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Citation de enjie77


J'ai fini par aimer les cartes de cette époque, avec toutes ces rues dont les noms mais pas le tracé, changeaient souvent. J'ai appris à bien connaître un certain banc public, belle relique Art Nouveau de la période austro-hongroise. Depuis mon banc, j'observais le cours du monde et l'histoire de Lviv (Lemberg).

En 1914, le banc se trouvait dans le Stadtpark, le parc de la ville. Il faisait face au Landtagsgebäude, le Parlement de Galicie, la province la plus orientale de l'Empire austro-hongrois.

Une décennie plus tard, le banc n'avait pas bougé mais il se trouvait dans un autre pays, en Pologne, dans le parc Kosciuszki. Le Parlement avait disparu mais pas le bâtiment qui abrite aujourd'hui l'Université Jan Kazimierz. A l'été 1941, lorsque le gouvernement général de Hans Frank avait pris le contrôle de la ville, le banc avait été germanisé et se trouvait désormais dans le Jesuitengarten, en face d'un ancien bâtiment universitaire, lui aussi dépouillé de son identité polonaise.

Ces années de l'entre deux-guerres ont fait l'objet d'oeuvres littéraires nombreuses mais aucune ne décrit mieux que "Moj Lwow" la perte de ce qui fut. "Où êtes-vous maintenant bancs publics de Lwow (Lemberg) noircis par l'âge et la pluie, frustes et craquelés comme l'écorce d'oliviers médiévaux ?" se demande le poète polonais Jozef Wittlin en 1946.

Soixante ans plus tard, lorsque je m'approchai du banc sur lequel mon grand-père aurait s'asseoir un siècle plus tôt, j'étais dans le parc Ivan Franko, baptisé en l'honneur d'un poète ukrainien, auteur de romans policiers dont le nom ornait également le bâtiment universitaire.


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