Citations de Pierre Lunel (60)
Le pardon consiste à redonner à l'autre la scintillance du meilleur de lui, car on ne peut nier le passé, on ne peut que le dépasser.
Qu'est-ce que l'amour vrai ? Un contrat entre deux partenaires ou le don entier d'une âme, là où court une parole qui jamais ne s'achève.
Un ou à la rigueur deux miracles peuvent aider à faire de vous un saint mais trop de miracles font de vous un suspect.
Un pèlerin c'est un voyageur recru d'avoir arpenté toutes les beautés du monde et qui éprouve un sentiment d'inachevé, un goût d'indicible manquant, une frontière qui sans cesse se dérobe et se fait plus lointaine. Un pèlerin c'est celui qui confond l'infini avec l'horizon...
- Sire, permettez-moi de vous présenter la plus jeune de mes suivantes, Agnès Sorel.
La main droite du roi serre le bras du haut fauteuil sur lequel il est assis. Il s'incline avec déférence vers Agnès :
- La plus jeune mais aussi la plus belle, dit-il dans un souffle. La plus belle du monde.
Agnès, lui dit-on est la fille d'un petit noble de rien du tout, du nom de Jean Sorel, et d'une Catherine de Maignelay de toute aussi petite extraction. Qu'importe ! Elle est belle au-delà de tout ce que l'on peut imaginer, une sorte d'apparition divine qui fait fondre tous les cœurs. Charles n'a cure du tourment des autres. Il est tout entier concentré sur le sien. Que faire, que l'on soit roi ou fils de rien, en présence d'une pareille divinité ? La regarder, la contempler, l'admirer, tout en rêvant de la découvrir un jour plus secrètement.
La naissance et la mort sont les deux moments privilégiés de la vie et sont en eux-mêmes si puissants qu'ils ne nécessitent rien de plus qu'un cadre tout petit : un berceau et un tombeau.
Une femme divorcée est carrossée comme une voiture d’occasion… Tout a déjà servi. Elle n’est plus pure comme la jeune mariée à la couronne de fleurs d’oranger. Elle sent le parfum de l’autre, de celui d’avant, et l’acte de chair commis avec lui sous le regard de Dieu devient péché dans les bras du nouvel époux.
Cette mère modèle ne touche ses enfants autrement que du bout de sa règle. Une règle en fer qu’elle ne quitte jamais et dont la simple évocation suffit à dissuader les gamins de toute fantaisie ; la théorie de Pavlov mise au service de la fabrication de grands hommes…
Bien sûr, le jeune Joseph n’est pas insensible aux charmes plus poivrés des jeunes actrices. Mais pour le jeune homme, élevé dans la plus pure tradition catholique, il y a les femmes avec lesquelles on badine − en secret − et celles que l’on épouse − au grand jour.
L'enfant arrive à la cour de France six mois plus tard pour y être élevée, comme c'est alors la coutume. Prudent, le roi exige que l'on procède sur-le-champ à la célébration du mariage en s'épargnant le ridicule d'interroger la petite sur son consentement. Pour la nuit de noces, on verra plus tard quand elle sera nubile. Ainsi le monarque le plus rusé de notre Histoire se garde-t-il deux fers au feu : le mariage n'étant pas consommé, il se donne le temps de changer un jour d'avis en fonction des intérêts du royaume tout en gardant sous le coude la petite princesse Habsbourg !
La malignité humaine et l’amour de l’extraordinaire sont souvent les seules raisons de la persuasion générale […]. Le genre humain serait trop malheureux s’il était aussi commun de commettre des choses atroces que de les croire.
Quand on est un Kennedy, tout a un sens, même l’insensé. Voilà l’histoire qui reprend. L’histoire du complot telle que l’a racontée un philosophe facétieux des Lumières, à la plume trempée dans l’encre de l’ironie.
Le jeune homme est promis à un grand destin. Un destin dans lequel elle n’a pas sa place, elle, la femme fatale, l’amorale sans foi ni loi… Trop libre pour accepter n’importe quel joug, fût-il de bois tendre… Elle ne veut pas être le caillou dans la chaussure, la poussière dans l’œil, la rature sur sa feuille de route…
À l’hôpital a débuté son éducation sentimentale. Un lieu où la souffrance change les lois de la décence, où la pudeur passe pour une affectation ridicule, hors saison et hors propos. Le désir de corps à corps, somme toute bien naturel chez un adolescent, est exacerbé par le fait d’être en permanence à poil sous le regard des autres. De combien de relations réelles ou fantasmées avec des infirmières blondes et aguichantes, évidemment nues sous leur blouse...
Être mère est un métier qui s’apprend. Il consiste à façonner un destin à chacun de ses enfants, selon son sexe biologique d’abord puis selon une règle unique, celle de l’excellence en tout, règle qui se nourrit d’habitudes maniaques et de rituels invariables.
L'abbé riait peu. Mais quand il était heureux, il était tout sourire. Et même quand il ne souriait pas, il souriait intérieurement. Le sourire possède cette double vertu d'être à la fois dedans et dehors. Mais c'est quand il vient du dedans, traduit ou non sur un visage, qu'il est vrai. Il m'a suffi de voir son regard devant le souffrant pour y saisir mille sourires. J'avais toujours pensé qu'il fallait un rire tonitruant ou arborer une face de "ravi de la crèche" pour exprimer son bonheur à la face du monde. Je me trompais encore. Le sourire allait beaucoup plus loin que le rire aux éclats, il rejoignait un certain infini pendant que ma joie rigolarde fondait comme la neige au soleil. Je faisais partie de ces innombrables qui confondent le bonheur avec la joie (p. 169-170).
En politique, l’important ce n’est pas ce que vous êtes, mais ce que les gens croient que vous êtes.
La paternité aurait pu l’assagir… Mais il y a cette fichue cortisone qui lui arrondit les joues et lui donne une virilité de Priape.
L’humour demeure la plus sûre des armures.
En politique, comme à la guerre, il faut trois choses pour gagner. La première, c’est l’argent, la seconde, c’est l’argent et la troisième, c’est l’argent.