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3.67/5 (sur 15 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Pierre Lafargue est né en 1967 à Bordeaux.

Il a publié aux éditions William Blake & Co:

Mélancolique hommage à Monsieur de Saint-Simon et L’Honneur se porte moins bien que la livrée.

A publié six ouvrages aux éditions verticales.

« Il faudrait de lui tout citer, ne rien faire d’autre que de lui tout citer, car tout commentaire n’est que tisane, fadasserie et délayage au regard de son texte qui est pur concentré, pure foudre. » Lydie Salvayre (prix Goncourt 2014)

« Au royaume des lettres, on dirait volontiers que Pierre Lafargue est le secret le mieux gardé de ces dernières années. » Nils C. Ahl (Le Monde des livres, mai 2014)

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Bibliographie de Pierre Lafargue   (10)Voir plus

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Citations et extraits (33) Voir plus Ajouter une citation
Si ce monde n'était pas composé de tant de choses nécessaires à sa conservation on pourrait couper dedans, histoire de le simplifier pour mieux le comprendre. Mais on ne peut supprimer que des choses accessoires, ça ne désencombre rien. Les choses nécessaires forment un tissu serré impossible à défaire. C'est comme si on essayait de couper du fer avec du sang. Alors tout est toujours aussi obscur.
Le jour est une autre nuit, qui porte un nom plus aimable. Quand je marche c'est dans la nuit.
Ce monde ne permet pas qu'on le prive d'une seule chose nécessaire à son obscurité. Il ne permet pas que je parvienne jusqu'à la bouche dans les arbres. Il s'arrange pour me tenir loin d'elle, je ne sais comment il s'y prend.
Il faudrait que je pense que je supprime du temps et de la douleur, mais sa totalité en est faite. C'est ne rien faire que d'enfoncer des parties de cette machine douloureuse qui ne doit pas guérir.
Puisque je n'ai pas avancé je m'arrête.
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Pierre Lafargue
Lydie Salvayre à propos de l'auteur :

À certains, il aimerait serrer autre chose que la main.
À tous il déclare "Sachez que vous serez savants dès lors que vous aimerez la vertu d’amour"

içi le texte en entier : http://www.vagabonde.net/spip.php?article61

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Soudain (oui, c’est le soir), entrant dans une ville qu’elle n’a pas eu besoin de sommer pour s’en faire ouvrir les portes, elle voit arriver vers elle à grandes enjambées un grand Balimbure, de ces Balimbures dont les chroniques sont pleines et qui ont désolé tant de provinces sous tous les régimes. Ce monstre, qui a la taille d’un immeuble de rapport, est vêtu à la façon de ceux qui travaillent à la Défense et à la City, et comme eux il est plein d’une belle assurance indexée sur une redoutable malignité. Car le Balimbure est tout sauf un imbécile, c’est ce qui le rend si dangereux, ceux qui ont eu affaire à lui et qui l’ont sous-estimé ne sont plus là pour s’en plaindre et regretter leur erreur. Bien sûr, c’est un animal sauvage, on sait qu’il ne fait pas de quartier, mais sa nullité dans la plupart des domaines, et le mépris dans lequel on tient ses goûts et ses manières, endorment la méfiance des mieux prévenus. Il pleut. Les enseignes de la rue commerçante clignotent d’une façon qu’elles voudraient primesautière mais qui ne fait qu’ajouter un caractère de fatalité à l’atmosphère sinistre qui règne ici. Ce grand Balimbure, écumant comme une écumoire, ou comme la bouche de Nicole Obry qu’il a dû baiser cent fois, se plante devant Marie-Alberte, qui recule un peu devant son rot. Sa figure a quelque chose du cratère Chicxulub. L’intérieur de sa bouche est vert, pourri par la diffamation, l’ignorance, la baliverne, la gématrie, la flatterie, la coterie, le larbinisme, l’enflure, l’imposture et les dartres mais les dents sont admirables ; des trois trous de son nez alla bigotta dépassent les quatre cent trente-trois millions et quarante-cinq gros vers noirs du fanatisme ; ses yeux verticaux laissent couler un pus qui s’enflamme au contact de l’air et ces flammes forment des lettres et ces lettres forment le manuel de la lâcheté médiatique et friendly ; sa main gauche a la forme du génocide et de sa répétition machinale et contente ; son sexe qui déboutonne lui-même sa braguette dresse dans la bise nocturne sa profusion d’écailles jaunes au bout de laquelle s’agite follement une langue bifide (on se demande ce que fiche là ce pauvre pangolin) ; de ses oreilles sort l’écran de fumée du bon sens économique derrière lequel se dissimulent l’abus de bien social et cette bonne grosse dondon, l’optimisation fiscale ; dans chaque trou de sa peau grêlée remue le point médian de l’écriture inclusive ; sa main droite est faite d’épluchures des mille crânes qu’elle a épluchés ; son ventre, que surmonte l’emplacement vide du cœur, est ouvert sur la puanteur du ventre ouvert des Indigènes de la République (on y trouve leur théorie politique : c’est une vieille pantoufle dans laquelle poussent d’assez jolies crottes de demoiselles) ; ses genoux sont faits de toute la poussière où la soumission les a jetés, pour le compte du crime ; bref, le Balimbure est un de ces égouts que n’obture aucune plaque de fonte et où il faut bien que l’on tombe quand la nuit est noire.
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INTERLUDE EN FORME DE SAYNÈTE REPOSANTE AVANT LES CHOSES SÉRIEUSES
Sitôt la tête souple du cheveu mise à l’air des toits de Paris, tu bondis avec toute la gaieté de ta jeunesse entre les fines cheminées dont quelques-unes s’écroulent de rire. Il arrive qu’on déplore que Jean-Paul Belmondo ne t’ait pas donné de leçons, mais on oublie bien vite ces réserves, et ta maladresse devient l’autre nom du charme. Les chats ne s’y trompent pas tous. Certains même s’essaient à aboyer sur ton passage, sans oser se frotter à tes jambes, de peur que tu ne les reconnaisses, comme si ta sagacité n’était pas autre chose qu’un danger. Chat mon ami, on ne s’étonne plus que tu ne sois pas le roi des animaux.
Il mettait son corps par-dessus la foule des choses ; pas un roi n’aurait défendu contre lui sa couronne. À moins de l’avaler comme on le fait d’un papier, pas un roi ne l’aurait gardée. Mais croit-on vraiment qu’il se serait contenté de couronnes volées, ou de fleurons tout ce qu’il y a de légal selon François Hotman ? Souvenons-nous, mes petits frères, qu’on n’est pas plus aimable que le formidable qui n’apprécie pas trop qu’on lui aplatisse le poil, et que la façon qu’ont certains de se tromper est vraiment délicieuse. Il y a de quoi rire ! La vie, si elle n’était pas cette rigolade, en serait une autre qu’on n’échangerait pas contre une troisième. Il n’existe pas, le poète sombre, dont le sérieux prouverait ce dont on ne se soucie guère.
Mais si, bondissant farcesquement encore au-dessus des cloches qui l’enchantent, l’ami de soi trébuche sur la tuile amie de nous, son aïe est reconnu de nos os qui relèvent la tête vers lui. Depuis donc l’accablement où nous rampons dans le méthane nous conjurons ce dieu dans l’air qui penche de n’être pas une bête de plus parmi les deuils. Alors ses ailes le ramènent à son règne qui ravit les toits, et tout.
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Déplorable fille, amenée par ses vices et par l’exagération de ses vertus à la dissolution la plus odieuse de sa personne. On l’avait crue promise à l’une de ces destinées extraordinaires que des étoiles semblent accompagner – ces astres brillent, dit-on, avec une intensité particulière quand les êtres auxquels on les associe atteignent quelque comble de réussite sociale ou de mérite personnel. Quelle erreur ! Avec sur l’épaule une chouette de concours qui dit des charades ; avec un esprit devant lequel les montagnes s’inclinent et fondent leurs glaciers ; avec un gros sac à dos bourré de pépites plus précieuses les unes que les autres, elle est pourtant l’une des plus démunies personnes de ce monde et incapable, chaque jour plus incapable de se hausser à une condition meilleure que ses talents nombreux devaient lui assurer, comment la qualifierai-je, sinon de malheureuse ? ô déplorable fille !
La pustule n’est pas rédhibitoire, dès lors qu’elle est convenablement placée. Ainsi, la déplorable fille, pourvu que ses malheurs ne lui mangent pas tout le visage, peut plaire. Elle peut même rendre fou : un beau visage de porcelaine que les malheurs ne mangent qu’à moitié, l’imagination le reconstitue sans peine, et le cœur romanesque du garçon qui passe, sensible aux peines qu’il ne peut soulager, conçoit pour celle qui les souffre un attachement dont il veut qu’on lui sache gré et qui se renforce chaque jour de l’indifférence qu’on lui montre. Ça se terminera mal, cette histoire. On le pense en levant le coude comme Pure Malt en personne.
Elle marche. Elle traîne un chien mort. Quand on s’en étonne, elle tchipe sans cracher et la chouette fait remarquer que c’est une compagnie comme une autre, et même supérieure à d’autres par son poids conséquent qui permet à la fille d’exercer ses muscles : ce n’est pas un petit chien, un danois. Un chat mort est cousu par la gueule à la gueule du chien, on le remarque à peine tant il est petit : ce n’est pas grand, un chat nouveau-né. Une puce ni morte ni vive est cousue par la bouche à la bouche du chat ; nous n’en tirerons pas de conclusion hâtive, comme ces minables qui n’ont rien de plus pressé que de trouver aux faits des interprétations qui les insultent. Même si la puce est aisément interprétable, comme une charte qui a conservé toutes ses lettres et tous ses sceaux. La fille traîne tout ça au bout d’une très belle laisse tressée à la vendéenne, nouée à sa taille, assez solide pour traîner mille autres salissures. Elle marcherait aussi vite sans avoir rien à traîner, alors autant traîner, se dit-on, mais il est douteux qu’elle se le dise. Elle arrive chez un homme, il perd toute retenue et annonce qu’il va donner libre cours à sa nature libidineuse. Il couvre le chien, le chat et la puce. L’homme s’adresse ensuite à la fille, tout en s’essuyant les pudenda : « Voulez-vous ? » Elle décline l’invitation en ne répondant pas. Ayant trimballé avec elle jusqu’au rivage sa compagnie qui s’est accru de l’homme, cousu par la bouche de la puce, elle adresse à la mer ce discours : « Comment te permets-tu de croire que tu m’intéresses, petite babiole ? Ce que je traîne sans y penser me paraît moins insignifiant que toi. Jamais je n’avais assisté à un spectacle aussi plat, d’une insipidité de cul mongol ôté de la selle. Ne t’avise pas de prétendre m’avoir vue, toi que j’ai déjà oubliée, toi que ce promontoire domine pour rien et dans les creux duquel tu viens hululer de façon grotesque (disant cela, elle met deux doigts talqués de tact dans les oreilles de la chouette). Et puis, comme les dessous de bras des crabes, tu sens mauvais ! » Comment les adversaires de l’éloquence réagiront-ils à ce morceau que les anthologies, plus soucieuses de ne pas le manquer que de le reproduire exactement, esquintent chacune à sa manière, dans la précipitation, de sorte que les écoliers seront appelés à admirer des versions fautives et à s’extasier devant des sottises ? C’est une question que nous ne posons même pas, la vie est courte comme la paille et la situation évolue trop vite.
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Celui qui boudera ici son plaisir sera réputé mal inspiré, il ne sera reçu nulle part, parmi tout ce qui déplaît aux femmes son nom brillera d’un éclat fatal. Les mouchoirs que le vent des adieux agite dans l’air saturé de regrets ne bougeront pas pour lui dans le grand parc ni sur le seuil des robes. Pourtant il voudra répondre à ce qu’il croira voir, et son ridicule sera le comble. Seul à ne pas connaître sa disgrâce, il continuera de s’estimer, de faire le compte de ses qualités, et de jeter un œil méprisant sur la clef rouillée dont il s’obstine à ignorer qu’elle ouvre chaque porte de bronze.
Moi dont la vie est toute de pourpre, et qui ne lève pas un doigt sans que les royaumes ne retiennent la vaisselle dans le rond de leurs bras, je connais ce genre de mauvais hommes sur le chemin desquels on a raison de cracher des glaires glissantes, et je n’ai pas de parabole pour empêcher qu’ils soient mal accueillis dans les maisons que des chiens gardent, pelés.
Dans les jardins parcourus de statues, la mousse ne salit pas l’œuvre des hommes, le lierre ne disjoint pas les pierres des palais, la pluie ne creuse pas de rigoles le marbre. Celui qui se promène au bras de sa chimère forme avec elle des projets qui reçoivent immédiatement un commencement d’exécution ; celle qui soigne un oiseau dont l’aile est brisée marche plus légère dans l’allée aux chèvrefeuilles ; celle qui aimerait danser soudain voit devant elle un bal où l’invitent des princes ; à celui dont l’esprit est une montagne, on offre des paliers pour qu’il soit, sans d’inutiles fatigues, la plus haute montagne.
Tout est grand, tout est si grand. Le coeur qui répète la musique de ses ancêtres ne la trouve plus monotone. Il remet ça. Les huîtres de la mer sont mangées avec l’appétit des crabes qui exigent que toute chose soit perlière. Monde crabique ! Hommes crabeux ! L’exposé des sagesses orientales, s’il fait bâiller un peu derrière une main fine, est salué d’un murmure flatteur mais les acclamations, qui sont une autre chose, vont ailleurs : à de très considérables polyphonistes.
Des poèmes plus étonnants que la fortune d’Alexandre se présentent en personne aux lieux préparés à des surprises moins habillées. Je ne dis pas qu’on ne leur refuse pas l’entrée, mais cela n’a pas l’air de les empêcher de se retrouver au grand Centre de tout. Le premier moment de stupéfaction passé, le deuxième ouvre lui aussi une bouche grande comme l’ode qu’elle ne chante pas. Les poèmes en profitent et s’enfoncent comme une poire d’angoisse dans l’espace découvert par les mâchoires bien dentées. Le chemin qu’ils empruntent ensuite pour descendre irrite quelque peu ce toboggan, mais les tulipes qu’ils y plantent sont de bien jolies végétations. Ils remontent peu après et si je puis exprimer ici mon avis, je dirai que nous sommes allés si loin pour un résultat un peu plus que potager. Les fleurs de toutes sortes s’emballent d’être liées de si près, et la bouche, en laissant passer ce bouquet, émerveille les yeux ; quant aux oreilles, elles sont impatientes du concert qui accompagne les prodiges. J’apporte les cuivres, c’est ma fonction puisque c’est mon talent. Le tout est de les faire sonner de manière à stupéfier l’univers et enseigner les anges. Ce n’est pas la chose difficile parmi les suprêmes, et je m’en acquitte comme je mettrais un disque. C’est dire si, n’étaient les pistons, je pourrais me faire les ongles tout en présentant le ciel sur un plateau. Les choses, leur mollesse est extrême. Le goût qu’on en a est vif. C’est assez inquiétant. C’est gouffre et tout. L’homme doué pour la vie ne l’est pour rien d’autre. Je le repousse un peu du bout de la canne, il tombe comme un rien. Et ces quelques vertiges viennent à point nommé pour faire pencher la balance des uns sur le fléau des autres et le fausser le plus justement du monde.
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Ce que nous ne comprenons pas, nul ne se flatte de l'entendre. Ce que nous comprenons nous vaut un afflux de disciples; ils nous considèrent comme l'orange qu'il faut presser en ménageant l'écorce.
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Mon Dieu qui êtes là vous me voyez si tuméfié que vous ne reconnaissez pas votre créature et que vous m'enjambez comme une flaque de novembre. Vous êtes déjà si loin dans juillet Seigneur.
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Sans qu'on y pense trop, le cerveau aménage pour lui seul des étages où l'exposition de ses mérites, qu'il visite trois fois par jour, le persuade de continuer de se manifester dans le monde. Mais, parce qu'il doit souvent user du corps pour ce faire, il arrive qu'on le trouve maladroit et qu'on le dénonce au public, alors que cette gaucherie vient de la grossièreté du truchement. Ce corps est cause de la disgrâce de quelques individus très distingués qui seraient fins sans lui.
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Rien n'est de nous sinon l'offense. Autrement ne pouvons. Pour avoir mis la guerre dans l'encadrement de la porte je ne suis pas mécontent de l'y voir toutes les fois que j'ouvre à quelqu'un. Cela me donne un avantage de fait qui dure autant que l'intrus. L'intrus à beau quitter ma maison très vite, il a beau courir au bord du monde, il emporte ma guerre avec lui.
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