de la salle Hillaire, chef-d’œuvre majeur du sanctuaire, est-il structuré et organisé autour d'une alcôve dont on s'approche aujourd'hui en avançant sur une passerelle. Là, au pied de la paroi de l'alcôve, sous l'image d'un bison qui semble vouloir s'échapper au galop et de deux félins en pleine parade nuptiale, une anfractuosité dans la roche est visible. Lors des fortes pluies, l'eau coule par cette ouverture à la manière d'une source, dans un gargouillis caractéristique. Le phénomène spectaculaire, s'il s'est produit à l'époque, n'a pu que marquer l'esprit des Aurignaciens. Se peut-il, comme le propose l'anthropologue Joëlle Robert-Lamblin, qu'ils aient vu dans ce filet d'eau surgi de l'arrière de la paroi une manifestation surnaturelle ? Leur rappelant le prodige de l'arche de pierre du Pont d'Arc enjambant la rivière, non loin de la caverne ? Pour cette chercheuse, la grotte considérée comme sacrée par les hommes était peut-être placée, dans son ensemble, sous le signe de l'ours, omniprésent sur les sols fossiles et les parois. Un plantigrade considéré comme « un intermédiaire entre le monde sensible et un monde surnaturel » peuplé d'esprits, dont la cavité aurait été le séjour. Dans ce monde souterrain et effrayant, les artistes, peut-être aussi chamans, allaient à la fois éprouver leur courage et représenter sur la roche les images qui supportaient les mythes fondateurs de leurs groupes.
Ce caractère surnaturel supposé de la caverne aurait pu être renforcé par les innombrables anfractuosités, failles et recoins naturels, dont les animaux peints il y a 36 000 ans semblent souvent surgir. Comme s'échappant du « monde autre », un au-delà hypothétique dont la paroi aurait marqué la frontière, dans le cadre chamanique proposé par Jean Clottes pour interpréter l'art paléolithique. Dans ce même cadre, l'acte d'apposer la main sur la paroi, tant de fois répété à Chauvet-Pont d'Arc puis plus tard tout au long de l'art préhistorique, aurait eu pour fonction d'entrer en communication, symboliquement, avec les forces, les esprits et les puissances de cet au-delà minéral.
p. 82
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Comme leurs pairs d'autres régions, les artistes de Chauvet-Pont d'Arc ont respecté certaines conventions stylistiques traduisant certainement une sorte de contrôle exercée par les groupes, dans la forme générale des animaux et la manière de figurer les yeux, les oreilles et les membres. Pour autant, ceux qui ont orné la grotte Chauvet-Pont d'Arc ont également exprimé une créativité, une liberté dans le trait associée à une qualité d'observation et de reproduction tout à fait hors du commun. Pour dessiner avec une telle précision certains détails anatomiques des membres, de la tête ou du poitrail, il est probable, d'après la préhistorienne et membre de l'équipe scientifique Valérie Feruglio, que les Aurignaciens aient longuement observé au préalable leurs modèles dans leur environnement. Voire même, qu'ils aient réalisé l'équivalent de dissections anatomiques sur les animaux chassés ou retrouvés morts. Au moment d'effectuer leurs figures au fond de la cavité, ils se sont ensuite affranchis de certains codes graphiques et du « bain culturel aurignacien » évoqué par Valérie Feruglio, pour s'autoriser, dans le secret du sanctuaire, une « véritable liberté créatrice » à l’œuvre.
À la fois artistes remplissant cette fonction de nature spirituelle au service du groupe et créateurs à part entière, les peintres de Chauvet-Pont d'Arc ont investi la cavité dans son intégralité, en alternance avec l'ours des cavernes qui y hivernait, comme l'indiquent les griffades superposées à certains dessins. La présence de l'homme est en effet avérée jusqu'aux moindres recoins du sanctuaire, même non ornés. Ainsi, dans la galerie des Croisillons, à plus de 200 mètres de l'entrée, des empreintes de pas d'un préadolescent ont été découvertes, témoignage émouvant d'une exploration qui s'est déroulée il y a peut-être 36 000 ans à l'Aurignacien, ou plus récemment lors du deuxième passage des hommes. La présence humaine, troublante, est également palpable face aux figures dont les traits semblent avoir été dessinés la veille. Ou devant ces émouvantes empreintes apposées sur la roche, paumes ou mains complètes négatives et positives. L'étude scientifique a montré que certaines mains étaient celles d'une femme ou d'un adolescent (le même que celui de la galerie des Croisillons ?). Et que d'autres ont appartenu à un homme de grande taille, 1,80 mètre environ, dont l'auriculaire légèrement tordu se retrouve en plusieurs points de la cavité. Magie incomparable de Chauvet-Pont d'Arc où Homo sapiens est là, présent sur les sols et les parois, dans toute son humanité.
p. 79
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Pour les préhistoriens, le choc ressenti à Chauvet-Pont d'Arc a été d'autant plus grand que les dessins somptueux que renferme la cavité, parfaitement exécutés, sont aussi les plus anciens connus à ce jour, avec 36 000 ans d'âge ! En effet, c'est ce qu'ont montré les datations, 85 au total, effectuées sur des échantillons prélevés dans la cavité. Ces analyses ont révélé deux phases d'occupation du site, la plus ancienne datée de -36000 environ, à l'Aurignacien, la seconde autour de -30000, au Gravettien. Mais seuls les Aurignaciens auraient réalisé des peintures et des dessins, leurs lointains successeurs se contentant vraisemblablement d'investir les lieux, certainement impressionnés par ce qu'ils voyaient, sans laisser de traces artistiques.
Or, les théories héritées des travaux du pré-historien et ethnologue français André Leroi-Gourhan, dans les années 1960, prévoyaient que l'art pariétal paléolithique était apparu à partir de formes balbutiantes et imparfaites, à l'Aurignacien, pour s'améliorer et se perfectionner peu à peu, au fil des millénaires, jusqu'au sublime de Lascaux, à la période magdalénienne. Avec Chauvet-Pont d'Arc, cette conception gradualiste des origines et de l'évolution de l'art est entière-ment bouleversée et écartée. Au contraire, dans la cavité ardéchoise, l'art des origines est, d'emblée, parfaitement maîtrisé. Autre remise en cause due à Chauvet-Pont d'Arc : la zone d'influence de l'art pariétal paléolithique, auparavant centrée sur la région francocantabrique (Dordogne, Pyrénées, Pays basque et Cantabrie) déborde large-ment vers l'est, l'Ardèche devenant, à son tour, un centre majeur de l'art préhisto-rique, au même titre que la Provence avec Cosquer, ou l'Yonne avec Arcy-sur-Cure.
p. 76 et 78
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LA SALLE DU CRÂNE
Située dans le prolongement de la salle Hillaire, la salle du Crâne attire l'attention par les dizaines d'ossements et de crânes d'ours des cavernes qui en jonchent le sol, dont certains semblent immergés sous une gangue de calcite. Sentiment de mystère encore renforcé par la présence, au centre de la salle, d'un bloc rocheux détaché de la voûte, sur lequel a été posé l'un des crânes. L'effet de mise en scène, déjà employé pour certains panneaux ornés, devient ici saisissant. Comme le notent Carole Fritz et Gilles Tosello, toute la salle ressemble à un amphithéâtre dont les « gradins » seraient constitués de banquettes d'argile grise qui paraissent la ceinturer. D'autres observations, réalisées par le spéléo-archéologue Yann-Pierre Montelle, renforcent cette idée. Ainsi, certaines banquettes naturelles au-raient été remodelées par les hommes. En outre, le bloc principal sur lequel est posé le crâne aurait été volontairement aménagé pour remplir la fonction recherchée, d'ordre vraisemblablement symbolique, en lui accolant une seconde pierre qui semble solidarisée à la première par la main de l'homme.
De telles actions, si elles devaient être confirmées par de futures recherches, iraient dans le sens d'une cavité entièrement aménagée par les hommes, comme l'a déjà en partie montré l'équipe de géomorphologues du laboratoire Edytem dirigée par Jean-Jacques Delannoy. Peut-être à des fins de culte ? Dans cette optique, les premiers blocs rocheux assemblés en amas dans les salles précédentes, tout comme l'étonnant bassin de rétention d'eau réalisé dans la salle du Cierge constitueraient les étapes successives d'un cheminement symbolique convergeant vers le centre emblématique du sanctuaire. Et la salle du Crâne serait alors le premier théâtre connu, placé sous le signe de l'ours, craint et respecté. Au point d'être considéré comme « un intermédiaire entre le monde sensible et un monde d'esprits dont la caverne aurait été le séjour », selon l'hypothèse avancée par l'anthropologue Joëlle Robert-Lamblin.
p. 128
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Pour représenter ce panthéon animal et symbolique, les artistes de Chauvet-Pont d'Arc ont fait appel à un éventail technique parfaitement maîtrisé, qui laisse encore pantois les spécialistes de l'art pariétal et tous ceux qui ont pu observer leurs œuvres : dessin au fusain de charbon de bois, peinture à l'ocre rouge et jaune, emploi du tampon ou de la paume de main pour apposer du pigment sur la paroi, gravure fine au silex ou avec les doigts lorsque le support était assez meuble, préparation de la paroi par raclage de la surface molle, exploitation des reliefs de la roche pour figurer les animaux, usage de l'estompe pour accentuer encore les volumes des corps, représentation du mouvement, suggestion de la perspective...
De plus, certaines techniques ont été associées pour réussir certains des plus beaux chefs-d’œuvre de l'art paléolithique, et de l'art en général. C'est le cas du panneau des
Chevaux, dans la salle Hillaire, qui allie parfaitement dessin, gravure et estompe pour composer une scène complexe associant chevaux, aurochs et rhinocéros. Ou la fabuleuse charge des lions sur un troupeau de bisons, ultime mise en scène qui s'offre au visiteur dans les tréfonds de la caverne, et bijou de l'art paléolithique. L'admiration et l'émotion sont totales face à ces tableaux élaborés, parfaitement conservés, sur lesquels des dizaines d'animaux comme doués de vie sont associées en véritables scènes éthologiques tels la parade nuptiale d'un félin mâle, reconnaissable à son scrotum, l'affrontement belliqueux de deux rhinocéros en rut, ou l'affût patient et silencieux des lions avant la charge fatale.
p. 76
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Annoncés au mois de juin 1995, les premiers résultats, obtenus par la méthode du carbone 14, font l'effet d'une bombe : avec des dates situées autour de 31 000 ans avant le présent (BP), les dessins de la cavité ardéchoise sont alors les plus anciens que l'on connaît ! Depuis, et après calibration du carbone 14, deux groupes de dates ont été obtenus : autour de -35 500 ±1000 pour le plus ancien, correspondant à la réalisation des dessins. Et entre -30000 et -31 000 pour le second, correspondant au passage d'hommes qui n'ont vraisemblablement pas laissé de traces artistiques. Avec 36 000 ans d'âge, les somptueux dessins de la grotte Chauvet-Pont d'Arc sont donc, à la fois, les plus aboutis techniquement avec la maîtrise de l'estompe et de la perspective, et les plus anciens de l'humanité... Deux fois plus anciennes, à titre d'exemple, que celles de la célèbre grotte de Lascaux, découverte le long de la Vézère en 1940, en Périgord, les œuvres de Chauvet-Pont d'Arc datent de la période aurignacienne, la première véritable culture du Paléolithique supérieur en Europe.
Un bouleversement, donc, dès 1995, de nos conceptions sur les origines et l'évolution de l'art, ainsi que sur l'intelligence et les capacités cognitives de nos ancêtres, qui ne fera que se confirmer par la suite.
p. 47
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Les techniques de réalisation dénotent d'emblée un talent digne des plus grands maîtres de la Préhistoire, et au-delà. Dessin, peinture, gravure et estompe sont maîtrisés à la perfection pour représenter des animaux observés au préalable dans l'environnement, et épousent parfaitement les reliefs tourmentés des parois.
Autant de trésors qui placent, dès 1995, Chauvet-Pont d'Arc au panthéon des grottes ornées paléolithiques, aux côtés de Lascaux en Dordogne, Niaux en Ariège, Cosquer en Provence ou Altamira en Espagne... À l'époque, la cavité ardéchoise constitue la dernière découverte en date en matière d'art pariétal paléolithique européen, une pratique culturelle qui s'est perpétuée en Europe, essentiellement sous terre, entre -36 000 et -10 000 durant les périodes aurignacienne, gravettienne, solutréenne et magdalénienne. Selon les préhistoriens, les grottes ornées constituaient des sanctuaires réservés aux pratiques cultuelles : cérémonies d'initiation, pratiques chamaniques ou transmission de récits mythologiques. Elles ont été surtout décorées de figures animales, souvent représentées de profil, en l'absence d'éléments naturels, végétation ou reliefs, ainsi que de nombreuses empreintes de mains, de signes mystérieux et de formes mi-humaines, mi-animales.
p. 73
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Tous ceux qui la visitent insistent ainsi sur la fraîcheur extraordinaire des pigments, l'état inviolé des sols et des parois... « Comme si, à chaque fois que nous pénétrons par l'entrée, les artistes quittaient la grotte par l'autre extrémité », témoigne Dominique Baffier, qui en fut la conservatrice entre 2000 et 2014.
p. 48
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Là, sur douze mètres de parois à l'aspect presque doré, une fresque unique dans tout l'art préhistorique se déploie. Un feu d'artifice pictural qui associe des félins par dizaines, de puissants rhinocéros représentés en perspective, une harde de bisons et un petit cheval comme tapi dans une alcôve. Plus loin, un pendant rocheux est décoré d'un bouleversant motif mi-humain mi-bison, mythe fondateur tout droit sorti de la nuit des temps. « Nous en avions tous les larmes aux yeux, et nous nous demandions en permanence si nous ne vivions pas un rêve éveillé », raconteront par la suite les découvreurs.
Oui, la cavité cachée sous les falaises du cirque d'Estre est un chef-d’œuvre majeur et de l'art pariétal et de l'humanité, à l'égal de Lascaux, en Dordogne, Cosquer en Provence ou Altamira en Cantabrie espagnole... Un chef-d’œuvre qu'il est temps, désormais, de mettre en partage.
p. 44
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