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Citation de Coco574


Les gens du Plateau ont coutume de dire que Pierpont est un trou et il est difficile de leur donner tort ; on y vient à la descente et on en repart à la montée. Le village se niche dans l’une de ces rares boutonnières où la Siche, qui dévale des Hautes Chaumes, prend quelques aises et s’octroie un petit méandre ou deux avant de se remettre à tailler le granit du Plateau pour s’en aller rejoindre la Loire. La route, qui la traverse ici sur un pont de pierre, relie Saint-Issiaume à Fontbonne en venant de Saint-Etienne et en partant vers les tréfonds de l’Auvergne. La grosse trentaine de maisons du village s’étale le long de cette voie, de part et d’autre du pont, sur deux départements.
Un viaduc de chemin de fer traverse la vallée à près de quarante mètres au-dessus de la rivière, quelques centaines de mètres en amont du pont routier. Il y a bien dix ans qu’on n’y voit plus que des trains de marchandises de deux wagons, trois les bons jours. Trois provinces se rencontrent en son milieu, si l’on en croit les Pierpontois (d’aucuns disent Pierpontais) : l’Auvergne, le Forez et le Velay. Vantardise ! clament les habitants de Saint-Issiaume où se trouve, affirment-ils, la borne qui marque ce point nodal entre pays d’états et pays de mandement.
L’orientation générale du cours de la rivière et les pentes qui la bordent, abruptes et hérissées de pins, font que le soleil se lève ici plus tard pour se coucher plus tôt. Inconvénient qui, l’hiver, cache un avantage. Surtout quand une tempête de neige fait rage dans les hauteurs, bouchant les routes, plâtrant les façades et, pour peu que la consistance de la neige s’y prête, surchargeant jusqu’à la rupture les branches des arbres. Il arrive certes, un vent de nord-est aidant, que les rafales s’engouffrent dans la vallée et ramènent pour un temps les Pierpontais (d’aucuns disent Pierpontois) à la condition des malheureux du Plateau. Mais ces anomalies météorologiques sont rares au point de faire les conversations de plusieurs générations.

La tempête qui balaya le Plateau, au soir de ce dimanche de février, ne dérogea pas à la règle si ce n’est que, le matin, rien ne l’annonçait. Ni le ciel, ni le vent, ni les rhumatismes des vieux, rien ne laissait prévoir la violence froide et implacable de la tourmente qui, en quelques heures, allait paralyser les deux cantons que sépare la Siche et qui se touchent à Pierpont. L’atmosphère était si peu à la menace que j’avais résisté à la tentation de fermer à midi le café du Pont, tentation qui me prenait le dimanche, de la Toussaint à Mardi gras, et à laquelle il m’arrivait souvent de céder.
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