AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Charybde2


Quand le tocsin sonna à Lurs ce jour du 3 septembre vers les sept heures du soir, nous étions tous occupés, l’eissade à la main, parmi nos vignes et nos oliviers. L’août avait été pluvieux, l’herbe avait poussé dru. Il convenait avant les vendanges, avant les olivades, d’en débarrasser les ceps et les souches d’arbre pour faciliter les cueillettes.
À l’appel de cette cloche qui imitait à s’y méprendre l’esclandre joyeuse d’un baptême, on s’arrêta en chœur de frapper la terre, on mit bas l’outil sur lequel on s’efforçait. On eut soudain l’air de se recueillir pour écouter l’angélus, alors que, depuis bien longtemps, cette coutume n’existait plus pour personne.
Au village, tous ceux qui restaient, et les femmes notamment qui triaient la salade pour le repas du soir, tous se précipitèrent sur le pas des portes comme pour un tremblement de terre. Ils restèrent là, figés, le nez en l’air, les yeux tournés du côté du clocher.
Nous, nous étions déjà de vieux hommes. Nous avions fait celle de 14. Ce n’était plus pour nous qu’on craignait, c’était pour nos enfants. Verdun nous sauta à la mémoire, que nous croyions bien tous avoir oublié en vingt ans de bonheur. Lequel d’entre nous, je vous le demande, n’eut pas la tentation de faire sauter trois doigts de la main droite à l’enfant, d’un coup d’accident de chasse ? – vous savez comme les détentes sont sensibles et les chasseurs insoucieux ? Mais bien entendu personne ne s’y risqua. La république de cette époque avait encore des pelotons d’exécution.
Commenter  J’apprécie          10









{* *}