AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Radhika Jha (67)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


La beauté du diable

Les histoires d’addiction parlent souvent d’alcool ou de drogue mais beaucoup plus rarement de la dépendance aux vêtements, aux chaussures et aux sacs à mains !

Ici, la jeune japonaise que l’on suit pendant quelques années devient peu à peu une acheteuse compulsive, et cela l’entraîne dans une spirale infernale entre euphorie, exaltation, mensonges et gros soucis financiers au point de remettre toute sa vie en question.



Pendant toute une partie du roman, l’héroïne est accro au luxe et elle énumère consciencieusement les grandes marques françaises ou italiennes qui la font rêver.

Elle nous entraîne dans son obsession pour les vestes en cachemire, les sandales en cuir, les robes aux coupes parfaites et les sacs à main griffés, qu’elle assimile à la beauté, à la jeunesse et à la réussite.

Mais cet aspect futile s’estompe rapidement pour laisser place à une vraie histoire, celle d’une femme qui souffre, qui n’a pas la sensation d’avoir sa place dans la société, qui croit lutter contre un vide immense en achetant des robes en lamé ou des escarpins à talons vertigineux.



L’auteur nous montre un autre aspect du Japon, un Japon où la honte et le fait de perdre la face est une des pires choses qui puisse arriver à une personne, au point qu’on préfère parfois ne plus jamais parler d’une personne qui a fait honte à sa famille, un Japon compétitif, où les enfants sont poussés dès leur petite enfance à être les meilleurs dans tous les domaines, un Japon où les femmes sont mères au foyer ou reléguées à des postes subalternes en attendant de se trouver un mari pour les entretenir, un Japon qui rêve d’Occident mais qui est gouverné par les Yakuzas, un Japon enfin qui confond le bonheur et l’acquisition des biens au point de se perdre en route, au détour d’un temple, d’un jardin zen ou d’une salle de jeu.

Commenter  J’apprécie          441
La beauté du diable

Kayo est une jeune japonaise qui a tout pour être heureuse : elle épouse son premier amour, qui va vite construire une carrière solide dans la banque et ils ont deux beaux enfants. Mais Kayo va très vite devenir totalement dépendante de son désir des belles choses : sacs, chaussures, vêtements haute couture... Tout est, pour elle, à acheter et à avoir dans sa garde robe. Elle possède au départ une belle somme d'argent donnée par sa mère, mais elle va très vite dépenser beaucoup plus et se mettre dans une situation qui n'accorde aucun retour en arrière...

Ce roman n'est pas un livre comme les autres, il ne s'agit pas ici de décrire la vie d'une accro au shopping ou d'une femme superficielle qui ne veut que de belles choses... On sent tout le malaise de Kayo, on est submergé par sa descente aux enfers et on a beaucoup de mal à ne pas pouvoir la prévenir de ce qui l'attend. C'est une héroïne attachante et dont la solitude nous attriste vraiment... Une écriture fluide couronne le tout et j'ai passé un bon moment de lecture.
Commenter  J’apprécie          250
La beauté du diable

Pauvre Kayochan... pauvre petite Madame Bovary du Soleil Levant... Seuls vêtements, accessoires et cosmétiques de luxe ne viennent éclairer une vie familiale qu'elle juge étriquée et insipide. Pour lutter contre ce vide qu'elle sent croître en elle après les désillusions du mariage et du rôle de mère au foyer, elle met le doigt dans un engrenage infernal. La frénésie des achats compulsifs, des soldes privées, etc lui donnent, l'espace d'un moment, la sensation d'être pleinement vivante. Chimère de plus puisque rien ne peut combler durablement le gouffre en elle.



Jha Radhika est une auteure d'origine indienne qui a vécu un temps à Tokyo, ce qui lui a donné l'idée de ce roman. Elle retranscrit parfaitement des éléments constitutifs de la société japonaise : le mari dévoué jusqu'à point d'heure à son entreprise, la femme attachée au foyer et à l'éducation des enfants, ... Puis les dérives du consumérisme des folles années 80, avant l'éclatement de la bulle financière et de la grave crise économique qui ébranle l'archipel. Le luxe n'en a pas moins continué à obséder nombre de Japonaises, parfois prêtes à tout pour un sac Vuitton, des chaussures Ferragamo et autres valeurs sûres du prestige vestimentaire occidental. Kayo en suit d'ailleurs la pente avec un abandon presque lascif.



Le thème n'est pas sans rappeler celui du roman de Murakami Ryu, Love and Pop.  Il y traite de la pratique de l'enjokosai, rendez-vous tarifés (pour ne pas dire prostitution ) auxquels se livrent lycéennes et étudiantes, voire collégiennes, avec des hommes plus âgés pour pouvoir s'offrir tous ces produits de grandes marques. La société japonaise étant ce qu'elle est, il est de bon ton de ne pas déparer par rapport au groupe et de suivre la tendance. Sous peine d'exclusion, condamnation sociale insupportable au Japon.

Le caractère "carcan" de cette société est dépeint à merveille par Jha Radhika, notamment avec le groupe des mères de famille ou encore le rôle des voisines qui exercent une pression sociale terrible, prêtes à enfoncer le clou qui voudrait dépasser, pour reprendre un proverbe nippon.



Avec talent, l'auteur nous entraîne dans la spirale compulsive de Kayo et dans les méandres de la condition féminine de l'archipel, avec son culte de l'apparence, du jeunisme et du luxe. Ça ne résume certes pas ce magnifique pays mais c'est néanmoins une réalité qui ressort dans d'autres romans et essais sociologiques comme ceux de Muriel Jolivet. La narration à la première personne rend l'histoire encore plus immersive car on se trouve dans la tête même de cette acharnée de la beauté.



J'ai pris grand plaisir à lire ce roman maîtrisé et finement écrit. Les passages dans le vieux temple, chez okaasan et otoosan, m'ont tout particulièrement ravie. Une lecture que je recommande chaleureusement.
Commenter  J’apprécie          194
Le Cuisinier, la Belle et les Dormeurs

Trois nouvelles, sans aucun rapport entre elles, si ce n'est l'inexpérience, voire le manque de talent de l'auteure. Trois nouvelles dont le but reste assez obscur. Radhika Jha savait-elle seulement ce qu'elle voulait en faire ???



La première met en scène un cuisinier qui semble basculer vers la folie. Hors ; le sujet a été suffisamment exploré par des écrivains de talent, voire de génie, pour qu'on l'aborde avec circonspection et qu'on se donne un tant soit peu de mal pour en donner une variante un rien intéressante. On pense assez rapidement à un roman comme La moustache d’Emmanuel Carrère. Or, ici, c'est ennuyeux à mourir. Le personnage principal multiplie les bizarreries, symptômes d'une paranoïa grotesque, entraînant le lecteur dans un enchaînement de petits événements inintéressants au possible. Aucune étude psychologique à l'horizon, aucun signe d'une quelconque tentative d'incursion dans le genre fantastique. D'ailleurs, contre toute attente, on découvre que le personnage ne devient pas fou, mais qu'il a seulement un petit passage à vide (sans qu'on puisse deviner pourquoi) et puis c'est tout. Une nouvelle d'une rare médiocrité, qui m'a donné envie de laisser tomber la suite du recueil.



Bon, j'ai tout de même persisté (après un bonne pause). La seconde nouvelle met en scène une jeune fille extrêmement sensible à toutes les formes de beauté (j'ai cru déceler une sorte d'autoportrait complaisant de l'auteure), qui rencontre une autre jeune fille, forcément d'une beauté époustouflante. La première considère que la beauté de la seconde relève du sacré (on tombe quelque peu dans les bondieuseries), la seconde ne songe qu'à faire des photos de mode pour devenir célèbre. Sujet éculé, travaillé sans finesse, mais nouvelle au moins plus cohérente que la première. Allais-je pour autant terminer le recueil, qui ne promettait guère de se transformer subitement en chef-d’œuvre ?



Longue, très longue pause à nouveau, puis lecture de la troisième nouvelle. A priori, la plus intéressante des trois. Et puis finalement non. Cette histoire d'un fonctionnaire qui tombe dans un village où les dissensions entre Chrétiens et Hindous prennent des proportions énormes et franchement bizarres n'est pourvue d'aucune cohésion. Là encore, on se demande ce qu'a voulu faire l'auteure. On tendrait au départ pour une nouvelle basculant dans le fantastique. Non. Serait-ce une dénonciation de problèmes religieux qui empoisonneraient l'Inde ? Sûrement, mais c'est tellement mal mis en scène que c'en est parfaitement inintéressant. La fin pourrait nous entraîner du côté du récit gore, sauf que Radhika Jha n'a pas su exploiter le filon. La structure de cette nouvelle est d'un incohérence totale, au point que tout sujet s'efface et qu'il ne nous reste sur les bras qu'un amalgame d'idées non exploitées.



J'en conclue que Radhika Jha, qui travaille pour des organisations internationales prestigieuses mais qui est incapable de construire un récit, et donc d'écrire correctement, dispose d'un réseau fort intéressant qui comprend des gens bien placés dans le monde de l'édition.
Commenter  J’apprécie          191
La beauté du diable

Je veux tout d'abord remercier chaleureusement Babelio et la splendide maison d'édition Picquier pour m'avoir fait découvrir ce roman.



Là, on l'on s'attendrait à une "confession d'accro au shopping" à la sauce nippone, c'est une surprise de taille que ce roman. Une descente aux enfers par addiction sur fond de surendettement, prostitution et secrets. Cette spirale du mensonge emporte l'héroïne dans un gouffre qu'elle nomme "makura", un état d'hébétude et de tristesse extrême. Des scènes parfois choquantes, émouvantes qui ne laissent en aucun cas indifférent. Un traitement intéressant du thème de l'addiction, peu ou pas abordée du point de vue vestimentaire. L'auteur décortique le cheminement psychologique de l'addiction (le déni, l'abandon, le renoncement, la joie intense quand l'addiction est satisfaite, le caractère éphémère de cette joie, la culpabilité et ainsi de suite comme un éternel recommencement).



L'écriture est limpide, claire et parfois crue. Les personnages secondaires qui gravitent autour de Kayo sont complexes et perturbants. L'auteur n'épargne personne dans ce monde où tous les gens ont un côté sombre (j'ai été particulièrement surprise par Ryu de ce point de vue).



Un roman qui laisse un certain malaise au cœur, l'empathie pour les personnages rend nauséeux face à leurs comportements contradictoires et excessifs. Un parfait contraste entre la société japonaise actuelle si standardisée et normée et les dérives énormes qu'elle provoque dans ce récit.



Mes scènes préférées : l'"oasis" de quiétude du séjour au temple, la révélation de l'interlocuteur de Kayo (à qui elle raconte son histoire).



Bref, ce roman est un lotus, une merveille ancrée dans des racines fangeuses et obscures.
Commenter  J’apprécie          192
La beauté du diable

L'histoire se passe au Japon mais l'auteure est indienne; elle s'était fait un beau succès déjà avec le livre "L'odeur".

Ce livre, pour cette rentrée littéraire, devrait connaître du succés aussi.

Titre curieux qu'on comprend mieux dès les premières pages de ce livre écrit en anglais (titre original : "My beautiful Shadow").

Le diable ici, c'est le désir de consommation, d'être belle, d'avoir des vêtements luxueux et griffés, de se sentir élégante et remarquée.

Kayo est une jeune mère au foyer japonaise; Très vite elle s'ennuie dans sa petite vie étriquée: son mari, banquier, travaille beaucoup et lui consacre peu de temps, son quartier est triste, ses voisines l'espionnent constamment.

Pour compenser cette frustration grandissante, que les Japonais nomment "makkura", elle se met à fréquenter "les clubs de beauté" et devient une "accro" aux soldes privées et aux achats luxueux.

Le premier pas vers la dépendance est vite franchi. Bientôt la jeune femme va acheter de plus en plus compulsivement, et se retrouve dans la foule des femmes au foyer et des "office ladies" prêtes à tout pour avoir les plus belles marques sur le dos.

Et c'est l'engrenage fatal: consommation, folles dépenses, endettement croissant, arrangements avec la banque et les usuriers (de redoutables "yakouzas"..)

Un engrenage qui aurait pu être fatal mais heureusement le mari va enfin enrayer la spirale infernale...

Un livre très vivant, qui se lit d'une traite..

Cette Madame Bovary version Soleil levant nous fait découvrir les subtilités de la mentalité japonaise, et ce "carcan" qui enferme encore les jeunes femmes de nos jours.

On découvre les quartiers de Tokyo, les habitudes des Japonais, les rapports sociaux complexes, le poids des traditions familiales.

Un agréable moment de lecture.
Commenter  J’apprécie          190
L'Odeur

J'ai été attirée tout d'abord par la couverture: un beau visage de trois quarts couleur sépia, portrait très "latourien" de jeune femme indienne. Le titre également m'a intriguée: pourquoi "L'odeur" et non " Le parfum" ou " La fragrance"? La réponse à cette quetion, vous l'aurez en lisant ce roman captivant.

Radhika Jha, nous dépeint le parcours cahotique, sensuel et violent de Lilâ, jeune indienne originaire du Kenya et contrainte à l'exil, suite au décès de son père. Envoyée chez son oncle et sa tante paternels à Paris, elle découvre la cuisine indienne et ses épices qu'elle apprend à maîtriser à la perfection. Cependant, chassée par sa tante, suite à une violente altercation, Lilâ erre dans Paris et enrichit son univers olfactif, culturel et relationnel.

La découverte de son corps, de sa féminité et de sa sexualité s'accompagne d'une peur incontrôlable. Entre angoisse et insouciance, timidité et hardiesse, la jeune femme nous entraîne dans sa quête qui démarre par une fuite. Parviendra-t-elle à se comprendre et à s'accepter?

Une bien belle découverte!
Commenter  J’apprécie          160
La beauté du diable

"Cette histoire aurait pu tout aussi bien se dérouler à Paris, Londres ou Delhi ; dans n’importe laquelle de ces capitales où prévaut le culte de l’apparence et du luxe, où la pétillante ivresse du shopping peut se transformer en drogue, et le paradis en enfer. Car le club des passionnées de beauté compte des alliées dans le monde entier." Certes, oui, mais jusqu'à un certain point. La beauté du diable est avant tout le portrait d'une femme japonaise d'aujourd'hui, délaissée par son mari et qui va sombrer dans la dépendance. Une véritable "shopaholic", addiction qui va la conduire à mentir, s'endetter et, bien pire encore. Ce roman sur la condition féminine au Japon est écrite par une indienne, Radhika Jha, laquelle y a passé 6 ans de sa vie. Si le livre est nippon jusqu'au bout des ongles vernies de son héroïne, il n'en conserve pas moins un très léger recul, presque imperceptible, le regard d'une étrangère sur une société plus que jamais patriarcale. D'une certaine façon, les temps n'ont pas tellement changé depuis les années 50 quand apparaissaient sur les écrans certains (superbes) films féministes de Kenji Mizoguchi ou Mikio Naruse. Le livre est un peu inégal, cependant. Répétitif, parfois, heureusement traversé de scènes magnifiques comme celles du temple. Le personnage le plus fascinant est celui de Tomoko, l'amie suicidée de la narratrice, une "fashion victim" dont le vice cache une dépression et une solitude profondes. Son ombre plane constamment au-dessus de celle qu'elle a poussé vers un bonheur éphémère et les voies de la perdition. Femme de diplomate, Radhika Jha vit désormais à Pékin. Son prochain roman nous contera t-il l'émancipation de la femme chinoise ? Même en émettant des réserves sur La beauté du diable, on demande volontiers à lire.
Lien : http://cin-phile-m-----tait-..
Commenter  J’apprécie          160
La beauté du diable

A Tokyo, Kayo, la narratrice, s’adresse à un mystérieux destinataire. Elle lui explique son parcours : mariée trop vite à un salaryman accaparé par son métier de banquier, elle devient mère trop jeune et végète dans un rôle de femme au foyer sans avenir ni perspectives. Son désœuvrement la ronge. L’ennui insondable qu’elle vit au quotidien la pousse inexorablement vers la dépression. En retrouvant Tomoko, une ancienne camarade de lycée, elle découvre le monde de la mode, le shopping compulsif, les vêtements, chaussures et accessoires de marque. Elle enchaîne les ventes privées, fait sienne la devise de son mentor (« Les vêtements représentent le seul vrai pouvoir que nous autres femmes détenons sur le monde ») et finit par se brûler les ailes.





Ayant ouvert un compte sans en parler à son mari grâce à un don de sa mère, elle dépense sans compter jusqu’au jour où la source se tarît. Croulant sous les dettes, elle s’adresse à des usuriers mafieux pour obtenir un crédit. Les yakuzas vont lui faire comprendre qu’il y a un moyen très simple d’obtenir tout l’argent qu’elle désire en toute discrétion : la prostitution…





J’ai vraiment beaucoup, beaucoup aimé ce roman. Radhika Jha est indienne mais j’ai retrouvé dans son texte le sombre désespoir que j’apprécie tant dans la littérature japonaise contemporaine, notamment chez Murakami Ryu. Aucune superficialité malgré les apparences. Le mal être de Kayo est profond, elle achète pour exister, pour ne pas devenir invisible. Elle achète pour combler un vide qui a désespérément besoin d’être rempli. Sa confession agace, touche, inquiète. Elle fascine aussi. Sous les abords légers la cruauté affleure, le glamour devient glauque, l’ivresse du shopping tourne à l’aigre. Percutant et fort bien mené.


Lien : http://litterature-a-blog.bl..
Commenter  J’apprécie          150
L'Eléphant et la Maruti : Fictions de Delhi

3 nouvelles, 3 récits qui content les histoires de personnes qui se battent bec et ongles pour réussir, de personnes qui se battent bec et ongles pour survivre dans une Inde surpeuplée, où l'argent et les castes séparent les gens.

J'ai une préférence pour le premier récit éponyme du recueil et le dernier Le mariage est un peu court. Le second L'espoir est acide et laisse ses personnages face à un destin désenchanté.

Ce recueil place le lecteur en immersion indienne totale. Une Inde moderne mais à couteau tiré.

Le style est simple et laisse la parole aux protagonistes qui racontent leur histoire tels des conteurs d'un autre siècle.

Bon moment de lecture.
Commenter  J’apprécie          140
L'Odeur

Impression étrange que me laisse cette lecture. J'ai été plutôt séduit par toute la première partie et ce personnage à l'histoire singulière et plutôt difficile et dont l'environnement prenait particulièrement forme à partir de l'odorat.



J'ai en revanche trouvé beaucoup de fausseté, de clichés au coeur du roman, avec des personnages un peu trop caricaturaux pour certains. L'étrangeté du propos était certes voulu et compris par moments mais j'ai rencontré à mon sens beaucoup de maladresse dans la description de certains rapports humains, de certaines péripéties qui s'enchainent avec peu de vraisemblance, plus posées là pour traiter à tout prix de certaines questions de société.



La fin m'a plutôt réconciliée avec le personnage et j'ai davantage compris ses ambivalences et ses volte-faces... mais en restant circonspect sur le talent d'écriture. Il est vrai également que c'est un premier roman et que je manque de légitimité pour me poser en critique trop dur mais l'impression du début m'avait plutôt enthousiasmé et c'est sans doute la déception qui parle plutôt que le jugement objectif.
Commenter  J’apprécie          130
Des lanternes à leurs cornes attachées

Superbe livre qui nous plonge au plus profond de l'Inde et de ses croyances millénaires mettant face à face ceux qui refusent tout changement et s'arque boutent sur les traditions et ceux qui veulent en faire fi pour mener le pays sur la voie de la modernité.

Ramu le plus pauvre de Nandgaon ce pauvre village ne survit que grâce à la charité du patel le chef du village dont il garde le troupeau de chèvres. Ramu n'a rien à lui et on lui refuse le droit de posséder de la terre ou du bétail, il a même été relégué dans une maison en ruine à l'écart du village près de la forêt.

Lakshmi quant à elle a pu aller faire des études à l'université, mais son père ruiné va se suicider, et à 25 ans elle qui est toujours célibataire n'est plus rien dans cette société indienne.

Elle sera contrainte d'accepter un mariage arrangé, mais à son âge (en Inde 25 ans c'est trop vieux pour qu'une fille puisse se marier) et sans dot, seul un homme comme Ramu qui n'a rien à offrir peut accepter l'offre de la marieuse.

Lakshmi arrive donc avec son époux à Nandgaon et elle découvre un village isolé de tout, aucune route n'y mène, il n'y pas d'électricité. le village vit totalement replié sur lui-même comme il a toujours vécu depuis des siècles.

Un jour Ramu découvrira une vache perdue dans la forêt, le patel va l'autoriser à la garder, c'est une Junglee, une vache sauvage qui ne vaut rien, et qui ne vaut en tout cas pas la peine qu'on la fasse entrer dans le troupeau collectif du village. La vie n'en sera pas changée.

Oui mais….. Lakshmi va recevoir la visite de Manoj Mishra, spécialiste de l'insémination artificielle des vaches.

Sans rien dire à son mari et sans demander l'autorisation au chef du village, elle fera inséminer la Junglee.

Lorsque le veau naitra, un veau noir et blanc ne ressemblant en rien aux vaches indiennes, les villageois y verront un don des dieux.

D'autant plus que 2 ans plus tard le miracle va se reproduire et la fille de la Junglee va elle-même avoir un veau et va se mettre à produire des litres et des litres de lait et rendra Ramu et Lakshmi plus riche que le patel lui-même.

Le village va alors se diviser, ceux qui resteront fidèles au patel en souhaitant que rien ne change dans le village, et ceux qui voudront suivre Ramu et Lakshmi dans leur quête de modernité.

Un livre qui nous démontre à quel point les traditions de ces villages isolés de tout perdurent encore aujourd'hui et les paralysent, alors qu'en parallèle une autre partie de l'Inde envoie des satellites sur la Lune….

Commenter  J’apprécie          111
L'Eléphant et la Maruti : Fictions de Delhi

L'éléphant et la Maruti, de Radhika Jha est un recueil de trois courtes nouvelles : "Le mariage", "L'espoir" et la nouvelle éponyme qui donne son titre au livre.



Si de nombreux personnages se bousculent et se croisent dans ces nouvelles, le personnage principal est cependant Delhi; Delhi avec ses embouteillages, ses mendiants, ses pauvres qui luttent de toutes leurs forces pour ne pas devenir mendiants à leur tour, ses policiers corrompus, ses petits fonctionnaires, ses mafieux et ses jolies filles.



J'ai trouvé les trois nouvelles de qualité inégale. "Le mariage" est une histoire assez farfelue, qui m'a quelques fois fait sourire, mais souvent laissée perplexe.



"L'espoir" est ma préférée, parce que plusieurs histoires y sont enchâssées et que, malgré la note triste sur laquelle elle se termine, elle est remplie d'espoirs justement : l'espoir de tous ceux qui sont venus à Delhi pour y trouver une vie meilleure, qui l'ont trouvée, ou qui ont toujours l'espoir de la trouver un jour.



"L'éléphant et la Maruti" est la nouvelle la plus sombre : une longue, interminable, épouvantable descente aux enfers, qui m'a laissée assommée, au bord de la nausée, complètement abattue et déprimée.



Ces courtes nouvelles semblent plutôt relever d'un travail journalistique, et ressemblent à des articles de fond qui auraient été particulièrement étoffés et développés. Ils sont des témoignages sur cette ville immense, saturée de pollution, saturée d'ordures, mais surtout saturée d'hommes.



L'ensemble de ces nouvelles forme, selon moi, une introduction à la ville pour qui envisagerait un voyage en Inde (ou un souvenir pour qui en reviendrait), une fiction hyper-réaliste pour lecteur lassé de se voir toujours présenter une Inde des Mille et une nuits, toute de pierreries, de colliers de fleurs parfumés et de saris chatoyants.
Commenter  J’apprécie          110
La beauté du diable

En commençant La beauté du diable, on peut s’attendre à Une accro du shopping made in Japan où tout n’est que paillettes et désinvolture. Ce texte de Radhika Jha est à l’opposé, elle nous livre un texte profond presque déroutant.



La beauté du diable nous parle de l’addiction sans rien omettre, on y lit la découverte du vice, les sensations de bien être quand le besoin est assouvi, le manque, les mensonges et la descente aux enfers. Bien qu’ici, il ne soit nullement question de drogue ou d’alcool, en effet Kayo est une adepte d’un petit club très privé qui réunit les amateurs de la beauté, la beauté de soi dans de jolies tenues hors de prix.



Kayo est une jeune tokyoïte qui souhaite échapper au destin familial, elle se marie trop vite même si elle aime sincèrement Ruy, son mari. Elle devient également très vite maman. Elle aime sa vie de femme au foyer et de mère de famille mais la makkura (que je traduirai par quelque chose qui ressemble à la dépression) est là, elle s’ennuie. C’est son amie Tomoko qui lui fera découvrir les joies du shopping dans les boutiques de luxe. Kayo aime voir, toucher et posséder des jolis et onéreux vêtements. Au milieu de ces étoffes délicates, elle se sent belle, elle se sent vivre, elle se sent exister. La dépendance se met en place…



Ce texte est un vrai délice, Radhika Jha décrit avec beaucoup de justesse les états âmes de Kayo. On ressent aisément les joies et ses peines de jeune femme au foyer et on vit avec elle, la sensation de manque qui monte progressivement, le bonheur intense de l’achat, la culpabilité d’avoir une nouvelles fois craqué. Un panel d’émotions fortes et puissantes décrites avec beaucoup de pudeur et de délicatesse. C’est malgré tout avec un sentiment partagé que j’ai suivi sa descente vers l’enfer, j’ai tout de suite aimé, compris et soutenu Kayo mais j’avais également envie qu’elle s’affirme, qu’elle ose, qu’elle mette en place les solutions qu’elle possède en elle. Mais voilà, la culture japonaise fait également partie intégrante de ce roman.



J’ai adoré suivre la préparation des diners, savoir quel ingrédient est pour les jour de fêtes et lequel est pour lotus les jours. Cette immersion dans le quotidien des civilisations différentes de la mienne historiquement ou géographiquement fait partie des choses que je préfère dans la littérature. Le Japon, on y est avec son culte à la réussite, sa pudeur et l’honneur guidant chaque décision, chaque fait. Je me suis étonnée de découvrir que l’auteur de ce roman est indienne ; car ce livre est une véritable excursion en territoire nippon.



Je remercie chaleureusement Babelio et Les Editions Philippe Picquier pour m’avoir permis de lire ce livre dans le cadre d’une masse critique. Cette lecture a été un merveilleux voyage entre dépaysement et ancrage dans l’humanité.
Commenter  J’apprécie          100
La beauté du diable

Nous sommes à Tokyo dans les années 90

La narratrice souffre d'une addiction : celle du shopping.

Femme au foyer, mère d'un petit garçon puis d'une petite fille, elle s'ennuie cruellement. Son mari part tôt le matin et rentre tard le soir. Bien que amoureux, il est distant et observe à la lettre le machisme de sa culture.

La narratrice a le culte du beau vêtement et du paraître dans une société qui présente le paradoxe de l'indifférence et de l'espionnage des voisins.

Très vite, la narratrice va être endettée. Elle va alors avoir recours à des solutions de plus en plus dangereuses et indignes.

Le parcours de cette femme est semblable à celui de n'importe quel toxicomane : du plaisir puis de la dépendance, du vol puis de la prostitution. La cure de désintoxication est relativement artisanale et n'empêchera pas la rechute.

Ce qui m'a plu dans ce roman est tout d'abord son sujet : un phénomène banal et loin d'être illégal créé une véritable pathologie chez une femme ordinaire. Ensuite, j'ai trouvé que situer l'action au Japon donnait encore plus de force au propos puisque la culture du paraître prend ici une dimension sociale très importante.

En revanche, j'ai trouvé les scènes de shopping longues et répétitives. L'auteur aurait pu épargner à son lecteur la description détaillée de chaque vêtement !

Néanmoins, il reste un goût d'amertume à cette lecture qui la rend poignante : la solitude, le paraître, la société de consommation : autant de thèmes universels toujours d'actualité.

Si vous êtes de celles ou de ceux qui vont (trop) souvent faire les boutiques, faites une pause, allez au parc et lisez ce roman. Peut-être vous aidera-t-il à relativiser votre besoin du dernier pantalon à la mode 😉



Pioche dans ma PAL - Avril 2017

Commenter  J’apprécie          90
La beauté du diable

Contrairement à ce qui est mis en avant - le besoin d'acheter des vêtements, d'être belle, le paraitre - ce qui m'est resté de ce livre est tout autre. C'est surtout l'histoire d'une femme d'aujourd'hui face à la société dans laquelle elle vit. Comment avoir l'impression de ne plus être transparente, avoir des ami(e)s, appartenir à un cercle. Là ce sont les vêtements, ça aurait pu être autre chose je pense, bien qu'on insiste ici sur l'apparence.

Il se dégage surtout une extrême solitude et un mal être que beaucoup de femmes partageront.

J'avais lu "l'odeur" du même écrivain, talent confirmé.
Commenter  J’apprécie          90
L'Odeur

Née à Delhi en 1970, Radhika Jha perd sa mère à trois ans, grandit à Bombay puis atterrit dans un pensionnat himalayen avant d'obtenir une bourse pour aller poursuivre ses études aux Etats-Unis. Ensuite elle découvre la France et la Suisse, avant de rentrer en Inde. Aujourd’hui, Radhika Jha vit à Delhi. L'Odeur est son premier roman, il a reçu le prix de la Fondation Guerlain en 2002. « Au début, j'avais l'intention d'écrire quelque chose de court sur une idée qui m'était venue à Paris, l'histoire d'une femme obsédée par son odeur et par ses racines. Finalement, j'ai pris tant de plaisir à l'écrire qu'elle s'est passablement amplifiée », livre-t-elle lors d’une interview. Empli de couleurs et d’odeurs, ce roman à la sensualité envoûtante et saturé de volupté est un bel hommage à l’art culinaire et à l’Inde, terre natale de l’auteure, pays des senteurs et des saveurs s'il en est. Une lecture où tous les sens sont à l'honneur, à savourer avec un vrai bonheur.
Commenter  J’apprécie          80
L'Odeur

*Prix Guerlain



“Odeur: Émanation volatile qui se dégage de quelque chose et que l'on perçoit par l'odorat.” Dict. Larousse.



Lîla vit au Kenya. Lorsque son père est tué dans une émeute, sa mère décide de l’envoyer chez son oncle Krishenbhai et sa femme Latha à Paris pendant qu’elle ira avec ses deux garçons chez son frère à Londres … La séparation est très difficile pour Lîla, elle ne connaît personne à Paris oncle et tante compris. L’adaptation est difficile, sa tante exigeante. Elle apprend à cuisiner et développe son odorat à différentes épices, arômes, … Après un malentendu, Lîla se retrouve à la rue, découvre peu à peu la ville lumière, les parisiens. Les odeurs culinaires font place maintenant aux odeurs corporelles …



Un roman magnifique qui nous incite à humer ce qui nous entoure, la nourriture, les gens, …. on ne se promène plus de la même façon une fois enivré par se livre !

Commenter  J’apprécie          70
Des lanternes à leurs cornes attachées

Une vache est sortie de la forêt et est apparue dans un village d'Inde. Ramu, un humble berger et sa femme Lakshmi la recueillent et la soignent, l'entourant d'un amour immodéré...

Jusque là le village de Nandgaon était à l'écart du monde moderne, dans une sorte de paradis préservé, avec ses règles, ses coutumes et ses fêtes.

Mais voilà que passe dans ce village un homme à moto: avec la complicité de Lakshmi, ce "médecin des animaux" va inséminer la vache venue de la jungle.

Dès lors, la vie des villageois va être bouleversée.

De cette simple anecdote, Radhika Jha fait un long roman dans lequel elle introduit les paysans, les commerçants, le chef du village, et chacun joue un rôle dans cette histoire écrite non sans humour mais avec des longueurs, à mon avis!

Commenter  J’apprécie          60
L'Eléphant et la Maruti : Fictions de Delhi

Il s'agit d'un recueil de trois nouvelles, le lien entre elles est qu'elles se passent à Delhi, et la ville ainsi que le rapport des personnages à cette ville est un élément important dans les récits.



L'un des thèmes des récits est une opposition entre des Indiens occidentalisés, vivant dans une aisance matérielle, ayant suivi des études et exerçant des professions intellectuelles et les Indiens miséreux, essayant de survivre au jour le jour, d'une façon traditionnelle. Les premiers pour la plupart tentent d'ignorer les seconds, les considèrent comme une nuisance. Les deuxièmes s'adaptent tant bien que mal aux premiers, tentant de tirer d'eux leur subsistance. C'est étonnement dur parfois, on est confronté à une société dans laquelle la notion d'égalité, y compris de dignité et de respect, n'est même pas une sorte de vague programme, mais presque quelque chose d'inconcevable.



J'ai été un peu déçue par la façon dont l'auteur traite ses personnages, en survolant, on aimerait un peu plus savoir d'eux, les suivre, parce que là on entrevoit, mais on reste sur sa faim, alors que certains semblent intéressants. Les récits étant plus basés sur les descriptions des personnes que sur une action, cette manière de ne pas approfondir les portraits casse un peu l'accroche des histoires.

Commenter  J’apprécie          60




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Radhika Jha (338)Voir plus

Quiz Voir plus

Antigone de Jean Anouilh

Qui sont les parents d'Antigone :

Jocaste et Oedipe
Créon et Jocaste
Créon et Eurydice
Hélène et Ménélas

10 questions
629 lecteurs ont répondu
Thème : Jean AnouilhCréer un quiz sur cet auteur

{* *}