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Citation de alzaia


alzaia
27 septembre 2014
La Vezère a fait un coude. Je n'entends plus que son glissement soyeux, ponctué, dirait-on de paroles sybillines qu'elle confie à sa rive. Je ne sais quel vestige de lucidité, qu'elle crainte m'ont arrêté au seuil de l'équipée. Il y a trop loin de ce que je peux envisager, accueillir, alors à ce qui ne demande qu'à venir à ma rencontre, au fil de l'eau. Pour étrangère que demuere la forme que l'on prend aux vieux creux, la chose en quoi l'on consiste, on en pressent l'etroitesse, la fragilité. On devine que l'ouvert et le vaste auxquels on aspire, loind de l'accroitre, la déchireront ni plus ni moins qu'un sac en papier kraft dans lequel on voudrait faire entrer le restant du monde ou simplement son parvis aquitain. J'ai devancé, en pensée, la lente dérive dans le couchant, gagné le cours inféiruer sous la nuit prochaine, l'aube du lendemain vers le Bugue(...) Et alors il fut évident que je n'étais pas de taille ni de force. La réalité, ma peine, pour pesantes qu'elles fussent, n'appelaient pas pareil remède. Ou si elles le réclaimaient, je n'avais pas, de mon côté, la constitution, l'âge, la détermination qui m'aureint permis d'y résister. Jamais tant d'étendue n'entreraient dans ma poche en papier. Un frisson m'a traversé. Je me suis mis à nager vers la rive, à accomplir énergiquement tous les mouvements. Elle dominait l'eau d'un bon mètre, avec des galets noyés dans le sable comme les fruits confits d'une tranche de cake(...) la bien heureuse glissade s'était muée en débâcle, alors qu'il n'y avait pas vraiment de quoi. J'avais pied. (...) ça ne m'empêchait pas de m'agiter, d'essayer de happer une pierre en saillie, la tige d'une plante aux larges feuilles grasses qui me restaient aux doigts. L'eau complice et tiède était maintenant despotique et froide sans pour autant cesser de jaser ni de sourire. Elle me proposait de me mettre au monde et je ne voulais plus je n'aurais pas pu.
Je n'avais pas parcouru cinquante mètres, lorsqu'un affaissement dans la berge s'est présenté, où il était facile comme tout de se hisser. Mais la faible longueur que j'avais dévalée m'avait semblé interminable. Je tremblais lorsque je me suis jeté dans le fouillis. L'eau fuyait à mes pieds, comme si de n'était, qu'elle n'eût pas tenté subrepticement de me perdre. Elle s'offrait toujours à me faire découvrir la nuit splendide qui apprêtait son velours sombre, sa parure d'étoiles, l'aube du lundi sur la basse vallée garnie de vignobles, le pressentiment de la mer. Je suis resté accroupi un moment dans les branches à attendre que la chair de poule me passe. Ensuite, j'ai suivi l'ébauche de sentier qui longeait la rivière et retrouvé les bruits d'éclaboussures, les appels, la réalité que j'avais failli inconsidérement quitter.
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