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Citation de Ziliz


Ziliz
07 décembre 2016
Quand je suis arrivée à Murmont en 1941, on ne disait plus asile mais H.P. C'est en 1938 qu'un ministre a décrété qu'il ne fallait plus dire 'asile d'aliénés' mais 'hôpital psychiatrique'. Il devait être drôlement content, le ministre, d'avoir trouvé ça. Il a même ajouté que les gardiens et les gardiennes s'appelleraient dorénavant 'infirmiers d'hôpitaux psychiatriques'. Tout ça parce que depuis 1936 et l'adoption des 40 heures, les horaires de travail étaient répartis en équipes de 3 fois 8 et non plus 2 fois 12, que les asiles n'arrivaient pas à recruter le personnel supplémentaire nécessaire, et qu'en donnant le titre d'infirmier à des paysans qui ne savaient pas lire et encore moins faire une piqûre, le ministre croyait trouver plus de candidats. Pensez donc ! Il n'y a pas eu davantage de volontaires pour travailler chez les fous.
Les infirmiers et les infirmières des hôpitaux psychiatriques reçoivent aujourd'hui la même formation et passent les mêmes diplômes que leurs collègues des autres services hospitaliers. Ce sont des gens remarquables qui accomplissent avec un dévouement exemplaire un métier difficile.
A l'époque, c'était la lie du corps médical. Les infirmiers d'hôpitaux psychiatriques qui ont été mobilisés en 1939 se sont vu refuser toute affectation dans les infirmeries militaires : je répète que la plupart ne savaient même pas faire une piqûre ! Pour être gardien ou gardienne, il suffisait de ne pas avoir froid aux yeux et de posséder de bons muscles. Ouvriers agricoles ou filles de ferme, ils étaient pour la plupart incultes mais disposaient d'un pouvoir absolu sur les aliénés. Vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Forcément, il en résultait des abus et pas seulement sexuels.
Le plus étonnant, c'est qu'au lieu de faire bloc contre leurs gardiens, les malades se créaient entre eux des rapports de force aussi abominables. On retrouvait au sein de chaque groupe d'internés des petits chefs violents, sadiques, souvent dangereux et criminels comme Tony, qui profitaient de la faiblesse des autres aliénés pour se construire un royaume avec des serfs (les malades), des taxes (le racket) et qui exerçaient leur droit de cuissage sur tous leurs subordonnés. Vous imaginez les débordements qui en résultaient chaque jour. Et chaque nuit.
Chaque nuit...
(p. 50-51)
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