Règle d’or de tous les pilotes de chasse du monde : C’est l’ennemi que vous n’avez pas vu qui vous abattra.
Comme autrefois dans le Colisée, c’est le combattant le plus habile, le plus chevronné, le plus agressif et le plus audacieux qui l’emporte. L’inconscient, même très courageux, ne survit jamais très longtemps. Le hasard a également son mot à dire, tout comme le destin ou la fatalité.
L’ordre émanait directement du président Saddam Hussein. Hassan avait beau ne pas être versé en politique, il ne comprenait pas la stratégie de son président, alors même qu’il lui savait gré d’avoir mis son pays sur la voie du développement économique et de la laïcité, éloignant ainsi les rivalités sectaires qui menaçaient de le stabiliser. Bien sûr, Saddam était un dictateur brutal, mais on ne pouvait pas tout avoir au Moyen-Orient…
Savoir que l’on tue est très différent de voir que l’on tue.
Quand Saddam vous regardait droit dans les yeux, c'était comme s'il pouvait lire à l'intérieur de vous. Ce qui était effrayant avec lui, c'est que vous ne saviez jamais ce qu'il avait en tête. Il avait une personnalité complexe, alternant les moments de sympathie réelle et de cruauté impitoyable. Il pouvait se montrer généreux, ou bien extrêmement mesquin. Il avait un bon esprit de synthèse, mais il pensait de manière tribale et envisageait chaque problème sous un angle politique, pas sous un angle stratégique. Sur le plan tactique, c'était un remarquable manœuvrier. Sur le plan stratégique, 99 % de ses concepts se révélèrent erronés.
Lorsque le 18 janvier 1974, les représentants de l’Égypte et d'Israël signèrent l'accord de cessez-le-feu, dont la négociation avait débuté quelques semaines plus tôt sous une tente située en plein désert, au kilomètre 101 de la route Le Caire/Suez, ils n'imaginaient pas sans doute pas que moins d'un an et demi plus tard, le 1er septembre 1975, leurs deux gouvernements parapheraient officiellement un accord comportant les prémices d'une entente pacifique entre les deux États. Cet accord préludait la visite surprise du président Sadate en Israël et la conclusion définitive d'un traité historique à Washington. L'homme qui avait décidé de la guerre pouvait s'offrir la paix, illustrant à sa manière le vieil adage : "Si vis pacem, para bellum."
Sur le plan politique, les Arabes peuvent se targuer d'un réel succès symbolique. En démontrant l'efficacité de l'arme du pétrole et en exacerbant la confrontation des deux grandes puissances, ces derniers sont en effet parvenus à conférer à cette crise une résonance mondiale, insufflant une nouvelle dynamique au conflit israélo-arabe. La guerre d'octobre a mis en évidence un renouveau du sentiment de solidarité arabe qui semblait passé de mode depuis la mort de Nasser. Pour la première fois depuis la fin de la guerre d'indépendance, une coalition de circonstance, englobant les forces appartenant à douze pays arabe, s'est trouvée réunie face à Israël.
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L'Europe occidentale, à l'exception de la France et du Royaume-Uni, est restée très en retrait pendant cette crise, adoptant une attitude pusillanime qui a servi par ricochet les intérêts américains. Mais pouvait-elle faire autrement ? Son principal souci consistait à garantir ses sources d'approvisionnement énergétiques dépendant très largement du pétrole arabe. Sa crainte d'un embargo l'a donc incité à adopter une attitude ambiguë, ménageant la susceptibilité de son allié américain tout en tenant un discours globalement pro-arabe.
A travers le monde, la plupart des États ne manquent pas de réagir au coup de tonnerre que constitue le déclenchement de la guerre d'octobre. Si les États arabes semblent exulter, les deux grandes puissances adoptent une attitude beaucoup plus réservée. L'Europe, discrètement pro-arabe, demeure volontairement en retrait par rapport à ce conflit. Dans le reste du monde, de nombreux dirigeants prennent ouvertement parti pour le camp arabe. Leur activisme dépasse cependant rarement le stade des discours.
Aman et le Mossad étaient pourtant conscients du redressement militaire arabe. Des rapports étaient parvenus jusqu'aux responsables. Plusieurs membres de l'état-major avaient fait valoir leurs inquiétudes. Il n'y a donc pas eu faillite du renseignement, mais bien erreur d'interprétation. Les dirigeants israéliens ont été aveuglé par leur complexe de supériorité et par leur croyance dans un concept biaisé.