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4.02/5 (sur 21 notes)

Nationalité : Suisse
Né(e) à : Schaffhouse , le 25/09/1954
Biographie :

Années 1970 - 1980 : Etudes de littérature française et russe à Zurich et Paris.

1985 - 2000 : traduction du russe à l'allemand des Oeuvres complètes d'Ossip Mandelstam (10 volumes, éditions Ammann, Zurich).
1995 : Tendres mains d'Europe (essai).

2002 : Le Carnet d' épitaphes (poésie).

2007 :
- Sel ô sel (poésie).
- Rien que des miracles. Essais sur la poésie (essai).

2009 : Novalis au vignoble et autres poèmes (Le Bruit du temps).

2012 : Mandelstam, mon temps, mon fauve (Le Bruit du temps/La Dogana).

Poète et écrivain suisse allemand, Dutli est un spécialiste d'Ossip Mandelstam dans son pays. Sa biographie est une référence indiscutable.

2016 : Le dernier voyage de Soutine (Le Bruit du temps).


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Source : Le Monde des livres
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Citations et extraits (35) Voir plus Ajouter une citation
Printemps 1920 Mandelstam est alors en Crimée
Le poète Emili Mindline se souvient que Mandelstam, un soir qu'il rentrait en nage de la vigne, lui récita les sept magnifiques strophes du poème vénitien. C'étaient sa vision de la mort de l'homme, de la mort à Venise qui était également un masque pour Pétersbourg, la Venise du Nord agonisante :

"Air délicat de la peau. Veines bleues.
Neige blanche. Vert brocart.
Tous sur des civières de cyprès
On les tire de leurs manteaux, tièdes et somnolents.

Et brûlent, brûlent les bougies dans les corbeilles
Comme la colombe vola dans l'arche.
Au théâtre, aux vaines assemblées,
L'homme se meurt.

"L'homme se meurt" : la mort est partout sur cette péninsule déchirée par la guerre civile. (...) La côte de Crimée était son Italie. Sienne et Venise, qu'il n'avait jamais vues, hantaient son imagination. (p199)
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"Dans la poésie, l'invention et la mémoire vont de pair : se rappeler c'est aussi inventer, qui se souvient réinvente. Le problème fondamental du goût littéraire moscovite est l'oubli de cette double vérité. (...) La poésie respire par la bouche et par le nez, par la mémoire et par l'invention. Il faudrait être un fakir pour se passer de l'une de ces deux respirations" ( "Moscou littéraire" essai de Mandelstam)
Les révolutionnaires de la culture grisés par l'avenir négligent la mémoire : c'est là le principal reproche que leur adresse Mandelstam.
Dans "Un éclat", il se dresse aussi contre toute appropriation ou toute mise sous tutelle de la poésie par le pouvoir : "La pauvre poésie recule craintivement devant les nombreux canons de revolvers braqués sur elle, chargés de sévères exigences. Que doit être la poésie ? Peut-être ne doit-elle être rien du tout, peut-être ne doit-elle rien à personne et tous ses créanciers sont-ils des imposteurs !"
(p 252)
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Service d'hygiène ! Ouvrez immédiatement !
Le peintre prend peur, il est livide, on dirait un cadavre. Un homme entre dans la pièce, vêtu d'un tablier blanc, un bonnet blanc sur la tête. Il veut confisquer la carcasse de boeuf à la puanteur atroce. Des mouches vertes vrombissent dans l'atelier. Soutine est atterré, son tableau n'est pas terminé. Rembrandt dans un coin a un rire triomphant.
Paulette plaide la cause du peintre désespéré.
Vous voyez bien qu'il est en train de le peindre, il en a besoin pour finir son tableau, je vous en prie !
Les hommes du services d'hygiène ont pitié, ils sortent leurs seringues et injectent de l'ammoniaque dans cette pauvre chair de la carcasse. Ils lui montrent en quelques gestes comment conserver les animaux sans empester tout l'immeuble. Dès lors, reconnaissant, il ne se déplace plus dans le monde qu'avec du formol, de l'ammoniaque et un assortiment de grosses seringues pour conserver au triomphe de la mort toute sa fraîcheur rouge sang. Et les dindons, les lièvres, les faisans viennent s'ajouter à la liste. Il se fait livrer plusieurs carcasses de boeuf, et chaque fois fixe un nouvel aspect de cette mort juteuse : un amas de graisse jaune rance ou la torsion d'un membre, ou les caillots de sang qui forment une surface mouvante. (p. 179)
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Cette fois les cosaques parlaient français. La circulaire N°173-43 de la préfecture de police ordonnait l'arrestation des juifs étrangers. Plus de treize mille personnes rien qu'à Paris. La moitié est acheminée jusqu'au camp de Drancy au nord de Paris dans des bus municipaux réquisitionnés ; les autres sont parqués au Vel'd'hiv. Beaucoup sont restés introuvables lors de la grande rafle. Parmi eux un peintre invisible. (p. 112)
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La folie est experte en travestissement, elle a des circonvolutions cérébrales secrètes et ses escaliers dérobés où nul ne peut la suivre.
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Fais comme si tu étais mort. Ce sera plus facile. Tout sera plus facile. Tu es déjà mort, tu ne peux plus perdre la vie. La vie toujours déjà perdue, nous sommes déjà libres à demi. Tu ne peux plus rien perdre, rien. Et tu t'en vas, léger. Il faudrait pouvoir peindre ça.
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« Tu vois la fissure de cette formidable tour, là-haut ? Depuis le faîtage, elle serpente jusqu'aux toits des maisons plus basses de la piazza Mantegna. Un zigzag noir a entaillé le rouge sale des briques. Très décoratif, n'est-ce pas ? C'est l'écriture d'un dieu, un échantillon de son écriture impérieuse aux fioritures fantasques. Sans attendre que tu me demandes le nom de ce dieu, je te l'apprends : il s'appelle Terremoto. »

Pour capter quelques vagues bribes, Manu doit maintenant se pencher par-dessus la table, car en ce début de soirée, la petite place qui est face au café Miró bourdonne de palabres italiennes, telle une ruche. En acrobate, le serveur tient bien haut son plateau chargé de tasses minuscules et de verres ventrus jaunes, rouges ou de la teinte orangée du couchant. Il a l'œil à tout.

Dans ses souvenirs, Manu humera les arômes de café de centaines de places et de ruelles, à gauche et à droite, des effluves de café hallucinatoires, intensifiés par les palabres, et il entendra comme le fredon d'un immense essaim égaré sur la piazza. Gageons qu'il atteint même la silencieuse basilique Sant'Andrea de l'autre côté de la place : dans la première chapelle à gauche, derrière une stèle dépouillée, reposent les ossements du peintre Andrea Mantegna, de retour au pays, doucement bercés par son saint patron. Ce fredon, le peintre peut-il l'entendre ? Comprend-il ces palabres ? Manu, lui, peut Ie voir hocher la tête.

(INCIPIT)
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Pas la moindre trace de convulsion ou de combat sur ces visages, nulle contorsion des deux corps enlacés, calmes comme s'ils venaient de s'endormir. Ils avaient découvert les sucs de plantes qu'il leur fallait, la révolution néolithique était aussi pharmacologique, ils avaient trouvé la pierre philosophale, mourir ensemble au bon moment, ils étaient maîtres de leur destin, ils avaient eux-mêmes choisi l'instant voulu. Bonheur parfait de ne plus devoir apprendre à vivre seul, mourir seul après le départ de l'autre, L'art suprême !
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Mon temps, mon fauve, qui pourra
Plonger au fond de tes prunelles ?
Qui de son sang recollera,
Les vertèbres de deux siècles ?
(...)
Et les bourgeons vont encore gonfler,
Le rejeton de verdure jaillira,
Mais ton échine est brisée,
Mon pauvre siècle, si beau !
Et avec un sourire insensé
Tu regardes en arrière, faible et cruel,
Comme une bête jadis souple,
Se retourne sur ses propres traces...

Ce poème de Mandelstam voit le jour les 8-9 octobre 1922.
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Alors qu'on se dénude à l'envi partout sur les réseaux, voiler son corps pourrait représenter le dernier vestige d'érotisme encore possible. Un repli héroïque, une audacieuse autocontraction du dieu Éros.[...]Le drap, détecteur de séisme. Ample et blanche mémoire
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