Philippe Alméras

Doit-on ou peut-on distinguer l'homme de l'oeuvre ?

Epineuse question en ce qui concerne L.F. Céline.



Pour ma part, j'ai renoncé à tenter d'y répondre.

Mais, on peut si on y tient vraiment s'aider pour trouver des éléments de réponse du "Dictionnaire Céline" de Philippe Alméras.



Dans ce copieux volume de plus de 850 pages, Alméras a compilé des extraits de lettres ou des déclarations de Céline des passages de ses livres, ainsi que des citations de tiers sur l'homme et son oeuvre précisemment.



Je suis en outre assez d'accord avec l'auteur qui dans sa préface explique qu'il y a plusieurs Céline, celui d'avant 1937 et celui d'après 1937, auxquels s'ajoutent encore des Céline : collaborateur, éxilé/condamné, revenant puis semi-clochard de Meudon...

Chacun de ces Céline,de celui du Voyage, à celui de Rigodon, a ses admirateurs et contempteurs.



On a écrit, on écrit encore beaucoup sur Céline, admiré ou haï, il est de ceux, hommes ou artistes qui ne laissent pas indifférent, c'est bien un point, le seul sans doute, sur lequel tout le monde est d'accord.

Critique de Olivier Cariguel pour le Magazine Littéraire



Deux biographes de Céline, Philippe Alméras et Henri Godard, abordent les contradictions de l'auteur du Voyage au bout de la nuit. Jusqu’à aujourd’hui, la biographie de Céline publiée au Mercure de France entre 1977 et 1986 (plus de mille pages) par l’avocat et romancier François Gibault faisait autorité. Un demi-siècle après la mort de l’écrivain, le 1er juillet 1961, deux biographies charpentées et diamétralement opposées par leur approche examinent le cas Céline. Entre-temps, l’exhumation de correspondances et d’archives publiques dissipait les épisodes inconnus ou méconnus d’une légende forgée par l’écrivain de son vivant. Beaucoup d’écrits ont aussi été retrouvés, permettant de confronter la réalité à l’invention. Célinien émérite à contre-courant, Philippe Alméras livre une réédition actualisée de sa biographie Céline entre haines et passion parue en 1994. Elle « propose un Céline total et non retouché ». Après avoir signé six ouvrages sur l’auteur de Voyage au bout de la nuit , dont un Dictionnaire Céline (éd. Plon, 2004) souvent approximatif et défaillant, Philippe Alméras veut «liquider définitivement la théorie des deux Céline, comme celle de l’accès d’ébriété mentale». Le romancier et l’antisémite ne doivent pas être dissociés, il n’en démord pas depuis ses premiers travaux. Et sa biographie à thèse est critique, écrite avec une alacrité qui en rend la lecture heurtée.

À l’autre bout de l’échiquier, Henri Godard, maître d’oeuvre des cinq volumes de Céline dans la «Bibliothèque de La Pléiade» et auteur notamment de Poétique de Céline (éd. Gallimard, 1985) et de Céline scandale (éd. Gallimard, 1994), a conçu une biographie plus en symbiose avec le surgissement de l’oeuvre célinienne, aux prises avec les variantes des manuscrits et une psychologie en ébullition permanente. Ce spécialiste appelle à une séparation de l’homme et de l’écrivain Céline et cherche à comprendre la logique de ses partis pris, depuis l’expression brutale d’une vision noire de ses semblables jusqu’à sa fibre compassionnelle devant les malheurs de la condition humaine. Il a évité l’écueil d’une biographie-fleuve en synthétisant son savoir érudit. Henri Godard révèle notamment le système de surveillance installé par le père de Céline quand il était à l’armée, à travers des lettres retrouvées. L’axe de sa biographie ne masque pas pour autant la question des engagements politiques et de l’antisémitisme de Céline. Reprenant une formule de Malraux, il pose plus clairement que Philippe Alméras les conditions de la «métamorphose» de l’oeuvre de Céline, c’est-à-dire «la destinée qui l’attend, en termes de survie et d’interprétation», en l’absence de l’auteur. Une voie féconde pour juger des écrits qui ont marqué la fin et le commencement d’une littérature et d’un monde.

Dans une biographie sans concessions, Philippe Alméras rétablit le double visage de Céline, celui d’un être complexe à la personnalité controversée.


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