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Citation de enkidu_


Le respect accordé par les Ottomans au Patriarche orthodoxe Gennadios et à son Église était tel que les Grecs préférèrent l’autorité musulmane à celle des Francs latins ou des Vénitiens. Le clergé enseignait que l’autorité du Sultan avait l’approbation divine, et qu’il avait reçu le mandat de faire respecter cette autorité : il est à la fois chef des Musulmans et protecteur de l’Église orthodoxe. Le degré de tolérance religieuse accordée à toutes les confessions chrétiennes était tel que les Calvinistes et les Unitariens de Hongrie et de Transylvanie « préféraient de loin se soumettre aux Turcs plutôt que tomber dans les mains fanatiques de la Maison de Habsbourg(1). » Il n’est pas difficile de voir pourquoi. Après s’être amèrement plaint du massacre de milliers de Russes orthodoxes par les Catholiques polonais au XVII siècle, Makarios, Patriarche d’Antioche, s’exclamait : « Que Dieu perpétue à jamais l’Empire des Turcs ! Car ils prélèvent leur impôt (gizya) sans tenir aucun compte de la religion, que leurs sujets soient Chrétiens, Nazaréens, Juifs ou Samaritains(2). » De même, quand les Ottomans ont pris Constantinople, on sait que les Grecs orientaux (Orthodoxes) ont déclaré qu’ils préféraient le turban du Sultan à la tiare du pape. Le souvenir amer de ce qui était arrivé à leur ville en 1204, deux siècles plus tôt, durant ce qu’on appelle la quatrième Croisade, était encore présent à leur mémoire : les Vénitiens catholiques avaient mis à sac la capitale de l’Empire byzantin de la manière la plus abject, commettant ‘’l’une des plus abominables atrocités de l’histoire(3)’’.
(...)
On peut voir jusqu’où cela été apprécié dans l’hommage rendu avec le tribut payé avec enthousiasme par le Patriarche grec de Jérusalem, revenant sur la situation passée – quatre cents ans – de son Église sous autorité ottomane, il s’exprime ainsi :

« Voyez à quel point il est évident que Notre Seigneur, d’une miséricorde infinie et toute sagesse, avait entrepris de garder encore une fois sans tache la Sainte Église orthodoxe. (…) A partir de rien, Il a élevé le puissant Empire des Ottomans à la place de notre Empire romain [byzantin] qui avait commencé, d’une certaine façon, à dévier des croyances de l’Église orthodoxe, et Il a élevé l’Empire des Ottomans plus haut qu’aucun autre royaume, de façon à montrer sans l’ombre d’un doute qu’il avait surgi de la Volonté divine, et non du pouvoir de l’homme. (…) Le Seigneur Tout-Puissant nous a alors mis sous l’autorité de ce grand royaume, ‘’car il n’y a aucun pouvoir que de Dieu’’, de sorte qu’il soit pour le peuple de l’Occident un guide, et pour nous, peuple de l’Orient, un moyen de salut. C’est pour cette raison qu’Il a mis dans le cœur des sultans ottomans une inclination à garantir la liberté des croyances de notre Église orthodoxe, et, comme œuvre de surérogation, à les protéger, jusqu’à châtier à l’occasion les Chrétiens qui déviaient de leur foi, afin qu’ils aient toujours devant les yeux la crainte de Dieu(4). »

(1) Arnold, The Preaching of Islam, p. 155.

(2) Arnold, op. cit., p. 156-157

(3) A.L. Maycock, The Papacy, Londres, 1927, p. 48. Quand le pape apprit ces atrocités, il excommunia toute l’armée.

(4) Cité dans Braude and Lewis, Christians and Jews, p. 16-17 (pp. 58-59 & 64)
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