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« Ces derniers instants n'auraient pas dû exister »

L'idée préconçue que j’ai dû corriger au fil de toutes ces années d’enquêtes dans les affaires de pédophilie, c’est celle qui nous pousse à croire que chaque victime éprouve une haine profonde à l'égard de son agresseur. Ainsi, une fillette a avoué à un collègue qu’elle aimait aller s’asseoir sur les genoux de son papa tous les dimanches après-midis alors que sa mère allait rendre visite à sa grand-mère. Son père la cajolait alors et la caressait, ce qu’elle trouvait très agréable. « Ce n’est que pour les cinq dernières minutes, alors qu’il me caressait entre les jambes, que là, j’aurais préféré que ça s’arrête, disait-elle, mais j’aimerais pouvoir continuer à lui faire des câlins tous les dimanches. » C’est ce genre de récit de victimes qui m’a donné une vision plus claire des agressions sexuelles en général et des agressions sexuelles sur enfants en particulier. Ce phénomène est très complexe et trop souvent examiné de façon simpliste.

On entend parfois des récits d’enfants ou d’adolescents, agressés sexuellement pendant des années, qui reviennent pourtant régulièrement auprès de leurs agresseurs. Incompréhensible ? Sont-ils obligés d'entrer dans cette maison ? Non ! Mais ils le font quand même. Pendant des mois, voire des années… L’agresseur les a conditionnés, manipulés ou trompés, mais il ne s’agit pas uniquement de ça. Non, ces enfants continuaient de rendre visite à leur agresseur parce que, d'une façon ou d'une autre, ils se sentaient bien chez lui. L’agression sexuelle n’était que la partie désagréable de cette visite. Certains racontent par la suite que la maison de leur agresseur était plus « chaleureuse » que leur propre foyer. Il est clair que c’est également une des raisons pour lesquelles le pédosexuel les avait « sélectionnés ».

Un agresseur a d’ailleurs tout intérêt à ce que l’enfant revienne spontanément vers lui. C’est pourquoi il fait tout ce qui est en son pouvoir pour mettre ses victimes à l'aise. En effet, cela réduit le risque que ses agressions soient rendues publiques. Mais cela cache souvent une stratégie encore plus perverse : en effet, l'agresseur peut ainsi rappeler à l’enfant que celui-ci est toujours venu de son plein gré. De cette façon, il parvient, d’une manière très lâche, à faire porter la responsabilité de l’abus à l’enfant.

Ce qui n’a pas de sens, seul l’adulte porte la responsabilité de ce genre d’agression.

Au fil des années, j’ai dû revoir mon jugement sur une autre idée préconçue. Auparavant, je pensais que l’ampleur d’un traumatisme résultant d’une agression sexuelle était plus ou moins proportionnelle à la gravité de celle-ci. Mais ce n’est pas le cas. Ainsi, je me souviens d’un animateur de camp qui, le soir, faisait venir dans sa tente les jeunes garçons qui avaient fait des bêtises pendant la journée. Le jeune devait enlever tous ses vêtements, sauf son caleçon, et l’animateur l’obligeait à regarder un livre pornographique. Dès que celui-ci constatait une érection, la punition était accomplie et il pouvait quitter la tente.

C’est un comportement qui dépasse clairement les limites, et je me demande si cet animateur n’est pas un véritable « pédosexuel ». On pourrait cependant estimer que c’est moins grave qu’un autre crime sexuel comme, par exemple, un viol et penser dès lors que ce genre de comportements n’aura pas autant de conséquences sur l'avenir de la victime. Sans doute, les jeunes, eux aussi, estimaient à ce moment qu’il ne s’agissait que d’une blague de mauvais goût ? Mais, plus tard, lors de l’audition des victimes, nous avons compris que, même vingt ans plus tard, celles-ci n’avaient pas encore réussi à digérer ce qu'elles avaient subi. La nuit, ces hommes se réveillaient régulièrement en nage après avoir fait des cauchemars qui les poursuivaient.

Les agressions sexuelles sur les enfants sont encore trop souvent associées au cliché du vieil homme sale et bossu qui repère un enfant à vélo, l'attire derrière les buissons et le viole. Au fil des pages, ce livre nous apprendra que, la plupart du temps, cela n’arrive pas de cette façon et que les agresseurs se retrouvent dans la plupart des cas parmi les amis ou la famille de la victime et de ses parents.

Pour que ce soit bien clair : en soi, la pédophilie n’est pas un crime. Tout le monde a le droit d’avoir des fantasmes sexuels concernant les mineurs d’âge ; c’est le principe de liberté d’opinion qui le veut. Les pédophiles qui ne se contentent pas de rêver et de fantasmer, mais qui passent à l'acte et agressent réellement des enfants, sont des pédosexuels, ce qui est bel et bien punissable par la loi.

Une étude récente montre que les agressions sexuelles sont particulièrement fréquentes. Une fille sur trois et un garçon sur cinq vivent, avant leur dix-huitième anniversaire, un contact que l’on pourrait qualifier de harcèlement sexuel. Les jeunes filles sont donc plus souvent agressées que les jeunes garçons. Le pourcentage de filles agressées augmente également avec l’âge.

Bien sûr, ces contacts ne se limitent pas uniquement aux viols et aux attentats à la pudeur. Il peut également s’agir d’un exhibitionniste qui leur a foncé dessus ou encore de la main baladeuse d’un oncle qui voit dans les trois baisers traditionnels du Nouvel An une chance de toucher un sein « accidentellement ». C'est le sentiment d'agression ressenti par l'enfant qui détermine l'ampleur du traumatisme.

Lorsque la directrice de Child Focus m’a demandé pourquoi je voulais écrire ce livre, alors qu’il existait déjà une littérature scientifique considérable sur le sujet, je lui ai dit que la réponse se trouvait dans sa question. En effet, des rayons entiers traitent déjà de pédophilie, mais je n’ai encore jamais repéré de livres écrits à l’intention de lecteurs qui n'étudient pas cette problématique, que ce soit sur le plan scientifique ou professionnel.

La raison principale de mon initiative est assez complexe et légèrement contradictoire. J’entends alerter et éveiller les parents, les grands-parents et toute personne soucieuse de la sécurité des enfants, tout en les incitant à ne pas devenir paranoïaques.

En gros, je voudrais inviter les lecteurs à dorloter et câliner davantage nos petits, mais pour les bonnes raisons, à savoir l’amour que nous leur portons. Je trouverais cela particulièrement regrettable que notre société en vienne à considérer toute personne entrant en contact physique avec les enfants comme un pédophile supposé. Nous ne devons pas les priver de la chaleur physique et émotionnelle dont ils ont besoin, sous prétexte que des pervers sont dans la nature. Au contraire.

Les exemples pratiques largement présentés dans ce livre sont basés sur des faits réels que j’ai pu constater en tant que policier, ou que des collègues m’ont rapporté. Ils sont rédigés pour que ni la victime ni le suspect ne puissent être identifiés. À cette fin, deux ou plusieurs affaires ont parfois été fondues dans le même récit.
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Ce livre est des plus originaux. Ceux qui s’attendent à des récits spectaculaires et à des détails croustillants sur la chasse aux déviants sexuels resteront sur leur faim. En effet, le policier Peter De Waele, chargé des affaires de pédophilie depuis plus de quinze ans, veut donner au lecteur une image plus précise de ce qui se joue réellement dans cette période très sombre de la vie.

Pourquoi et comment les auteurs de ce genre de crime passent-ils à l’acte ?

Comment cela se fait-il que des enfants et leurs parents se laissent berner ?

Que pouvons-nous faire, en tant que pouvoirs publics, ou éducateurs, ou société, pour éviter et combattre ces actes horribles ?

Le résultat des recherches de l’auteur afin répondre à toutes ces questions se retrouve dans ce livre sobre et audacieux. Il est pourtant facile de faire parler de soi dans la lutte contre les crimes sexuels sur les enfants. Le journal britannique à sensation, le News of the World, disparu à la suite d’un scandale de trop, se faisait une gloire de publier, systématiquement, à la une, des photos de pédophiles présumés, même quand ils bénéficiaient encore de la présomption d’innocence (on ne sait jamais !...). Il est bien plus difficile et courageux de tenter de comprendre les agresseurs potentiels et de retrouver, dans leur passé, les racines de leur plaisir pervers pour pouvoir les guider vers le changement, en les mettant face à leurs responsabilités, ou encore en leur faisant prendre conscience de l’existence de structures d’accompagnement.

Ceux qui se soucient réellement de la sécurité de nos enfants, ceux qui veulent détecter les pédophiles potentiels assez tôt, et ceux qui veulent donner les armes aux victimes éventuelles pour qu’elles s’expriment et se défendent, doivent choisir le chemin le plus difficile. En effet, ce n’est qu’en tenant compte de tous les aspects du problème, étape après étape, que l’on pourra atteindre des résultats concrets.

L’auteur de ce livre (et, chez Child Focus, nous le savons par expérience) est un policier engagé qui ne lâche rien jusqu’à ce qu’il découvre la vérité. C’est donc un livre honnête et ouvert dans lequel il confronte le lecteur avec des exemples concrets et horribles et avec l’être humain dans toute sa vulnérabilité.

Il décrit en détail le mode de pensée des auteurs de violence sexuelle. Il raconte comment les enfants victimes de ces actes inacceptables sont touchés dans le plus profond de leur être. Il parle également en toute franchise de ses propres émotions et celles de ses collègues, eux qui sont en permanence confrontés à ce genre d’affaires, en tant qu’êtres humains et en tant que parents. Il nous invite à briser les tabous et à nous libérer de l’hypocrisie : en notre qualité de dirigeant, jeune ou aîné, éducateur ou animateur, agresseur ou victime (éventuels), nous devons enfin oser aborder le sujet.

La pédosexualité est un phénomène complexe. Lutter contre celui-ci demande une approche spécialisée et une législation réfléchie et adaptée aux évolutions de la société. Il n’est pas possible de combattre les agressions d’enfants à l’aide de gaz lacrymogène ou d’armes à feu. Il convient plutôt d’utiliser des instruments adaptés comme la compétence extraterritoriale, la recherche sur Internet et l’interrogatoire audiovisuel des victimes. Les soins durables apportés aux victimes, – indispensables au demeurant, – demandent également une attention particulière, tout comme l’approche et l’encadrement des auteurs.

Aujourd’hui, la police doit donc être prête à interagir avec les acteurs des secteurs du bien-être et la santé. Le fil rouge de ce livre est l’attention portée à la prévention. Mais l’auteur nous explique que la « prévention de la pédophilie » n’existe pas en soi. Il plaide toutefois pour que l’on apprenne aux enfants à se défendre, et, là non plus, il n’y a pas de recette miracle ! Il s’agit d’entourer au quotidien les enfants avec toute la chaleur et tout l’amour dont ils ont besoin. De leur montrer concrètement que nous les aimons et que nous sommes fiers d’eux, pour que d’autres personnes malintentionnées ne le fassent pas à notre place.

Apprendre à l’enfant à se défendre, c’est aussi lui donner de la place, le laisser vivre sa vie au sein d’une relation parent-enfant honnête, généreuse et ouverte. Lui faire confiance et lui donner progressivement des responsabilités pour qu’il apprenne à réagir si, un jour, il se retrouve dans une situation véritablement malsaine.

Ce livre a été écrit principalement à l’attention des profanes en la matière : il leur offre un large éventail de ces affaires particulièrement complexes et une réponse nuancée aux questions qu’ils se posent, ce qui est logique d’ailleurs. Mais il contient également des recommandations importantes pour les pouvoirs publics ; nous ne nous laverons plus les mains lorsqu’un énième drame de pédophilie paraîtra dans la presse. Parmi ces recommandations, on retrouve l’intervision et la supervision nécessaires pour les enquêteurs dans les affaires de pédophilie. Le renouvellement des effectifs est également nécessaire. Qui peut se charger de ce genre d’affaires pendant vingt ans ? Et, surtout, ce livre préconise un cadre de gestion, une détection préventive et une intervention dans toutes les institutions d’accompagnement d’enfants et de jeunes. Après nous être cachés pendant des années derrière la fausse idée que rien ne pouvait arriver à nos enfants, il est désormais urgent de mettre ces conseils en application.
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« Tu joues toi aussi parfois à papa-maman avec ton papa ? »

Il y a quelques années, la ministre de la Justice, chaperonnée par les ténors de la justice et de la police, a tenu une conférence de presse (eh ! oui, la ministre en personne). Si la salle du parquet fédéral était déjà bien remplie de journalistes belges, les médias étrangers étaient, eux aussi, venus grossir les rangs pour accueillir la grande nouvelle. C'est Dame Justice en personne qui venait annoncer que la police belge avait, grâce à une opération d’infiltration (dont je ne peux donner aucun détail), pu empêcher trois internautes de kidnapper une jeune fille. Ils avaient l’intention de l’enfermer pendant un week-end dans une centrale téléphonique abandonnée en France avec la seule intention d'abuser d’elle de façon horrible. Je me souviens de ce matin où nous avions franchi les portes du bureau de notre directeur judiciaire. Exceptionnellement, nous étions en costume cravate. Il nous a vus et nous a dit : « Ha, the heroes! » Par hasard (ou peut-être à cause de mes longues années d’expérience ?), les paroles de la chanson de David Bowie ont immédiatement résonné dans ma tête : Heroes, but just for one day (héros, mais seulement pour un seul jour).

Parce que cette affaire aurait pu vraiment mal tourner. Nous devons continuellement prendre des décisions, en concertation avec le magistrat. Nous évaluons toutes les informations que nous recevons et jugeons de leur importance.

L’affaire de la centrale téléphonique française a commencé avec un fax d’à peine trois lignes de Child Focus contenant des informations floues. La décision qui a mené à intervenir immédiatement et à mettre la machine judiciaire en branle à toute vitesse, n’était donc pas basée sur des informations fiables et détaillées, mais plutôt sur une intuition. Cependant, tout flic honnête sait que cette intuition peut parfois mener à prendre de mauvaises décisions.

C’est pourquoi, alors que la chanson de David Bowie me revenait en tête, ...
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