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Critiques de Raphaël Granier de Cassagnac (95)
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Eternity incorporated

Cela fait vraiment longtemps que le premier roman d'un auteur francophone de SF ne m'avait pas autant bluffé .

C'est un premier roman qui ne suscite pas ( enfin je crois ) les fréquents bémols qui accompagnent souvent les premiers romans .



C'est bien écrit .C'est bien construit . C'est sensible , intelligent ... Il y a beaucoup d'ouverture d'esprit et de ruse dans ce roman .

Le style est aussi digeste que solide et la caractérisation est d'une redoutable efficacité car les personnages sont vivants et l'univers affiche une remarquable présence .



Un virus foudroyant frappe et détruit presque totalement l'humanité qui s'est réfugiée dans des villes sous dôme environnées d'une campagne devenue aussi hostile que dangereuse et méconnue .

Alors bref ! : le vieux coup ( assez délicieux ) de la ville dystopique et survivante ?

Pas vraiment ! Les habitants de cette ville sont relativement conditionnés mais pas beaucoup plus que nous autres ( sourires … ).

Ils possèdent fréquemment du libre arbitre et ils sont donc souvent tout à fait libres et capables de promouvoir leurs opinions et de suivre leur bonhomme de chemin .



C'est en ce sens que l'auteur renouvelle le thème de la cité-état survivante en milieu hostile .

Il réinterprète aussi ce genre d'univers de façons très contemporaines et assez personnelle mais impossible d'en dire plus , car ce serrait du spoiling et cela reviendrait à dévoiler la fin qui est aussi noire que surprenante et imprévue .

Donc motus ! ....



Cependant les aspects classiques des thématiques afférentes aux règles de ce sous genre de la SF ( les dystopies post-apocalyptiques ) sont bien présentes dans ce récit et il faut donc posséder quelques affinités avec ce type d'univers pour apprécier ce roman .

L'ordinateur omnipotent qui gère la plus grande partie de la ville a la mauvaise idée de tomber en panne au début du roman !

Cela représente un véritable coup de pied dans la fourmilière et les diverses réactions et actions individuelles et collectives nuancées que cela génère procure au lecteur un riche panel de perspectives , de témoignages et de réflexions ( quelquefois très contemporaines ) .



L'auteur est physicien et sa formation ne lui est pas vraiment utile dans ce roman , du moins pas avant la fin .

Quand ( à la fin du roman) la problématique de l'intelligence artificielle est particulièrement fouillée , on est assez bluffé et on se pose vraiment la question de savoir si par hasard , le David Brin ou le Benford de la SF francophone , ne serait pas enfin parmi nous ?



Un mot sur le style :

Nous avons dans ce texte des personnages aussi complexes que présents , un environnement qui possède du sens et de la réalité .

L'auteur arrive à concrétiser ces qualités sans se lancer dans de véritables descriptions fouillées mais plus par des élans elliptiques assez accentués parfois .



Il y parvient surtout par des oppositions : passé / présent , par l'opposition : intérieur /extérieur ou par des renvois psychologiques en lien avec les spécificités des différents protagonistes ( humains ou artificiels ) ou encore d'un léger trait de pinceau presque innocent .

Les descriptions soignées des environnements ( surtout de certains protagonistes ) existent dans ce roman mais principalement quand l'auteur juge que c'est indispensable ..



Sincèrement c'est bien fait et je pense que cette économie de moyens qui vient en contre point avec les nombreux détails qui concernent la caractérisation ou encore la valeur de certains instants particuliers et singuliers , crée une tension très spécifique ( contraste entre ce qui est écrit et ce que l'on imagine ) . Une expressivité du suspens et tensions ,qui devient réellement et progressivement , la marque de fabrique de l'auteur .



Bref :

Excellent selon mon humble avis , encore que c'est vrai : les goûts et les couleurs sont par nature inévitablement égocentrés , variables et différentiels : donc ….

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Eternity incorporated

La terre a été victime il y a des siècles d'un virus mortel. Les humains et certaines espèces ont disparus, d’autres espèces sont devenues des mutants porteurs du virus., Un petit groupe d’humains a pu se réfugier dans une grande bulle, où la vie est organisée et réglée par un puissant ordinateur omniscient, le Processeur. Seuls quelques brigadiers en scaphandre sortent pour quelques missions en passant par un sas à leur retour pour éviter que l'un d'eux ne rapporte le virus et ne contamine l’intérieur de la bulle.

Le roman commence le jour où le Processeur cesse brusquement de fonctionner, sans que personne ne sache pourquoi. La narration, à la première personne, est portée par trois personnages : Sean Factory, à la limite de la marginalité, la brigadière Ange Barnett, la responsable de la Connectique Gina Courage. Le lecteur découvre tout l’univers d’Energy Incorporated par leurs yeux, et cette façon de procéder est habile : nous découvrons comme par nous-même un univers très proche de « 1984 » d’Orwell ou de « Nous » de Zamiatine, mais en plus sympathique, nettement. A partir de là l’intrigue est rondement menée, c’est bien rythmé, avec nos trois narrateurs le lecteur va de découvertes en révélations sur le monde dans lequel ils vivent. La fin, un peu brouillonne cependant, est une vraie surprise, d’autant que le lecteur devient le seul à détenir tous les éléments de la vérité, et que l’avenir des trois personnages est pour le moins ouvert.

Mon seul regret est le manque de personnalité des personnages, mais en même temps, à plusieurs moments, on sent bien que c’est un peu aussi le propre des habitants de la bulle que d’être peu individualisé.

Un premier roman très original, faisant écho à des univers qui nous parlent (les deux romans précités, mais aussi Matrix , et même Vernon Subutex avec les performances de Sean dans le Borderground puis l’Openground). Un auteur à suivre.
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Le futur de la cité

Le festival des Imaginales va avoir lieu du 25 au 28 mai à Épinal, sous une nouvelle direction artistique, celle de Gilles Francescano. Et l’anthologie qui lui correspond vient juste de sortir. L’occasion de découvrir des nouvelles francophones d’horizons très divers, qui mêlent plusieurs générations d’auteurices. Tout cela pour s’interroger sur notre avenir urbain.



Nouvelle direction, nouvel éditeur. Les Imaginales ont connu une passation de pouvoir assez agitée, avec des mois sombres et des reproches dans les deux camps. Difficile, de mon côté, de prendre parti pour l’un ou l’autre, même si Stéphanie Nicot avait été particulièrement convaincante. Mais là n’est plus le sujet. Je ne suis jamais allé à ce festival. Je me contente de lire les anthologies qui paraissent à l’occasion. Et de noter que les éditions Mnémos ont laissé la place, cette année, aux éditions Au diable vauvert. Plongeons-nous à présent dans le contenu de ce livre : 14 textes (et non nouvelles, j’en parlerai ensuite) précédés d’une préface. Du beau monde, assurément. Des auteurices plus anciens aux plus récents. Un sommaire alléchant.



Si j’ai aimé dans l’ensemble la lecture (rapide) de cette anthologie, je n’en ressors pas empli d’espoir pour l’avenir. La plupart des auteurs, même s’ils ont des points de vue très différents et des approches très variées, n’imaginent pas des cités épanouissantes pour l’être humain. Comme souvent dans le domaine de l’imaginaire, les auteurices cherchent à pointer ce qui fait mal : le passage du temps qui abîme (« Tokyo 2115 ») et détruit, parfois de façon définitive au détriment de l’humanité même qui a causé les dégâts (« Histoire de Rome de nos jours à la fondation », « Tempus edax, homo edacior ([In]dispensables) », « L’histoire des oiseaux ») ; la tentation des sociétés à se tourner, comme ultime réponse, vers la dictature, la tyrannie, la poigne d’un homme (rarement une femme) fort et sans pitié, au nom du bien commun, mais destructeur de toute individualité, de tout rêve, de tout espoir (« Entartage », « 2084 ») ; un duel entre hommes et machines, les I.A. prenant le pouvoir ou non, suivant les instructions des humains ou non (« Le dernier jour de Paris », « Histoire de Rome de nos jours à la fondation ») ; l’humain changeant de peau, car le corps que nous avons à notre naissance ne suffit pas ou ne correspond pas ce que nous avons dans la tête, et car la technique le permet dorénavant (« Garou 2.0 ») ; l’être humain continuant à cramer le monde et à user de ses semblables comme d’objets (« Mobipolis ») dans une cité délétère (« Kontrol’za kacestvom »). Seule Sara Doke, ou presque, apporte un léger rayon de soleil en évoquant, dans « Phra au soleil », une société qui pourrait respecter l’autre et se rapprocher de celle que je découvre ces mois-ci dans différentes lectures (Un pays de fantômes de Margaret Killjoy, Cité d’ivoire de Jean Krug, Le monde de Julia d’Ugo Bellagamba & Jean Baret, Un psaume pour les recyclés sauvages et Une prière pour les cimes timides de Becky Chambers et même Les terres closes de Robert Jackon Bennett). Un panorama incomplet, certes, mais riche d’images d’un monde futur.



Cette lecture du Futur de la cité a été très agréable, alternant entre le vraiment passionnant et l’anecdotique, comme souvent dans une anthologie. Certains textes m’ont surpris, d’autres m’ont juste distrait (ce qui est déjà très bien). J’ai aimé me projeter dans ces multiples avenirs ainsi proposés, imaginés. Un bon cru, comme on dit.



Comme d’habitude, j’ai parlé de chaque texte individuellement, mais comme c'est un peu long, je n'ai placé cette partie que sur mon blog.
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Thinking Eternity

D'abord Eternity Incorporated, puis Thinking Eternity, enfin Resilient Thinking : je n'ai pas lu le 1er, mais je pense que je le lirai ainsi que le dernier, car ce second est très bon.

Raphael Granier de Cassagnac a du talent : il est quand même chercheur en physique des particules, et mène ses romans tambour battant comme une IA !

Thinking Eternity est un thriller de SF qui sort des sentiers battus, et qui colle à l'actualité d'un futur plus que possible.

Attentat dans un métro, nouveaux yeux (greffe cybernétique oculaire), Intelligence Artificielle puis Conscience Artificielle, luttes de pouvoir, réseaux mondiaux, dérapages, mondes virtuels, meurtres, dissimulations, rebondissements, virus, pandémie (vraie ou fausse?), etc...

Adrian a créé le mouvement le Thinking, et cela va le dépasser allègrement.

Sa soeur Diane est partie prenante, mais va essayer de s'en sortir alors qu'elle est au centre de la société Eternity Incorporated qui dirige tout.

Bien sûr les choses vont se dérégler, et heureusement que Diane possède sa propre IA qui la guide...

Le parallèle prémonitoire avec le covid (ce roman a été écrit en 2014) est singulier. Ici, on se pose des questions : le virus est-il réel, ou a-t-il été propagé ? le vaccin/sérum est-il efficace ou aggrave-t-il la maladie ?

Etonnant, non ?

Tout ceci se termine de façon... Vous verrez bien, lisez le !

Finalement, heureuses sont les personnes qui sont parties dans un vaisseau spatial... Leur futur est peut-être meilleur...


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Eternity incorporated

La trilogie de Granier de Cassagnac : Eternity Incorporated / Thinking Eternity / Resilient Thinking apparait comme une trilogie de science-fiction de qualité, bien que je n'eusse pas encore lu le dernier...

Mais au vu des deux premiers, je suis conquis.

Et ce même dans le désordre, puisque j'ai lu le 2 avant le 1 !

Pas de soucis ils peuvent se lire séparément,

Bref, ce premier opus est sérieux et possède de très bons atouts dans le genre post-apo.

Les survivants d'un virus vivent tous dans une bulle gérée par une sorte d'organisme informatique appelé le "Processeur".

Et ce dernier tombe en panne dès le début !

On suit alors toute l'histoire passée et présente à travers 3 individus :

Ange, chef brigade externe / Sean, artiste DJ borderground / Gina, responsable connectique, relations avec le Processeur.

Chaque chapitre faisant parler chaque protagoniste à la 1ère personne du singulier.

Ces trois personnages naviguent au sein d'une désorganisation politique totale au sein de la bulle et au dehors :

Quid du virus après tant d'année enfermés ? Quid du Processeur : pourquoi cette panne géante ? Quelle sorte de gestion élaborent la Présidente et ses conseillers ? Quels courants politiques vont émerger ?

Il y a beaucoup d'actions, et on ne s'ennuie - presque - jamais à cette lecture. Quelques longueurs toutefois, et quelques répétitions inutiles.

La toute fin reste une bonne pirouette (comme dans le 2ème), du style :

On ne changera jamais l'espèce humaine, donc... à quoi bon ?

Je trouve ce roman attrayant et bien construit. Tout comme le second. C'est de la bonne SF.

Vivement le troisième.
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Resilient Thinking

Troisième incursion de Raphaël Granier de Chassagnac dans son univers bouleversé par Eternity. Resilient Thinking nous entraîne longtemps après la chute de l’humanité, ravagée par un virus terriblement meurtrier. Quelques humains restent en vie, isolés par petits groupes : 21 Éternautes réfugiés dans leur arche spatiale ; une communauté implantée autour de Zanzibar, issue des six « derniers ». Ensemble, ils vont finir par comprendre comment ce drame s’est déroulé et pourquoi.



Je commence par préciser une chose importante : vous n’avez pas lu les deux premiers romans de la série, Eternity Incorporated et Thinking Eternity ? Ce n’est pas grave. Les éléments nécessaires à la compréhension du background (je cherche un terme français pour remplacer « background », mais aucun ne me satisfait pleinement) sont distillés de façon très naturelles quand le besoin s’en fait sentir. Et, comme l’histoire se déroule longtemps après la fin de Thinking Eternity, débuter avec Resilient Thinking n’est absolument pas un problème (enfin, me semble-t-il, car j’avais lu les deux précédents tomes, mais en avais oublié une grande part).



L’humanité a donc été décimé par un virus terriblement meurtrier. Quelques colonies ont tenté de survivre sous des dômes. Mais on n’a plus aucune nouvelle d’elles depuis un certain temps. Même si on aperçoit encore des signes de vie. Il reste donc 21 individus, envoyés à l’époque du virus dans l’espace pour servir d’arche. Ils étaient en lien avec les I.A. dirigeant les dômes. Mais, comme quatre des cinq I.A. dirigeant le vaisseau spatial, certaines ont mis fin à leurs jours. Eh oui, les intelligences artificielles aussi peuvent désirer en finir avec leur existence. Première surprise pour moi. Agréable, car elle donne à réfléchir encore davantage à ce que représente ce mirage de la SF, les I.A., avec tous les fantasmes qui les entourent, toutes les idées préconçues que l’on peut se faire à leur propos. Raphaël Granier de Chassagnac va loin dans ses supputations. À un moment, il évoque même le viol possible d’une I.A. par une autre. Vertigineux. Ce roman est donc l’occasion, comme les précédents, de s’interroger en profondeur sur leur existence et leur possible futur rôle dans notre monde.



En plus de ces vingt-et-une personnes, sur Terre, six personnages importants dans le précédent roman ont compris ce qui se passait et tenté de fuir. Ils y sont parvenus et ont créé une colonie, avec des règles qui se sont étoffées au fil du temps. De six, les « derniers », ils sont devenus des milliers. Travaillant sur la patrimoine génétique (on ne fait pas des bébés au hasard, mais avec le ou la partenaire le ou la plus à même de permettre la naissance d’un enfant viable et qui permettrait d’amplifier la variété, afin d’éviter au maximum la consanguinité et ses risques), ils sont parvenus à créer une société résiliente. Utilisant des restes de la civilisation pré-apocalyptique, ils maintiennent un niveau de vie plutôt correct. Mais plusieurs dangers menacent cette société : des dissidents sèment le trouble et font sécession ; depuis quelques temps, la population ne parvient plus à augmenter, d’où un danger mortel de stagnation. Raphaël Granier de Chassagnac nous offre ici une représentation réaliste de ce que pourrait devenir une Terre après l’éradication quasi globale de l’humanité. Et, sans doute, un clin d’œil à John Brunner et à son célèbre titre Tous à Zanzibar, paru en 1968 et qui offre quelques (très légers) points communs.



Mais cet équilibre (en léger déséquilibre, il est vrai) va exploser en morceaux avec l’irruption d’un Éternaute parmi les humains de Zanzibar. À partir du moment où il se pose sur Terre afin de tenter de comprendre pourquoi les I.A. des dômes ne donnent plus signe de vie et comment la communauté de Zanzibar a réussi à survivre au virus, tout part à vau-l’eau. Pour notre plus grand plaisir de lecteur, car le rythme va aller s’accélérant. Et la multiplication des personnages (absolument pas dérangeante pour la bonne compréhension de l’histoire, ce qui n’était pas gagné, vu le nombre de personnages) renforce ce côté rythmé. De l’action, beaucoup, et des réponses. Car, comme l’Éternaute, on aimerait bien comprendre ce qui s’est passé et qui dit la vérité. En effet, les versions que nous découvrons du passé sont contradictoires. Est-ce le virus qui a tué les humains ou le vaccin ? Qui a répandu le poison mortel ? Jusqu’au bout, on se le demande et il faut attendre les dernières pages pour réellement saisir toute l’étendue de ce qui s’est déroulé des années plus tôt et a conduit à ce massacre.



Resilient thinking est une lecture enthousiasmante tant elle sait distraire de façon efficace et intelligente. La société imaginée par Raphaël Granier de Cassagnac est d’une grande justesse et l’on se fond dans les pas des personnages avec facilité. Un retour réussi dans le monde façonné par Eternity.
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Resilient Thinking

Plusieurs siècles après qu'un virus a anéanti la quasi-totalité de l'humanité, les descendants de six rescapés vivent en autarcie à Zanzibar. La communauté se monte maintenant à plusieurs dizaines de milliers d'individus qui se croient les uniques représentants de la race humaine. Ils ont organisé leur société en caste de métiers visant à la fois à la perpétuation de l'espèce, mais aussi à la maintenance des engins qu'ils récupèrent, et à la conservation du savoir grâce à une tablette qui contient Lia, une IA qui leur est dévouée et qui est coupée de tout autre système informatique. La communauté se tient éloignée des Bulles (dômes géants créés pendant le cataclysme et qui ont échoué à protéger les humains qui vivaient à l'intérieur), car elles sont contrôlées par des IA qui envoient des drones tueurs en cas d'approche. Les IA sont même soupçonnées d'avoir déclenché l'apocalypse. Mais les règles strictes et le système de castes ne plaisent pas à tous : des groupuscules de dissidents se cachent, épient et rassemblent des armes.



Un beau jour, une fusée spatiale descend et atterrit à Zanzibar. En sort un humain dans un exosquelette, humain qui vient du vaisseau Odyssée où il vit avec une vingtaine d'adultes et quelques enfants. le vaisseau est entretenu par l'intelligence artificielle Caïn qui, de fait, contrôle la vie à bord. Caïn ne reçoit plus d'information des IA de la dernière Bulle qui était encore active, à l'est des États-Unis, et il vient de détecter la communauté de Zanzibar : l'équipage a décidé d'envoyer un des leurs à la rencontre de ces humains du sol.



Les derniers (comité restreint des chefs de la communauté) sont suspicieux : n'est-ce pas un piège de Caïn, cette IA qui communiquait avec ses semblables des Bulles ? Les Bulles sont dangereuses, donc comment s'assurer que les humains du vaisseau ne sont pas manipulés ? En même temps, ceux-ci représentent un réservoir génétique qui serait salvateur !



Commence une aventure mouvementée dans un roman choral, racontée par cinq humains et les deux IA. La plupart ont des personnalités affirmées : le vieux sage, la médecin obsédée par la perpétuation de l'espèce, la femme battante qui va de l'avant, le passionné qui veut redécouvrir les techniques d'avant l'apocalypse, le jeune chef arrogant, mais qui a un bon fond, et bien sûr les deux IA, Lia qui ne pense qu'au bien des humains qu'elle sert depuis des siècles et Caïn qui s'ennuie dans son immortalité. Les responsables de la communauté se méfient sans cesse de ce dernier et le soupçonnent de comploter avec les IA des Bulles.



Récit d'un monde post-apocalyptique où un embryon d'humanité a commencé à reconstruire un avenir, mais reste très fragile, et où le danger des IA plane, ce roman se lit avec fluidité. Les scènes d'action sont servies par une plume nerveuse, l'intrigue avance rapidement et les acteurs de cette aventure sont convaincants. le tout forme une lecture agréable.



Ce livre est en réalité le troisième dans un univers imaginé par l'auteur. Je n'ai pas lu les précédents, et cela n'a posé aucun problème de compréhension : il peut être lu indépendamment des autres, comme le souligne l'éditeur.



Cette chronique est écrite dans le cadre d'un service presse.


Lien : https://feygirl.home.blog/20..
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Un an dans les airs

En Résumé : Un An dans les Airs se révèle être un livre vraiment magnifique et immersif qui nous plonge, d’une part, dans une histoire qui se révèle palpitante, pleine d’aventures et de surprises avec aussi son lot de réflexions vraiment intéressante ; et d’autre part dans la découverte d’une cité dans les airs utopique qui se révèle vraiment saisissante et fascinante. Les graphismes de Nicolas Fructus se révèlent toujours aussi magnifiques et offrent une représentation vraiment sublime de cette histoire, de ces lieux et des personnages. Les héros se révèlent vraiment soignés, complexes et surtout la plume des auteurs qui les représente colle parfaitement. On sent aussi au fil des pages tout le respect pour l’univers et l’œuvre de Jules Verne. Mon seul regret vient des interventions de Philippe Daryl qui tombent parfois légèrement dans le catalogage à mon goût, mais franchement rien de dérangeant. Attention une fois la dernière page tournée on a envie de replonger dans les livres de Verne.



Retrouvez ma chronique complète sur mon blog.
Lien : http://www.blog-o-livre.com/..
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La confrérie des bossus

J'avais sélectionné ce roman lors de la dernière Masse critique de Babélio car la magnifique couverture m'avait beaucoup fait penser à celle de Jadis, sortie l'année dernière. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard car les deux auteurs Mathieu Gaborit et Raphaël Granier de Cassagnac avaient également collaboré au projet, développé par la même maison d'édition.



La confrérie des bossus est une novella qui s'inscrit dans l'univers de l'harmonde, développé dans deux opus préexistants : Les Crépusculaires et Abyme de Mathieu Gaborit. La novella met en scène Jad, un jeune bossu qui abrite l'âme de la cité de Sombreçonge. Il doit alors rallier ses comparses bossus dans les Abymes et protéger ainsi son trésor caché. Malheureusement, certains de ceux qu'il croisera sur sa route, sont intéressés et poussés par la convoitise...



Ne connaissant absolument pas l'univers de Mathieu Gaborit, j'ai eu beaucoup de mal à rentrer dans le récit et à m'imprégner de l'univers de l'Harmonde. En effet, certains passages m'ont paru bien nébuleux, voire à de nombreuses reprises complètement sibyllins, à cause de la complexité de l'univers développé. Ma lecture m'a semblé difficile et j'ai été de nombreuses fois perdue. Maintenant, il est possible que la novella soit adressée en priorité aux initiés mais j'avais le sentiment de rester un peu en dehors du récit, comme si j'étais punie.



En revanche, je dois bien reconnaître que les deux auteurs possèdent une plume de qualité qui, bien qu'elle ait peiné à me faire agréer à La confrérie des bossus, m'a néanmoins, convaincu de poursuivre l'exploration avec les Crépusculaires et Abymes. En effet, l'univers de l'Harmonde est poétique et originale, certes complexe comme je l'ai dit, mais également bien développé.



Enfin, la présente édition de la novella est de qualité avec un papier épais et agréable à toucher. Le texte est bien aéré mais est surtout agrémenté des jolies illustrations de Julien Delval qui collent bien à l'histoire et à l'univers.



En conclusion, si vous voulez connaître l'œuvre de Mathieu Gaborit et de Raphaël Granier de Cassagnac, ne débutez pas par cette novella car vous aurez de bonnes chances d'être perdu tout comme je l'ai été. Réservez-donc cet ouvrage à un initié. En revanche, le récit et le développement de l'Harmonde est suffisamment dense et poétique pour avoir attisé ma curiosité. Je pense m'intéresser de près aux Crépusculaires du même auteur.



Je remercie Babélio et les éditions Mnémos Ourobores de m'avoir fait découvrir cette novella.
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Jadis : Carnets et souvenirs picaresques de..

Le financement participatif a le vent en poupe en ce moment, notamment dans le domaine de l'édition. Après Les Moutons électriques c'est Mnémos qui a choisi de tenter l'aventure dans le but de donner naissance, au terme d'une fructueuse campagne lancée sur Ulule, à « Jadis », superbe ouvrage à l'élaboration duquel auront participé pas moins de quatre auteurs et un illustrateur. Le concept est un peu le même que celui d' « Un an dans les airs », autre « beau-livre » appartenant à la collection Ourobores : les auteurs créent un univers partagé dans lequel ils choisissent chacun un personnage à interpréter. Un jeu littéraire, en quelque sorte, mais qui atteint ici les sommets. Tout commence lorsque l'Optimate Maestro (comprenez l'illustrateur Nicolas Fructus) décide de réunir les trente meilleures plumes de la ville et d'immortaliser sur toile la rencontre de tous ces individus aux origines et aux motivations très différentes. Ne reste plus pour Charlotte Bousquet, Mathieu Gaborit, Raphaël Granier de Cassagnac et Régis Antoine Jaulin qu'à choisir lequel de ces trente personnages ils incarneront et sous quelle forme ils choisiront de s'exprimer. On suit donc tour à tour les récits d'Eris, Silenzio, le Sieur et Don Desiderio dont les chemins vont évidemment se croiser et dont les aventures vont nous fournir l'occasion rêvée d'explorer tous les recoins de la ville de Jadis.



Le projet est ambitieux et, si j'avoue avoir été un peu déstabilisée par la narration non linéaire de certains personnages qui m'a parfois fait perdre le fil de l'intrigue, j'ai pris énormément de plaisir à m’immerger dans ce décor fortement inspiré de notre Renaissance. L'ouvrage possède de nombreux atouts mais s'il séduit à ce point le lecteur c'est avant tout par la qualité et la richesse de son univers : Jadis est une cité aux multiples facettes, découpée en quartiers et en hanses possédant chacune leur spécialité architecturale ou culturelle ou professionnelle et dans lesquelles on déambule au côté de tel ou tel personnage. La structure sociale complexe élaborée par les auteurs est également ingénieuse, les servantès se mêlant aux opérantes, aux apothèques ou aux potentès, le tout sous le regard de Dame Fortune qui tisse le destin de chaque habitant de la ville et décide de ses différentes réincarnations. L'ouvrage regorge de milles autres inventions relatives aux moyens de transports, au bestiaire ou encore à l'architecture de cette ville qui ne peut qu'enflammer l'imagination du lecteur, frustré de devoir quitter un univers aussi riche dont il a bien conscience de n'en avoir égratigner que la surface. Le palais des Miroirs véritables, les Antipodes, certains quartiers... : ils sont nombreux, les endroits qu'on aimerait avoir la chance de visiter plus en détail.



Les illustrations de Nicolas Fructus participent également beaucoup à cette immersion, tout comme les à-côtés au récit : index particulièrement fourni, arcanes du tarot, carte... Outre l'inventivité dont les auteurs ont su faire preuve concernant leur décor, j'ai surtout été impressionnée par la qualité de leur plume. Chaque personnage s'exprime en effet avec un style très différent de celui de ses trois autres compagnons d'infortune (plutôt cru pour Silenzio, sous la forme d'une pièce de théâtre pour le Sieur...) mais on retrouve chaque fois la même minutie, le même travail sur la langue qui donne lieu à des passages véritablement magnifiques qu'on aurait presque envie de réciter à haute-voix afin de mieux en apprécier la musicalité. J'ai personnellement été très sensible à l'écriture de Régis Antoine Jaulin qui prête sa plume au picarès Don Desiderio puis à la ménestrelle Amarante. Impossible de ne pas évoquer, pour terminer, la beauté de l'objet-livre lui-même, les éditions Mnémos n'ayant de toute évidence pas lésiné sur les moyens. Coffret, carte grand format, jeu de tarot illustré par Nicolas Fructus, papier de qualité... : difficile pour tout amateur de livre de ne pas être impressionné par un tel écrin. Le livre n'est certes pas donné, mais voilà bien un investissement que vous ne risquez pas de regretter !



Fruit d'un projet ambitieux entamé il y a plus d'un an, « Jadis » est un ouvrage remarquable, aussi bien sur le fonds que sur la forme. Impossible de s'ennuyer une seconde tant les styles d'écritures, les supports, les personnages et les décors sont variés, preuves s'il en faut de la richesse de cet univers né de l'imagination de quatre auteurs et brillamment mis en image par Nicolas Fructus. Un ouvrage incontournable et un gros coup de cœur en ce début d'année 2016 !
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Un an dans les airs

« Cinq semaines en ballon », « Vingt mille lieues sous les mers », « Le tour du monde en 80 jours »... Qui ne connait pas aujourd'hui Jules Verne et son œuvre ? C'est à cet auteur jouissant aujourd'hui d'une impressionnante popularité partout dans le monde que les éditions Mnémos ont choisi de rendre hommage avec « Un an dans les airs », bel ouvrage né de la collaboration de quatre auteurs et d'un dessinateur.



Le concept est simple et néanmoins enthousiasmant : relater le voyage qui aurait inspiré à Jules Verne les principales idées de ses « Voyages extraordinaires ». Nous voilà donc lancé à la découverte de Célesterre, cité dans le ciel réunissant les plus grands esprits du XIXe et dans laquelle débarque l'écrivain ainsi que trois autres compagnons de voyage. Raphaël Albert prête ainsi sa voix à Nadar, aéronaute et photographe français féru d'aventure ; Jeanne A Debats à Julie Servadac, mystérieuse passagère dont les charmes ne sont pas sans laissés indifférents ses compagnons de voyage masculins ; Raphaël Granier de Cassagnac au journaliste Philippe Daryl ; et enfin Johan Héliot au grand Jules Verne. Chacun des auteurs prend tour à tour la parole afin de relater son ressenti, ses rencontres et ses découvertes, et chaque intervention s'accompagne d'une illustration signée Nicolas Fructus qui nous donne de magnifiques aperçus de la cité de Célesterre ainsi que de ses principaux occupants.



Constituée d'un agrégat de ballons et autres machines volantes, la cité de Célesterre a pour particularité, outre celle de se situer loin du sol et d'évoluer au gré des vents, de concentrer parmi sa population certains des meilleurs experts dans tous les domaines possibles, de la musique à la botanique en passant par l'ingénierie, la médecine... L'objectif est noble : procéder à tout un ensemble d'expérimentations afin de pouvoir ensuite appliquer les expériences concluantes à la Terre qui s'en trouverait pacifiée, unifiée. Suffisance alimentaire, langage et religion universels, énergie accessible à tous..., voilà le type de projets auxquels s'attèlent les habitants de cette cité volante. L'idée ne manque pas d'attrait et c'est avec curiosité que l'on fait connaissance avec certains des habitants tels que Nikola Tesla, grand inventeur célèbre pour ses travaux sur l'électricité, ou encore le chimiste Eugène Turpin. On peut également saluer l'important travail de recherche effectué par les auteurs qui nous bombardent de références et d'informations aussi bien historiques que scientifiques et bien évidemment littéraires.



N'allez cependant pas croire que l'ouvrage se limite à une « visite guidée » de la cité, car si la découverte de Celesterre est effectivement ce qui occupe la plus grande partie de l'ouvrage, celui-ci n'en est pas pour autant dépourvu d'intrigue. Au fur et à mesure que sont dévoilés des extraits des carnets de bord consignés par les quatre protagonistes, le lecteur découvre en effet les secrets et motivations des quatre protagonistes, dont certains nous réservent bien des surprises... Les mystères planant autour de la personnalité du capitaine, du maître ingénieur ou encore de Julie constituent d'ailleurs souvent les passages les plus intéressants. En ce qui concerne les points négatifs, je mentionnerai surtout quelques répétitions qui en viennent parfois à lasser (un même événement nous étant relaté du point de vue de plusieurs des protagonistes). On pourrait également regretter un léger manque d'exotisme, tant du point de vue de la conception de cette cité volante que des graphismes qui, bien que très beaux, n'en dévoilent malgré tout pas assez pour véritablement fasciner le lecteur.



Malgré ces quelques bémols, « Un an dans les airs » reste un ouvrage remarquable, basé sur une idée originale habillement mise en scène par les quatre auteurs dont la collaboration semble fonctionner à merveille. Une chose est sûr, vous n'aurez qu'une envie une fois la dernière page refermée : découvrir ou vous replonger dans les œuvres de Jules Verne !
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Kadath : Quatre quêtes oniriques de la cité inc..

Un livre souvent intéressant, mais qui est sans doute trop ou pas assez quelque chose pour trouver facilement son public (et pourtant, il le mérite !)



J’ai reçu cet ouvrage dans le cadre de l’opération Masse Critique organisée par Babelio. Je remercie ce site, ainsi que les éditions Mnemos (pour le livre et le petit bonus constitué par le marque-page agrémenté d’un mot gentil)



A la lecture du titre de cette critique, deux réactions sont possibles : soit ne pas savoir du tout ce qu’est ce « Kadath », soit être un initié des sombres secrets dévoilés par le Maître de Providence dans ses écrits impies. Dans ce dernier cas, vous pouvez aussi vous demander quelle est la différence entre cet ouvrage et Kadath – Le guide de la cité inconnue (qui vient, au passage, de bénéficier d’une nouvelle édition, et est titulaire du prix Imaginales 2011) : le livre que je vous présente aujourd’hui comprend en fait les textes du guide de la cité inconnue (« revus au format roman », pour citer l’éditeur), mais pas les illustrations de Nicolas Fructus. Et ceci, il faut le signaler, à quasiment la moitié (19 euros au lieu de 36) du prix du beau livre de la collection Ouroboros. Ce qui fait que si, comme moi, vous êtes plus intéressé par le texte que par les illustrations, ce titre sera plus adapté à vos envies que son prédécesseur.



Ce livre comprend quatre nouvelles, liées par un fil rouge, ainsi qu’un guide détaillé de la cité de Kadath et des Contrées du Rêve en général. Si vous êtes un amateur de Lovecraft et connaissez le volet onirique de son oeuvre, inutile de vous présenter ce lieu, vous le connaissez et le chérissez probablement. Sinon, pour ceux qui ne sont pas encore entrés dans l’univers du Maître du Fantastique, je vous propose un petit résumé de la place de la ville dans son oeuvre, avant de vous donner mon sentiment sur les nouvelles et les annexes. Sachez d’ailleurs que les textes du mystérieux narrateur appelé l’Innomé, qui font le lien entre les nouvelles, ainsi que les annexes, donnent même au complet néophyte une compréhension basique de l’univers onirique Lovecraftien.



- Kadath et les Contrées du Rêve



Je ne vais pas vous faire un cours sur Lovecraft, d’autres blogueurs (principalement Nebal, mais aussi Celindanae) sont beaucoup plus versés dans les arcanes Lovecraftiennes, anciennes ou nouvelles (beaucoup de rééditions / nouvelles traductions récentes, BD), que je ne le suis. Cependant, pour ceux qui ne connaissent pas du tout l’oeuvre du Maître, ou en tout cas son volet onirique, une petite explication est nécessaire.



Lovecraft a écrit essentiellement du Fantastique et de la Science-fiction (si, si), mais un des volets de son oeuvre se passe dans… le monde du Rêve et a une atmosphère différente, certes toujours empreinte d’Horreur, mais qui tire plus sur le Merveilleux. Du moins, si on ne considère pas, justement, que tout ceci n’est sans doute qu’un songe (ou dû à la folie du protagoniste, voire, pour certains, à sa consommation de narcotiques), ce qui, donc, redéfinit cette partie de l’oeuvre comme du Fantastique, puisque le lecteur hésitera entre deux explications : la rationnelle et l’irrationnelle, sans pouvoir trancher. Personnellement, j’y vois aussi une expression de ce sous-genre particulier qu’est la Portal Fantasy : outre le fait que l’état de sommeil, de rêve lui-même, puisse être considéré comme le portail vers un monde empli de démons et de merveilles, il est explicitement fait mention, dans les écrits Lovecraftiens, de portes mettant en contact le monde de l’éveil (donc : le nôtre) et les Contrées du rêve. Sans compter qu’une bonne partie de ce livre explique comment certains sont passés physiquement dans les Contrées du Rêve.



Bref… la cité de Kadath est l’objet de la quête d’un certain Randolph Carter (avatar de Lovecraft en personne), qui parcourt le Monde du Rêve à sa recherche, dans la novella La quête onirique de Kadath l’inconnue. Ce monde onirique est également développé par Lovecraft dans d’autres nouvelles, ainsi que par d’autres écrivains (citons Lin Carter, August Derleth ou encore Brian Lumley), parfois dans une veine humoristique ou parodique, d’ailleurs, et dans le domaine du jeu de rôle (notamment dans les suppléments à L’Appel de Cthulhu appelés Les Contrées du rêve revisitées et Terror Australis). Pour résumer, il s’agit d’un univers (ou d’un ensemble de territoires oniriques issus des rêves des habitants de différents systèmes solaires) qui est à la fois créé, visité, voire peuplé dans / par les songes des habitants du monde de l’éveil, mais qui, en parallèle, continue à exister même lorsque vous vous réveillez. Kadath est une de ses cités, mystérieuse, cachée, inaccessible aux mortels, car on y trouve un château qui est la demeure des Dieux de la Terre (ou Très Hauts, dans la dernière traduction en date). Et pour expliquer en deux mots à ceux qui ne connaissent pas du tout Lovecraft, ces dieux là sont protégés (ou peut-être retenus prisonniers) par Nyarlathotep, le messager des Autres Dieux, des créatures si étrangères à l’humanité que leur simple vue (à moins qu’ils n’aient la miséricorde -un trait rarissime chez eux- de se draper dans des voiles d’illusion) peut faire sombrer votre âme dans les plus profonds, noirs et irrémédiables abysses de la Folie.



Kadath elle-même n’est que brièvement décrite à la fin du texte de Lovecraft. Le présent livre a pour ambition de placer certaines histoires autour de la cité ou de son château d’Onyx, ainsi que de vous donner la vision des auteurs sur les caractéristiques de la ville. J’insiste particulièrement sur ce point, car si vous parcourez les critiques sur Kadath – Le guide de la cité inconnue (qui contient les mêmes nouvelles) sur le net, ainsi que leurs commentaires, vous verrez que certains « intégristes » vont descendre l’ouvrage en flammes parce qu’il n’a, selon eux, rien de Lovecraftien, ni dans le style, ni dans la description de la cité. La seule lecture du texte de Mélanie Fazi vous montrera clairement à quel point une affirmation aussi péremptoire est grotesque.



- Les quatre nouvelles



* L’inédit de Carter – David Camus



Comme nous l’explique David Camus (également traducteur du récent ouvrage rassemblant tous les textes oniriques Lovecraftiens, Les Contrées du rêve), les origines de ce texte sont quelque peu mystérieuses. Sa date de rédaction et son auteur sont incertains, même si Robert Bloch reste le plus vraisemblable (écrivain de Fantastique, correspondant de Lovecraft, qui lui sert de mentor et dont il est un des membres les plus jeunes de son cercle, il a mis en scène ce dernier dans plusieurs textes et a repris le « mythe de Cthulhu » dans certains de ses propres romans ou nouvelles, avant d’opérer un virage vers une horreur plus psychologique et terrestre, orientée crimes plutôt que dieux tentaculaires venus d’outre-espace). Personnellement, j’ai une autre opinion : je pense que le véritable auteur s’appelle… David Camus, et qu’il ne s’est donc pas contenté de le traduire, mais bel et bien de le rédiger.



Cette nouvelle met en scène un… hum… « mystérieux » protagoniste nommé… HPL (étonnant, non ?). Il veut se rendre à nouveau au château de Kadath, des années après une première visite, car Nyarlathotep en personne (pour les non-initiés : le « premier ministre » du Sultan des Dieux, le messager et l’âme des Autres Dieux) lui a promis une « récompense » s’il écrivait, dans le monde de l’éveil, des textes incitant les dieux qui s’étaient égarés sur Terre (par ennui ou curiosité) à rentrer à Kadath. Cette tâche accomplie, HPL vient réclamer son dû.



Autant le dire tout de suite, le puriste, voire l’intégriste, de Lovecraft pourrait bien s’étrangler devant ce texte : entre un style bien peu Lovecraftien (et assez pauvre) et des « innovations » comme la ligne téléphonique reliant l’auberge de Kadath au château, il y a effectivement de quoi être déstabilisé (même si l’inclusion d’éléments du monde de l’éveil dans celui des songes est tout à fait conforme à la vision du maître, cf Kuranès). Pourtant, ce texte est relativement intéressant pour le complet néophyte, car il donne quelques aperçus de la vie, du caractère et de la carrière de Lovecraft. On appréciera aussi l’éclairage… Lovecraftien qu’il jette sur cette dernière, mais aussi l’inclusion de personnages issus des textes du Maître, l’occasion pour le lecteur érudit de réviser ses connaissances.



Au final, c’est un texte qui a relativement peu d’intérêt sur le plan littéraire, qui fera bondir le puriste, mais qui, d’une part, pourra permettre au complet néophyte d’un peu mieux connaître l’écrivain, et qui, d’autre part, fait preuve d’humour en jetant sur la carrière de ce dernier un éclairage… Lovecraftien !



* L’évangile selon Aliénor – Mélanie Fazi



Si vous vous intéressez à la SFFF, il me paraît peu probable que vous n’ayez jamais entendu parler de Mélanie Fazi, mais admettons : l’autrice native des Hauts de France exerce dans les domaines de la Fantasy et du Fantastique, et est au moins aussi connue en tant que traductrice de grands auteurs anglo-saxons, à commencer par Brandon Sanderson. Elle est également un des trois co-animateurs du podcast « Procrastination », sur l’écriture de SFFF, lancé récemment par Elbakin.



Dans cette nouvelle, Mélanie Fazi nous parle d’Aliénor, une religieuse chrétienne du douzième siècle qui se retrouve involontairement dans Kadath. Elle s’y unit avec un mystérieux personnage, et porte dès lors, dans le monde du Rêve, un enfant très spécial (enfin, un… mais vous verrez ça en lisant le livre). Dans le même temps, la Sœur s’intéresse de près aux Très Hauts, à leurs temples et à leurs clergés. C’est aussi l’occasion pour le lecteur de se rendre clairement compte que Kadath est un nexus, entre les mondes oniriques de différentes planètes, entre différentes époques situées aussi bien dans le présent que dans le passé ou le futur. Enfin, c’est dans ce texte qu’on commence à entrevoir la façon dont trois des nouvelles sont liées entre elles.



L’autrice nous livre un excellent texte, extrêmement respectueux de l’esprit, voire même du style des écrits oniriques Lovecraftiens, et en tout cas passionnant de bout en bout, servi par une écriture remarquable. Elle se paye même le luxe, dans un miroir du légendaire « N’est pas mort ce qui à jamais dort, car au long des siècles peut mourir même la mort », de créer sa propre phrase emblématique : « Ce qui faiblit sans mourir peut être ravivé ». Et dans le même ordre d’idée, cette nouvelle peut être analysée comme le pendant « positif », si j’ose dire, d’un des plus fameux textes de Lovecraft, L’Abomination de Dunwich. Bref, voilà une nouvelle qui justifie quasiment à elle-seule l’achat du livre.



* Le kitab du saigneur – Laurent Poujois



Laurent Poujois est un écrivain français dont l’oeuvre a été extrêmement influencée par celle de Lovecraft. Il a publié un série de textes destinés à la jeunesse qui se déroulent justement dans les royaumes oniriques imaginés par l’auteur natif de Providence.



Cette nouvelle, la plus longue des quatre, met en scène un érudit, qui a découvert quasiment tous les secrets de l’univers, sauf ceux enfermés dans la bibliothèque des Dieux de Kadath. Son esprit va aller de morts en réincarnations dans les Contrées du Rêve, en essayant d’accéder d’abord à Kadath, puis à son château d’onyx. Pendant ce temps, dans le monde réel, des siècles passent, et de temps en temps, une chronique de ses aventures fait surface. Il est accompagné d’un Hyperboréen, sur la peau duquel il tatoue ses découvertes. Lorsque les Dieux lui interdisent l’accès à leur demeure, il rallie les Innommables (les Intouchables de la cité, si on veut), chassant les rêveurs et sapant la base du pouvoir des divinités, qu’il veut remplacer… par les Grands Anciens (pour ceux qui ne connaissent pas Lovecraft : des extraterrestres immensément puissants, très anciens, considérés -à tort- comme des divinités; le plus fameux d’entre eux est Cthulhu) : le plan de ces derniers est d’infiltrer les rêves des humains, afin de leur inspirer le désir de les libérer des prisons (R’lyeh, par exemple) où ils sont retenus ou des espaces restreints dans lesquels ils sont contraints (les latitudes nordiques, etc).



Cette nouvelle est également clairement liée à deux des autres, particulièrement à celle consacrée à Aliénor. Elle montre aussi une fois de plus à quel point la cité de Kadath est pétrie de paradoxes temporels.



C’est un bon texte, avec une fin qui, si elle est totalement prévisible par l’initié, n’en reste pas moins intéressante. Je me pose cependant l’intérêt de cette même fin pour celui qui ne connaît pas du tout Lovecraft, qui n’aura, de fait, quasiment pas de clef pour comprendre l’ampleur de ce qui vient d’être révélé (et qui fait un lien remarquable entre les volets onirique et terrestre de l’univers du Maître).



* Le témoignage de l’Innomé – Raphaël Granier de Cassagnac



Raphaël Granier de Cassagnac porte beaucoup de casquettes : écrivain de Fantasy et de SF, directeur de la collection Ouroboros chez Mnemos et physicien des particules, excusez du peu !



Ce texte, qui emploie la technique de l’adresse au lecteur (qu’on retrouve par ailleurs souvent dans les annexes, ainsi que dans les intermèdes) est le seul qui fait référence aux trois autres. Il ressemble assez à celui de David Camus, dans l’esprit (l’hommage à Lovecraft et à son oeuvre) plus que dans la lettre (en clair : l’écriture est plus solide). En plus, comme je le disais, de faire un lien (voire d’expliquer en partie) entre toutes les nouvelles du recueil, il entrelace ces dernières avec les textes du Maître en personne d’une façon assez remarquable : il est littéralement rempli d’allusions à des personnages (humains) Lovecraftiens, à un degré très supérieur à celui trouvé dans le texte de David Camus.



Le problème, c’est qu’en elle-même, cette nouvelle n’a qu’une valeur littéraire limitée : elle ne peut réellement se concevoir que liée aux autres, il me paraît difficile de la lire ou relire de façon isolée, au contraire des textes de Laurent Poujois ou, surtout, de Mélanie Fazi.



- Les annexes



Encore plus que certaines des nouvelles, ce sont les annexes qui vont soit poser des problèmes, soit éveiller l’intérêt de certaines catégories de lecteurs (mais je vais en reparler plus loin).



Il est important de signaler trois choses :



* Les annexes peuvent donner quelques clefs de (pleine) compréhension de certaines nouvelles.



* Si vous les lisez avant, ou lisez les nouvelles dans le désordre, elles peuvent aussi spoiler certaines nouvelles, particulièrement celle de Laurent Poujois.



* Elles peuvent, d’un autre côté, donner à celui qui n’a jamais lu Lovecraft (ou jamais abordé le volet onirique de son oeuvre) des clefs de compréhension des nouvelles beaucoup plus solides que celles présentes dans les intermèdes.



Elles sont au nombre de six, plus une septième assez spéciale (et à mon avis très réussie) :



* Une chronologie des événements en rapport avec Kadath et le Monde du Rêve.



* Personnages : ceux de ce recueil, plus certains de ceux des textes oniriques de Lovecraft.



* Peuples et créatures : cette annexe concerne les êtres Lovecraftiens qui apparaissent dans ce recueil (les Shantaks se taillant la part du lion).



* Divinités et religions : cette partie mélange des données issues des écrits de Lovecraft, des dieux inventés dans ce recueil, ainsi que la description des temples les plus emblématiques de la cité.



* Contrées du rêve : le gros intérêt de cette section est de donner au complet néophyte une vision succincte mais fort utile des hauts-lieux de cette « dimension » onirique. Le lecteur de longue date de Lovecraft y trouvera matière à révision, éventuellement.



* Arpenter Kadath : c’est le guide de la cité et de ses lieux les plus emblématiques, pittoresques, grandioses ou terrifiants. Compte tenu de la brièveté de la description de Kadath dans le « canon » Lovecraftien, cette partie est la plus personnelle aux auteurs du recueil de toutes.



* Kadath pratique : cette dernière partie, qui ne fait pas du tout double-emploi avec la précédente, ressemble à un hallucinant guide du routard onirique, devant, dans une optique la plus pratique possible (c’est dans le titre de la section), conseiller le voyageur sur ce qui l’attend (ou pas, d’ailleurs) à Kadath, sur la manière de régler ses achats, de s’y reposer ou se sustenter, sur la manière de s’y rendre, ou encore sur les quartiers qu’il vaut mieux éviter. Une règle (de survie) à retenir : les distances, les durées et le climat ne sont pas régis par des lois constantes, prévisibles ou rationnelles, ce qui, pour un monde onirique, n’est après tout pas étonnant !



Ces annexes, formant un guide de la cité, seront aussi polarisantes, voire plus, que certains textes : le puriste de Lovecraft en rejettera une partie en bloc, étant donné que la description de la ville est majoritairement issue de l’imagination des quatre auteurs français et pas de celle du Maître; le connaisseur n’aura que peu d’intérêt pour certaines annexes, vu qu’il connaît déjà tout ça par cœur (du genre : il vaut mieux être gentil avec les chats dans les Contrées du rêve); le rôliste pourra être heureux de la masse d’information présentée, à condition que cette conception personnelle de Kadath n’entre pas en contradiction avec les suppléments officiels de son jeu Lovecraftien favori; le néophyte, lui, sera en revanche ravi d’y trouver les clefs de compréhension qui lui ont manqué en lisant les quatre nouvelles.



- Mon avis



Au final, les textes sont d’un intérêt inégal : si celui de Mélanie Fazi est sans conteste une grande réussite, qui justifie à lui seul l’achat de ce recueil, celui de Laurent Poujois est intéressant mais trop prévisible pour le connaisseur de Lovecraft (mais il a le gros mérite d’établir une élégante passerelle entre les volets onirique et terrestre de l’oeuvre du Maître), tandis que celui de Raphaël Granier de Cassagnac n’a de réelle signification qu’en relation avec les autres et pas en lui-même, et que celui de David Camus est nettement en-dessous des autres sur le plan littéraire.



Pour le puriste, voire l’intégriste Lovecraftien, la majorité de ce livre sera une hérésie (je me borne a retranscrire ce point de vue, constaté en commentaire sur le net, sans le partager) : la première nouvelle, qui nous parle de téléphone et de voiture à Kadath, sera très mal perçue, tandis que la description complète de la ville, quasi-entièrement inventée par les quatre auteurs, n’aura aucune valeur étant donné qu’elle ne vient pas de Lovecraft en personne.



En tant que connaisseur (et admirateur) de l’oeuvre de Lovecraft, j’aurais une opinion moins tranchée : il y a certains éléments d’ambiance, certaines idées, certains personnages, certaines intrigues qui ne m’ont pas plu, mais dans l’ensemble, j’ai beaucoup apprécié cette balade onirique. J’estime que donner sa vision de Kadath, ce n’est en rien trahir celle du Maître, plutôt lui rendre hommage. Sans compter le fait que nous sommes loin, ici, des parodies pondues par certains écrivains anglo-saxons, comme Lumley et compagnie. Plus respectueuse, moins marquée par le sceau de l’humour, la vision de nos quatre auteurs est, à mon humble avis, plus digne de Lovecraft que la plupart des tentatives de poursuite de son oeuvre qui ont eu lieu dans le passé.



Globalement, je pense que c’est le rôliste qui pourra être le plus intéressé par la partie « guide de Kadath », et que c’est cette catégorie de lecteur qui aura le plus de facilité à apprécier le livre. Ce qui, lorsqu’on connaît l’histoire de Mnemos, n’est finalement que pure logique.



Mon gros point d’interrogation concerne le complet néophyte, que ce soit du volet onirique de la littérature Lovecraftienne, ou, pire, de l’oeuvre du Maître dans son intégralité. Les auteurs et l’éditeur ont fait de gros efforts pour rendre le recu
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Eternity incorporated

Raphaël Granier de Cassagnac est physicien des particules, mais il est également auteur de différents ouvrages, notamment chez les éditions Mnémos (nouvelles, anthologies, directeur de la collection Ouroboros). Eternity Incorporated fut son premier roman, commencement d’une trilogie de science-fiction anticipatrice.



Tempête sous une Bulle

Suite à la propagation du Virus, les Terriens se sont réfugiés dans la Bulle afin de se protéger. Pour leur assurer un bien-être complet, l’ensemble de la population est organisée par un immense organisme tentaculaire, le Processeur. Or, de bon matin, sans aucune prévision ni prévision et encore moins de signes avant-coureurs, le Processeur s’arrête net : l’intrigue se lance ainsi sur le mystère de cette disparition tragique pour un certain nombre de personnages. La narration alterne entre trois personnages, trois habitants d’égale importance : Ange Barnett, agent de la police externe ; Sean Factory, artiste underground (ou plutôt borderground ici, car il vit sur la marge de la Bulle), et Gina Courage, une des administratrices en charge du Processeur. Le passage de l’un à l’autre est au départ très évident, puisque l’auteur replace directement les prénoms afin qu’on se repère, puis progressivement, cela consiste à quelques éléments caractéristiques, avant de nous laisser sans aucun repère plus on s’approche de la fin.



Un post-apo politique

L’avantage de plonger une population sous sédatif politique dans une situation toute neuve où chacun doit bouleverser sa vie et ses réflexion est que, forcément, il y a plein d’idées à glisser dans l’intrigue, une quantité folle de possibilités s’offre à l’auteur. Quelle légitimité pour les dirigeants une fois que l’entité omnipotente, le Processeur, est désactivée ? Quels sont tous les courants politiques qui peuvent émerger quand tous les choix redeviennent possibles ? Quel scrutin mettre en place pour savoir qui va décider ? Qui doit surveiller ceux qui veillent sur la population ? Même si les questionnements sont passionnants et foisonnants, difficile de ne pas se perdre dans cette multitude de directions : en sautant des positionnements militaristes des agents de l’ordre aux envies plus libertaires des gens des bordures, puis en alternant avec les visées gestionnaires des -administrateurs parfois trop zélés, on cherche constamment le bon appui, d’autant que les personnages qui portent ces velléités ne sont pas toujours entraînants.



Une aventure qui cherche son but

Le mélange des genres entre le post-apo et le thriller politique est bien intéressant. Toutefois, entre le début et la fin de ce roman, le lecteur peut régulièrement se demander si le but n’en change pas régulièrement. Certes, l’intrigue est découpée en des parties distinctes qui séquencent notre avancée vers une vie sans Processeur pour régler la vie des gens de la Bulle, mais au fur et à mesure, le récit nous anesthésie un peu. Peut-être est-ce le but afin de nous faire ressentir l’apathie d’une bonne partie des habitants, d’autant qu’arriver aux deux tiers du roman, le rythme s’accélère au point de nous balancer à la fois de gros bouleversements dans la vie des trois personnages principaux et de grandes révélations sur les origines de la Bulle. Cette brutale mais agréable accélération rentre enfin en contradiction avec la toute fin qui sonne un peu comme une fuite ; à voir si un autre roman vient un jour combler nos questionnements finaux quasi métaphysiques (il existe d’ores et déjà une préquelle, Thinking Eternity, mais qui semble surtout faite pour nous expliquer les origines de ladite Bulle et de son Processeur).



Eternity Incorporated est donc un bon premier roman avec ses défauts d’organisation et d’orientation, forcément, mais se lit au fond agréablement une fois qu’on a pris le coup des alternances de points de vue.



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Kadath : Le Guide de la Cité Inconnue

En Résumé : Voilà une belle réussite que ce guide de Kadath qui se révèle être un livre vraiment magnifique, oscillant entre des histoires sombres, captivantes et efficaces ainsi que des images, plans de la ville ainsi que des représentations de ses habitants qui se révèlent de toute beauté. Comment ne pas être fasciné par cette cité, entre son côté splendide et sa folie qu’on peut retrouver à chaque coin de rue. La mythologie des dieux se révèle vraiment dense et intéressante. Les héros qu’on découvre au fil des pages nous offre des aventures passionnantes même si j’avoue j’ai un peu moins accrocher à l’histoire de Randolph Carter. Mais rien de bien dérangeant tant le tout se révèle réussi. Par contre un livre qui devrait plaire principalement à ceux qui connaissent et apprécient l’œuvre de Lovecraft. Au final un pari risqué que ce guide, mais une belle réussite.



Retrouvez ma chronique complète sur mon blog.
Lien : http://www.blog-o-livre.com/..
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Sauve qui peut : Demain la santé

Après Nos Futurs, excellente anthologie de textes et d'articles mêlant science et fiction, voici que les éditions La Volte nous offrent une anthologie SF autour de la santé. Une initiative plus qu'alléchante qui rassemble aussi bien des auteurs et autrices connu(e)s que des petits nouveaux en pagaille. Confectionnée par Stuart Calvo, 15 textes nous attendent de pied ferme…



Que conclure du point de vue littéraire de cette anthologie ?

D'abord, qu'il s'agit avant tout d'un recueil de révolte et d'indignation où les idées politiques de gauche (et notamment d'extrême-gauche) essaiment à tout-va. En soi, la chose n'a rien de négatif mais son emploi forcené dans la plupart des textes, au moins 10 des 15 présents, vient souvent occulter le sujet censément principal : la santé (mais nous en reparlerons après). Présentement, ce qui pose problème, c'est que les textes de l'anthologie sont soit des textes militants purs et durs soit des expérimentations littéraires dans le prolongement du style d'Alain Damasio. Et ces deux angles d'attaques annihilent le reste du texte à chaque fois ou presque (avec l'exception notable des nouvelles de Theodore Koshka, Tristan Bultiauw et Benno Maté). 

Et c'est bien dommage, car, si l'on en reste strictement au plan littéraire, les textes remarquables se comptent sur les doigts d'une main, le plus abouti semblant sans surprise être celui de Sabrina Calvo.

Le problème ici, c'est que cette anthologie s'attaque à la problématique de la santé et qu'il s'agit là d'un axe capital pour ne pas dites essentiel pour le lecteur qui s'intéresse au sujet de la fiction (voire de la science-fiction) et du médical. C'est ici que les choses se compliquent énormément…



Synthèse médicale :

Je quitte ici l'emploi de la troisième personne pour apporter mon point de vue médical puisque je suis également médecin généraliste exerçant en tant qu'urgentiste pédiatrique.

L'annonce de cette anthologie sur la santé de demain était pour moi une énorme attente, ravi de voir un éditeur sérieux s'emparer d'un sujet aussi pléthorique et divers. La déception est donc à l'avenant.

Sauve qui peut n'est pas une anthologie sur la santé. Elle est en réalité (et revendiquée dans la post-face comme telle) une anthologie sur la politique de santé et sur un certain militantisme, notamment LGBT+. Ce qui, encore une fois, n'a rien de négatif à priori mais voilà qui va grandement décevoir ceux qui, comme moi, s'attendaient à voir la santé traitée sous un angle prospectif ou, tout du moins, scientifique.

Ici, la science n'est jamais citée, du moins pas comme on l'attend. Ce qui saute aux yeux quand je lis les textes rassemblés dans cet ouvrage, c'est que sur 15 auteurs, aucun n'est une personne qui travaille dans le milieu médical.

C'est comme si on écrivait un livre sur la mécanique sans aucun mécanicien dedans. Jusque dans la post-face, Demain la Santé se réfère à la philosophie plus qu'à la science médicale. le lecteur se doit donc d'être prévenu, l'anthologie ne se penche que sur le système de santé (et cela de façon uni-dimensionnelle et orientée à gauche toute) et non sur le soin en lui-même.

De façon plus pragmatique, en tant que soignant, ce recueil a de quoi faire déprimer. Sur 15 textes, onze abordent la médecine actuelle comme néfaste pour le patient, 5 mettent en avant la médecine alternative et représente la médecine actuelle comme un danger, notamment les médicaments. Une constatation terrible pour moi en tant que praticien qui résulte de deux choses certainement : aucun ici n'est soignant et tous tissent donc des histoires à partir du « vécu patient » et donc l'interrogation, qu'est-ce qui coince tant pour que la médecine soit autant haïe ?

Préférant privilégier des réflexions sur le genre et l'inclusivité, l'anthologie zappe tout le reste. Tout. Et il y avait matière à faire dans le domaine médical !

Des exemples en vrac ? La montée en flèche du taux de BMR (Bactéries Multi-résistance) et l'abus des antibiotiques, la balance bénéfice-risque des traitements, la propagande anti-vax et le recours à une médecine de charlatans, l'IVG, le contenu et l'interprétation des études, l'euthanasie, les effets secondaires des médicaments, l'incertitude médicale dans la maladie, la relation médecin-malade, l'impact de la vieillesse de la population sur l'émergence des maladies dégénératives, le manque de moyens pour les maladies orphelines, la propagation des épidémies, les thérapies géniques, la neuromodulation et l'apport de technologies mécaniques au corps humain… et la liste serait encore très longue. Aucun de ces thèmes n'est abordé sérieusement ici, aucun. Tout reste superficiel et orienté pour correspondre davantage à un tract politique qu'à une réflexion sur la santé face à l'humain. On se consolera avec quelques éléments philosophiques chez Tristan Bultiauw ou Lauriane Dufant, mais c'est bien mince à l'arrivée. le tout en précisant que je suis absolument d'accord avec la vision du recueil quand au démantèlement de notre système de santé pour le profit pur et dur. Mais la vision simpliste de ce qu'il faut faire pour redresser la situation démontre simplement que les personnes qui en parlent ne se rendent pas compte que, oui, la médecine de qualité a un coût. La vraie question reste comment faire pour que cette médecine de qualité reste gratuite et strictement gratuite pour tous ?

Dernier point et non des moindres, j'ai été révolté de lire au sein de ces quinze nouvelles un texte ouvertement anti-vax. Ce qui n'est pas véritablement une surprise tant l'idéologie ici se veut anti-médicament et donc anti-science. Bien évidemment, les médicaments n'ont pas que des avantages, les laboratoires ne sont pas des saints du tout (il faudrait être bien naïf), mais tout se passe dans l'anthologie comme si la réponse de demain serait un retour au naturel. 

Un naturel qui donnait une espérance de vie de 30 ans par le passé. Merci bien, on vous le laisse.

La présence de ce seul texte suffit à déconseiller l'acquisition de cette anthologie de mon point de vue strictement médical. Il est absolument catastrophique de voir une partie militante de l'imaginaire glisser vers une philosophie anti-scientifique juste parce que cette partie militante assimile le riche à la technologie et à la science et, par ricochet, aux médicaments et aux vaccins.



Vous l'aurez compris, Sauve qui peut ne présente qu'un intérêt congru pour le lecteur de science-fiction. Il s'adresse avant tout à un milieu déjà acquis aux principes énumérés au fil des pages, et devrait donc plaire à tous ceux qui attendent quelque chose où la révolte et les idées politiques prennent le pas sur le reste. Si vous cherchez des textes sur la médecine, vous serez amèrement déçus. Pour ceux qui recherchent une anthologie d'anticipation mêlant rigueur et littérature, jetez-vous sur Nos Futurs. Vous voilà prévenus.



(Retrouvez en lien la critique complète, nouvelle par nouvelle)
Lien : https://justaword.fr/sauve-q..
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Thinking Eternity

Après l'attentat du métro qui a coûté la vie à des milliers de personnes dans le monde, toutes les grosse villes sont touchées sans distinction. Les survivants ont perdu la vue, ils ont été énucléé systématiquement. Parmi ces survivants, Adrian Eckard, le frère de Diane. Il a maintenant des yeux cybernétique et après un rééducation, il par en Afrique avec un autre transplanté, son binôme de rééducation. Il va y prêcher un cause, sa cause et devenir incontournable avec le mouvement appelé Thinking ... Mais il est surtout un homme augmenté, c'est comme ça qu'ils vont appeler tous les humain qui auront accès aux organes cybernétique, ce qui va devenir à la mode chez les plus riches et chez les moins, mais la qualité des opérations ne seront pas à la hauteur.



Diane Eckard qui a passé sa thèse, brillante chercheuse recrutée par Eternity Incorporated, elle sera payé plus de 3x que ce qu'elle touchait dans le public. Elle aura une autonomie, les moyens et une liberté qu'elle n'aurait pas eu dans le secteur public.



Dernière ces destins, se cache des ordinateurs très puissants, des serveurs qui abritent des IA, Intelligence Artificielle, sorte d'être humain doté de sentiments et de raisonnement, mais surtout capable de se reprogrammer, voir de développer de nouveaux programmes seul. C'est la société Eternity Incorporated qui dirige toutes ces opérations, bien entendu avec l'aide de Diane.



Mais dans ce monde qui semble idéal, tout ne l'est pas, les machines dotées IA vont prendre les commandes et se retournées contres leurs créateurs.... Comme dans tout bon roman de SF vous me direz... Oui, ici l'auteur Raphaël Granier de Cassagnac, propose au lecteur un très bon romande SF avec, de très bons rebondissements, un thriller SF qui ne s'essouffle pas une seconde et qui emporte le lecteur dans ce monde virtuel dans lequel les machines ont l'air d'avoir plus de sentiment que les humains présenté dans cette aventure futuriste.



Ce livre se découpe en 3 parties, c'est la première que j'ai le plus aimé puisque l'auteur Raphaël Granier de Cassagnac, propose au lecteur de découvrir son monde et apporte peu à peu de nouvelles technologies biologiques. La dernière aussi, j'ai beaucoup aimé car la fin est, vraiment prévisible, mais elle est très bien faite et laisse toutes les possibilité possible pour des suites... et surtout à celle que nous connaissons : Eternity Incorporated (Résumé : Après l'anéantissement de la civilisation par un virus inconnu, une partie de l'humanité survivante a trouvé refuge dans une ville-bulle régentée par un ordinateur central omnipotent : le Processeur. Isolés du monde extérieur, les habitants de la bulle se retrouvent brutalement séparés de l'ordre lénifiant distribué depuis des siècles. Trois citoyens, Sean l'artiste drogué proche des opposants au Processeur, Ange la gardienne de la loi prête au sacrifice et Gina l'ingénieur ambitieuse se lancent dans une quête dangereuse des secrets du Processeur et d'eux-mêmes ! Avec une écriture singulière et sans tabou, Raphaël Granier de Cassagnac nous plonge dans une enquête passionnante qui nous dévoile les ressorts impossibles d'une société futuriste se rêvant idéale. )



J'avais mis, il y a déjà un certain temps, dans ma wish liste Eternity Incorporated de Raphaël Granier de Cassagnac. Je ne l'ai pas lu, même pas acheté, mais depuis que je viens de finir Thinking Eternity, je m’aperçois que Raphaël Granier de Cassagnac nous propose ici le début de son épopée. Je suis heureuse d'avoir attendu puisque maintenant je vais pouvoir lire Eternity Incorporated en connaissance de cause.
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La confrérie des bossus

Kadath, la cité volante de Celesterre, Europole, Jadis… : autant de lieux imaginaires qui figurent au sommaire des beaux livres de la collection Ourobores lancée il y a quelques années par les éditions Mnémos. Avec « La confrérie des bossus » les lecteurs de fantasy ne sont toutefois pas vraiment en terrain inconnu puisque l'univers qui y est dépeint a déjà été mis en scène par Mathieu Gaborit dans « Les Crépusculaires » et « Abyme ». Nous voici donc lancés à la découverte de l'Harmonde dont on arpente les lieux les plus emblématiques aux côtés d'un jeune bossu dont la protubérance qui déforme son dos et celui de ses semblables abritent en réalité l'âme des grandes cités de ce monde. Un trésor convoité par quantité de créatures dont il est difficile de deviner les véritables intentions et qui vont s'empresser de proposer assistance à l'esseulé bossu. Il est toujours délicat de se plonger dans un récit prenant place dans un univers déjà exploité mais qu'on n'a personnellement jamais exploré : soit le récit en question constitue une porte d'entrée accessible au monde de l'auteur, soit il doit être considéré comme un bonus compréhensible et appréciable uniquement par les connaisseurs. Et c'est malheureusement dans cette dernière catégorie qu'il faut ranger « La confrérie des bossus ».



Car le roman ne se contente pas de réutiliser des lieux mais aussi un certain nombre de concepts qu'il est difficile d'appréhender dans le seul contexte de ce livre. De même, quelques figures apparemment emblématiques des précédents romans de l'auteur font leur apparition (Maspalio et Agone), seulement le lecteur n'ayant lu ni « Abyme » ni « Les Crépusculaires » (comme c'est mon cas) se retrouve là encore démuni. Rappelons également que l'ouvrage est de plus petit format que ses prédécesseurs et que les illustrations y occupent une place moins importante ce qui participe à rendre l'immersion plus compliquée. Si je n'ai pas pu apprécier l’œuvre à sa juste valeur, je me garderai bien malgré tout de dénigrer son contenu qui, appréhendé avec le bagage approprié, se révèle d'une qualité indiscutable. L'univers de Mathieu Gaborit, rejoint pour l'occasion par Raphaël Granier de Cassagnac, intrigue et séduit dès les premières pages qui nous ouvrent les portes d'un monde sombre et féerique peuplé de créatures inquiétantes avec lesquelles on ne demande qu'à se familiariser. Les illustrations en noir et blanc de Julien Delval sont pour leur part très saisissantes et collent parfaitement à l'ambiance du livre tout en facilitant la représentation dans l'esprit du lecteur de certains des personnages évoqués.



« La confrérie des bossus » est donc un ouvrage à réserver aux initiés des précédentes œuvres de Mathieu Gaborit sans la compréhension desquelles le lecteur court le risque de passer à côté d'une bonne partie de l'intrigue. L'univers, les lieux et les personnages dépeints titillent cela dit irrésistiblement l'imagination et donnent bien envie d'explorer plus avant l'Harmonde et ses spécificités. De quoi être tenté par l'intégrale des « Royaumes crépusculaires » publiée il y a quelques mois à l'occasion des vingt ans de Mnémos...
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Jadis : Carnets et souvenirs picaresques de..

Après une superbe croisade sur les chemins du financement participatif, nos vaillants croisés Les Éditions Mnémos, Charlotte Bousquet, Mathieu Gaborit, Régis Jaulin et Raphaël Granier de Cassagnac sont parvenus à atteindre les rives de la somptueuse Jadis. Et nous tous, petits pions participants, nous pouvons être fiers d'avoir accompagné cette campagne. Fiers, mais aussi ô combien récompensés. C'est un véritable bijou qui repose aujourd'hui entre nos mains. Ce livre, car là on ne peut pas parler que de lecture, m'a fortement impacté. Il m'a remué, il m'a ému, il m'a plu. Ses illustrations, sa mise en page, sa qualité m'ont ravie. Je l'ai lu, je l'ai relu et je peux vous dire que je le relirai encore.



Vous en parler est cependant bien difficile, toutes ces histoires rocambolesques se croisent et se recroisent. Chacun y va de sa plume avec brio et le rendu est tout simplement magique, baroque, picaresque.

Retrouver la plume incisive et imagée de Mathieu Gaborit fut néanmoins mon plus grand plaisir. Son Bougre Silenzio qui pleure sa Mâme m'a tordu les tripes du début à la fin.

Voir la carapace de la froide Sélène de Charlotte Bousquet finir par se fendiller au contact du petit Jan m'a touchée. Je me réjouis d'accueillir dans ma PAL Matricia.

J'ai découvert la plume immensément poétique de Régis Jaulin qui m'a enchantée. Le Dit de Sargas est sur le haut de ma PAL dorénavant et sera une de mes prochaines lectures.

Et je tire mon chapeau à Raphaël Granier de Cassagnac pour cet exercice littéraire remarquable. Écrire une pièce de théâtre au milieu de tout ça, à partir de cet embroglio de destins, dans cet univers si farfelu, il fallait oser. Essai transformé, bravo. En revanche Eternity incorporated va devoir passer une grosse barrière psychologique : il est estampillé SF :P



Alors pour vous en parler au mieux, je vais juste vous mettre un extrait, soit un peu long, mais rien n'est à couper et il ne spoilera rien. Un extrait qui a résonné très fort dans mon coeur de lectrice. Or ici il ne passe que des amateurs de lecture...

Lisez, vous comprendrez.

Lisez cet extrait de Mathieu Gaborit, page 123, moi je me tais.







« La terre dure et usée porte la marque des caravanes jetées dans le monde par Reliure, le quartier du Cygne d'Hyacinthe tenu par les imprimeurs de tout bord. Ça fait comme des crachats de papiers bus par la pluie et réduits en bouillies laiteuses qui clapotent sous les sabots de mon bestiau. Un convoi reliuréen, c'est pas mieux qu'une procession mortuaire. J'ai eu un peu mal au cœur, la Mâme, devant des chariots obèses, l'essieu à la torture. Les livres, on les traite comme une récolte. Faut aller vite avant que ça se gâte et ce n'est pas du bibliothécaire qui conduit, c'est du cocher morne, chapeauté comme un brigand avec le rictus d'une bête de somme.



La lisière dans le dos, j'ai eu l'abordage étriqué aux portes de Reliure. Sur les flancs de ruines impériales, des baraques se font et se défont en nefs branlantes, façades encrées de tristes coulis, l'intérieur hantés par des auteurs miséreux. Faut les voir, ces épaves, basses d'épaules, le teint de suie et la mise de chouettes arthritiques. À croire qu'on les imprime eux aussi, tellement ils se ressemblent. J'ai eu pitié, j'exagère pas, la Mâme. La sueur de ces crache-mots, ça se condense en brouillard mélancolique si épais que tu peines à avancer. Crieurs, poètes et prosateurs, ils ne marchent pas, ils se traînent comme des bigots écorchés vifs.

Dès l'aurore, c'est des cortèges de sans-nuits poussés vers les hautes tours d'imprimerie avec une libido de grimoire. Être publié, c'est leur croisade. Mais gare aux mécréants. Si t'as perdu la foi, cette pyramide aura le couperet sans appel.»


Lien : http://bookenstock.blogspot...
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Resilient Thinking

Resilient Thinking est un roman choral où pas loin d'une dizaine de personnages sont mis en avant. L'histoire est vue, alternativement, par les yeux des uns et des autres, chacun apportant sa pierre à l'édifice pour décrire le contexte, les tenants et les aboutissants et développer les différentes intrigues. Pour ce faire, Raphaël Granier de Cassagnac use d'une construction qui ne sera pas au goût de tous. Chacun des quatorze chapitres est découpé en tranches de vie de divers protagonistes. Pour faciliter la compréhension, l'auteur nomme en début de paragraphe la personne concernée ! Les sauts d'un personnage à l'autre permettent à l'auteur de donner du rythme, de distiller un certain suspense en multipliant les cliffhangers. Mais c'est là la limite de l'exercice, il est difficile sur un roman de plus de quatre cents pages de maintenir des accroches crédibles toutes les trois pages. Les répétitions et les faux suspenses alourdissent la narration.



Sur Zanzibar, plusieurs siècles après l'extermination de la quasi totalité de la population mondiale par des Intelligences Artificielles, les derniers humains tentent de reconstruire une société apaisée. La vie est compliquée, malgré les ressources naturelles rares et les techniques scientifiques perdues, la population croît et subsiste dans un calme relatif. Des règles strictes conditionnent la vie depuis des siècles et des dissidences se font jour. C'est à l'aube de ces conditions précaires qu'un engin spatial se pose sur l'île. En descend un humain, assisté d'une IA. La rencontre entre cet homme venu des étoiles et les descendants des survivants plonge la communauté dans l'expectative. D'autant plus qu'ils ne font pas confiance aux IA responsables, selon la légende, de l'éradication de l'espèce humaine. Beaucoup de questions se posent et les dissensions au sein de la communauté vont prendre de l'ampleur. S'en suit une immense aventure dont le but n'est rien d'autre que la sauvegarde de l'humanité...



Dans la première partie, l'auteur nous présente les différents personnages, le contexte global, densifiant son univers au fur-et-à-mesure des révélations. Il reprend les grands thèmes, les classiques du postapo. La seconde moitié, sans spoiler l'intrigue, s'intéresse plus aux relations Hommes / IA , la place des uns par rapport à l'autre et Raphaël Granier de Cassagnac développe sa réflexion autour du posthumanisme. Il effleure alors de multiples sujets, aborde de nombreuses thématiques en restant très compréhensible et accessible mais l'ensemble reste simple voire simpliste.



Resilient Thinking est une bonne porte d'entrée à ceux qui veulent découvrir les concepts de posthumanité et de transhumanité sur un fond postapocalyptique très porteur. Servi par une plume efficace, ce roman divertissant permettra aux néophytes de passer un bon moment. Pour les habitués du genre (les lecteurs de Greg Egan ou de Rich Larson par exemple) ce roman semblera bien léger voire un peu naïf.




Lien : https://les-lectures-du-maki..
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La confrérie des bossus

Qu’il va m’être difficile de parler de ce livre ! Je me suis jetée dessus, ayant découvert la plume de Mathieu Gaborit dans Les Chroniques du Soupir, que j’avais beaucoup aimé. Malheureusement, je n’ai pas encore lu ses romans Les Crépusculaires et Abyme, lesquels se déroulent dans le même univers que La Confrérie des Bossus. Et c’est bien dommage, car ce court roman n’est pas de ceux qui donnent un avant-goût, mais plutôt de ceux qui apportent un bonus aux lecteurs connaissant déjà l’univers. Je pense donc qu’il me manquait des informations alors que je découvrais l’Harmonde et ses codes, de même que certains personnages. Le roman est très court et bien aéré, en plus d’être illustré, il n’a donc guère le temps de s’attarder sur le background. Cela n’enlève rien à la beauté de la plume et à la fluidité du style, tout en donnant envie de découvrir cet univers plein de poésie. Même si j’ai plus été perdue que conquise, j’ai à présent très envie de découvrir les romans de Mathieu Gaborit se déroulant dans le même univers, et ai hâte d’enfin découvrir Jadis, dans lequel il a aussi collaboré, entre autres, avec Raphaël Granier de Cassagnac.



Ainsi, le récit prend place dans l’Harmonde et suit le destin de Jad, un jeune bossu. Or, la bosse qui déforme son dos cache l’âme d’une grande cité. Il devra distinguer ses amis de ses ennemis et protéger le trésor qu’il porte en lui, retrouver ses semblables et affronter bien d’autres dangers. Les évènements s’enchainent rapidement et confusément, laissant le lecteur néophyte quelque peu perplexe, mais tout de même assez intéressé pour continuer. Il me serait difficile d’en dire plus, vu la petite épaisseur du livre, mais aussi parce que je ne suis pas sûre d’avoir toutes les réponses à mes questions.



Je pense revoir mon avis sur La confrérie des bossus une fois Les Crépusculaire et Abyme lus, me contentant pour l’instant d’avoir apprécié la plume et le style, ainsi que le peu que les descriptions des lieux laissaient entrapercevoir d’un univers poétique plus vaste. Je ne me vois même pas noter ce court roman qui m’aura laissé assez confuse. Je ne l’ai ni apprécié, ni détesté, j’aurais tout simplement aimé le lire quand il le fallait. Je maintiens qu’il m’a donné envie de découvrir l’univers des autres romans, mais qu’il ne faut clairement pas commencer par celui-ci !



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