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Citations de Philippe Delerm (1397)


Non, c'est plutôt l'organisation de la comédie humaine qui est en cause. Le monde est fait pour être deux, pour être au moins à deux: les spectacles, les terrasses, les tables de restaurant :
-Vous serez seul ?
Oui, je serai seul. Ca vous ennuie ? Au Luxembourg, où naissent vite des conversations sur le sens de l'existence, Monsieur Spitzweg évite les bancs...Il se choisit un fauteuil vert pâle, à défaut une chaise. Il se redit cette phrase de Léautaud qui le ravit: "Ce que j'ai dans la tête me suffit." (p.99)
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Venu après la mort de ma soeur Michèle, mon rôle était d'emblée différent. Mon dilettantisme naturel, ma paresse scolaire m'avaient détaché d'une tension nécessaire mais contraignante.
Je l'ai éprouvé très tôt dans mon rapport au monde: pour moi, la vie pourrait être un spectacle à regarder.
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LE REVE
Bulles de temps, gouttes légères. A peine un souffle, et l'eau se gonfle de secret, se détache, s'envole. A peine un souffle, et la mélancolie part en voyage. Un peu plus haut, les frontières s'effacent, un peu plus loin. Les peines s'apprivoisent dans l'espace. La terre devient bulle, et la bulle une terre.
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On se surprend à marcher sur le bord du trottoir comme on faisait enfant, comme si c'était la marge qui comptait, le bord des choses.
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La barbe à papa, ça se vendait avec une espèce de générosité bizarre : il y en avait toujours trop.
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Je déteste la pureté, si la pureté, c'est se débarrasser de tout.
Je veux m'embarrasser de tout.
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Philippe Delerm
Le Tour fait seulement semblant de dépendre de ses champions. C'est lui qui crée les mythologies. Il est sans doute la seule épreuve sportive à dominer ceux qui l'incarnent.
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Un entrelacement de poutrelles, de pylônes. A travers les verrières filtre une lumière indécise, prudente, vouée à la déclinaison de tous les gris. On est dans la gare, et l'on n'investit jamais cet espace sans lui associer des bruits : la voix souvent confuse du speaker officiel, qu'un peu de mauvaise foi rapproche du borborygme inaudible des "Vacances de Monsieur Hulot"; les crissements d'essieu; les claquements de portières; le ronron des moteurs; et puis, les pas, les pas...
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Spritz. Le mot jaillit avec un pétillement un peu abrupt, effervescent, comique. C'est presque par dérision qu'on le rattache à la matérialité languide de ces boissons couleur soleil qui donnent le ton à toutes les terrasses de café vénitiennes. Soleil orange ou soleil rouge ? Spritz aperol ou campari ? A chaque fois, on hésite. Pas seulement pour le goût mais pour le choix de la lumière. Le campari est plus amer, plus sauvage, plus absolu. Sa luxuriance appétissante cache une force inattendue. L'aperol ne glisse pas jusqu'au sucré, mais l'éclat de son orangé mène vers une douceur subtile. Ils semblent faits pour la comparaison, la liberté du choix, le plaisir absolu de les voir se côtoyer sur la petite table blanche. Dans les verres évasés, tous deux ont des volutes lourdes. Ils donnent envie de se taire, d'attendre avant de les goûter.
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Il va faire son marché, avenue de Saint-Ouen, et c’est dimanche. Une petite phrase de Goscinny chante en lui, lui revient de l’époque où il lisait les épisodes du «Petit Nicolas» dans le journal 𝘗𝘪𝘭𝘰𝘵𝘦 : « Un marché c’est comme une cour d’école qui sentirait bon ». Des deux côtés de l’avenue, c’est une jolie cour d’école. Il fait beau, l’air a cette fraîcheur d’eau qui précède au matin les journées les plus chaudes. Avenue de Saint-Ouen, toutes les rues autour sont rassemblées : rue Marcadet, rue Championnet, rue Ordener, rue Vauvenargues, rue Lamarck. Le béret kabyle, la casquette à l’envers et le bibi désuet se côtoient sans effort. Arnold Spitzweg est là comme un poisson dans l’eau. C’est la vraie vie. Un quartier populaire.
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Le goût des mots

Les mots nous intimident. Ils sont là, mais semblent dépasser nos pensées, nos émotions, nos sensations. Souvent, nous disons "Je ne trouve pas les mots". Pourtant les mots ne seraient rien sans nous. Ils sont déçus de rencontrer notre respect, quand ils voudraient notre amitié.
Pour les apprivoiser, il faut les soupeser, les regarder, apprendre leurs histoires, et puis jouer avec eux, sourire avec eux. Les approcher pour mieux les savourer, les saluer, et toujours un peu en retrait se dire je l'ai sur le bout de la langue... le goût du mot qui ne me manque déjà plus.
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ce courage qu'ont les Scandinaves pour arrêter le temps, pour se regarder vivre l'instant, n'a rien d'un conformisme. Chez moi... D'abord il y avait peu de fêtes. Mais quand c'était la fête, les soirées se passaient sans que jamais personne n'ait su dire aux autres qu'il les aimait. Appelles-tu cela de la pudeur ? Alors, j'aimerais bien ne plus jamais être pudique. La vie passe, on se perd. Mais quand on se rassemble, surtout pas de sentimentalisme. On fait assaut d'esprit, d'ironie, on se dispute pour une pièce de théâtre ou pour de la politique. Voilà comment les choses se passent en France. Je sais trop l'amertume qu'il en reste, à la fin d'une vie. Aimer les gens quand il n'est pas trop tard, au prix même d'un peu d'emphase... Risquer ce ridicule est beau, Julia. C'est chaud et c'est vivant. Nous ne sommes pas nés seulement pour demeurer pudiques...
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Ça me choque en tout cas de vivre dans une société où la mélancolie, la tristesse sont des fautes, qu'on n'avoue pas aux autres, et peut-être même pas à soi-même.
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mais on n'est pas non plus de ceux qui ont envie de lire seulement ce que les autres lisent
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Parfois on dit : "On aurait presque pu..." Là, c'est la phrase triste des adultes qui n'ont gardé en équilibre sur la boîte de Pandore que la nostalgie. 28
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La dernière tue, c'est indiscutable, du moins en apparence. Mais toutes blessent, non. La formule nous culpabilise, nous reproche notre oubli de la mort. Les heures sont ce que nous en faisons. Elles sont magiques. Elles nous inventent, et sont d'autant plus notre propriété qu'elles ne nous appartiennent pas. Car ce n'est pas vrai que nous oublions la mort. Nous sommes plus beaux, plus grands que ce pessimisme arrogant. Nous faisons seulement semblant d'oublier que nous mourons, que nous mourrons. La quête du bonheur n'est rien de plus, et c'est cela qui fait sa gravité, qui donne le frisson. Coincés dans une souricière, les hommes jouent jusqu'au bonheur l'héroïsme de la légèreté. Et c'est tellement plus fort et plus subtil que la mort.
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Le passé n'est pas un monde perdu. Le vivre dans le présent n'est pas de la nostalgie. Ce qui est passé est possédé, définitivement. Je dis "ma vie est belle" parce que j'ai la chance de sentir le passé dans le présent. Il y est, il n'attend rien que de se déployer.
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Bien sûr, le mot spritz n'est pas italien. Ce sont les Autrichiens qui l'ont inventé, en envahissant la Vénétie au tout début du dix-neuvième. Ils ne supportaient pas la force des vins italiens, et les étendaient d'eau, ou plutôt les aspergeaient, sens de ce verbe spritzen, au dynamisme un tantinet ridicule. Par la suite, les autochtones épousèrent l'idée à leur manière, mêlant leur vin blanc prosecco à l'eau de seltz, et ajoutant surtout la magie de la couleur, l'essence du soleil, aperol, campari.
Au-delà des fondamentaux, chaque cafetier vénétien possède ses dosages, ses secrets. On ne boit pas "le" spritz, comme on dit "le" pastis sur le port de Marseille, avec l'article défini qui sacralise le rite. On boit "un" spritz, soumis à l'alchimie d'une décantation qu'on ne domine pas. A Venise, il faut se laisser faire.
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La bretelle electrique: L'enjeu ne semble pas si capital.Ce n'est qu'une épaule, la terre ne va pas trembler; la bretelle n'en cachait presque rien.Enfin...Elle sait, et vous savez, c'est bien plus compliqué. La symbolique de la chaute n'est pas sans conséquence, et moins encore celle du glissement. Il ya des choses qui s'échappent, d'autres qu'on laisse s'échapper.
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C’est pas pour dire mais…

L’homme est un animal singulier. Il a reçu le don de la parole, mais l’abrite souvent sous des précautions oratoires plus ou moins subtiles. «En tout état de cause», «en revanche», «en même temps» précèdent alternativement ce qu’il va dire. Mais la plus étrange est sans doute «c’est pas pour dire», suivie d’un mais qui annonce que l’on va dire beaucoup. En fait, il va moins s’agir de dire que de médire.
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