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Citations de Rafik Schami (47)


«Oh, un journaliste, a soupiré oncle Salim, c'est quelqu'un de futé et de courageux. Avec une feuille de papier et un crayon, il peut faire trembler un gouvernement entier, y compris la police et l'armée.
- Avec du papier et un crayon ?»
Je n'en revenais pas : papier et crayon, tous les élèves en ont à l'école, et ça n'impressionne même pas le portier.
«Oui, il fait trembler le gouvernement, car il est toujours à la recherche de la vérité, alors que tous les gouvernements s'efforcent de la cacher. Le journaliste est un homme libre, comme un cocher, et vit comme ce dernier en perpétuel danger.»
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Tout grandit, m'a-t-il dit un jour, sauf les catastrophes. Elles sont énormes quand elles naissent ; ensuite, elles rapetissent un peu plus chaque jour.
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Les enfants de boulangers, la plupart du temps, ont les jambes arquées et les cheveux en broussaille. Les jambes arquées, parce que, tout jeunes, ils doivent porter des charges très lourdes, et les cheveux en broussaille à cause de la farine. Les enfants de bouchers sont gras, les enfants de mécaniciens ont toujours les ongles en deuil, etc. Il me suffit de regarder mes camarades pour savoir quel est le métier de leur père. Je n'ai de problèmes qu'avec les riches. Ils ont tous des cheveux soyeux, des mains fines, des jambes bien droites et ne connaissent rien à rien. L'autre jour, Joseph a expliqué à un de ces petits chéris que ce n'étaient pas les anges qui l'avaient mis au monde, mais sa mère, parce qu'elle avait couché avec son père. Eh bien, le nigaud s'est mis à chialer, en disant que jamais sa mère ne ferait une chose pareille. Mais Joseph ne voulait pas en démordre. Il est venu me trouver pendant la récréation et a sollicité mes lumières sur la question. J'ai répondu ce que je savais. Le môme a dû écouter tous les témoins que Joseph était allé chercher. De retour chez lui, le crétin a refusé de toucher à son repas et, le soir, il a exigé de coucher entre son père et sa mère. L'un et l'autre étaient sans doute très portés sur la chose ce soir-là ; en tout cas, ils ont très mal pris la plaisanterie et, à force de cajoleries, ils ont fini par découvrir la raison de l'étrange comportement de leur petit chéri. Aujourd'hui, le père est venu à l'école pour se plaindre de Joseph, et le pauvre s'est fait punir sévèrement, sous prétexte qu'il a perverti un petit innocent.
Je trouve le père vraiment dégueulasse. Il couche avec la mère mais n'a pas le courage de ses actes et appelle les anges à la rescousse. Mon père hurle bien trop souvent à mon gré qu'il est mon géniteur !
(p. 22-24)
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Le maire est issu d'une des familles les plus riches du Nord. Ses grands-parents possédaient des villages entiers et son père est propriétaire d'une banque. Et lui pourchasse ceux que ses parents ont réduits à la famine. De nombreux mendiants, en effet, sont d'anciens artisans ou paysans qui, après avoir tout perdu, sont venus à Damas dans l'espoir d'y trouver du travail.
(p. 197)
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Mahmud a quitté l'école. Son père ne veut pas qu'il continue ses études. Il ne peut plus nourrir seul les neuf marmots. «Ils font des gosses, et après ils se plaignent», râlait Mahmud qui, comme moi, aimait beaucoup l'école. Son rêve, c'était de devenir pilote et de faire le tour du monde. La pauvreté étouffe nos rêves avant même que nous les ayons rêvés jusqu'au bout.
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Je pense aujourd'hui que la vraie richesse, c'est le temps. Celui qui a l'argent, mais pas le temps, est un pauvre type qui ne sait même pas qu'il est pauvre. C'est le temps qui fait la beauté, pour les bâtiments, pour les arbres comme pour les âmes. Regarde les pyramides, les cathédrales, les hammams, les mosquées et les palais antiques : là habite le temps, et c'est lui qui crée toute cette beauté. (p. 39)
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" Vole, mon oiseau, vole,
bientôt déferleront les barbares.
Vole jusqu'au plus haut du ciel,
là je t'ai construit un nid.
Vole et emporte ma peine,
ma joie fait peur aux barbares."
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Joseph dit que les perles ont besoin des profondeurs de la mer, de la pureté de l'eau et de l'éclat du soleil pour se développer à l'abri du coquillage. "As-tu déjà vu un coquillage produire une perle dans les égouts de Damas ?" a-t-il demandé tristement.
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"Tu sais, mon ami, l'amitié a été inventée par les plus faibles. Les puissants n'en ont pas besoin. Ils ont leur puissance. Fais-toi des amis, et laisse ta loupe tranquille, sinon tu feras la plus grosse bêtise de ta vie : tu te retrouveras seul."
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• 22 mars
On doit élargir notre rue pour permettre aux voitures des touristes de circuler plus facilement. Les habitants s'y opposent. Ils ont protesté à la mairie. Peine perdue ! Il paraît que c'était prévu depuis quinze ans.
[...]
• 20 mai
Notre rue offre un triste spectacle depuis trois semaines. Les maisons d'en face sont amputées de huit mètres de profondeur. Certaines ont complètement disparu, d'autres sont devenues étroites et laides. On est asphyxié par les gaz d'échappement et la poussière. Les bulldozers font un bruit d'enfer. Ils commencent très tôt, car ils ne peuvent pas travailler pendant la canicule de midi. Ensuite, ils travaillent jusque tard dans la nuit. Nous avons perdu beaucoup de voisins. Joseph et sa mère ont dû déménager dans un quartier éloigné. Il ne reste de leur grande maison que trois pièces sombres qu'un oncle de Joseph continue à habiter, faute de pouvoir se payer un meilleur logement. [...] Nos pauvres maisons de torchis ont abrité plusieurs générations, mais il n'a fallu que quelques jours pour les réduire en poussière.
(p. 225 & 230)
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• 13 janvier
Il y a eu un beau chahut, aujourd'hui, pendant le cours de religion.
« Pourquoi, sur les peintures, Jésus est-il toujours un blond aux yeux bleus ? » a demandé Joseph.
L'abbé a marmonné une sottise du style : « C'est parce que Jésus répand la paix autour de lui. »
Mais l'impertinent Joseph n'était pas satisfait de la réponse :
« Jésus est-il né en Palestine, oui ou non ? Les Palestiniens et les Juifs ont les yeux et les cheveux noirs, ce qui ne les empêche pas d'avoir l'air pacifique. »
L'abbé s'est embrouillé de plus en plus dans son boniment. Mais Joseph savait parfaitement où il voulait en venir. « Et pourquoi aucun Palestinien n'a été élu pape ? a-t-il demandé. Ni aucun Africain ? Hein, pourquoi ? »
L'abbé est sorti de ses gonds et a infligé à Joseph, en guise de punition, dix actes de contrition. Nul !
(p. 116)
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Ça me fait mal au coeur de voir chaque matin les écoliers, bien peignés, sur le chemin de l'école. Mon père s'en aperçoit parfois. Il me caresse la tête et se montre tout gentil envers moi pendant un moment. Un jour, il a même pleuré. « Tu es plus intelligent que tous ceux-là, m'a-t-il dit. Je sais quel fils j'ai mis au monde. » Une autre fois, il a dit : « Quand ils naissent, les enfants sont nus et se ressemblent tous. Mais deux secondes plus tard, ils sont déjà différents. »
Parfois, il me fait pitié. Je crois que lui non plus n'avait pas envie de devenir boulanger.
(p. 133)
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La radio nous serine nuit et jour qu'il faut travailler davantage. Oncle Salim n'y comprend plus rien. «Quels abrutis !» jurait-il sans cesse tandis que nous buvions le thé en écoutant la radio. Quand un chanteur a entamé un hymne au travail (glorifiant le manche de la faucille et le choc du marteau frappant l'enclume !), oncle Salim, écœuré, a tourné le bouton de la radio. «Comment peut-on chanter des âneries pareilles ! On voit bien qu'il n'a jamais eu une faucille en main. Le manche te brûle la peau, et cet imbécile trouve ça merveilleux. Il n'a qu'à aller travailler dans les champs au moins de juin, et il changera vite de refrain. Il chantera : «Restons à l'ombre !»
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Mahmud pense qu'on peut faire croire n'importe quoi aux gens. Il suffit de le leur répéter souvent.
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Ensuite j'ai écrit que faire voler les arbres est certainement une idée un peu folle, mais que notre professeur nous a dit que sans folie la poésie n'est qu'un discours ennuyeux.
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J'ai perdu mon pari ! Je n'ai vraiment pas de pot. Enfin, l'enjeu n'était qu'un jus d'orange. J'ai parié avec Josef que je pouvais aller me confesser et sortir du confessionnal sans pénitence. Josef prétendait qu'avec l'abbé Jean, même Jésus ne s'en tirerait pas à moins d'un Notre Père.
Aussitôt dit, aussitôt fait. Je suis entré dans le confessionnal, je me suis agenouillé, et avant que j'aie eu le temps d'ouvrir la bouche, le père Jean m'a demandé : « Quels péchés avons-nous commis depuis la dernière fois, mon fils ?
- Je me suis confessé samedi dernier et je n'ai commis aucun péché cette semaine, ai-je répondu de ma voix la plus angélique.
- C'est impossible, mon fils ; fais un examen de conscience approfondi. Pense aux dix commandements ! N'as-tu jamais juré ?
- Non ! » ai-je répondu, la conscience bien tranquille, car pour nous, d'innocentes injures comme 'va te faire voir' ou 'sale chien' ne sont pas des péchés. la première est un conseil et la seconde fait référence à une créature divine.
« N'as-tu pas convoité le bien d'autrui ?
- Non, ai-je répondu, l'âme en paix, car je n'aime que Nadia.
- Réfléchis bien, mon fils, n'as-tu jamais menti ?
- Non, pas cette semaine, ai-je répondu, un peu moins sûr de moi.
- C'est impossible. Tu pèches par orgueil. Prie, mon fils, afin que renaisse l'humilité en ton coeur. Un Notre Père et l'acte de contrition ! » Et il a marmonné l'absolution.
(p. 100 > 101)
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Ma mère dit qu'oncle Salim fabule. Moi, je souhaiterais que les profs fabulent autant que lui et nous racontent des histoires aussi intéressantes.
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Oncle Salim voulait me servir du thé, mais ses mains tremblantes ont lâchés le verre, qui s'est brisé au sol. J'ai fait semblant de ne rien voir, mais oncle Salim s'est moqué de mon embarras.
"Mon ami, la nature donne une preuve de sa sagesse et toi, tu détournes les yeux" Tout en buvant son thé il m'a expliqué :
" Vois-tu, mon ami, la nature ne peut pas parler. Mais elle s'exprime par signes. Elle vient de me le dire à l'instant : ne t'accroche pas au choses, tu ne pourras pas les emporter avec toi. Et plus tu t'y accroche, plus vite elles te glisse entre les doigts. Voila ce que dit la nature en faisant trembler les mains des vieillards."
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" Celui qui oublie une injustice en attire une nouvelle"
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D'une certaine façon, oncle Salim continue à vivre dans les arbres, les fleurs et les chardons, car chaque plante prend quelque chose de lui à la terre et le transforme : les arbres en ombre et protection, les fleurs en couleur et parfum, les chardons en épines et résistance. Mais aucune créature sur la terre ne peut faire de tout cela un mélange vivant qui serait oncle Salim.
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