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Critiques de Rafael Reig (59)
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Des chrysanthèmes jaunes

En 1975 à Madrid, Pedrito Ochoa a une douzaine d'années. Cela fait un bail qu'il grandit dans un orphelinat de bonnes soeurs, sans trop savoir ce qui est arrivé à ses parents. Sans doute des communistes, emprisonnés ou exécutés par le régime franquiste. En ces temps-là, peu lui importe, de toute façon. Ce qui compte, c'est sa bande de copains. de la mauvaise graine qui va forcément mal tourner, c'est en tout cas ce que répètent à l'envi les religieuses (aux comportements sexuels pas toujours catholiques d'ailleurs), au point que Pedrito et ses amis ont intégré ce credo, convaincus que "les branlettes et la prison, la désolation et le confinement, la splendeur et la solitude étaient notre destin naturel, comme le pronostiquaient les bonnes soeurs ; nous répondions à l'appel d'un sang obscur, insistant et lointain".



Et pourtant, en cet an de grâce 1975, Franco meurt, ce qui va radicalement changé la vie de Pedrito. Ses grands-parents maternels se rappellent tout à coup de ce "fils de communiste". Ils décident de le reprendre chez eux et de lui offrir un "Grand Avenir" petit-bourgeois. Et Pedrito de se retrouver désormais, non plus avec l'ivraie, mais avec le bon grain des "gens charmants", même s'il n'oubliera jamais ses amis de l'orphelinat. C'est à ce moment-là qu'il décide de devenir richissime, quoi qu'il lui en coûte.



L'histoire est racontée par Pedrito lui-même, de nos jours, alors qu'il a passé la cinquantaine et se trouve mêlé à une enquête policière. Son récit va et vient dans le temps, alternant enfance, adolescence et âge adulte, et il n'est pas toujours simple de se repérer dans ces sauts de chronologie. Roman d'apprentissage, le texte balaie aussi les soubresauts de l'histoire espagnole récente, de la fin du franquisme à la Movida en passant par la Transition démocratique et le "destape" (suppression de la censure qui déclencha une vague d'érotisme). C'est donc un parallèle entre la libération d'un pays et celle d'un enfant sorti de l'enfermement de l'orphelinat et de sa classe sociale. Mais si l'ascenseur social permet à Pedrito de côtoyer la classe des "gens charmants", il comprend bien vite qu'il ne sera jamais l'un des leurs et se sentira toujours comme un imposteur parmi eux, profondément marqué qu'il est par la conviction que seule son enfance et les amitiés forgées alors étaient authentiques.



Portrait d'une époque et d'une génération, ce roman m'a paru long et répétitif, et lassante l'obsession du narrateur et ses camarades pour le sexe. Si la quatrième de couverture parle d'humour décapant, j'y ai surtout vu de l'humour désabusé, voire de l'amertume, et de la nostalgie. L'amitié du narrateur pour Escurín et son adoration pour Mercedes sont très touchantes, mais globalement je reste sur une impression de confusion et d'incompréhension.



En partenariat avec les Editions Métailié.
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Ce qui n'est pas écrit

De tous les polars que j'ai pu lire, Ce qui n'est pas écrit se classe haut la main dans mon top 3 des pire de ce genre. C'est la première fois qu'une découverte Masse Critique s'est avérée pénible, a tel point que j'ai eu hâte d'en finir. Je remercie malgré tout le site et les Editions Métailié Noir pour cet envoi qui a eu au moins le mérite de me faire frémir, mais pas de plaisir loin de là.

 

Je ne vais pas m'étendre sur un résumé détaillé de la chose car grosso modo je n'ai pas trouvé de qualités à ce roman qui nous met en scène trois protagonistes plus que frustrés. Carlos, le père et accessoirement ex-mari de Carmen, pseudo écrivain et alcoolo à souhait. Carmen, la mère, femme à la carrière bien assise suite à ses parties de jambe en l'air avec son supérieur a tout de la femme pratique, elle pense pratique, elle baise pratique, enfin bref pas très réjouissant comme tableau. Pour compléter ce joli couple de gagnants, je vais vous demander d'applaudir bien fort Jorge, qui est la tendre progéniture des deux gugusses. Enfant chéri à sa maman, le cher petit âgé de 14 ans est surprotégé par celle-ci  alors quand notre gaillard de Carlos propose d'emmener le fiston en camping ça va chauffer sous le soleil d'Espagne. D'ailleurs j'allai oublier un élément clé dans ce bordel manifeste, c'est qu'entre Carlos et Carmen les rapports sont chauds bouillants. L'affection que porte Carlos à la bouteille a eu raison de son couple alors je vous raconte même pas l'étendue des dégâts et les griefs qui vont avec. Ce petit week end en montagne entre le père et le fils arrive à point nommé pour faire resurgir du passé les vieilles rancoeurs, amplifiées par l'angoisse que va causer  Carlos à Carmen en lui laissant une copie de son prochain livre aussi sordide qu'inintéressant , futur best-seller dans la catégorie fond de poubelles,mais Carmen devra y déchiffrer ce qui n'est pas écrit...



Sans déconner, qu'est-ce qui est passé dans la tête de l'auteur quand il nous a pondu ce truc?

Le roman est à trois voix, une fois nous avons affaire à Carlos ou Carmen et entre chaque lamentation nous découvrons le fameux roman qui va semer une super terreur dans l'esprit de celle-ci et pour moi, lectrice, cela s'est avéré être un vrai calvaire. C'est crade, c'est poisseux, ça sent le vice à plein nez et ça devient vite indigeste. Les personnages sont plats et je n'ai ressenti de sympathie pour aucun d'entre eux, ils sont tellement frustrés et aigris qu'en y repensant, cette histoire m'a plus fait rire qu'autre chose car entre leurs questions existentielles à la con et leur côté malsain ça en devient vraiment ridicule. De plus, l'auteur n'a pas eu la main légère question sexe et le roman est truffé de passages complètement à côté de la plaque qui n'apportent pas grand chose à l'histoire, hormis rajouter de l'absurdité au tout qui n'est déjà pas très glorieux...

Vous l'avez compris je n'ai pas aimé. Je ne connaissait pas l'auteur et je ne sais pas si j'ouvrirai un autre de ses livres, si toute sa bibliographie est dans la même trempe ça doit donner... Bien entendu, cet avis ne regarde que moi et ne doit pas vous empêcher de vous faire le vôtre en découvrant ce polar si ça vous tente.
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Ce qui n'est pas écrit

Carlos est divorcé de Carmen avec laquelle il a eu un fils, Jorge, dont il a été trop longtemps séparé. Carlos trouve que Jorge est un peu trop dans les jupes de sa mère. Il décide donc de l’emmener passer un weekend en montagne avec lui, histoire de le dégourdir un peu et surtout de mieux le connaitre. En partant, il laisse discrètement le manuscrit de son dernier roman chez son ex-femme, juste pour qu’elle le lise, selon le mot qu’il lui laisse.



« Il a laissé son roman à Carmen et elle lui a laissé son fils. Carlos se demande ce que ça signifie. Est-ce que par hasard l'enfant serait un roman qu'il doit lire et apprendre à interpréter ? A-t-il un sens qui n'est pas visible ? Carmen a-t-elle écrit l'enfant comme ça seulement pour qu'il le lise et comprenne quelque chose, pour qu'il reçoive le message ? Alors, à qui appartient cette peur : à Carmen ou à son fils ? »



Dès les premières pages, Carmen croit se reconnaitre dans un des personnages de ce roman particulièrement noir. Plus, elle avance dans sa lecture, plus le trouble l’envahit. Et si Carlos avait voulu lui dire quelque chose par le biais de son livre ? Et s’il y avait un message à découvrir entre les lignes de ce roman ? Et s’il y avait un sens caché à tout ça ? Et si le plus important se trouvait dans Ce qui n’est pas écrit ?



« On dit souvent que le romancier manipule le lecteur, mais elle, comme lectrice, n'était-elle pas en train de manipuler le roman dans le sens où elle avait décidé de le lire ? Lire dans la direction contraire à ce qui est écrit n'était-ce pas un autre acte de violence, un exercice de pouvoir ? »



D’emblée, on se dit qu’il va y avoir un problème, que tout ne va pas se passer comme prévu. On pense aussi à Sukkwan Island, ce père et ce fils qui partent ensemble dans un endroit isolé. Mais ici, même si l’envie de savoir est forte, l’intérêt est ailleurs. Fiction et réalité entremêlés et parfois réalité rattrapée par la fiction.



La structure du roman est triple. Le récit de la confrontation du père et du fils d’une part, celui de la mère angoissée d’autre part, et enfin le roman dans le roman. Celui de Carlos qui prend vie par la lecture de Carmen. Sans lecteur, pas d’existence pour le roman. Ne dit-on pas parfois qu’un roman est différent pour chacun de ses lecteurs ? Rafael Reig nous livre une intéressante réflexion sur le processus de création littéraire, sur ce qu’on lit, ce qu’on lit entre les lignes et ce que chacun met derrière les mots.



« Celui qui écrit a le pouvoir, celui qui lit se soumet. »



Ce qui n’est pas écrit est un roman noir aussi étonnant qu’oppressant dont la construction et la réflexion qu’il suscite font la force, l’intérêt et l’originalité.





Merci à Babelio et aux Éditions Métaillié pour cette belle découverte.
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Ce qui n'est pas écrit

Un bon roman noir doublé d'une belle réflexion sur le processus de création littéraire.

Après avoir été enthousiasmée par la lecture de Todo está perdonado qui évoquait avec élégance et humour la transition démocratique (que La tristesse du samouraï abordait avec la légèreté d'un char d'assaut), je me réjouis de voir que Rafael Reig est de retour avec un roman de bonne facture.

Carlos, aspirant écrivain rongé par l'amertume et l'alcool, décide de passer la fin de semaine dans la sierra de Guadarrama avec son fils adolescent Jorge. Cette randonnée dans la montagne lui offre enfin l'opportunité de renouer avec lui des liens qui n'avaient pas résisté à un divorce houleux. Avant de partir, il laisse à son ex-femme Carmen le manuscrit de son roman intitulé Sur la femme morte. "Le problème, avec les polars, était déjà bien pire que leur manque d'originalité: il s'en vendait de moins en moins." Et Carmen s'y connaît. Elle est sous-directrice commerciale pour un groupe éditorial.

Pendant que Jorge et son père crapahutent dans la sierra en tentant tant bien que mal de communiquer, Carmen se plonge dans la lecture du roman dont nous prenons connaissance en même temps qu'elle.

Là où le lecteur ne voit dans la prose de Carlos qu'une bien pâle copie de Pas d'orchidées pour Miss Blandish de James Hadley Chase, l'ex-femme appréhende ce récit alambiqué de kidnapping comme un roman à clé. Elle y voit des références particulièrement dures à ses amours défuntes: "Le lecteur? Quel lecteur? Ce roman s'adressait à une unique lectrice, elle." Carmen projette peu à peu ses angoisses sur la relation entre le père et le fils, angoisses amplifiées par l'impossibilité de joindre par téléphone les deux intéressés. Et si Jorge était en danger?

Cette réflexion passionnante sur la création et le rôle du lecteur qui serait tout le temps tenté de lire "Ce qui n'est pas écrit" est brillamment servie par une habile structure narrative ainsi que par son atmosphère oppressante. le nombre restreint de personnages donne une illusion de huis-clos d'autant plus déroutante que les protagonistes se trouvent dans des lieux éloignés. L'intrusion de la fiction dans le réel est subtile, Reig utilisant les grilles de mots croisés d'un des personnages du polar de Carlos comme premier mot du chapitre suivant. Les quatorze mots à insérer dans la grille ne laissent d'ailleurs aucune place à l'optimisme. La désillusion sur le couple est totale. On songe à No llames a casa, de Carlos Zanon. Madrid est moche, sa banlieue est sordide et même le beau parc naturel de Guadarrama qui enthousiasma en son temps Gautier et Dumas devient sinistre. La lecture de Ce qui n'est pas écrit fut quant à elle un véritable plaisir.



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Ce qui n'est pas écrit

Huit clos madrilène.



Carlos et Carmen sont séparés, difficilement remis d'un mariage raté fait de disputes, de tromperies, d'alcool et de souffrance psychologique, entre domination et rancoeur.

Malgré leurs différents, ils restent en contact pour leur fils Jorge, adolescent fragile, chouchouté par sa mère, terrorisé par son père, en constante demande d'amour et de reconnaissance.



Carlos organise une randonnée camping avec Jorge, et laisse à Carmen les épreuves d'un roman en sollicitant son avis d'éditrice.

Le livre sous forme de thriller plutôt glauque, peuplé de personnages improbables et de situations scabreuses interroge Carmen sur les motivations de son ex-mari. Que doit elle comprendre entre les lignes de ce torchon d'écrivaillon raté? Sa lecture entre peu à peu en résonance avec le vécu de leur couple, créant une peur, une introspection angoissante.

D'autant qu' il faut bien constater que la balade bucolique avec sacs à dos et duvet ne s'annonce pas comme une promenade de santé.



Un livre déroutant, sinistre, avec sa petite dose de perversion pas vraiment romantique.

Il faut reconnaitre une maitrise dans la construction mêlant trois histoires. L'angoisse monte incontestablement mais la narration semble patiner, préférant nous entrainer vers des réflexions sur l'estime de soi, la frustration, la culpabilité, la manipulation des individus.

Les chapitres alternent la mère lisant, le livre se dévoilant, les hommes se confrontant. Et puis, les mondes parallèles semblent se croiser, se rattraper, mêlant insidieusement les faits et personnages.



Se glissent au fil des pages, une réflexion sur la création littéraire, sur le trio [auteur-livre-lecteur], et le concept que chaque fiction est appropriée de multiples façons, par ceux qui la reçoivent.



Merci aux éditions Métailié pour une découverte "noire" insolite.

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La position du pion

Challenge ABC 2016-2017



A la fin d'une partie d'échecs, il suffit parfois de regarder les pièces qui restent sur l'échiquier pour deviner comment la partie s'est déroulée.

En cet an de grâce 1979, l'Espagne est en pleine effervescence. Franco est mort en 1975 et Adolfo Suarez, franquiste modéré converti à la Démocratie, a été désigné chef du gouvernement avec la lourde tâche d'assurer la Transition et de faire approuver la nouvelle Constitution.

A cette époque, dans un lotissement petit-bourgeois des hauteurs de Madrid, trois « couples amis » apprennent le retour au bercail de Luis Lamana et de sa femme. Pourquoi celui-ci rentre-t-il en Espagne après tant d'années d'exil aux USA ? Les six comparses se perdent en conjectures : revient-il pour enfin réactiver leur cellule de militants communistes, dormante depuis plus de quinze ans ? Est-il celui qui les a dénoncés en cette année de disgrâce 1962, lorsqu'ils se sont retrouvés emprisonnés dans les cachots de la Sûreté phalangiste? Quels sont ses projets ? D'où sort-il son argent ? Et sa femme, cette « fermière du Midwest » ?

A côté de ces quarantenaires, qui ont échangé sans trop d'états d'âme leur déguisement de rebelles gauchistes de pacotille pour les habits tellement plus seyants de « fils à papa de merde » qu'ils n'avaient, au fond, jamais voulu cessé d'être, il y a la génération suivante, celle de leurs enfants adolescents et de leurs amis, au nombre desquels Javito et Johnny, le fils du plombier. Enfin, façon de parler, le plombier en question n'étant pas son père biologique.

Presque 25 ans plus tard, Johnny est devenu écrivain, mais n'a toujours pas résolu le mystère de sa filiation ni celle de l'assassinat, douze ans plus tôt, de Javito, devenu entre-temps un junkie irrécupérable. Il poursuit ses recherches, sans grande conviction, sans être certain de vouloir vraiment connaître la vérité, qu'il n'imagine guère plus brillante que les intrigues mesquines des « couples amis » pour s'assurer une place au soleil, pour se trouver « là où ça se passe ».



Sautant d'une époque à l'autre, de la première à la troisième personne, le roman déroule en parallèle le fil d'une partie d'échecs entre deux des maris des « couples amis », notée par le troisième. Partie calamiteuse dans la mesure où le futur perdant accumule les erreurs par distraction, manque de vision d'ensemble et de réflexion stratégique. C'est le prétexte pour l'auteur de filer la métaphore en observant la vie de ses personnages, dont la seule angoisse existentielle est de « réussir » et d'atteindre les hautes sphères de la politique, de la culture, de la finance, mais au bout de quels renoncements, quels arrangements avec leurs consciences, quelles hypocrisies ?

Rafael Reig n'est pas tendre avec les mirages de l'avènement de la démocratie et sa cohorte de parvenus. Seule l'innocente Lourdes trouve grâce à ses yeux et, au passage, suscite l'empathie du lecteur. Avec une écriture acerbe, un humour caustique et un sens de la formule imparable, il interroge la Transition puis glisse vers les questions de la transmission, de la transgression : quelle génération a le droit de juger l'autre, qui lègue quoi à qui, qui est créancier ou débiteur, quel est le sens de la vie ? Une certitude : la vie est plus opaque qu'une partie d'échecs : même en observant ce qu'il en restera à la fin, il n'est pas certain qu'on pourra tout comprendre.
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Ce qui n'est pas écrit

«Ce qui n’est pas écrit» se lit entre les lignes.



Carlos emmène son fils pour une excursion à la montagne. Renouer les liens père-fils après ce douloureux divorce avec Carmen. Un fils qu’il trouve un peu trop timoré, un peu trop sous l’emprise de sa mère. Cette balade dans la nature, dans un environnement sauvage et hostile devrait lui faire du bien. Sac-à-dos, lampes de poches, couteau suisse. Tu éteins les portables, et l’expédition peut commencer.



Ah, j’oubliais de préciser qu’après avoir récupéré son fils chez son ex-femme, il laisse discrètement un manuscrit. Une note au stylo : Lis-le ! Plus qu’une requête, Carmen sent cette phrase comme un ordre, l’injonction d’un ex-mari. Passe ainsi un long week-end, éprouvant et de plus en plus terrifiant. Carlos, ce poète maudit que personne n’a voulu éditer, le voilà maintenant avec un roman. Noir en plus, du genre thriller vulgaire, un mélange de sang et de sexe. Pas vraiment un très bon cru. Mais Carmen se sent viser, à chaque page, à chaque ligne. Ou du moins, à chaque interligne. Elle se voit dans ce roman, elle voit des morceaux de sa vie. Et cette fille kidnappée, attachée, humiliée ne serait-ce pas une image détournée de son fils. Et le téléphone qui ne répond pas. Le malaise s’installe. Le thriller de Carlos sombre dans le polar scabreux en même temps que le thriller de Rafael Reig se montre plus ambigu. Deux romans à l’intérieur d’un même livre, deux histoires différentes mais que des détails semblent réunir vers une même fin tragique… Plus qu’une prémonition ? Mais le plus éprouvant n’est-il pas de lire « Ce qui n’est pas écrit »…



[...]
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Des chrysanthèmes jaunes

En pleine période après-Franco, nous suivons l'histoire d'un jeune orphelin Pedrito élevé dans un foyer de bonnes sœurs. Connaissant finalement peu de choses à l'Histoire de l'Espagne, j'étais donc très curieuse à la réception de cet ouvrage. Je remercie d'ailleurs Babelio et les éditions Métailié pour l'envoi de celui-ci.



Avec Des chrysanthèmes Jaunes, Rafael Reig nous offre un aperçu du quotidien de ses enfants "orphelins" dont souvent les parents sont emprisonnés à cause de leurs idées politiques ou de larcins. Avec une plume plutôt fluide, le roman se lit bien et j'ai été plutôt curieuse de l'évolution du Perdito et de ses camarades. Cependant, j'ai été extrêmement gênée par l'omniprésence de la sexualité dans ce roman. Nous parlons quand même d'enfant de 12 à 14 ans. Qu'ils peuvent avoir les hormones qui les titillent, je veux bien mais là c'est une véritable obsession et l'auteur n'a de cesse d'en parler, de décrire les masturbations de Pedrito et de son obsession des poils pubiens féminins. Les relations sexuelles décrites sont très tendancieuses et des viols sont décrits sans aucune remise en question (je pense notamment à un de ses camarades qui subit des attachements sexuels de la part d'une des bonnes sœurs) et sans que tout cela apporte quoi que cela à l'intrigue ou n'ai des répercussions réelles. N'oublions pas que c'est un auteur adulte qui écrit et j'avoue que cela m'a fortement dérangé.



L'intrigue et son aspect historique auraient pu être très intéressants mais j'avoue, de façon très subjective, ne pas réussir à passer outre l'omniprésence de la sexualité et son traitement par l'auteur.
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Ce qui n'est pas écrit

J’ai dû lire une critique qui m’a plu puisque ce roman était dans mon pense bête pourtant lorsque je parcours les critiques , elles sont loin d’être bonnes et je partage malheureusement ces dernières .

Ce livre se décline en trois histoires , la randonnée de Carlos avec son fils Jorge, le roman écrit par Carlos et Carmen la mère de Jorge et l’ex de Carlos qui lit le roman de Carlos.

Les chapitres alternent ces trois pans de l’histoire mais les chapitres sur le roman de carlos sont particulièrement ennuyeux. On se doute bien dès les premières pages que la randonnée ne va pas être un moment de détente et l’on s’attend à un drame mais , le scénario est tel que je l’ai lu avec détachement, sans avoir d’émotions. L’idée de départ n’est pas mauvaise mais je n’ai pas réussi à adhérer à l’histoire et à, ne serait-ce que quelques instants, oublier que j’étais en train de lire. Ma lecture fut laborieuse . J’ai eu du mal à m’évader et je ne me suis attachée à aucun des personnages, dommage !

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Ce qui n'est pas écrit

Carlos emmène son fils, Jorge, en weekend à la montagne. C'est l'occasion pour lui de se rapprocher de cet enfant qu'il ne voit que rarement depuis sa séparation avec Carmen. Seulement, il n'est pas très simple de créer du lien avec un adolescent de 14 ans… Ce weekend, c'est aussi l'occasion de reprendre sa place de père, et de faire un homme de ce fils un peu bébé, un peu trop gros.

Carmen, elle, se réjouit et s'inquiète à la fois de ce weekend. Carlos a laissé, avant de partir, un manuscrit sur sa table. Une note indique qu'il souhaite juste qu'elle le lise. Dès les premières pages, Carmen est troublée par les éléments sordides qu'il contient, d'autant que cette fiction évoque une réalité, celle de sa rencontre avec ce jeune poète talentueux sans le sou et sans relation. Au fur et à mesure de cette lecture noire et scabreuse, le doute s'insinue en elle : pour quelle raison Carlos lui a-t-il confié ce manuscrit ? S'agit-il d'une revanche sur le passé, d'un avertissement, ou d'une intention ? "Mais pour elle, il n'était pas si facile de continuer à lire : elle en savait trop. Elle en lisait trop, plus que ce qu'il y avait dans la page : elle lisait ce qui n'était pas écrit. Peut-être que c'était ça, l'obstacle : elle cherchait quelque chose entre les lignes et ça l'empêchait de voir ce qu'elle avait sous les yeux."



J'avoue avoir eu vraiment beaucoup de mal avec la première moitié de ce roman, qui mélange pour l'essentiel trois points de vue : celui de Carlos, celui de Carmen, et des passages de "La femme morte", le manuscrit cause de bien des interrogations. L'univers décrit est sordide, avec un intérêt particulier pour tout ce qu'il y a en-dessous de la ceinture, et pas qu'à des fonctions reproductives. Les personnages m'ont paru stéréotypés, engoncés dans un contexte (le loser qui veut faire ses preuves, l'adolescent malhabile, la femme partagée entre assumer ses actes et culpabiliser) qu'ils n'ont visiblement et masochistement pas envie de quitter. L'auteur semble n'avoir aucune compassion ni aucune affection pour ces héros malmenés qui hésitent entre brutalité envers eux-mêmes et les autres, élucubrations répétitives sur des évènements du passé, culpabilisation à outrance, etc… Enfin, des réflexions plus ou moins philosophiques, ésotériques et, grosso-modo, démagogiques, sur les liens entre un auteur et un lecteur viennent ponctuer un texte qui évoque une histoire au point mort. "L'auteur est dans le livre, pas dehors. C'est le livre qui, pour être lu, nous oblige à imaginer qu'il a un auteur. Nous inventons l'auteur comme nous inventons des dieux." Mais si j'interprète bien les intentions de l'auteur (ce dont je ne mettrai pas ma main à couper!), cette première moitié de l'ouvrage sert à planter un décor, un contexte, à donner au lecteur une représentation de l'histoire et des personnages, de façon à pouvoir le surprendre dans la seconde partie du livre.



Puisqu'on en parle, j'ai trouvé cette seconde moitié du livre plus intéressante. Le point de vue de Carlos est moins présent ; à la place, on suit un peu les pensées de Jorge. Comme Carmen, je me suis surprise à essayer de lire, entre les lignes, ce qui n'était pas écrit, pour deviner ce qui le serait. Le roman sordide tourne au roman noir, pour nous amener à un final fataliste.

Rafael Reig tisse, avec plus ou moins de bonheur, différents thèmes dans cet écrit étrange : la place du père, les illusions sur les autres, les liens auteur-lecteur, l'échec, la fiction et la réalité (qu'un peu de réalité se retrouve dans une fiction, passe, mais l'inverse ?) etc… Au final, on s'apitoie sur ces personnages qui portent malgré eux le masque que d'autres leur ont donné : ils n'arrivent pas à trouver leur place, coincés par ce qu'on attend d'eux, ce qu'ils pensent que les autres attendent d'eux, par ce qu'ils attendent d'eux-mêmes. Dans ce piège des illusions, les fantasmes deviennent un écran de fumée réel qui peine à masquer une réalité pitoyable.

Un roman sombre que j'ai, au final, plutôt apprécié. Je remercie Babelio et les éditions Métailié pour cette lecture.
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Ce qui n'est pas écrit

Livre lu dans le cadre d'une Masse Critique spéciale de Janvier 2014.



Lorsque Babelio m'a proposé de le lire, j'ai été intriguée par le résumé qui donnait au polar une forme particulière. Dans ma jeunesse, je lisais pas mal de policier mais j'ai fini par arrêter car je ne trouvais plus guère d'attrait à ce genre de lecture. Peut-être que ce roman m'y redonnera goût.



Les chapitres s'alternent autour de 3 personnages : Carmen (la mère), Jorge et/ou Carlos (le fils et le père) et Riquelme (le personnage de fiction du père). Quand la narration est avec Carmen ou Jorge, c'est le style propre à l'auteur qui est très agréable à lire, très fluide. Par contre, quand on passe à Riquelme, les choses changent du tout au tout, on en arrive même à cerner Carlos à travers son personnage de fiction. Le « style » de Carlos est lourd, vulgaire et me fait penser à une expression : « Moins on a de culture et plus on l'étale comme de la confiture sur une tartine ». J'ai d'ailleurs eu beaucoup de mal à lire les chapitres relatifs à Riquelme tellement c'était indigeste. Mais c'est néanmoins un véritable tour de force de la part de l'auteur de passer d'un style agréable à un autre vulgaire dans le même roman. Il ne crée pas juste un personnage différent mais un écrivain à part entière.



Finalement, plus on avance dans le roman et plus la vulgarité reste présente quelque soit les personnages de part ce qu'a fait subir autrefois Carlos à son épouse. Car Carlos et Carmen n'arrêtent pas de ressasser le passé pour trouver les failles et rejeter la faute sur l'autre. Même Jorge s'y met quand il croit ne pas être assez bien pour son père. Aucun des personnages ne se parle vraiment mais ils se font une montagne d'une parole, d'un geste, d'une attitude... À la fin, ça devient lassant mais je comprends mieux pourquoi ils appellent ça un « thriller psychologique », enfin je crois !! Le plus intéressant de l'histoire est finalement quand Carmen fait des liens entre le passé et le livre de Carlos qu'elle lit. Soit elle fait des parallèles entre les deux soit elle se dit que ce n'est qu'un roman, mais cette hypothèse ne dure jamais très longtemps.



Je vais sans doute me faire maudire par certains lecteurs mais je n'ai pas du tout aimé ce roman et il ne me tardait qu'une chose, le finir pour enfin pouvoir passer à autre chose et surtout à des lectures plus agréables. Je voulais néanmoins le terminer pour avoir le fin mot de l'histoire mais maintenant, je sais que je ne lirais pas un autre roman de cet auteur. Son style ne m'a finalement pas convaincu malgré un début prometteur. Beaucoup trop de violences, que ce soit verbale ou physique, et surtout certains propos très choquants et trash que je ne peux laisser passer. Plus jeune, je lisais des romans d'espionnage du genre OSS117 et il n'y avait rien de choquant dans leurs propos ou leurs faits et gestes. Pour moi, ce livre peut se classer dans les romans psychologiques, et encore. Passer d'un personnage à un autre qui passent leur temps à se triturer le cerveau en décortiquant les faits et gestes de l'autre pour savoir ce qu'il pense, c'est juste énervant à la fin mais pas psychologique pour ma part...



Comme vous l'aurez compris, cette lecture n'a guère été une réussite pour ma part aussi bien du point de vue du style de l'auteur que de l'histoire racontée. Mais comme on dit : « Chacun ses goûts ». Je suis finalement plus adepte des thrillers dit d'espionnage ou ressemblant à des romans policiers. Dans le cas présent, je me suis laissée abuser par le terme « thriller » que j'associais trop simplement à « policier ». Tant pis pour moi mais cela ne veut pas dire que ce roman ne se trouvera pas un lectorat plus adéquat que moi.



Je remercie néanmoins Babelio et les éditions Métailié pour cette découverte, non couronnée de succès pour ma part !!



Sur ce, bonnes lectures à vous :-)
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Ce qui n'est pas écrit

Rafael Reig est un petit manipulateur. Ce qui n'est pas écrit se devine ? S'imagine ? S'oublie ?

Si c'était un contrat, ce qui n'est pas écrit ne serait juste pas écrit.

Mais dans la littérature, cela ouvre le champ des possibles.

L'avantage d'un titre à la fois aussi évocateur et aussi flou est qu'il permet de lire plusieurs histoires en 1.

Ça tombe bien - oh mais quelle coïncidence - ce roman à 3 voix propose 2 histoires qui se font face, se répondent, s'entremêlent, se confondent par moments. Le procédé littéraire des 3 voix qui se renvoient les unes aux autres séduit beaucoup au début puis lasse un peu. Le gimmick étant trop appuyé et la finesse relative. Cela n'empêche pas que le lecteur va se triturer pour tenter de lire entre les lignes et y chercher une symbolique qui donnera des indices sur la fin. Fin qui sera, en fait, difficile à anticiper.



Un roman court certes mais intense, chargé de lourdes émotions. Totalement nihiliste. Entre renoncements, espoirs brisés et futur incertain. Un roman qui happe dès les premières pages pour laisser exsangue au bout de 100 pages. Puis viennent flottements et répétitions comme évoqué ci-dessus.



Des personnages abimés, gris, qui alignent les mauvais choix et ne s'en attribuent jamais le malheur et la maladresse. On se voit toujours mieux que ce qu'on est et les autres n ous voient souvent moins bien que ce que l'on pense être. Ou l'inverse. Ça crée forcément un équilibre. Le mieux étant de ne se soucier d'aucuns avis. Ça fait gagner du temps.



Doublé d'une réflexion sur l'écrivain et son lecteur. Pertinente et très juste donnant les clés de lecture du présent ouvrage. Qui manipule qui ? L'écrivain qui promène le lecteur selon son bon vouloir ou le lecteur qui s'approprie l'histoire selon sa sensibilité en y ajoutant son passif ? Ça dépend bitch ! L'auteur doué te manipulera, l'autre ne posera même pas sa plume dans les tréfonds de ton cœur. 3/5



Un grand merci à Babelio et aux Éditions Métailié Noir pour m'avoir fait découvrir un auteur étonnant et passionnant.

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Ce qui n'est pas écrit

Ce qui n’est pas écrit n’est pas uniquement un thriller psychologique. Entre les lignes, ce qui est aussi écrit ressemble à un message subliminal adressé au lecteur, à une thèse sur le pouvoir que détient l’écrivain sur ses lecteurs, vus comme des victimes consentantes se laissant embarquer par un scénario que l’écrivain, seul maître à bord, décide. De leur côté, les lecteurs peuvent cependant modeler l’histoire en fonction de leur interprétation des non-dits et de leurs angoisses personnelles qu’ils projettent dans le livre. Il existe donc autant de lectures que de lecteurs, et celles-ci, bien sûr, échappent à l’écrivain.

La construction du thriller est articulée selon les bases classiques d’une histoire racontée à plusieurs voix, mettant en scène trois récits différents évoluant dans leur référentiel propre, sans interconnexion (c’est voulu), mais dont les effets de miroirs renvoient des éclairages d’une partie vers l’autre, créant par construction des superpositions, des réflexions, des perspectives nouvelles, mais peut-être aussi des illusions d’optique et quelques facétieux tours de passe-passe de l’auteur. L’écrivain est un illusionniste qui berne son lecteur.

Les trois récits permettent de tenir en haleine le lecteur grâce à l’alternance des chapitres qui s’achèvent toujours par un « cliffhanger » insoutenable. Les transitions sont élaborées par une petite astuce littéraire exploitant le principe des mots croisés, avec des définitions de mots à chercher. Si vous ne trouvez pas tout de suite, hop, tournez la page et commencez le chapitre suivant, qui commence par… le mot en question ! Une astuce comme une autre pour empêcher le lecteur de lâcher le bouquin !

Un thriller angoissant et plein de suspense donc, qui nous plonge d’emblée dans l’univers anxiogène d’une famille madrilène où tout n’est pas rose, ni le passé, ni le présent, ni même, très probablement, l’avenir. Couple séparé. Garde alternée. Le mot divorce apparaît dès la quatrième ligne et donne le ton. Le mot pipi apparaît dès la quinzième ligne (et ce ne sera pas pour la dernière fois !)

Le premier récit est celui de la mère, Carmen, qui a du mal à laisser son fils Jorge, quatorze ans, partir en week-end avec Carlos, le père, pour une randonnée en montagne « entre hommes ». D’autant plus que Carlos, écrivain en herbe, lui a laissé le manuscrit de son premier roman, à lire au cours du wee-kend. « Je veux que toi, tu le lises », lui a-t-il écrit. Ce roman recèle-t-il des messages à son intention ?

Le second récit est celui du père, Carlos, qui veut profiter de cette escapade pour mieux connaître ce fils qu’il n’a pas vu grandir, et qu’il voudrait façonner à son image, virile, dure. La confrontation entre le père et le fils va très vite être étouffante.

Le troisième récit est celui du manuscrit, un polar noir, très noir. Le personnage principal du manuscrit est un truand, Riquelme, c’est aussi un clone fantasmé de Carlos, plus violent, plus brutal… Créé pour faire peur à Carmen ?

Les points de convergence entre l’histoire réelle du livre et le récit du manuscrit vont se multiplier, provoquant chez Carmen une extrême confusion (et parfois chez l’auteur aussi, semble-t-il, les images de la fiction et de la réalité finissent par se confondre un peu).

Si la violence physique est omniprésente dans le manuscrit, récit fictif, la violence n’est pour autant pas absente des autres récits. Cette violence, psychologique, alimente le moteur de l’angoisse et du suspense.

Pour Rafael Reig, ce trop plein de tension psychologique nécessite d’être équilibré par quelques éléments plus légers du récit, permettant ainsi de relâcher la pression. A cet effet, l’auteur fait très vite retomber le lecteur de la sphère psychologique à la sphère physiologique. Ainsi, pour faire bonne mesure, le fils fait plusieurs fois pipi sur lui, la mère se masturbe, le père compare la taille de son pénis avec tout ce qu’il trouve, l’urine sert à éteindre les feux de camp, le fils pète sous la tente, le crachat se mélange aux larmes, le truand libidineux défèque sur sa victime, le sperme jaillit, le sang coule, les morceaux de cervelle éclaboussent, et j’en passe. Ouf, ça défoule…

Malgré la belle construction intello de ce roman, il faut admettre une certaine propension à la description de scènes extrêmement glauques tout au long de ses pages.

Le 1 horizontal, en dix lettres. Aptitude à excuser, à pardonner les fautes, à ne pas les sanctionner sévèrement.

Indulgence. Quelques bonnes étoiles peuvent néanmoins être attribuées au roman, pour l’efficacité du suspense. Mais attention, malgré le contexte d’une opération Masse critique propice à l’indulgence, ceci n’était pas écrit d’avance !
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Ce qui n'est pas écrit

La famille est le lieu de toutes les perversions, à moins que ce ne soit la littérature … et son principal coupable, l’écrivain … ou encore l’imagination du lecteur…



Avec ce roman policier à trois voies, Rafael Reig manipule le lecteur pour qu’il imagine le pire dans «Ce qui n’est pas écrit».



Carlos, un père de famille divorcé, enragé de ses rêves de grandeur jusqu’alors défaits, et en manque d’amour de son fils dont il a été séparé pendant un an à cause de ses violences, vient chercher chez son ex-femme Carmen l’adolescent de quatorze ans, Jorge, pour passer trois jours en montagne avec lui. Après leur départ, Carmen découvre le manuscrit d’un roman au titre inquiétant, «Sur la femme morte», abandonné par Carlos comme un caillou blanc dans son appartement, avec une note l’enjoignant à le lire.



Les trois fils alternés du récit, celui du roman – l’enlèvement d’une jeune femme par une bande de truands pathétiques -, l’excursion en montagne d’un père manipulateur et pervers et de son fils paralysé par la culpabilité, et la peur croissante de Carmen restée seule, au fur et à mesure qu’elle découvre le roman de Carlos, qu’elle lit et interprète comme une menace voilée à l’encontre de Jorge, convergent et semblent par moments se superposer. À moins que l’angoisse ne naisse que de l’imagination débordante de Carmen, et de sa culpabilité vis-à-vis de Carlos et de son fils ?



Avec des personnages aux personnalités et perversions manquant un peu de nuances, mais une construction terriblement habile, ce roman qui se lit d’une traite, est un thriller oppressant et efficace.



Avertissement final : Surtout ne lisez pas la quatrième de couverture, elle contient un malheureux «spoiler».



"Elle embrassa Jorge et les vit descendre ensemble, le père et le fils, enfermés dans la cage de verre de l’ascenseur.

Vues d’en haut, leurs têtes ressemblaient à deux pierres de rivière lancées au fond d’un puits, chacune avec son sac à dos sur les épaules."



"Elle a besoin de continuer à lire pour savoir ce qu'il y a derrière cette fenêtre de mots, mais elle a peur de s'exposer, d'être lue quand elle lit."
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Des chrysanthèmes jaunes

L'année 1975 en est à son crépuscule, comme Franco, qui va mourir dans quelques jours, alors même que Paco Ponzano, camarade de chambre à l'orphelinat SaFa (Sagrada Familia) de Pedro Ochoa, narrateur de ce roman, vient lui-même de succomber d'une maladie. Alors âgé de 12 ans, Pedrito est présent dans cet orphelinat de Bilbao depuis ses cinq ans, avec quelques bribes de souvenirs de ses parents : sont-ils communistes, et donc emprisonnés par le régime en raison de leurs idées, comme il le croit ? Ou pire, ont-ils été exécutés ? Une fois sa condition orpheline acceptée comme telle, la vie de l'adolescent se cantonnera au respect – et au contournement dès que possible – des règles imposées par les soeurs de l'orphelinat, aux discussions avec ses camarades, aux rêveries, plus sexuelles qu'amoureuses… jusqu'à ce qu'un évènement vienne perturber cet état de fait devenu routine pas toujours désagréable.



Plus qu'à partir des souvenirs de son passé, trop confus, c'est à partir de ce présent, intensément adolescent, que notre protagoniste choisit de débuter son récit ; enfin, de ce présent qui n'en est finalement pas un, puisque nous avancerons le temps avec lui jusqu'au véritable présent de l'intrigue, c'est-à-dire de nos jours. Entretemps seront esquissés un portrait vivant et sans complaisance de lui-même, bien sûr, mais aussi de son entourage – famille, camarades d'orphelinat… -, et plus encore des mutations brutales qui ont secoué l'Espagne après la mort del Caudillo, dans un seul mouvement de libération qui a donné lieu à La Movida, et ce jusqu'aux révélations finales qui nous permettront de prendre conscience que Pedro n'est, au bout du compte, pas vraiment celui que l'on croit.



Ainsi, par cette image changeante que nous donne Pedro de lui-même – et qui ne sera pleinement perceptible qu'à la fin du roman – l'on découvre progressivement, et avec intérêt, deux mondes en un : celui de l'orphelinat, fortement lié à celui de Franco, où l'enfermement, la privation, le refoulement des sentiments et émotions règnent en maître, et ont une incidence sur des adultes en devenir ; celui post-orphelinat et post-Franco, libéré de tout ce qui l'avait oppressé pendant des années du fait de la dictature, et qui donnera lieu, forcément, à d'autres types d'excès. Deux mondes en un comme images évolutives, parfaitement symboliques, du narrateur et de l'Espagne dans laquelle il évolue, images qui feront, tout du long, osciller le roman entre récit d'apprentissage et récit historique, de manière certes bienvenue, mais cependant parfois confuse – les temporalités se brouillent en effet un peu trop pour que l'on puisse pleinement profiter du récit qui se déroule sous nos yeux -.



Je remercie les éditions Métailié et NetGalley de m'avoir permis de découvrir ce roman.
Lien : http://lartetletreblog.com/2..
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La position du pion

Merci à Babelio de m'avoir fait connaître ce nouvel auteur espagnol.



L'histoire met en scène quatre couples d'anciens communistes qui viennent d'apprendre que leur chef qui s'était enfui aux Etats-Unis est de retour. Nous sommes quatre ans après la mort de Franco.



L'auteur a un certain panache dans l'écriture, mais j'ai été fort gênée par l'imbrication d'une partie d'échec, pourtant centrale au livre et le titre aurait dû m'y faire penser. Mais voilà, je n'y connais rien aux échecs, j'ai du mal à comprendre les mouvements et le vocabulaire technique du jeu m'échappe totalement. C'est donc au début avec application, puis avec de plus en plus de lassitude que j'ai avancé dans ma lecture. Et pourtant, comme je l'écrivais, l'histoire est bien menée, avec un sarcasme somme toute bienveillant et je ne vais pas dire que c'est dommage, non, il faut juste être attentif avant de se lancer dans cette lecture car il y a un vrai grand plus à être amateur du jeu d'échec.
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Ce qui n'est pas écrit

CHALLENGE ABC 2013/2014 (18/26)



Difficile après cette lecture d'écrire une critique tant mon avis est mitigé.

J'ai trouvé ce thriller original dans sa construction. L'histoire pourrait être banale entre un ado mal dans sa peau, partagé entre ses parents divorcés, un homme écrivain et père raté, une mère qui ne fait pas confiance à son ex-mari. Mais comme une grille de mots croisés que l'on remplit, chaque définition trouvée s'imbriquant dans les autres, les trois fils conducteurs de l'intrigue vont se mettre en place, sauf que chercher à lire entre les lignes est très dangereux. C'est ce que va apprendre Carmen, la mère, en se plongeant dans la dernière tentative littéraire que Carlos, son ex, lui laisse entre les mains alors qu'il emmène Jorge, leur fils, dans une escapade en montagnes. Le suspense est malheureusement gâché, dès le départ, par la quatrième de couverture qui, à mon avis, en dévoile trop.



L'auteur soulève le débat intéressant du pouvoir de l'écrivain face à celui du lecteur. Dommage que cela entraine quelques réflexions philosophiques que j'ai trouvées plutôt tarabiscotées, côté style. J'ai aussi eu du mal à faire un lien entre ce qui était écrit (ou plutôt ce qui ne l'était pas) dans ce polar très (trop ?) scabreux que Carmen avait entre les mains et ce qui se passait en réalité. Évidemment, chaque lecteur interprète ce qu'il lit, suivant son état psychologique du moment et chez elle, c'était l'angoisse qui dominait..



L'ambiance très glauque du roman m'a déstabilisée : pas la moindre lueur d'espoir à l'horizon. Pas une seule relation entre les humains de ce thriller qui ne soit positive : la violence mène la danse. Tous les personnages vivent avec leur rancœurs, leurs griefs, plantés dans le cœur et ne voit plus rien autour d'eux ; principalement Carmen et Carlos qui ignorent la souffrance, le mal-être de leur fils.



Le sujet aurait pu être passionnant, car il est vrai que certains auteurs (je pense à Franck Thilliez notamment) ont un tel pouvoir qu'ils m'emmènent, moi, modeste lectrice, facilement là où ils l'ont décidé. Mais je crois que cette fois-ci, la magie n'a pas opéré. Ma note, 2,5 étoiles soit 10/20.



Merci à Babelio et aux Éditions Métailié de m'avoir fait découvrir Rafael Reig, auteur espagnol que je connaissais pas.
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Ce qui n'est pas écrit

Carlos se rêve écrivain. Il a publié quelques recueils de poésie grâce au père de son ex-femme mais, indéniablement, il n’est pas fait pour l’écriture. Son ex-femme, justement, élève leur enfant, Jorge, un adolescent replet, timide, craintif, qu’il a tout juste le droit de revoir maintenant qu’il a quatorze ans après qu’un jugement l’en ait éloigné suite à des soupçons de mauvais traitements. Déterminé à montrer à son fils ce qu’est un homme, un vrai, Carlos l’emmène pour une randonnée en montagne. Mais après leur départ, Carmen, la mère de Jorge, découvre un manuscrit laissé par Carlos lorsqu’il est venu chercher son fils pour cette excursion. Il s’agit d’un polar violent, obscène, dans lequel Carmen croit discerner d’étranges ressemblances avec la réalité, comme si Carlos, à travers ce roman, convoquait le passé pour mieux le détruire et, en passant, laissait planer une aura de vengeance à leur égard, à Jorge et à elle.



Ce qui n’est pas écrit est donc l’un de ces thrillers psychologiques qui jouent sur l’ambigüité des actes des personnages. Carlos avait-il une idée précise derrière la tête en écrivant son roman et en déposant le manuscrit chez Carmen ? Cette dernière n’y projette-t-elle pas ses propres craintes, surinterprétant les écrits de son ex-mari ? Ce sont là les questions que laissent Rafael Reig en suspens afin de faire lentement mais sûrement monter la tension grâce à une structure particulièrement efficace. Alternant mécaniquement trois points de vue (un chapitre mettant en scène Carlos et Jorge dans lequel la déception que provoque le fils chez le père et le sentiment de crainte du premier à l’égard du second sont mis en exergue, puis un autre composé du texte du manuscrit de Carlos, et enfin un troisième présentant les interrogations de Carmen à la lecture du manuscrit et les souvenirs douloureux de son histoire avec Carlos, avant de revenir à Carlos, etc), le récit dévoile peu à peu les sentiments des personnages, leurs craintes, leurs obsessions, leurs déceptions, rendant quasiment inéluctable une fin tragique dont on ne sait toutefois pas quelle forme elle pourra prendre.



Bien mené, valant surtout pour les portraits psychologiques de certains de ses personnages, plus particulièrement de Carlos, et l’attachement de Reig aux détails a priori insignifiants mais dans lesquels le lecteur, à l’image de Carmen, ne cesse de chercher une signification plus importante, Ce qui n’est pas écrit est incontestablement dans son genre un roman plutôt réussi.

Mais le livre de Rafael Reig apparaît aussi par certains aspects inégal, en particulier parce que l’auteur, malgré ses efforts, peine quelque peu à rendre le désarroi de Carmen ; ce qui, au passage, vient interférer avec son écriture. Tendue et fine dans les chapitres consacrés à Carlos et Jorge, elle se fait plus plate avec Carmen. D’une manière générale, ce que vient prouver l’apparition de la nouvelle épouse de Carlos, Reig ne semble pas forcément à l’aise avec ses personnages féminins.



À ces réserves près, Ce qui n’est pas écrit apparaît comme un honnête thriller psychologique qui arrive à se démarquer du gros de la production du genre et touche même presque dans certains passages à l’exceptionnel avant de reprendre un rythme plus attendu jusqu’à un twist final qui ne surprend que peu mais qui a pour lui d’être cohérent.

Voilà donc une lecture agréable qui, cependant, malgré des promesses évidentes, n’atteint pas encore le stade de l’inoubliable.


Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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Ce qui n'est pas écrit

Merci à Babélio de m'avoir offert l'opportunité de cette lecture lors de la masse critique.



Une grosse déception après la lecture de ce roman. Certes l'auteur a tenté de distiller une tension en créant une ambiguïté entre les trois principaux personnages. Hélas cela ne prends pas. L'intrigue dure très peu de temps, les personnages restent fades. Les dialogues sont tristes.

Ce polar ne restera pas dans ma mémoire !
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Ce qui n'est pas écrit

"Euh...oui, et ?"

Ce qui n'est pas écrit est un roman construit sur trois tableaux aussi inintéressants les uns que les autres.

Toute l'histoire peut parfaitement se résumer par l'enchainement (assez réussi néanmoins) de chapitres répétitifs du père alcolo machiste tape à l'oeil qui humilie son fils autant qu'il l'aime, puis de chapitres vides de la mère inquiète pour son fils et qui lit un manuscrit "comme si c'était un animal dangereux" et qu'elle cache "sous les pulls d'hiver" -sans blagues ?!- (p199, mais repris avec les exacts même-mots tout au long du roman). Et enfin, ce triptyque nous offre des chapitres du dit manuscrit un peu plus intéressants que le reste mais également plus vulgaires (et pourtant il y a dans les passages sur la mère une comparaison des nuages avec du sperme... Ça a peut-être une très grande portée métaphorique, mais elle doit m'échapper).

Le livre avance, les chapitres défilent rapidement, et l'histoire ne décolle pas. A 30 pages de la fin on attend encore un dénouement qui justifierait le fait d'avoir souffert le reste, mais non, la fin est juste correcte. Avec une projection et une symbolique intéressante, peut-être, mais ce n'est pas suffisant pour en faire un livre plus que très médiocre.

Question style, c'est très inégal. Faute à la traduction ? On en arrive quand même à des "Chez les quatre autres, le membre masculin de la copulation et dernier tronçon de l'appareil urinaire était d'une taille supérieure à celui de Toni Riquelme. De quoi faire chier." (p206). Mouuuiiii très intéressant tout ça ! Amis de la poésie, bonjour !

Avec 3 tableaux, on pourrait au moins penser qu'on puisse adhérer à un ou deux, histoire de pas trop s'ennuyer, mais même pas. La partie sur le manuscrit dans le roman est encore pas trop mal, mais comme on le sait écrit à destination de la mère, on se s'en sent d'autant plus exclu sans pouvoir objectivement percevoir les éléments clefs. La seule chose qui nous permet de comprendre -des "révélations" qui ne servent à rien- c'est encore toutes les explications rabâchées par la mère et les similitudes tordues qu'elle y voit (Mais en même temps, quand on compare les nuages avec du sperme, faut pas aller chercher à comprendre !)

Alors quoi de bon là dedans ? Ça se lit bien, les réflexions sur le travail d'auteur sont assez fines, les lieux sont nombreux (mais si vous connaissez pas Madrid, 'z'êtes fichus pour imaginer quoique ce soit), des transitions de chapitres originales (bien qu'on s'en lasse assez vite). Et c'est malheureusement à peu près tout !

La 4e de couverture vante : "Thriller psychologique basé sur les rancœurs et les frustrations, se déployant dans une nature inquiétante sur une trame de film d’horreur habilement construite, ce texte confirme la virtuosité stylistique et l’inventivité narrative de son auteur.". Frustration et rancœur, oui ! Les vôtres ! Pour le reste, d'ici à voir une coïncidence entre le fait que ce roman ait reçu le "prix Pata Negra décerné par des libraires" et que l'auteur se soit "récemment installé comme libraire", il n'y a qu'un pas. J'ai mon avis, je vous laisse vous faire le votre. En attendant, toute lecture est toujours bonne à prendre, aussi je remercie Babelio et les éditions Métailié pour m'avoir envoyé ce roman.

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